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24/09/2015 | FRANCE | N°14MA01677

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 24 septembre 2015, 14MA01677


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté en date du 9 décembre 2013 par lequel le préfet du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1400027 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 avril 2014, MmeB..., représentée par Me A..., demande à

la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 mars 2014 ;

2°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté en date du 9 décembre 2013 par lequel le préfet du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1400027 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 avril 2014, MmeB..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 mars 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 9 décembre 2013 du préfet du Gard ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étranger malade " dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal et d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de procéder au réexamen de sa demande de carte de séjour temporaire ouvrant droit au travail et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient, s'agissant de la décision portant refus de titre de séjour que :

- celle-ci est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle aurait dû être convoquée devant la commission du titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle méconnaît le droit à la protection de la santé tel que consacré par le préambule de la constitution de 1946 ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle fait valoir des considérations humanitaires et des motifs exceptionnels justifiant que lui soit délivré le titre sollicité ;

- la décision du préfet viole également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Elle soutient, s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire national, que :

- celle-ci est entachée d'illégalité par voie d'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle viole également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 mai 2014.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante arménienne née en 1954, déclare être entrée en France en décembre 2009 ; que sa demande d'asile a été rejetée le 22 avril 2010 par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 28 septembre 2011 ; qu'elle a fait l'objet le 25 janvier 2012 d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, auquel elle n'a pas déféré ; qu'elle a sollicité le 15 mai 2012 un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par une décision du 31 juillet 2012, le préfet du Gard lui a opposé un refus de titre de séjour ; que, par un jugement du 7 novembre 2013, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 31 juillet 2012 par laquelle le préfet du Gard a refusé à Mme B...une carte de séjour en qualité d'" étranger malade " et a enjoint à ce préfet de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de l'intéressée dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement ; que le préfet du Gard a interjeté appel de ce jugement ; que, par un arrêt n°13MA04520 en date du 9 avril 2015, la Cour a rejeté la requête du préfet du Gard ; que, par un arrêté en date du 9 décembre 2013, après examen de la demande de la requérante en exécution de la décision de justice, le préfet du Gard a de nouveau rejeté sa demande de titre de séjour, a fait obligation à Mme B...de quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que la requérante interjette appel du jugement du 27 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme B...reprend en appel le moyen de légalité externe tiré de ce que l'arrêté attaqué serait insuffisamment motivé ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus à bon droit par les premiers juges et qu'il convient, pour la Cour, d'adopter ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'en outre, aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ;

4. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande en qualité d'étranger malade, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...réside en France depuis décembre 2009, soit moins de dix années ; qu'à l'appui de sa requête, la requérante soutient qu'elle est atteinte d'un trouble anxieux et dépressif majeur et qu'elle fait l'objet de consultations médicales régulières, ainsi que l'atteste le certificat médical d'un médecin psychiatre ; que, par avis en date du 18 novembre 2013, le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé a indiqué que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine et que les soins nécessités doivent être poursuivis pendant une durée de douze mois ; que toutefois, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa pathologie ressortissant aux troubles mentaux et du comportement ne pourrait faire l'objet d'un traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine, dès lors qu'il ressort de la fiche établie par l'association Caritas pour l'Arménie ainsi que du courrier en date du 12 avril 2013 rédigé dans le cadre d'un échange avec le médecin conseil de l'ambassade de France en Arménie versé au débat faisant état d'un centre de santé mentale et psychique à Nork en Arménie que ce traitement existe dans ce pays ; que par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Gard, qui ne s'est pas estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de l'Agence régionale de santé, aurait fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en outre et dès lors, le préfet ne se trouvait pas non plus dans l'obligation de réunir la commission du titre de séjour puisqu'il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 de ce code, notamment au regard de la vie privée et familiale, ou qui justifient d'une durée de résidence en France de plus de dix ans, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué serait intervenu au terme d'une procédure irrégulière et de ce que la requérante remplirait les conditions de délivrance du titre sollicité doivent être tous deux écartés ;

6. Considérant, en troisième lieu, que, s'agissant de l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, si Mme B...argue de ce que son état de santé constituerait un motif exceptionnel ou une circonstance humanitaire, les faits rappelés au point 5 ne constituent pas des considérations humanitaires ou motifs exceptionnels tels qu'en s'abstenant de faire usage du pouvoir de régularisation qu'il tient de ces dispositions, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que Mme B...reprend en appel le moyen de légalité interne tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus à bon droit par les premiers juges et qu'il convient, pour la Cour, d'adopter ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que Mme B...est entrée sur le territoire national en décembre 2009 et s'y est maintenue en situation irrégulière ; que, compte tenu des conditions irrégulières et de la durée de son séjour, et en dépit de la présence en France de sa fille majeure qui séjourne en France de manière régulière, le refus de séjour n'a pas porté au droit de la requérante, veuve et sans charge de famille, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que le préfet n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire national :

9. Considérant que les conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus de titre ayant été préalablement rejetées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette première décision à l'appui des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire national doit être écarté par voie de conséquence ;

10. Considérant, que pour les mêmes raisons que celles précédemment évoquées, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter également ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président-assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2015.

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N° 14MA01677


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01677
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : DEIXONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-09-24;14ma01677 ?
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