La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2015 | FRANCE | N°14MA03555

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 22 septembre 2015, 14MA03555


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 7 avril 2014 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1401694 du 28 juillet 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 août 2014, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugem

ent du tribunal administratif de Nîmes du 28 juillet 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 7...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 7 avril 2014 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1401694 du 28 juillet 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 août 2014, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 28 juillet 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 7 avril 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet du Gard devait saisir la commission du titre de séjour avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les dispositions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, qui présentent un caractère réglementaire ; en effet, il peut se prévaloir d'une vie privée et familiale intense et stable ;

- cette décision porte également une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il vit en France depuis plus de six ans, son épouse y réside régulièrement depuis huit ans, leurs deux enfants sont nés en France, l'aîné étant scolarisé, et l'ensemble de sa belle famille réside sur le territoire français ;

- ladite décision est en outre entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de séjour méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 313-11-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mai 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 novembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur.

1. Considérant que, par jugement en date du 28 juillet 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M.A..., de nationalité turque, tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 avril 2014 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que M. A...relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

qu'aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; "

3. Considérant que M. A...fait valoir qu'il réside en France de manière habituelle depuis plus de six ans, alors même qu'il serait retourné quelques mois en Turquie avant de revenir sur le territoire français en août 2012, et qu'il vit avec son épouse, une compatriote en situation régulière dont toute la famille réside régulièrement en France, et les deux enfants du couple ; que, toutefois, M.A..., qui a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière le 5 décembre 2006 exécuté le 20 décembre suivant, n'établit pas la date de son entrée en France, ni au demeurant sa présence sur le territoire national avant l'année 2013, en se bornant à produire des attestations manuscrites peu circonstanciées ; qu'en outre, s'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé vit depuis le mois de juillet 2013 avec son épouse, dont il avait divorcé en 2009 et avec laquelle il s'est remarié le 5 avril 2013 ainsi qu'avec ses deux enfants nés en France les 17 octobre 2010 et 2 août 2013, la durée de la vie commune du couple dont peut se prévaloir le requérant à la date de la décision attaquée n'excède pas une année ; qu'en outre, le requérant n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Turquie, pays dans lequel il a vécu l'essentiel de son existence et où réside notamment sa mère ; que, dès lors, eu égard à la brève durée de son séjour en France à la date de l'arrêté attaqué, le préfet du Gard n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté ; que, par suite, il n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour les mêmes raisons, le préfet n'a pas d'avantage entaché le refus de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir de régularisation ;

4. Considérant qu'aux termes de l' article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ... " ;

5. Considérant que ni les éléments relatifs à la vie personnelle et familiale de M. A... exposés ci-dessus, ni la circonstance qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche ne peuvent être regardés comme présentant le caractère de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté ;

6. Considérant que M. A...ne peut utilement invoquer les orientations générales que le ministre de l'intérieur, dans sa circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

8. Considérant que si M. A...fait valoir que l'arrêté attaqué aura nécessairement des répercussions négatives sur ses enfants, il n'établit en tout état de cause aucune circonstance s'opposant à la reconstitution de la cellule familiale en Turquie avec son épouse, dont il n'est pas allégué qu'elle aurait un emploi ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la scolarité de ses enfants ne pourrait pas être suivie ailleurs qu'en France, l'aîné n'étant au demeurant scolarisé en classe maternelle que depuis le mois de septembre 2013 ; que, dès lors, la décision refusant l'admission au séjour n'a pas non plus méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

9. Considérant que les articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile disposent que : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). / La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ;

10. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles précités auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

11. Considérant que M. A...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ; qu'il ne peut par suite se prévaloir de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions en annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, qui reprennent ce qui a été développé par le requérant à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M.A..., n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions à fin d'injonction formulées par le requérant ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. A... de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015 où siégeaient :

- M. Cherrier, président de chambre,

- M. Martin, président assesseur,

- Mme Chenal-Peter, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 septembre 2015.

''

''

''

''

N° 14MA03555 2

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03555
Date de la décision : 22/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : DEIXONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-09-22;14ma03555 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award