Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du
12 avril 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1301644 du 5 août 2013, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 avril 2013, lui a enjoint de délivrer à M. A...le titre de séjour sollicité et a condamné l'Etat à lui verser la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée par télécopie le 5 septembre 2013 et régularisée le
9 septembre suivant, le préfet des Alpes-Maritimes demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 5 août 2013 ;
2°) de rejeter la demande de M. A...devant le tribunal administratif.
Il soutient que les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré par télécopie le 9 décembre 2013 et par telerecours le 19 décembre 2013, M. B...A..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés et qu'il remplit l'ensemble des conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article L. 313-11, 7° du même code ou des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par ordonnance du 20 août 2014, la clôture d'instruction a été fixée au
20 septembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Baux.
1. Considérant que, par jugement du 5 août 2013, le tribunal administratif de Nice a d'une part, annulé les décisions du 12 avril 2013 par lesquelles le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de délivrer un titre de séjour à M.A..., ressortissant malien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé d'office et, d'autre part enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ; que le préfet relève appel de ce jugement ;
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Considérant que, pour annuler les décisions du 12 avril 2013 par lesquelles le préfet des Alpes-Maritimes a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. B...E...A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, le tribunal administratif de Nice s'est fondé sur le double motif tiré de ce qu'en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet avait entaché sa décision d'une part, d'un vice de procédure en ne saisissant pas la commission du titre de séjour et d'autre part, d'une erreur manifeste d'appréciation, au regard tant de la durée de présence sur le territoire national du requérant que de sa persistance dans l'exercice d'une activité professionnelle depuis 2006 ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans.(...)" ;
4. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement des dispositions précitées par un étranger qui n'est pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présente pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; qu'il incombe à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;
5. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'entré sur le territoire national, le
14 octobre 2001, sous couvert d'un visa " étudiant ", M. A...a bénéficié d'un titre de séjour mention " étudiant ", renouvelé jusqu'au 12 octobre 2005 ; que le 28 novembre 2005, l'intimé a fait l'objet d'une première décision de refus de renouvellement de son titre séjour au motif de l'absence de progression et de sérieux dans ses études ; que depuis cette date, M. A...s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire national ; qu'il a ainsi fait l'objet, le 19 juillet 2010, d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ; que par ailleurs, ainsi que le soutient le préfet des Alpes-Maritimes, l'ensemble des documents produits à l'appui de sa présence habituelle et continue en France depuis 2006, sont des documents faux ou usurpés ; qu'en effet, il ressort des pièces du dossier et notamment de la lecture tant du passeport n° B0534487 que de l'attestation de droits émanant de l'Assurance Maladie (attestation d'affiliation au régime étudiant de sécurité sociale), que M. B...E...A...est né le 22 août 1982, à Madiakoye, au Mali (nationalité malienne) et que son numéro de sécurité sociale est le 7 06 17 10 612 372 26 ; qu'en revanche, l'examen attentif des documents produits démontre que leur titulaire a une identité, une date de naissance et un numéro de sécurité sociale différents, puisqu'il s'agit de M. B...(ou Abdul ou Abdoul)A..., né le 18 août 1982 en Côte d'Ivoire, (nationalité ivoirienne), dont le numéro de sécurité sociale est le numéro 1 82 08 99 00000000 ou le numéro 1 82 08 99 326 537 ; qu'ainsi, les pièces produites au titre de la période comprise entre 2006 et 2013, qui consistent notamment en des contrats de travail, à durée déterminée ou indéterminée, en des bulletins de salaire faisant mention, ainsi qu'il a été dit, d'identités et de numéros de sécurité sociale différents, ne présentent pas un caractère suffisamment probant permettant d'établir la présence en France de l'intimé, au cours de cette période ; que par suite, dès lors que les autres documents produits relatifs à des relevés de compte ou des factures ne permettent d'établir ni un séjour habituel en France, depuis 2006, ni l'exercice régulier d'une activité professionnelle, le préfet des
Alpes-Maritimes ne saurait être regardé comme ayant entaché la décision du 12 avril 2013 d'un vice de procédure et d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a, pour les deux motifs précités, annulé l'arrêté du 12 avril 2013 ;
7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...tant devant le tribunal administratif de Nice, que devant elle ;
8. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
9. Considérant, que si M. A...fait valoir qu'il a sa résidence habituelle en France depuis 2001 et se prévaut d'une présence continue sur le territoire national depuis cette date, celle-ci n'est toutefois pas établie au vu des pièces qu'il produit qui, ainsi qu'il a été dit dans le point 5. sont constitués de documents essentiellement faux ou usurpés ; qu'hormis les contrats de travail et bulletins de paye en cause, M. A...ne présente que des relevés de compte ou des attestations qui ne sauraient apporter la preuve qui lui incombe de sa présence continue sur le territoire français, depuis 2006 ; qu'il ressort également des pièces du dossier que l'intimé est célibataire et sans charge de famille et a fait l'objet, le 28 novembre 2005, d'une première décision refusant le renouvellement de son titre de séjour et le 19 juillet 2010, d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ; qu'ainsi, dès lors qu'il n'apporte la preuve ni de la durée de son séjour en France, ni de ce qu'il n'aurait plus d'attaches dans son pays d'origine, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour de M. A...en France, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elle n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté en date du 12 avril 2013 refusant à M. A...la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il devrait être reconduit et que la demande présentée par l'intéressé devant le président du tribunal administratif de Nice, tendant à l'annulation dudit arrêté, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer le titre en cause et à ce qu'il soit fait application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1301644 du tribunal administratif de Nice du 5 août 2013 est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A...sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Gonzales, président de chambre,
- MmeD..., première conseillère,
- Mme Baux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 juillet 2015.
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N° 13MA03669