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09/07/2015 | FRANCE | N°13MA03742

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 09 juillet 2015, 13MA03742


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Crudeli a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont étaient assortis les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 mars 2009 pour un montant total de 199 203 euros.

Par un jugement n° 1105588 du 12 juillet 2013, le tri

bunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge.

Procédure devant la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Crudeli a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont étaient assortis les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 mars 2009 pour un montant total de 199 203 euros.

Par un jugement n° 1105588 du 12 juillet 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 septembre 2013, la SAS Crudeli demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 juillet 2013;

2°) de lui accorder la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont étaient assortis les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, qui lui ont été assignées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008, et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 mars 2009, pour un montant total de 199 203 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sur la forme, l'administration n'a pas examiné et instruit sa demande de transaction formulée avant que l'imposition ne soit arrêtée ;

- sur le fond, les pénalités pour manquement délibéré provenant du redressement pour passif injustifié afférent à l'année 2005 sont infondées ;

- les pénalités pour manquement délibéré provenant de la rectification proposée au titre de la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1re janvier 2007 au 31 mars 2009 ne sont pas fondées compte tenu de la situation de créancière de la société par rapport au Trésor ;

- seul l'exercice clos le 31 décembre 1998 pouvait présenter un solde préjudiciable au Trésor et que, dès le début des opérations de contrôle, la société a porté à la connaissance du vérificateur ladite erreur par courrier du 22 septembre 2009.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2014, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- aucune disposition légale et réglementaire n'impose de répondre à une demande transactionnelle avant la mise en recouvrement des impositions, laquelle est une demande gracieuse n'appelant pas de réponse devant être motivée et que la société est réputée ne pas avoir accepté les redressements ;

- la demande de régularisation sur le fondement de l'article L. 62 du livre des procédures fiscales s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée ne pouvait être que rejetée, dès lors que l'application de pénalités pour manquement délibéré était envisagée ;

- la correction symétrique des bilans n'avait pas à s'appliquer s'agissant de rehaussements pour lesquels les pénalités pour manquement délibéré ont été appliquées ;

- les rétentions en matière de taxe sur la valeur ajoutée exigible concernent l'ensemble de la période soumise au contrôle, ce qui traduit un comportement répété de la société caractéristique d'une volonté de minorer l'impôt dû ;

- l'éventuelle compensation de la dette de taxe sur la valeur ajoutée générée par un rehaussement par une créance existante au préalable n'enlève pas le caractère délibéré du manquement constaté en matière de rétention de taxe sur la valeur ajoutée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public,

1. Considérant que la SAS Crudeli, qui exerce une activité de prestations dans le domaine des travaux de plomberie, chauffage, sanitaire, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée au 31 mars 2009 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale lui a notifié, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, par des propositions de rectification des 17 et 18 décembre 2009 et 25 mai 2010, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée sur la période litigieuse ; que les rectifications proposées ont été confirmées pour l'ensemble de la période contrôlée par courrier en date du 16 septembre 2010 ; que les droits correspondants ont été assortis de l'intérêt de retard, prévu à l'article 1727 du code général des impôts, et de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré, prévue à l'article 1729 du même code, et ont été mis en recouvrement le 22 décembre 2010 ; que la SAS Crudeli interjette régulièrement appel du jugement n° 1105588 du 12 juillet 2013, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge des pénalités pour manquement délibéré dont étaient assortis les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 mars 2009, pour un montant total de 199 203 euros ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant que la société soutient qu'à la suite du maintien des rectifications proposées dans la proposition de rectification du 25 mai 2010, elle a sollicité, par courrier du 5 octobre 2010, une transaction par laquelle elle se déclarait " prête à transiger sur les conséquences du contrôle sous réserve que les pénalités pour manquements délibérés soient limitées à 10 % " et que, de façon irrégulière, l'administration fiscale a mis en recouvrement les impositions litigieuses sans lui avoir donné de réponse sur sa proposition de transaction ; que, toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration fiscale, qui a maintenu par une réponse aux observations du contribuable, par lettre 3926 du 16 septembre 2010, l'intégralité des rectifications proposées, de répondre expressément à la demande de transaction formulée par la société requérante avant la mise en recouvrement des pénalités en litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition manque en droit ;

Sur le bien fondé des pénalités :

En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré appliquées aux suppléments d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2008 résultant du rehaussement pour passif injustifié afférent à l'exercice clos en 2005 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) " ;

4. Considérant que la société requérante soutient que l'administration fiscale a procédé à des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2006 ; que l'administration s'est volontairement abstenue d'une quelconque correction symétrique au titre de l'année 2005 dans la proposition de rectification du 18 décembre 2009 concernant l'impôt sur les sociétés de l'exercice 2006 ; que l'administration n'était donc pas fondée à procéder à une correction symétrique concernant le bilan 2005 dans une nouvelle proposition de rectification en date du 25 mai 2010 concernant les exercices 2007,2008 et 2009 ; qu'elle ne pouvait de ce fait calculer des pénalités pour manquement délibéré sur un passif injustifié au titre de 2005 dans une rectification concernant l'année 2008 alors qu'elle avait souhaité ne pas y procéder dans le contrôle relatif à l'année 2006 effectué auparavant ; qu'il en résulte que les pénalités dont s'agit ayant pour base théorique la somme de 96781 euros provenant du passif injustifié afférent à la taxe sur la valeur ajoutée collectée non déclarée prescrite de l'année 2005 sont infondées ;

5. Considérant que dans la proposition de rectification du 18 décembre 2009, le vérificateur a relevé que la SAS Crudeli réalise des prestations de services, dont la taxe sur la valeur ajoutée est exigible sur l'ensemble des encaissements, et que de la comparaison de ces encaissements, qui ressortent des comptes et documents sociaux présentés, avec les déclarations 3519/CA3 de taxe sur la valeur ajoutée, il résulte des discordances entre le chiffre d'affaires au compte de résultat et celui apparaissant sur les déclarations, aboutissant ainsi à une minoration du chiffre d'affaires déclaré et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 7 815 euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2006 ; que, toutefois, dans cette proposition, l'administration n'a pas appliqué de pénalité pour manquement délibéré sur l'année 2006, tout en précisant que cette absence d'application de pénalité ne présume pas de la qualification qui pourrait être retenue pour les mêmes chefs de redressements pour les périodes ultérieures ; que par proposition de rectification en date du 25 mai 2010, page 11 § II. 2, le vérificateur a relevé que de la comparaison entre la taxe sur la valeur ajoutée collectée figurant au bilan et la taxe sur la valeur ajoutée relative au solde des comptes clients au 31 décembre 2005, il apparaît un écart correspondant à de la taxe sur la valeur ajoutée antérieure au 31 décembre 2005 qui n'a pas été déclarée au 31 décembre 2008 ; que le vérificateur, estimant que cette taxe sur la valeur ajoutée était de ce fait prescrite et constituait un passif injustifié, a procédé à la réintégration de ce passif au résultat de l'exercice clos le 31 décembre 2008, date à laquelle cette dette n'a pas été réglée et exercice de prescription de la dette ; qu'une rectification a par suite été proposée en matière d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice 2008 pour un montant de 96 781 euros ; qu'au titre des sanctions fiscales, page 17, l'administration fiscale a appliqué sur le passif injustifié afférent à de la taxe sur la valeur ajoutée collectée non déclarée prescrite la majoration de 40 % pour manquement délibéré ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en ce qui concerne les redressements résultant de l'extinction d'une dette de taxe sur la valeur ajoutée, en raison de la prescription du droit de reprise de l'administration qui ne pouvait s'exercer qu'à partir du 1er janvier 2007, les dettes de taxe sur la valeur ajoutée de 96 781 euros au titre de l'année 2005 figurant au passif du bilan ont été éteintes en 2008 ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a rehaussé les résultats déclarés de cet exercice des profits nés de l'extinction de ces dettes, sans qu'il y ait lieu à correction symétrique du bilan d'ouverture ;

En ce qui concerne l'application des pénalités pour manquement délibéré :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;

7. Considérant que dans sa proposition de rectification en date du 25 mai 2010, page 11 § II. 2, le vérificateur a relevé que de la comparaison entre la taxe sur la valeur ajoutée collectée figurant au bilan et la taxe sur la valeur ajoutée relative au solde des comptes clients au 31 décembre 2005, il apparaît un écart correspondant à de la taxe sur la valeur ajoutée antérieure au 31 décembre 2005 qui n'a pas été déclarée au 31 décembre 2008 ; que le vérificateur a également relevé au § II.1 qu'en s'abstenant de verser au Trésor ou en récupérant indûment la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures visées par la notification, la société a réalisé un profit égal au montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée nette ; qu'en conséquence, au titre des sanctions fiscales, page 17, l'administration fiscale a appliqué aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée et aux rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés, visés " taxe sur la valeur ajoutée collectée ", " profit taxe sur la valeur ajoutée " et " passif injustifié ", la majoration de 40 % pour manquements délibérés sur le fondement du a de l'article 1729 du code général des impôts ; que pour apporter la preuve, dont elle a la charge, du caractère délibéré du manquement reproché à la société, l'administration fiscale a retenu que les rétentions de taxe sur la valeur ajoutée ont été mises en avant pour l'ensemble de la période soumise au contrôle, soit les exercices clos les 31 décembre 2006, 31 décembre 2007, 31 décembre 2008 et jusqu'au 31 mars 2009, ce qui traduit un comportement répété de la société caractéristique d'une volonté manifeste de minorer l'impôt dû ; qu'ainsi, l'administration a relevé que la société déclare régulièrement un montant de taxe sur la valeur ajoutée inférieur au montant de taxe sur la valeur ajoutée exigible alors que les recettes effectivement réalisées ressortent clairement de la comptabilité et que leur niveau réel et donc celui des droits correspondants ne peuvent être ignorés ; que l'administration fiscale s'est également fondée sur la fréquence des infractions commises sur chaque exercice contrôlé et sur les exercices atteints par la prescription ainsi qu'en atteste le montant de 96 751 euros figurant au passif de l'exercice clos le 31 décembre 2005 ; que les éléments d'appréciation ainsi invoqués par l'administration fiscale suffisent, en l'espèce, à établir l'existence d'un manquement délibéré du contribuable, sans que soit opposable la circonstance qu'au cours des périodes litigieuses la société aurait disposé d'une créance sur le Trésor de nature à compenser le paiement d'une dette de taxe sur la valeur ajoutée générée par un rehaussement, dès lors que cette éventuelle compensation n'a pas pour conséquence d'enlever le caractère délibéré des manquements constatés en matière de rétention de taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration fiscale établit ainsi le caractère délibéré du manquement de la société contribuable à ses obligations ;

8. Considérant que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Crudeli est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Crudeli et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pourny, président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Haïli, premier conseiller,

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2015

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N° 13MA03742


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03742
Date de la décision : 09/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-03 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations. Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : YVANT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-07-09;13ma03742 ?
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