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12/06/2015 | FRANCE | N°14MA01268

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 12 juin 2015, 14MA01268


Vu la requête enregistrée le 20 mars 2014, présentée pour M. A...F...D..., demeurant..., par Me B...C...;

M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301316 du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2013, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour lui permettant de travailler et ce, sous astr

einte de 100 euros par jour de retard dans un délai de quinze jours suivant la notification de...

Vu la requête enregistrée le 20 mars 2014, présentée pour M. A...F...D..., demeurant..., par Me B...C...;

M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301316 du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2013, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour lui permettant de travailler et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement des dépens et de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- par les pièces versées au dossier, il établit avoir sa résidence habituelle et continue en France depuis dix ans ;

- l'usage d'une fausse carte d'identité ne peut justifier à elle seule le refus du préfet, alors en outre que l'identité est réelle ;

- l'article 41 de la charte des droits fondamentaux n'a pas été respectée ;

- compte tenu des éléments fournis, le préfet a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille du 21 février 2014 admettant M. D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la lettre du 17 novembre 2014 informant les parties, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date à partir de laquelle la clôture de l'instruction sera susceptible d'être prononcée et de la date prévisionnelle de l'audience ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2014, présenté par le préfet des Bouches-du-Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir qu'outre les moyens déjà soulevés en première instance et que la Cour pourra écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges, le requérant soulève deux moyens nouveaux :

- le moyen tiré de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne qui est sans incidence en l'espèce, dès lors que l'article invoqué ne concerne les personnes que dans leurs rapports avec les institutions de l'Union ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne peut être accueilli alors que les circonstances invoquées ne peuvent constituer des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant une admission exceptionnelle au séjour ;

Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 3 décembre 2014, présenté pour M. D...;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 décembre 2014, présenté pour M. D... et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

Vu l'avis d'audience du 7 avril 2015, valant, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-2 du code de justice administrative, clôture de l'instruction à la date de son émission ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 24 avril 2015, le rapport de Mme Busidan, premier conseiller ;

1. Considérant que M.D..., ressortissant comorien né le 13 septembre 1977, relève appel du jugement rendu le 19 novembre 2013 par le tribunal administratif de Marseille, qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2013 portant refus de lui accorder un titre de séjour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé vit habituellement en France depuis le début de l'année 2005, soit depuis huit ans à la date de l'arrêté en litige ; que la plupart des pièces qui établissent cette résidence habituelle sont constituées des bulletins de paie qui lui ont été délivrés par les trois entreprises de propreté auprès desquelles il a, successivement, travaillé à temps partiel et sous contrat à durée indéterminée pour les deux dernières ; que la circonstance que ces embauches n'ont pu intervenir qu'en raison du fait que l'intéressé s'était prévalu auprès d'elles d'une fausse carte d'identité française ne peut empêcher ces bulletins de salaire d'attester de la réalité et de la continuité de sa résidence en France ; que l'allégation de l'administration selon laquelle le requérant aurait également utilisé cette fausse carte d'identité en 2005 auprès de la caisse d'allocations familiales du Bas-Rhin "dans le but évident de bénéficier d'allocations", n'est corroborée par aucune pièce versée au dossier ; que, par ailleurs, si M. D... doit être regardé comme ayant vécu jusqu'à plus de vingt-sept ans dans son pays d'origine et n'établit pas y être dépourvu d'attaches familiales, il a conclu en France, le 13 février 2012, un pacte civil de solidarité avec une Comorienne titulaire d'une carte de séjour de dix ans, dont il attendait un enfant à la date du refus en litige et dont il ressort des pièces du dossier qu'il partage l'appartement depuis juin 2011 ; que la directrice de l'école où sont scolarisés les deux enfants de sa compagne, nés d'une première union de celle-ci, atteste que le requérant agit envers ces enfants en bon père de famille et se préoccupe de leurs scolarités ; que, dans ces conditions et dans les circonstances de l'espèce, le requérant est fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'une carte de séjour, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale et, par suite, à demander l'annulation de ce refus ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et à demander l'annulation de ce jugement et celle de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 janvier 2013 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative: " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. "; qu'eu égard aux motifs pour lesquels il prononce l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 janvier 2013, et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans les circonstances de droit ou de fait y ferait obstacle, le présent arrêt implique nécessairement la délivrance au requérant d'une carte de séjour d'un an portant la mention "vie privée et familiale" ; que, par suite, il y a lieu pour la Cour de prescrire au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. D...un tel titre dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens :

5. Considérant que la présente instance ne comporte pas de dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'avocat du requérant d'une somme autre que celle à laquelle lui donne droit l'admission de M. D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 novembre 2013 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 janvier 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" à M.D..., dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...F...D..., au ministre de l'intérieur, au préfet des Bouches-du-Rhône et à Me E...B...C....

Délibéré après l'audience du 24 avril 2015, à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Portail, président-assesseur ;

Mme Busidan, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 12 juin 2015.

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N° 14MA01268


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01268
Date de la décision : 12/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : KHADIR CHERBONEL

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-12;14ma01268 ?
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