La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2015 | FRANCE | N°13MA01988

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 09 juin 2015, 13MA01988


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D..., Mme K...L..., M. B...F...et M. G...E...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Cheval-Blanc en date du 22 février 2011 ayant autorisé le maire à signer une convention d'occupation du domaine public avec la société Hélionext en vue de réaliser et d'exploiter une installation de production d'électricité photovoltaïque sur le toit de l'école primaire située sur le territoire de ladite commune.

Par un jugement n

1101348 du 15 mars 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D..., Mme K...L..., M. B...F...et M. G...E...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Cheval-Blanc en date du 22 février 2011 ayant autorisé le maire à signer une convention d'occupation du domaine public avec la société Hélionext en vue de réaliser et d'exploiter une installation de production d'électricité photovoltaïque sur le toit de l'école primaire située sur le territoire de ladite commune.

Par un jugement n° 1101348 du 15 mars 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 mai 2013, M. D..., Mme L...et M. E...représentés par MeJ..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 15 mars 2013 ;

2°) d'enjoindre à la commune de Cheval-Blanc de prononcer la nullité du contrat de la société Hélionext sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de communiquer l'arrêt à intervenir au procureur de la République territorialement compétent en application de l'article 40 du code de procédure pénale ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Cheval-Blanc une somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le remboursement de la somme mise à leur charge au même titre par le jugement attaqué et les dépens.

Ils soutiennent que :

- la convention d'occupation du domaine public en date du 23 février 2011 a été signée avant que la délibération litigieuse du 22 février 2011 ne soit devenue exécutoire, dès lors que ladite délibération n'a été reçue en préfecture que le 1er mars 2011 ;

- la délibération du 28 mars 2008 donnant, en application du 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, délégation au maire pour représenter la commune en justice ayant été signée par une autorité incompétente et le maire étant intéressé à la conclusion de la convention querellée, la commune n'est pas valablement représentée dans le présent litige ;

- la délibération contrevient aux dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, dès lors que le maire, M.H..., qui a participé au vote de la délibération du 22 février 2011, est intéressé à la conclusion de la convention en cause au motif que son épouse est la gérante de la société propriétaire des locaux loués à la société Hélionext et situés à la même adresse que celle du siège social de la société de MmeH... ;

- la convention en cause devant être analysée comme un contrat de délégation de service public, dès lors que son objet porte sur l'exploitation des installations par l'entreprise attributaire et répond à un besoin de la commune, une procédure de publicité et de mise en concurrence formalisée, et non pas seulement la procédure ad hoc mise en place par la commune, aurait dû être mise en oeuvre ; il devait en être de même, à supposer que la convention soit analysée en une simple convention d'occupation du domaine public ;

- la délibération litigieuse est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire, enregistré le 26 juillet 2013, la SARL Hélionext a présenté des observations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2015, la commune de Cheval-Blanc, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré du caractère non exécutoire de la délibération du 22 février 2011 est irrecevable, dès lors qu'il ne se rattache pas aux causes juridiques invoquées en première instance ;

- le moyen tiré de l'existence d'un détournement de pouvoir est irrecevable car nouveau en appel ;

- le maire dispose d'une délibération valable pour ester en justice tant en première instance qu'en appel et tant en demande qu'en défense ;

- les autres moyens soulevés par M. D...et autres ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 16 février 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mars 2015, puis reportée au 31 mars 2015 par ordonnance du 10 mars 2015.

Un mémoire présenté pour M. D...et autres a été enregistré le 31 mars 2015, M. D... et autres concluant aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de MeJ..., représentant M. D...et autres, et de Me I..., représentant la commune de Cheval-Blanc.

1. Considérant que M.D..., Mme L...et M. E...relèvent appel du jugement du 15 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Cheval-Blanc en date du 22 février 2011 ayant autorisé le maire à signer une convention d'occupation du domaine public avec la société Hélionext en vue de réaliser et d'exploiter une installation de production d'électricité photovoltaïque sur le toit de l'école primaire située sur le territoire de ladite commune ;

Sur la délégation accordée au maire pour représenter en justice de la commune de Cheval-Blanc :

2. Considérant qu'en application des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation générale pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée de son mandat ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par délibération du 28 mars 2008, le conseil municipal de Cheval-Blanc a chargé le maire de la commune, pour la durée de son mandat, d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle ; que, par suite, M. D...et autres ne sont pas fondés à soutenir que le maire de Cheval-Blanc n'est pas régulièrement habilité en vertu de ladite délibération à présenter les observations en défense de la commune dans l'instance ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la convention d'occupation du domaine public a été signée le 23 février 2011 et que la délibération contestée du 22 février 2011 a été reçue en préfecture le 1er mars 2011 est sans influence sur la légalité de ladite délibération ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires " ; qu'il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération, par une personne intéressée à l'affaire qui fait l'objet de cette disposition est de nature à entraîner l'illégalité de cette disposition ; que, de même, la participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération, par une personne intéressée à l'affaire qui fait l'objet de cette disposition, est susceptible de vicier la légalité de cette disposition, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation au vote de la disposition litigieuse, dès lors que la personne intéressée a été en mesure d'exercer une influence effective sur la délibération litigieuse ;

5. Considérant que la seule circonstance que l'épouse du maire est la gérante d'une société propriétaire de locaux donnés en location à la société Hélionext et situés à la même adresse que celle du siège social de cette société propriétaire n'est pas de nature à établir que le maire était intéressé à l'adoption de la délibération contestée et à la conclusion entre la commune et la société Hélionext de la convention litigieuse ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que les dispositions précitées de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales n'avaient pas été méconnues ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. / Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la convention dont la délibération contestée prévoit la signature a pour objet d'autoriser la société Hélionext à occuper, outre les armoires techniques, la toiture de l'école primaire en vue de réaliser et d'exploiter une installation de production d'électricité photovoltaïque, pour une durée de 21 ans, en contrepartie du paiement d'une redevance d'occupation du domaine public ; qu'ainsi que l'ont retenu à juste titre les premiers juges, les stipulations de ladite convention relatives aux prescriptions d'aménagement d'une toiture en bac acier permettant d'accueillir cette installation et aux obligations d'entretien à la charge de la société Hélionext s'inscrivent dans le cadre des obligations que l'autorité chargée de la gestion du domaine public peut imposer, tant dans l'intérêt du domaine et de son affectation que dans l'intérêt général, aux occupants dudit domaine ; que, si la délibération contestée autorisant la signature de la convention litigieuse est motivée par l'intérêt général s'attachant pour la commune à entamer une démarche écologique par l'implantation sur certains bâtiments publics d'unités de production d'électricité photovoltaïque, elle ne concerne pas les activités des services publics municipaux ni celles qui seraient exercées pour leur compte ; qu'il ressort également des pièces du dossier que la commune n'a pas entendu créer un service public, mais seulement utiliser son domaine public conformément aux prescriptions légales régissant l'occupation de celui-ci ; que la durée de 21 ans n'ôte pas à la convention litigieuse son caractère de convention d'occupation du domaine public ; que, dès lors, M. D...et autres ne sont pas fondés à soutenir que la convention dont la délibération contestée autorise la signature présente le caractère d'une délégation de service public soumise à une procédure préalable de publicité et de mise en concurrence ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que, si la commune, qui n'était pas tenue de faire précéder la signature de la convention litigieuse d'une procédure de publicité et de mise en concurrence, a mis en oeuvre une telle procédure par la consultation de différentes entreprises, il ne ressort pas des pièces du dossier que les règles d'une telle mise en concurrence n'auraient pas été respectées par la commune ;

9. Considérant, enfin, que le moyen tiré par M. D...et autres de l'existence d'un détournement de pouvoir n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Cheval-Blanc en date du 22 février 2011 et à demander l'annulation desdits jugement et délibération ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et, en tout état de cause, celles tendant à la mise en oeuvre de la procédure décrite à l'article 40 du code de procédure pénale, doivent être également rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

12. Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cheval-Blanc, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent M. D...et autres au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, d'autre part et en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.D..., de Mme L...et de M. E...une somme de 500 euros chacun au titre des frais exposés par la commune de Cheval-Blanc et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... et autres est rejetée.

Article 2 : M. D..., Mme L...et M. E...verseront à la commune de Cheval-Blanc une somme de 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à Mme K...L..., à M. G... E...et à la commune de Cheval-Blanc.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2015, où siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président assesseur,

- Mme Jorda-Lecroq, rapporteur,

Lu en audience publique, le 9 juin 2015.

''

''

''

''

2

N° 13MA01988

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01988
Date de la décision : 09/06/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Organisation de la commune - Organes de la commune - Maire et adjoints - Statut du maire - Prise d'intérêt.

Domaine - Domaine public - Régime - Occupation - Utilisations privatives du domaine - Contrats et concessions.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL JURIS PUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-09;13ma01988 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award