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29/05/2015 | FRANCE | N°13MA03321

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 29 mai 2015, 13MA03321


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2013, présentée pour Mme F...E..., demeurant..., par MeB... ;

Mme E...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102117 du 7 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune d'Aubais du 18 mars 2011 autorisant le maire à exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle B 2446 au prix de 6 000 euros, ainsi que de la décision du maire de la commune d'Aubais du 21 mars 2011 d'exercer ce droit et de la décision confi

rmative du 3 mai 2011 intervenue sur recours gracieux ;

2°) d'annuler ces t...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2013, présentée pour Mme F...E..., demeurant..., par MeB... ;

Mme E...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102117 du 7 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune d'Aubais du 18 mars 2011 autorisant le maire à exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle B 2446 au prix de 6 000 euros, ainsi que de la décision du maire de la commune d'Aubais du 21 mars 2011 d'exercer ce droit et de la décision confirmative du 3 mai 2011 intervenue sur recours gracieux ;

2°) d'annuler ces trois décisions ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aubais une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la motivation de la délibération du conseil municipal ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

- la commune ne justifie pas, à la date de la décision de préemption, d'un projet d'aménagement suffisamment précis au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu la lettre du 24 juin 2014 informant les parties, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date à partir de laquelle la clôture de l'instruction sera susceptible d'être prononcée et de la date prévisionnelle de l'audience ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2014, présenté pour la commune d'Aubais, représentée par son maire en exercice, par la Selarl Juris Publica ; la commune d'Aubais conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de Mme E...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance est irrecevable ;

- Mme E...est dépourvue d'intérêt pour agir dès lors que la promesse de vente qu'elle a conclue avec les propriétaires de la parcelle B 2446 était caduque avant la date de la décision de préemption ;

- la demande de première instance était tardive ;

- la décision du maire exerçant le droit de préemption, qui fait référence à la délibération du 18 mars 2011, respecte l'exigence de motivation résultant de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

- la délibération du 18 mars 2011, qui fait expressément référence à un projet d'aménagement urbain situé dans le secteur de l'Argilier, respecte également cette exigence de motivation ;

- l'opération d'aménagement prévue dans le secteur de l'Argilier est antérieure à la décision de préemption ;

Vu la lettre du 28 octobre 2014 invitant Mme E...à produire le compromis de vente qui a donné lieu à la déclaration d'intention d'aliéner au vu de laquelle la décision de préemption en litige est intervenue ;

Vu la lettre du 29 octobre 2014, portant à la connaissance des parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, un moyen sur lequel la Cour est susceptible de fonder d'office sa décision, tiré de ce que le 21 mars 2011, date à laquelle le maire d'Aubais a exercé le droit de préemption, la délibération par laquelle le conseil municipal avait décidé de lui déléguer le droit de préemption, affichée le 24 mars 2011, n'était pas exécutoire ;

Vu, enregistré le 14 novembre 2014, le nouveau mémoire présenté pour la commune d'Aubais, qui expose que la délégation était exécutoire à la date à laquelle la décision de préemption a été notifiée ;

Vu la lettre du 8 décembre 2014, invitant la commune d'Aubais à verser au dossier les éléments justifiant de son allégation selon laquelle, à la date de la décision de préemption, la promesse de vente dont bénéficiait Mme E...était caduque ;

Vu le mémoire et la pièce complémentaire, enregistrés le 17 décembre 2014, présentés pour MmeE..., qui soutient que le document qu'elle produit vaut compromis de vente ;

Vu, enregistré le 19 décembre 2014, le nouveau mémoire présenté pour la commune d'Aubais, qui soutient que les deux réquisitions de notification à l'autorité compétente, signées séparément par les vendeurs M. D...et MmeA..., ne peuvent être regardées comme des compromis de vente ;

Vu l'ordonnance du 22 janvier 2015, prononçant la clôture de l'instruction à la date de son émission, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2015 :

- le rapport de M. Argoud, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., pour la commune d'Aubais ;

1. Considérant que Mme E...relève appel du jugement du 7 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, premièrement, de la délibération du conseil municipal de la commune d'Aubais du 18 mars 2011 relative à l'exercice du droit de préemption urbain sur une parcelle cadastrée section B n° 2446, deuxièmement, de la décision du maire de la commune d'Aubais du 21 mars 2011 relative à l'exercice de ce même droit et, troisièmement, de la décision du 3 mai 2011 portant rejet de son recours gracieux du 27 avril 2011 ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes mêmes de la délibération du conseil municipal de la commune d'Aubais du 18 mars 2011, qui mentionne les caractéristiques précises de la parcelle B 2446 ainsi que son prix d'acquisition et qui indique que le maire est autorisé à exercer le droit de préemption à ce prix, que, par cette délibération, le conseil municipal a entendu exercer le droit de préemption urbain et autoriser le maire à procéder aux formalités nécessaires à cette fin ; qu'ainsi, MmeE..., qui entend contester la décision de la commune d'exercer son droit de préemption, doit être regardée comme demandant l'annulation, d'une part, de la délibération du 18 mars 2011 portant exercice de ce droit, qui lui a été notifiée par lettre du maire du 24 mars 2011 avec un exemplaire de la déclaration d'intention d'aliéner portant mention de la décision de la commune d'exercer son droit de préemption, et, d'autre part, de la décision de rejet de son recours gracieux ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, ni les documents adressés à Mme E...lors de la notification de la délibération du 18 mars 2011 par lettre du 24 mars 2011, ni la lettre du maire du 3 mai 2011 portant rejet du recours gracieux de Mme E..., ne comportent la mention des délais et voies de recours ; que, par suite, la commune d'Aubais n'est pas fondée à soutenir que la demande de Mme E... tendant à l'annulation de la délibération du 18 mars 2011 portant exercice du droit de préemption, serait tardive ;

4. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du document intitulé "réquisition de notification à l'autorité compétente" par lequel a été notifiée à la SAFER la vente projetée entre Mme E...et M. D...et MmeA..., ainsi que de la déclaration d'intention d'aliéner adressée à la commune par le notaire chargé de la vente qui, contrairement à ce que soutient la commune, ne comporte aucune mention d'une condition suspensive, qu'à la date de la décision de préemption, le projet de vente en cause n'était pas caduc ; qu'ainsi, la commune de Saint-Aubais n'est pas fondée à soutenir qu'à cette date Mme E... aurait été dépourvue d'intérêt pour agir à l'encontre de la décision de préemption en litige ;

Sur la légalité de la décision de préemption :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, alors applicable : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. Toutefois, lorsque le droit de préemption est exercé à des fins de réserves foncières dans la cadre d'une zone d'aménagement différé, la décision peut se référer aux motivations générales mentionnées dans l'acte créant la zone. " ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations. " ;

6. Considérant que la commune fait valoir son objectif d'aménagement du secteur de l'Argilier auquel appartient le terrain faisant l'objet de la décision de préemption en litige ; qu'il ressort des documents produits par la commune et notamment d'un extrait du projet d'aménagement et de développement durable de son plan local d'urbanisme en cours d'élaboration, que cet objectif ne se traduisait, à la date de la décision de préemption en litige, que par l'engagement d'une réflexion sur les difficultés de gestion de l'extension urbaine, sans qu'il soit fait état d'aucun élément suffisamment précis permettant d'établir la nature exacte de l'action ou de l'opération dont la commune entend poursuivre la réalisation ; que Mme E...est dès lors fondée à soutenir que la commune ne justifie pas de la réalité d'un projet au sens des dispositions précitées de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;

7. Considérant, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'en l'état de l'instruction aucun autre moyen n'apparaît de nature à fonder l'annulation de la décision de préemption contestée ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande et à demander l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune d'Aubais du 18 mars 2011 portant exercice du droit de préemption urbain et de la décision du maire de la commune d'Aubais du 3 mai 2011 portant rejet de son recours gracieux ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune d'Aubais une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme E... et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que la commune d'Aubais demande au même titre soit mise à la charge de Mme E..., qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 7 juin 2013, la délibération du conseil municipal de la commune d'Aubais du 18 mars 2011 portant exercice du droit de préemption urbain et la décision du maire de la commune d'Aubais du 3 mai 2011 portant rejet du recours gracieux de MmeE..., sont annulés.

Article 2 : La commune d'Aubais versera à Mme E...une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...E...et à la commune d'Aubais.

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N° 13MA03321


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption. Droit de préemption urbain.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Jean-Marie ARGOUD
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL JURIS PUBLICA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 29/05/2015
Date de l'import : 11/06/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13MA03321
Numéro NOR : CETATEXT000030664843 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-05-29;13ma03321 ?
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