Vu la requête, enregistrée le 17 juillet 2013, présentée pour la société par actions simplifiées (SAS) El Pa d'Avui, dont le siège est route de Rivesaltes à Saint-Estève (66240), par la SCP B. Fita-C. Bruzi ; la société El Pa d'Avui demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1103014 du 21 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du maire de Perpignan du 11 janvier 2011 majorant de trois mois le délai d'instruction de sa demande de permis de construire et, d'autre part, de l'arrêté dudit maire Perpignan du 14 avril 2011 lui refusant la délivrance d'un permis de construire pour le réaménagement et l'extension de locaux commerciaux ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Perpignan une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 janvier 2015 :
- le rapport de Mme Giocanti, conseiller ;
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., pour la commune de Perpignan ;
1. Considérant que la société El Pa d'Avui exploite une boulangerie dans les locaux d'une ancienne concession automobile dans le quartier des Cinq Ponts à Perpignan ; que par un arrêté du 14 avril 2011, le maire de Perpignan lui a refusé la délivrance d'un permis de construire pour le réaménagement et l'extension des locaux commerciaux existants ; que la société El Pa d'Avui relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 11 janvier 2011 par laquelle le service instructeur a décidé de porter le délai d'instruction de sa demande de permis à six mois et a sollicité la production de pièces complémentaires et, d'autre part, du refus opposé à sa demande de permis de construire le 14 avril 2011 ;
Sur la fin de non recevoir opposée à la requête d'appel :
2. Considérant que la présentation d'une requête par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative ne dispense pas la juridiction de s'assurer, le cas échéant, lorsque la partie en cause est une personne morale, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour engager cette action ; qu'une telle vérification n'est toutefois pas normalement nécessaire lorsque la personne morale requérante est dotée, par des dispositions législatives ou réglementaires, de représentants légaux ayant de plein droit qualité pour agir en justice en son nom ;
3. Considérant qu'en vertu de l'article L. 227-6 du code de commerce, les sociétés par actions simplifiées sont représentées à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts, qui dispose des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social ; qu'il en résulte qu'une société par actions simplifiées, telle que la société El Pa d'Avui, est régulièrement représentée devant la juridiction administrative par son président, sans que ce dernier ait à justifier d'un mandat ; que la société par actions simplifiées El Pa d'Avui a produit en appel un extrait Kbis mentionnant que M. A...en est le président ; qu'il suit de là que la fin de non recevoir selon laquelle M. A... n'établirait pas être habilité à représenter la société requérante, doit être écartée ;
Sur la recevabilité des conclusions de la demande de première instance dirigées contre la lettre du 11 janvier 2011 :
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la notification de la lettre du 11 janvier 2011 par laquelle le service instructeur a sollicité des pièces complémentaires et porté le délai d'instruction de la demande de permis de construire à six mois, ne comportait pas la mention des voies et délais de recours ; que, par suite, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevables les conclusions tendant à l'annulation de cette lettre, en lui opposant l'expiration du délai de recours ; qu'il y a lieu pour la Cour de statuer sur ces conclusions par voie d'évocation ;
Sur la légalité des décisions de prolongation des délais d'instruction et de refus de permis de construire :
5. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales.(...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) retirent ou abrogent une décision créatrice de droits " ;
6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 423-19 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. " ; qu'aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. " ; que selon l'article R. 423-41 du même code : " Une demande de production de pièce manquante notifiée après la fin du délai d'un mois prévu à l'article R. 423-38 n'a pas pour effet de modifier les délais d'instruction définis aux articles R. 423-23 à R. 423-37 et notifiés dans les conditions prévues par les articles R. 423-42 à R. 423-49. " ; qu'aux termes de l'article R. 423-46 : " Les notifications et courriers prévus par les sous-sections 1 et 2 ci-dessus sont adressés par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, par courrier électronique. " ; qu'aux termes de l'article L. 424-2 : " Le permis est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction. (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / (...) b) Deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle, au sens du titre III du livre II du code de la construction et de l'habitation, ou ses annexes ; / c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d'aménager. " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société El Pa d'Avui a déposé sa demande de permis de construire le 16 décembre 2010 ; qu'il lui a été indiqué à cette occasion que le délai d'instruction était de trois mois, sauf si, dans le mois suivant le dépôt de sa demande, il lui était réclamé des pièces manquantes ; que, par courrier daté du 11 janvier 2011 envoyé par lettre recommandée le 18 janvier 2011 et reçu par la pétitionnaire le 20 janvier 2011, le maire de Perpignan a sollicité la production de plusieurs pièces complémentaires et a fixé une nouveau délai d'instruction ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 423-41 du code de l'urbanisme que la réception de la décision de modification du délai d'instruction par le pétitionnaire dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier de demande, constitue une condition de la légalité de cette décision et qu'une décision de prolongation du délai d'instruction notifiée après l'expiration de ce délai d'un mois est dépourvue d'effet ; que la société El Pa d'Avui est ainsi fondée à soutenir que la décision de prolongation du délai d'instruction qu'elle conteste était illégale et qu'elle était en conséquence titulaire d'un permis de construire tacite à compter du 16 mars 2011 ;
8. Considérant qu'il est constant que l'arrêté de refus de permis de construire du 14 avril 2011, qui doit être regardé comme portant retrait d'un permis de construire tacite, n'a pas été précédé de la mise en oeuvre de la procédure contradictoire prescrite par les dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000, laquelle a le caractère d'une garantie dont la société requérante a été effectivement privée ; que si le tribunal administratif de Montpellier a relevé que le maire était tenu de retirer le permis de construire illégalement délivré, il ressort toutefois des pièces du dossier que le maire était nécessairement conduit, pour relever l'éventuelle illégalité du permis en litige, à porter une appréciation sur les faits de l'espèce, notamment sur la question de savoir si le projet d'extension était conforme aux exigences des dispositions du plan local d'urbanisme local applicables en zone agricole, où le projet est implanté ; qu'ainsi, contrairement à ce que les premiers juges ont estimé, le maire n'était pas en situation de compétence liée pour retirer le permis tacite et le moyen d'irrégularité de la procédure n'est, par suite, pas inopérant ;
9. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens soulevés par la société requérante n'apparaissent pas susceptibles, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation des décisions en litige ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société El Pa d'Avui est fondée, d'une part, à demander l'annulation de la décision de prolongation du délai d'instruction du 11 janvier 2011 et, d'autre part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du maire de Perpignan du 14 avril 2011 et à demander l'annulation de cet arrêté ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de Perpignan une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société El Pa d'Avui et non compris dans les dépens ;
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Perpignan demande au titre de ses frais non compris dans les dépens, soit mise à la charge de la société El Pa d'Avui qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 juin 2013, la décision de prolongation du délai d'instruction du 11 janvier 2011 et l'arrêté du maire de Perpignan du 14 avril 2011, sont annulés.
Article 2 : La commune de Perpignan versera à la société El Pa d'Avui une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Perpignan tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société El Pa d'Avui et à la commune de Perpignan.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Perpignan.
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N° 13MA02884