Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel, le 7 mars 2013, sous le n° 13MA00626, présentée pour la commune de Mandelieu La Napoule, par son maire en exercice, par Me C...;
La commune de Mandelieu La Napoule demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1004021 du 8 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 31 août 2010 par laquelle le maire a refusé de prendre en charge la formation sollicitée par M. Lavisse et a enjoint à la commune de lui verser la somme de 700,90 euros au titre de ses dépenses de formation dans un délai d'un mois ;
2°) de rejeter la requête présentée le 13 octobre 2010 par M. Lavisse ;
3°) de condamner M. Lavisse à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le Code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2014 :
- le rapport de M. Pecchioli, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., substituant MeC..., pour la commune de Mandelieu la Napoule ;
1. Considérant que M. Lavisse, conseiller municipal de la commune de Mandelieu La Napoule a adressé, le 12 juillet 2010, au service de la formation des élus une demande de formation pour la période du 26 août au 28 août 2010 dont le thème était " donner la priorité aux services publics, défendre la laïcité et promouvoir l'écologie : faisons la preuve par l'exemple " ; que le 10 août 2010 le directeur général des services de la commune a reçu M. Lavisse et lui a fait part du refus opposé à sa demande lui expliquant que le paiement d'une formation ne concernait que les élus possédant une délégation et plus largement ceux pouvant justifier d'une application immédiate de ces nouvelles connaissances ; que par courrier du 13 août 2010, M. Lavisse a sollicité à nouveau la prise en charge de cette formation ; que par courrier du 31 août 2010 le maire a réitéré son refus faisant valoir l'absence, d'une part, d'intérêt pour le bon fonctionnement du conseil municipal et, d'autre part, de lien avec sa délégation ou les missions particulières qui pouvaient lui être confiées ; que M. Lavisse, qui a décidé de suivre la formation, a demandé au tribunal administratif de Nice, par une requête enregistrée le 13 octobre 2010, d'annuler la décision individuelle de rejet du maire du 31 août 2010 et d'ordonner l'inscription d'office de cette dépense au budget de la commune, soit 700,90 euros ; que la commune de Mandelieu La Napoule relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice qui a annulé la décision du 31 août 2010 du maire de cette commune et a enjoint à cette dernière de verser à M. Lavisse la somme de 700,90 euros au titre de ses dépenses de formation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement ;
Sur la régularité du jugement :
En ce qui concerne les conclusions d'annulation présentées :
2. Considérant, en premier lieu, que, eu égard à la circonstance que les élus ont droit à suivre des formations adaptées à leur fonction, le rejet, par une décision verbale du directeur des services de la formation des élus, d'une demande adressée par courrier, en date du 10 juillet 2010, émanant d'un conseiller municipal, visant la prise en charge de frais de la formation, ne fait pas obstacle, en cas de décision de rejet d'une nouvelle demande ayant le même objet, à ce que l'intéressé saisisse le juge administratif d'une requête tendant à l'annulation de la seconde décision ; que, par suite, la commune de Mandelieu La Napoule n'est pas fondée, pour soutenir que la requête de M. Lavisse serait irrecevable, à se prévaloir du caractère confirmatif de la décision explicite de rejet prise par le maire, laquelle a fait suite à une seconde demande émanant de l'élu municipal en date du 13 août 2010 ;
3. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient la commune de Mandelieu La Napoule, la décision consistant à refuser à M. Lavisse la prise en charge des frais de formation au titre de la formation précitée, fait grief à celui-ci ; que, par suite, M. Lavisse, nonobstant le fait qu'il ne s'était pas acquitté desdits frais à la date de l'enregistrement de la requête, devra nécessairement in fine supporté le coût de la formation en cas de rejet de sa demande juridictionnelle ; que, dans ces conditions, M. Lavisse justifie d'un intérêt à agir à l'encontre de la décision lui refusant la prise en charge de la formation sollicitée ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune appelante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ;
En ce qui concerne les conclusions d'injonction :
5. Considérant que la commune appelante soutient que les premiers juges ont statué ultra petita, dès lors que M. Lavisse n'a jamais demandé une condamnation à son profit ; qu'il ressort de l'instruction que M. Lavisse a, en effet, demandé au Tribunal de tirer les conséquences de l'annulation de la décision individuelle contestée et d'ordonner l'inscription d'office de cette dépense au budget de la commune ; qu'en enjoignant à la commune à lui verser la somme de 700,90 euros au titre de ses dépenses de formation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, les premiers juges ont statué au-delà des conclusions dont ils étaient saisis ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a statué sur les conclusions d'injonction de M. Lavisse ; qu'il y a lieu pour la Cour de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions formulées par M. Lavisse devant le tribunal administratif tendant à ce que soit prononcée une injonction et par l'effet dévolutif pour le reste ;
Sur le bien-fondé du jugement :
6. Considérant que le maire de la commune de Mandelieu La Napoule a rejeté la demande de prise en charge des frais de formation de M. Lavisse au motif que cette formation ne présentait pas un intérêt pour le bon fonctionnement du conseil municipal et n'était pas en lien avec sa délégation ou les missions particulières qui pouvaient lui être confiées ; que la commune ajoute dans sa requête d'appel que les premiers juges ont opéré un renversement de la charge de la preuve au détriment de la commune en énonçant qu'elle n'établissait pas que la formation litigieuse n'était pas adaptée, que le premier des deux organismes formateurs n'a fait l'objet d'aucun agrément délivré par le ministre de l'intérieur conformément aux dispositions de l'article R. 2123-12 du code général des collectivités territoriales et que l'intérêt de M. Lavisse était exclusivement lié aux élections cantonales pour lesquelles il souhaitait se présenter ;
7. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales " Les membres d'un conseil municipal ont droit à une formation adaptée à leurs fonctions " ; qu'aux termes de l'article L. 2321-2 : " Les dépenses obligatoires comprennent notamment : 3° ... les frais de formation des élus visés à l'article L. 2321-2 " ; qu'aux termes de l'article R. 2123-12 du même code : " La prise en charge par la commune des dépenses liées à l'exercice du droit des élus locaux à la formation, dans les conditions prévues par les articles L. 2123-12 à L. 2123-16 et par le 3° de l'article L. 2321-2, ne peut intervenir que si l'organisme dispensateur du stage ou de la session a reçu un agrément délivré par le ministre de l'intérieur dans les conditions fixées par les articles R. 1221-12 à R. 1221-22 " ; qu'aux termes de l'article R. 2123-13 du même code : " Les frais de déplacement des élus municipaux sont pris en charge par la commune dans les conditions définies par le décret n° 90-437 du 28 mai 1990 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils sur le territoire métropolitain de la France lorsqu'ils sont à la charge des budgets de l'Etat, des établissements publics nationaux à caractère administratif et de certains organismes subventionnés " ; et qu'aux termes de l'article 13 du décret du 28 mai 1990 précité : " Est en stage, au sens du présent décret, l'agent qui se déplace pour suivre une action de formation organisée par l'administration ou à son initiative en vue de la formation professionnelle des personnels de l'Etat, conformément aux dispositions du titre Ier du décret du 14 juin 1985 susvisé et du titre Ier du décret du 26 mars 1975 susvisé. Pour ouvrir droit à indemnité de déplacement, le stage doit se dérouler hors du territoire de la commune de résidence administrative de l'agent et hors du territoire de la commune de sa résidence familiale. " ; qu'il résulte des dispositions précitées, que les élus ont droit au remboursement des frais de formation qu'ils ont exposés, sous conditions que la formation soit dispensée par un organisme bénéficiant d'un agrément de la part du ministre de l'intérieur, qu'elle soit adaptée, ne soit pas trop coûteuse, et n'entraîne pas le dépassement du plafond visé à l'article L. 2123-14 du code général des collectivités territoriales, ni de la somme votée au budget au titre de la formation ;
8. Considérant, d'autre part, qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties ; que s'il peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance ; que, le cas échéant, il revient au juge, avant de se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l'administration en défense, de mettre en oeuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l'administration compétente la production ;
9. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'instruction, tout d'abord que l'organisme formateur en cause dénommé " formation et citoyenneté " bénéficie depuis le 7 avril 2010 de l'agrément du ministère de l'intérieur prévu par l'article R. 2123-12 du code général des collectivités territoriales précité ; que la circonstance que l'autre organisme, dénommé FDC (" formateur des collectivités "), associé au premier dans la dispense de formation, n'ait pas cet agrément est, en tout état de cause, sans incidence sur l'éligibilité de la formation à la prise en charge ; qu'ensuite, il ne saurait être sérieusement contesté, contrairement à ce que soutient la commune appelante qui ne peut valablement se plaindre d'un quelconque renversement de la charge de la preuve, et nonobstant la candidature de M. Lavisse aux élections cantonales, que les premiers juges ont procédé à une analyse du contenu de la formation en litige relevant de manière générale le caractère adapté de celle-ci aux fonctions de conseiller municipal, dès lors qu'elle se donnait pour objectif essentiel de " donner la priorité aux services publics, défendre la laïcité et promouvoir l'écologie : faisons la preuve par l'exemple " ; qu'à l'exception du dernier thème consacré aux priorités programmatiques pour les élections cantonales, les quatre autres thèmes dont " faire vivre la laïcité en collectivités locales ", " pouvoir et compétences des collectivités territoriales à l'aune d'une réforme gouvernementale ", " comment mettre en place une régie publique de l'eau ", " critères de conditionnalité écologique et sociale dans les politiques et les aides publiques " présentaient une incontestable utilité pour le fonctionnement du conseil municipal ; qu'enfin le maire ne soutient, ni même n'allègue que ladite formation entraînerait une dépense excessive ou excédant le montant de l'enveloppe budgétaire allouée à ce titre ; que, dans ces conditions, le maire, qui ne tient pas des dispositions précitées le pouvoir de limiter le droit à la formation des élus pour d'autres motifs, a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
10. Considérant, en second lieu, que lorsque M. Lavisse a suivi la formation contestée, il s'inscrivait dans le cadre des dispositions de l'article 13 du décret du 28 mai 1990 susmentionné lequel précise que l'action de formation peut être menée à l'initiative du stagiaire et n'implique aucune autorisation préalable du maire sous la forme d'un ordre de mission ; que le moyen tiré de ce que le rejet de la demande de formation de M. Lavisse faisait obstacle à sa prise en charge doit être écarté ; qu'en ce qui concerne le remboursement des frais de déplacement pour se rendre à la formation, la seule condition posée par ce texte au versement d'une indemnité est que le lieu de déroulement du stage se situe en dehors de la résidence administrative de l'agent, ce qui est le cas en l'espèce ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Mandelieu La Napoule n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 31 août 2010 par laquelle le maire a refusé de prendre en charge la formation sollicitée par M. Lavisse ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Considérant qu'aux termes de l'article 1612-15 du code général des collectivités territoriales : " Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. / La chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'Etat dans le département, soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la collectivité territoriale concernée. / Si, dans un délai d'un mois, cette mise en demeure n'a pas été suivie d'effet, la chambre régionale des comptes demande au représentant de l'Etat d'inscrire cette dépense au budget... " ; qu'aux termes de l'article L. 1612-16 du même code : " A défaut de mandatement d'une dépense obligatoire par le maire, le président du conseil général ou le président du conseil régional suivant le cas, dans le mois suivant la mise en demeure qui lui en a été faite par le représentant de l'Etat dans le département, celui-ci y procède d'office. Le délai prévu à l'alinéa précédent est porté à deux mois si la dépense est égale ou supérieure à 5 p.100 de la section de fonctionnement du budget primitif " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour obtenir l'inscription d'office d'une dépense obligatoire au budget d'une commune, la personne y ayant intérêt doit saisir la chambre régionale des comptes, qui seule peut demander au représentant de l'Etat d'inscrire cette dépense au budget ;
13. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. Lavisse, qui a demandé devant les premiers juges et en appel, l'inscription d'office de la dépense au budget de la commune de Mandelieu La Napoule, ait saisi la chambre régionale des comptes qui en conséquence n'a pu se prononcer sur le caractère obligatoire pour la commune de la dépense, ni mettre en demeure celle-ci de l'inscrire à son budget ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que le juge administratif ordonne l'inscription d'office de cette dépense au budget de la commune de Mandelieu La Napoule, adressées directement au juge, ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
15. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge d'une des parties la somme que demande l'autre au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1004021 du 8 janvier 2013 rendu par le tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il a enjoint à la commune de Mandelieu La Napoule de verser à M. Lavisse la somme de 700,90 euros au titre de ses dépenses de formation dans un délai d'un mois.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Mandelieu La Napoule et à M. A... Lavisse.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
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N° 13MA00626