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19/12/2014 | FRANCE | N°13MA00495

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2014, 13MA00495


Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2013 sous le n° 12MA00495 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par MeB... ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1204659 du 27 décembre 2012 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté non daté, qui lui a été notifié le 3 octobre 2012 à 14H00, par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligée à quitter le territoire dans un dé

lai de 30 jours en fixant le pays de destination et, d'autre part, retiré la décisio...

Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2013 sous le n° 12MA00495 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par MeB... ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1204659 du 27 décembre 2012 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté non daté, qui lui a été notifié le 3 octobre 2012 à 14H00, par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination et, d'autre part, retiré la décision n° 2012/016266 du 23 novembre 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Montpellier a accordé l'aide juridictionnelle totale à MmeA... ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2014 :

- le rapport de M. Renouf, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme A...fait appel de l'ordonnance par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté non daté, qui lui a été notifié le 3 octobre 2012 à 14H00, par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination et, d'autre part, retiré la décision n° 2012/016266 du 23 novembre 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Montpellier a accordé l'aide juridictionnelle totale à MmeA... ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : 1° Donner acte des désistements ; 2° Rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative ; 3° Constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur une requête ; 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; 6° Statuer sur les requêtes relevant d'une série, qui, sans appeler de nouvelle appréciation ou qualification de faits, présentent à juger en droit, pour la juridiction saisie, des questions identiques à celles qu'elle a déjà tranchées ensemble par une même décision passée en force de chose jugée ou à celles tranchées ensemble par une même décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux ou examinées ensemble par un même avis rendu par le Conseil d'Etat en application de l'article L. 113-1 ; 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. / Les présidents des cours administratives d'appel et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel et les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 6° du présent article. Ils peuvent, de même, annuler une ordonnance prise en application des 1° à 5° du présent article à condition de régler l'affaire au fond par application de l'une de ces dispositions. " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 50 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " " Sans préjudice des sanctions pénales éventuellement encourues, le bénéfice de l'aide juridictionnelle est retiré, même après l'instance ou l'accomplissement des actes pour lesquels il a été accordé, si ce bénéfice a été obtenu à la suite de déclarations ou au vu de pièces inexactes. // Il est retiré, en tout ou partie, dans les cas suivants : // (...) 3° Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle a été jugée dilatoire ou abusive " ; qu'aux termes de l'article 51 de ladite loi : " " (...) Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle a été jugée dilatoire ou abusive, la juridiction saisie prononce le retrait total de l'aide juridictionnelle " ;

4. Considérant que, s'il résulte de la lecture de l'ordonnance attaquée que celle-ci est, contrairement à ce que soutient MmeA..., suffisamment motivée, la question du retrait de

l'aide juridictionnelle accordée au requérant en application des dispositions précitées des

articles 50 et 51 de la loi du 10 juillet 1991 procède d'une appréciation du juge qui ne peut

être portée par une ordonnance prise en application de l'article R. 222-1 précité du code de justice administrative ; que, par suite, en tant qu'elle décide le retrait du bénéfice de l'aide juridictionnelle qui avait été accordée à Mme A...par décision du 23 novembre 2012 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Montpellier, l'ordonnance attaquée a été prise par une formation de jugement irrégulièrement composée ; que, par suite, l'ordonnance attaquée doit, dans cette mesure, être annulée ;

5. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la question du retrait de l'aide juridictionnelle en décidant qu'il n'y a pas lieu de décider d'en retirer à Mme A...le bénéfice ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen de la décision attaquée que celle-ci énonce suffisamment les éléments de fait et de droit sur lesquels elle repose pour ne pas être entachée du défaut de motivation allégué ;

7. Considérant, en second lieu, que d'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ;que, d'autre part, aux termes de l'article 3, paragraphe 1, de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, enfin, aux termes de l'article 9 de la même convention : " 1. Les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant (...) 2. Les États parties respectent le droit de l'enfant séparé de ses deux parents ou de l'un d'eux d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant " ;

8. Considérant que si les jeunes enfants de Mme A...résident tous en France, il est constant que le père desdits enfant est un compatriote de l'intéressée qui n'est pas autorisé à résider sur le territoire national ; qu'ainsi, et eu égard à la brièveté du séjour de Mme A...en France, étant par ailleurs précisé que l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant crée seulement des obligations entre États sans ouvrir de droits aux intéressés, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision du préfet de l'Hérault attaquée par laquelle celui-ci l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de 30 jours en fixant son pays d'origine comme pays de destination a méconnu les stipulations conventionnelles applicables et les dispositions législatives citées ci-dessus ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a retiré la décision du 23 novembre 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Montpellier a accordé l'aide juridictionnelle totale à MmeA... ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 75 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, codifiée à l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et des articles 37 et 43 de la même loi, que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de mettre à la charge, à son profit, de la partie perdante que le paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat ; mais que l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de mettre à la charge de la partie perdante la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

11. Considérant que, d'une part, MmeA..., pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'État au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de Mme A...n'a pas demandé que lui soit versée par l'État la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance susvisée du 27 décembre 2012 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier est annulée en tant qu'elle décide le retrait de l'aide juridictionnelle accordée par décision du 23 novembre 2012 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Montpellier.

Article 2 : Le surplus des conclusions en annulation de Mme A...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 13MA004955


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00495
Date de la décision : 19/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Jugements - Composition de la juridiction.

Procédure - Jugements - Frais et dépens - Aide juridictionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe RENOUF
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : SAKO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-12-19;13ma00495 ?
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