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18/12/2014 | FRANCE | N°14MA02638

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2014, 14MA02638


Vu I°), sous le n° 14MA02638, la requête, enregistrée le 17 juin 2014, présentée pour Mme A... D...épouseC..., demeurant..., par MeE... ;

Mme D... épouse C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402299 du 15 mai 2014 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 mai 2014 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi, ainsi que de l'arrêté préfe

ctoral de la même date l'assignant à résidence ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l...

Vu I°), sous le n° 14MA02638, la requête, enregistrée le 17 juin 2014, présentée pour Mme A... D...épouseC..., demeurant..., par MeE... ;

Mme D... épouse C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402299 du 15 mai 2014 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 mai 2014 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi, ainsi que de l'arrêté préfectoral de la même date l'assignant à résidence ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision du refus d'accorder un délai de départ volontaire et de lui donner un délai de départ suffisant pour permettre à la famille de trouver un autre pays d'accueil ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me E...d'une somme de 1 500 euros TTC en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

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Vu II°), sous le n° 14MA02639, la requête, enregistrée le 17 juin 2014, présentée pour M. B... C..., demeurant..., par Me E... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402298 du 15 mai 2014 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 mai 2014 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi, ainsi que de l'arrêté préfectoral de la même date l'assignant à résidence ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision du refus d'accorder un délai de départ volontaire et de lui donner un délai de départ suffisant pour permettre à la famille de trouver un autre pays d'accueil ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me E...d'une somme de 1 500 euros TTC en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu les décisions du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2014 le rapport de M. Haïli, premier conseiller ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 10 décembre 2014, présentées pour l'Etat, représenté par la préfète des Pyrénées-Orientales ;

1. Considérant que les requêtes susvisées présentées par Mme D...épouse C...et M. C...présentent à juger des questions connexes et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les épouxC..., se déclarant de nationalité russe tchétchène, sont entrés irrégulièrement sur le territoire français le 21 octobre 2010 et ont sollicité le bénéfice de l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, OFPRA, le 8 juin 2011 ; que par courriers du 24 mars 2011, le préfet du Gard, indiquant que les intéressés faisant l'objet d'une décision de remise aux autorités polonaises dans le cadre de leurs demandes d'asile, avait mis fin à la rétention administrative dont ils faisaient l'objet, en raison de l'état de santé de Mme C...qui ne lui permettait pas de voyager, et avait invité celle-ci à déposer un dossier en qualité d'étranger malade ; que l'OFPRA a rejeté leurs demandes d'asile le 30 novembre 2011 et que ces décisions ont été confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 28 septembre 2012 ; que par arrêtés du 5 novembre 2012, le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé aux époux la délivrance d'un premier titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné la Russie comme pays de renvoi ; que saisi d'une demande de réexamen au titre de l'asile par chacun des épouxC..., par décisions du 13 novembre 2012 le préfet des Pyrénées-Orientales leur a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au titre de l'asile et a transmis leurs demandes à l'OFPRA pour qu'il statue selon la procédure prioritaire ; que ces demandes de réexamen ont été rejetées par l'OFPRA par des décisions du 20 décembre 2012 que la Cour nationale du droit d'asile a confirmées le 7 novembre 2013 ; que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté, par deux jugements du 12 avril 2013, leurs recours dirigés contre les arrêtés du 5 novembre 2012 et les décisions du 13 novembre 2012 ; que par son arrêt n°s 13MA01854, 13MA01855 également du 18 décembre 2014, la Cour a rejeté leurs appels dirigés contre ces jugements ; que M. et MmeC..., qui ont eu une fille le 31 juillet 2013, relèvent régulièrement appel des jugements du 15 mai 2014 par lesquels le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 12 mai 2014, par lesquels le préfet des Pyrénées-Orientales les a obligés à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi ;

Sur la légalité des arrêtés du 12 mai 2014 en tant qu'ils portent obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant que M. et Mme C...soutiennent " qu'ils ont été assignés à résidence sans qu'il y ait un placement en rétention administrative pour se voir notifier l'obligation de quitter le territoire et l'assignation à résidence, sans avoir les garanties attachés à cette procédure dont notamment l'assistance d'un interprète et d'un avocat et de pouvoir faire prévenir une personne de son choix de sorte qu'il y a eu une méconnaissance du principe de loyauté et un détournement de la loi qui a abouti à l'édiction de l'obligation de quitter le territoire " ; que les époux C...ne sauraient utilement se plaindre de ne pas avoir fait l'objet d'une mesure de placement en rétention administrative, à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les obligations de quitter le territoire français dont ils ont fait l'objet le 12 mai 2014 ;

4. Considérant que les requérants, qui déclarent être entrés en France en 2010, soit à l'âge de vingt et un et vingt-six ans, après avoir vécu l'essentiel de leurs vies personnelles et sociales dans leur pays d'origine, ne démontrent pas ne plus avoir d'attaches personnelles et familiales en Russie, ni la centralité et l'intensité de leurs intérêts privés et familiaux en France, eu égard aux conditions irrégulières et à la durée de leur séjour en France ; que la circonstance qu'une enfant est née de leurs oeuvres en France en 2013, n'est de nature à établir ni une erreur manifeste d'appréciation des conséquences des décisions les obligeant à quitter le territoire français sur leurs situations, ni une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, alors que ces décisions n'emportent aucune séparation au sein de la cellule familiale, laquelle peut se reconstituer en dehors du territoire français, notamment en Russie, qui est leur pays d'origine commun ; que par ailleurs, si les requérants font valoir que Mme A...C...souffre de troubles psychiques liés au stress post-traumatique résultant des évènements vécus en Tchétchénie, l'intéressée n'a présenté aucune demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que les pièces versées aux débats n'attestant pas avec certitude de la cause réelle de ces troubles et alors que les requérants n'établissent pas que cette pathologie ne pourrait pas être prise en charge dans leur pays d'origine, le préfet des Pyrénées-Orientales n'a pas méconnu l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoit que " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

Sur la légalité des arrêtés du 12 mai 2014 en tant qu'ils n'accordent pas un délai de départ volontaire :

5. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine (...). Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...)d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement. f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 " ;

6. Considérant que, pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire, le préfet a estimé que " les risques de fuite sont avérés " en se fondant sur le d) et le f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les requérants s'étant déjà soustraits à l'exécution des mesures d'éloignement notifiées le 5 novembre 2012 et ne présentant aucune garantie de représentation suffisante en l'absence de possession d'un document de voyage ou d'identité en cours de validité, ils se trouvaient dans la situation où, en application de ces dispositions, le préfet pouvait légalement décider de ne pas leur octroyer de délai de départ volontaire, en raison du risque qu'ils se soustraient à leurs obligations de quitter le territoire français ; que le moyen tiré de l'absence de fondement de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire doit, dès lors, être écarté ;

Sur la légalité des arrêtés du 12 mai 2014 en tant qu'ils fixent le pays de destination :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que ces dispositions font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger, faisant l'objet d'une mesure d'éloignement, un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les demandes d'asile présentées par les requérants ont été rejetées, le 30 novembre 2011 et le 30 décembre 2012 par l'OFPRA, et que ces décisions ont été confirmées le 28 septembre 2012 et le 7 novembre 2013 par la Cour nationale du droit d'asile, ces juridictions ayant relevé le caractère trop peu crédible des allégations et des craintes invoquées par les demandeurs ; qu'il n'est pas établi qu'en fixant le pays de renvoi, le préfet des Pyrénées-Orientales se serait estimé lié par ces décisions ; que, cependant, les intéressés soutiennent être en droit de se prévaloir des dispositions de la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 qui imposent à l'autorité saisie d'une demande d'asile de s'informer, avant de statuer, de la situation générale du pays d'origine ; que les requérants font valoir qu'il résulte d'un rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés qu'une répression massive et des violations persistantes de droits humains seraient pratiquées dans le Caucase du Nord, et que les personnes de retour de l'étranger seraient particulièrement menacées ; que, toutefois, ces éléments généraux d'information ne sont pas, par eux-mêmes, de nature à établir la réalité de menaces personnelles et actuelles à l'encontre des requérants en cas de retour dans leur pays d'origine ; qu'il s'ensuit que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que les décisions par lesquelles le préfet des Pyrénées-Orientales a fixé la Russie comme pays de destination des mesures d'éloignement seraient intervenues en méconnaissance des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur leurs situations personnelles ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions de leur avocat tendant au bénéfice des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme D... épouse C...et de M. C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...épouseC..., à M. B... C..., à Me E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à Madame la préfète des Pyrénées Orientales.

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Nos 14MA02638, 14MA02639


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02638
Date de la décision : 18/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SUMMERFIELD ; SUMMERFIELD ; SUMMERFIELD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-12-18;14ma02638 ?
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