Vu, I, la requête, enregistrée par télécopie le 21 mai 2013, régularisée le 27 mai 2013, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 13MA01951, présentée pour la commune de Peynier (13790), représentée par son maire en exercice, par Me Guin, avocat ;
La commune de Peynier demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1205724 du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision en date du 18 juillet 2012 par laquelle le directeur de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur a exercé son droit de préemption sur des parcelles situées sur le territoire de la commune ;
2°) de rejeter la demande tendant à l'annulation de la décision précitée présentée par la SARL " les Jardins de Philia " ;
3°) de mettre à la charge de la SARL " les Jardins de Philia " la somme de 1 792 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, II, la requête, enregistrée le 22 mai 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le numéro 13MA01967, présentée pour l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur, ayant son siège 62/64 La Canebière à Marseille (13001), par Me Journault, avocat ;
L'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1205724 du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision en date du 18 juillet 2012 par laquelle le directeur de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur a exercé son droit de préemption sur des parcelles situées sur le territoire de la commune de Peynier ;
2°) de rejeter la demande tendant à l'annulation de la décision précitée présentée par la SARL " les Jardins de Philia " ;
3°) de mettre à la charge de la SARL " les Jardins de Philia " la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2014 :
- le rapport de M. Gonneau, rapporteur ;
- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;
- et les observations de Me B... substituant Me Guin pour la commune de Peynier, de Me Journault pour l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur et de Me A... pour la SARL " les Jardins de Philia " ;
1. Considérant que la commune de Peynier et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur demandent l'annulation du jugement n° 1205724 du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille, à la demande de la société " les Jardins de Philia ", a annulé la décision en date du 18 juillet 2012 par laquelle le directeur de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur a exercé son droit de préemption sur des parcelles situées sur le territoire de la commune ;
2. Considérant que les requêtes susvisées tendent à l'annulation d'un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. " ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ; que, lorsque la loi autorise la motivation par référence à un programme local de l'habitat, les exigences résultant de l'article L. 210-1 doivent être regardées comme remplies lorsque la décision de préemption se réfère à une délibération fixant le contenu ou les modalités de mise en oeuvre de ce programme, et qu'un tel renvoi permet de déterminer la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement que la collectivité publique entend mener au moyen de cette préemption ; qu'à cette fin, la collectivité peut soit indiquer la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement du programme local de l'habitat à laquelle la décision de préemption participe, soit se borner à renvoyer à la délibération si celle-ci permet d'identifier la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement poursuivie, eu égard notamment aux caractéristiques du bien préempté et au secteur géographique dans lequel il se situe ;
5. Considérant que la décision du 18 juillet 2012 du directeur de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur visait la convention conclue entre la communauté d'agglomération du Pays d'Aix et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur relative aux acquisitions foncières et aux portages fonciers sur le territoire communautaire aux fins de réaliser des logements, à laquelle la commune a adhéré le 12 juillet 2012, en désignant les parcelles en litige comme périmètre d'intervention de l'établissement public foncier ; que cette même décision vise la délibération du conseil municipal de Peynier du 11 juillet 2012 délégant à l'établissement public foncier le droit de préemption urbaine aux motifs que " cette acquisition représente une opportunité foncière qui permettra de mettre en oeuvre la politique locale de l'habitat poursuivie par la commune en accompagnement de la démarche de PLH engagée sur le territoire communautaire. " ; que la décision rappelle la situation de pénurie foncière de la commune de Peynier, l'objectif de constitution de réserves foncières du programme local de l'habitat de la communauté d'agglomération du Pays d'Aix, qui identifie des besoins à hauteur de 310 logements par an pour la vallée de l'Arc dont fait partie Peynier, la circonstance que la commune de Peynier est proche du seuil d'éligibilité de la loi " Solidarité et renouvellement urbain ", que le plan local d'urbanisme de cette commune a été annulé et que les parcelles en cause sont classées en zone NA, que la commune de Peynier s'est fixée pour objectif d'accueillir 74 logements sociaux sur son territoire en 2020 et enfin que l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur a engagé les études de faisabilité nécessaires à la réalisation de logements ; que le programme local de l'habitat de la communauté d'agglomération du Pays d'Aix approuvé le 14 octobre 2005 pour la période 2005-2010 avait pour objectif de constituer des réserves foncières dans la vallée de l'Arc et d'y développer l'offre de logements sociaux ; que le projet de programme local de l'habitat pour l'année 2011 fait état de l'objectif de la commune de Peynier quant au nombre de logements sociaux à accueillir sur son territoire en 2020 ;
6. Considérant que le programme local de l'habitat de la communauté d'agglomération du Pays d'Aix ne mentionne toutefois, quant à lui, aucune action ou opération d'aménagement à mener sur le territoire de la commune de Peynier, en se bornant, dans sa dernière version non applicable, au surplus, à la date de la décision de préemption, à mentionner, en ce qui concerne cette commune, un objectif général en terme de nombre de logements ; que le conseil municipal de la commune de Peynier n'a délibéré ni pour fixer le contenu ou les modalités de mise en oeuvre de ce programme local de l'habitat, ni pour définir le cadre des actions qu'elle aurait entendu mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux ; que ni la convention conclue entre la communauté d'agglomération du Pays d'Aix et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur relative aux acquisitions foncières et aux portages fonciers sur le territoire communautaire, ni la convention d'adhésion de la commune de Peynier ne font état d'action ou d'opération d'aménagement à fin de construire des logements locatifs sociaux ; que les seules intentions ou les objectifs généraux de la commune de Peynier en matière de logements sociaux ne peuvent constituer l'objet de la préemption au sens des dispositions précitées ; qu'ainsi ni la commune, ni l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur, ne justifient de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement auquel le bien préempté aurait concouru ; que c'est ainsi à bon droit que le tribunal a jugé que la décision du 18 juillet 2012 méconnaissait les dispositions de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;
7. Considérant que pour juger que la décision du 18 juillet 2012 était de plus entachée d'un détournement de procédure, le tribunal s'est référé à la chronologie des faits de l'espèce et en a déduit que la préemption n'avait été mise en oeuvre que dans le but exclusif de faire échec à la réalisation du projet de construction sur le terrain préempté porté par la société " les Jardins de Philia " ; que ces seuls éléments ne suffisent pas toutefois à démontrer que la commune de Peynier n'aurait poursuivi que cet objectif à l'occasion de cette procédure de préemption ;
8. Considérant qu'il résulte toutefois de ce qui précède que la commune de Peynier et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 18 juillet 2012 ;
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Peynier et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur à verser chacun à la société " les Jardins de Philia " une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que soit mise à la charge de la société " les Jardins de Philia ", qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent la commune de Peynier et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes présentées par la commune de Peynier et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur sont rejetées.
Article 2 : La commune de Peynier versera à la SARL " les Jardins de Philia " une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : L'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur versera à la SARL " les Jardins de Philia " une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Peynier, à l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur et à la SARL " les Jardins de Philia ".
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N° 13MA01951-13MA01967