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16/12/2014 | FRANCE | N°13MA00525

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 16 décembre 2014, 13MA00525


Vu la requête, enregistrée le 6 février 2013, présentée pour la SELARL Centre médical subaquatique, représentée par son gérant, dont le siège est situé 36 boulevard de l'Océan, à Marseille (13009), par MeD... ;

La SELARL Centre médical subaquatique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104812 en date du 11 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé du 24 février 2011, confirmée par décision du 24 mai 2011 prise sur recours g

racieux, refusant de lui délivrer un agrément pour procéder à la formation à la séc...

Vu la requête, enregistrée le 6 février 2013, présentée pour la SELARL Centre médical subaquatique, représentée par son gérant, dont le siège est situé 36 boulevard de l'Océan, à Marseille (13009), par MeD... ;

La SELARL Centre médical subaquatique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104812 en date du 11 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé du 24 février 2011, confirmée par décision du 24 mai 2011 prise sur recours gracieux, refusant de lui délivrer un agrément pour procéder à la formation à la sécurité des travailleurs intervenant en milieu hyperbare, ainsi que ses conclusions tendant à l'allocation d'une provision et celles tendant à ce qu'il soit fait injonction au ministre de réexaminer sa situation ;

2°) d'annuler les décisions du 24 février 2011, du 24 mai 2011 ainsi que la décision du 29 novembre 2011 rejetant sa demande indemnitaire ;

3°) de lui accorder la somme provisionnelle de 40 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des décisions du 24 février 2011 et du 24 mai 2011 ;

4°) d'enjoindre au ministre de réexaminer sa demande sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 à L. 911-3 du code de justice administrative, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 400 euros par jour de retard à l'issue de ce délai ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 90-277 du 28 mars 1990 relatif à la protection des travailleurs intervenant en milieu hyperbare, et notamment ses articles 3 et 32 ;

Vu l'arrêté du 28 janvier 1991 définissant les modalités de formation à la sécurité des personnels intervenant dans des opérations hyperbares ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Paix, président assesseur ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., pour la SELARL Centre médical subaquatique ;

1. Considérant que la SELARL Centre médical subaquatique, qui a pour objet l'organisation et l'expertise au travail subaquatique et hyperbare et l'étude des maladies professionnelles et des accidents spécifique, a déposé le 25 octobre 2010 une demande d'agrément pour la formation à la sécurité - mentions C et D - des travailleurs intervenant en milieu hyperbare ; qu'après instruction de cette demande, un refus d'agrément a été notifié à la société le 24 février 2011, confirmée sur recours gracieux de l'intéressée, par lettre du 24 mai 2011 ; que la SELARL Centre médical subaquatique interjette appel du jugement du 11 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de ces deux décisions et a rejeté l'ensemble de ses autres conclusions ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions des 24 février 2011 et 24 mai 2011 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret n° 90-277 du 28 mars 1990 : " Les travaux en milieu hyperbare ne peuvent être effectués que par des travailleurs titulaires d'un certificat d'aptitude à l'hyperbarie approprié à la nature des opérations et détenteurs d'un livret individuel. II. - Ce certificat d'aptitude indique l'une des classes ou sous-classes de travaux hyperbares auxquelles le travailleur a accès et mentionne l'activité qu'il est habilité à pratiquer en hyperbarie. (...) Un arrêté des ministres chargés du travail, de l'agriculture et de la mer fixe la liste des mentions d'activité ainsi que les modalités d'obtention du certificat d'aptitude à l'hyperbarie et les conditions dans lesquelles est assurée la formation correspondant à chacune de ces mentions (....) " ; que l'article 4 de l'arrêté du 28 janvier 1991 définissant les modalités de formation à la sécurité des personnels intervenant dans des opérations hyperbares, applicable à l'espèce, prévoit que " La formation des travailleurs intervenant en milieu hyperbare a pour but de leur permettre d'exercer leur activité dans le respect des règles de sécurité individuelle et collective. A cette fin, les programmes pédagogiques distingueront ce qui relève de l'accès à une classe ou à une sous-classe de pression et qui, par conséquent, sera commun à toutes les activités, de l'enseignement spécifique à chaque mention. L'enseignement commun a pour objet, à une pression donnée, de doter le candidat des connaissances théoriques et pratiques indispensables à son accès, son maintien et sa sortie du milieu hyperbare. L'enseignement relatif à chaque mention s'attachera à illustrer les principes généraux de chaque classe d'hyperbarie en fonction des matériels et des procédures propres à chaque activité faisant l'objet d'une mention (...) " ; que l'article 5 du même arrêté prévoit que " les organismes habilités à dispenser la formation des travailleurs intervenant en milieu hyperbare en vue de l'obtention du certificat d'aptitude à l'hyperbarie sont agréés par arrêté des ministres chargés du travail et de l'agriculture après avis de la commission spécialisée du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels en matière de risques chimiques, biologiques et de ceux résultant des ambiances physiques et de la commission nationale d'hygiène et de sécurité du travail en agriculture. L'organisme doit être en mesure de s'assurer que les candidats à la certification sont aptes au sens de l'article 33 du décret n° 90-277 du 28 mars 1990 susvisé (...) " ;

3. Considérant que le refus d'agrément opposé à la SELARL Centre médical subaquatique a été pris par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la santé après avis de la commission spécialisée relative à la prévention des risques pour la santé au travail du conseil d'orientation sur les conditions de travail rendu le 14 décembre 2010 ; que la décision du 24 février 2011 mentionne que " afin de fonder les décisions d'agrément ou de refus, la direction générale du travail s'appuie sur l'expertise technique d'un organisme spécialisé dans la même spécialité, en l'espèce l'Institut national de la plongée professionnelle (INPP). Or le service instructeur a relevé que votre organisme ne dispose pas d'une structure et des compétences pour assurer les formations en mentions C et D. " ; que la SELARL Centre médical subaquatique soutient que l'INPP, lui-même agréé pour dispenser la formation à la sécurité des travailleurs intervenant en milieu hyperbare étant en situation de concurrence directe avec elle-même, l'avis qu'il a émis à son encontre n'aurait pas été impartial ;

4. Considérant que le principe d'impartialité, qui garantit aux administrés que toute autorité administrative, individuelle ou collégiale est tenue de traiter leurs affaires sans préjugés ni partis pris, doit être respecté durant l'intégralité de la procédure d'édiction des décisions ; que la décision du 24 février 2011 a été prise, comme il a été indiqué au point précédent après avis du conseil d'orientation sur les conditions de travail (COCT) ; qu'il est constant que cet organisme s'est fondé, ainsi que cela est mentionné, sur l'avis émis par l'INPP ; qu'il résulte des pièces du dossier que l'INPP, qui a été consulté en tant qu'expert, intervient dans le même secteur d'activité que le Centre médical subaquatique, dans deux arrondissements proches de Marseille ; que le directeur de l'INPP et M. A...entretiennent de longue date des désaccords sur des sujets professionnels ; que, de plus, le compte rendu de la séance du 14 décembre 2010 établit que certains membres de la commission spécialisée du COCT ont soulevé la question de l'indépendance et de la transparence de la procédure, en raison de la présence d'un membre de l'INPP sans qu'il n'en ait été tenu compte ;

5. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;

6. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point 4, la demande d'avis à l'INPP, qui a été consulté en tant qu'expert, a privé la SELARL Centre médical subaquatique d'une garantie d'impartialité à laquelle elle était en droit de prétendre dans l'examen de sa demande ; qu'en outre la rédaction de la décision montre que cet avis a eu une influence sur la décision ministérielle ; qu'il en résulte que la SELARL Centre médical subaquatique est fondée à soutenir que la procédure suivie est irrégulière et que cette irrégularité entache de nullité les décisions du 24 février 2011 et du 24 mai 2011 ;

Sur les conclusions indemnitaires de la SELARL Centre médical subaquatique :

7. Considérant que, pour refuser l'agrément sollicité par la SELARL Centre médical subaquatique, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la santé s'est fondé sur la circonstance que l'organisme ne disposait pas d'une structure et des compétences pour assurer seul les formations en mentions C et D ; qu'il a relevé l'absence de caisson thérapeutique et d'environnement hospitalier nécessaire pour les stagiaires en mention C et l'insuffisance de l'effectif des formateurs en ce qui concerne la mention D ; que la SELARL Centre médical subaquatique conteste chacun de ces motifs ; que la circonstance que la société requérante a, par arrêté du 15 mars 2012, obtenu un agrément pour la mention D, jusqu'au 31 décembre 2013 est sans incidence sur la légalité des décisions antérieures ;

8. Considérant, en premier lieu, que s'agissant de l'agrément pour la mention C, la SELARL Centre médical subaquatique soutient qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas disposer de caisson hyperbare thérapeutique, dès lors que, dans sa demande, elle indiquait utiliser les caissons thérapeutiques des clients demandeurs pour effectuer les formations ; que si l'absence de possession d'un tel caisson ne suffit pas à justifier le refus de la formation, la SELARL Centre médical subaquatique ne justifie pas qu'elle aurait la possibilité d'accéder à ces équipements, notamment par convention passée avec des partenaires ; que, la mention C étant notamment destinée au personnel hospitalier, la SELARL Centre médical subaquatique devait pouvoir justifier d'un tel équipement même si, au demeurant, ses formations s'adressaient en priorité davantage au personnel de chantier qu'au personnel hospitalier ; que, dans ces conditions, l'absence de précision sur le matériel utilisé a pu à bon droit être opposée à la société requérante ;

9. Considérant, en second lieu, que, s'agissant du personnel qualifié, et si la compétence du Dr A...n'est nullement en cause, la demande du 25 octobre 2010 indique que la formation sera assurée par lui-même et par deux salariées du centre, MmeB..., infirmière diplômée d'Etat, titulaire d'un certificat d'aptitude à l'hyperbarie, et l'épouse du DrA..., titulaire du 2ème échelon de plongée ; que l'attestation du 18 octobre 1991 indiquant que Mme B...a suivi une formation de 10 jours d'infirmier hyperbariste et a obtenu une attestation de stage d'infirmier d'Etat spécialisé en hyperbarie est insuffisante pour justifier sa compétence en tant que formateur ; que Mme A...n'a aucune compétence particulière en hyperbarie ; que ce motif de refus pouvait donc également justifier le refus d'agrément opposé à la SELARL Centre médical subaquatique ;

10. Considérant que la SELARL Centre médical subaquatique demande l'indemnisation du préjudice subi du fait de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de réaliser des formations en mention C et D ; que toutefois, si l'intervention d'une décision illégale constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité de la personne publique, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cadre d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 8 et 9 que les refus d'agrément opposés à la SELARL Centre médical subaquatique, pris à la suite d'une procédure irrégulière, étaient cependant fondés ; que dès lors les conclusions indemnitaires de la SELARL Centre médical subaquatique ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Considérant que la procédure d'agrément ayant été remplacée par une procédure de certification, les conclusions présentées par la SELARL Centre médical subaquatique tendant à ce qu'il soit fait droit à sa demande d'agrément sont sans objet ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SELARL Centre médical subaquatique est seulement fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille, qui a suffisamment répondu à l'ensemble de ses moyens, en tant que ce jugement rejette sa demande d'annulation des décisions des 24 février 2011 et 24 mai 2011 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; qu'il y a lieu d'accorder à la SELARL Centre médical subaquatique la somme de 2 000 euros en application de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : Les décisions du 24 février 2011 et du 24 mai 2011 du ministre du travail de l'emploi et de la santé sont annulées.

Article 2 : Le jugement n° 1104812 du tribunal administratif de Marseille du 11 décembre 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt

Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la SELARL Centre médical subaquatique en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SELARL Centre médical subaquatique est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Centre médical subaquatique et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N° 13MA00525 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00525
Date de la décision : 16/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-032 Travail et emploi. Réglementations spéciales à l'emploi de certaines catégories de travailleurs.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : W., J.-L. et R. LESCUDIER - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-12-16;13ma00525 ?
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