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07/11/2014 | FRANCE | N°13MA03940

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 07 novembre 2014, 13MA03940


Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2013, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 13MA03940, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me E...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304002 du 6 septembre 2013 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de l'Hérault du 31 juillet 2013 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

2°) d'annuler

la décision préfectorale attaquée ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui ...

Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2013, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 13MA03940, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me E...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304002 du 6 septembre 2013 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de l'Hérault du 31 juillet 2013 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

2°) d'annuler la décision préfectorale attaquée ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un titre provisoire de séjour et de statuer sur sa demande de titre de séjour dans le mois suivant la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 9 octobre 1987 entre la République française et le royaume du Maroc en matière de séjour et de l'emploi, entré en vigueur le 1er janvier 1994 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2014 :

- le rapport de M. Pecchioli, rapporteur,

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., de nationalité marocaine, relève appel de l'ordonnance en date du 6 septembre 2013 par laquelle le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 31 juillet 2013 par lesquelles le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) / 7º Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. / (...) " ;

3. Considérant que, pour contester devant le tribunal administratif de Montpellier les décisions du préfet de l'Hérault en date du 31 juillet 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, M. C... a soulevé, d'une part, des moyens de légalité externe notamment tirés de l'incompétence du signataire de ces décisions et de l'insuffisance de motivation et, d'autre part, des moyens de légalité interne notamment tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, faisant notamment valoir qu'il résidait sur le territoire national depuis 2001 et qu'en dépit d'un retour au Maroc pendant quelques mois en 2009, il a construit l'essentiel de sa vie en France et plus particulièrement à Montpellier, s'étant marié avec une ressortissante d'un Etat membre de la communauté européenne, de nationalité hollandaise, avec laquelle il vit et a eu un enfant ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même qu'il ne s'appuyait que sur des pièces justificatives d'identités, était assorti des précisions suffisantes permettant au juge d'exercer son office ; que, dans ces conditions, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ne pouvait, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, rejeter la demande de M. C...par application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l'ordonnance du président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Montpellier en date du 6 septembre 2013 doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande présentée par M. C... tendant à l'annulation de la décision en date du 31 juillet 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui octroyer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2013 I 1071 entrant en vigueur le 17 juin 2013, régulièrement publié au Recueil des actes administratifs du département du 10 juin 2013, le préfet de l'Hérault a donné à Mme D...B..., sous-préfet, délégation pour signer toutes décisions notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que le refus de titre énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire est suffisamment motivée dès lors qu'elle a été prise consécutivement à un refus de titre de séjour qui est lui-même suffisamment motivé et qu'elle vise les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté en litige doit être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que si M. C...soutient que l'arrêté litigieux du 31 juillet 2013 est fondé sur de nombreux éléments de faits inexacts concernant sa situation familiale, le préfet n'ayant pas tenu compte de la communauté de vie avec son épouse et de l'existence d'un enfant à charge, les visas dudit arrêté mentionnent bien ces éléments ; qu'ainsi il n'en résulte pas que le préfet aurait fondé sa décision sur des éléments erronés ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que toutefois l'arrêté litigieux, qui n'a pas pour effet, par lui-même, de séparer M. C...de son enfant, n'a pas méconnu les stipulations précitées ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : [...]11° Le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ainsi que les membres de sa famille, qui bénéficient du droit au séjour permanent prévu par l'article L. 122-1 " ; que ledit article L. 122-1 dispose que " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant visé à l'article L. 121-1 qui a résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes acquiert un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français. Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de sa famille mentionné à l'article L. 121-3 acquiert également un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français à condition qu'il ait résidé en France de manière légale et ininterrompue avec le ressortissant visé à l'article L. 121-1 pendant les cinq années précédentes. Une carte de séjour d'une durée de validité de dix ans renouvelable de plein droit lui est délivrée " ;

10. Considérant qu'à la date d'intervention de l'arrêté contesté, soit le 31 juillet 2013, M. C...ne justifiait pas résider en France de manière légale et ininterrompue avec son épouse pendant les cinq années précédentes, étant entré en France en 2009, après s'être marié au Maroc, et ne se prévalant, sans l'établir, d'une durée de vie commune de seulement quatre années ; que M.C..., ne remplissant pas les conditions posées par l'article L. 122-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne saurait valablement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 511-4 11° dudit code pour soutenir qu'il ne pourrait faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en tant qu'il est l'époux d'une ressortissante d'un Etat membre de la communauté européenne ;

11. Considérant, en sixième lieu, que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié" éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) " ; qu'aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 311-7 du code susmentionné : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ;

12. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté litigieux que, pour rejeter la demande de titre de séjour en qualité de salarié présentée par M.C..., le préfet de l'Hérault s'est fondé sur la circonstance que ce dernier ne justifiait pas être titulaire d'un visa de long séjour ; qu'il résulte de la combinaison des textes précités que si la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est régie par les stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, la délivrance à un ressortissant marocain du titre de séjour " salarié " prévu à l'article 3 de ce texte est subordonnée, en vertu de son article 9, à la condition, prévue à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la production par ce ressortissant d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que, dès lors, et en tout état de cause, c'est à bon droit que le préfet de l'Hérault a également opposé l'absence de production de visa de long séjour à la demande de M. C... ;

13. Considérant, en septième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui "

14. Considérant que si M. C... fait valoir qu'il réside avec son épouse et son enfant en France, il ne le justifie pas par les pièces produites ; que, par suite, la décision de refus de titre n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, M. C... n'est pas davantage fondé à soutenir que cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2013 en litige ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées par M. C... en vue de l'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2013 du préfet de l'Hérault, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

18. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1304002 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier en date du 6 septembre 2013 est annulée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. C... devant le tribunal administratif de Montpellier et tendant à l'annulation de la décision en date du 31 juillet 2013 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...C....

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 13MA03940


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03940
Date de la décision : 07/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Jean-Laurent PECCHIOLI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : CHAIGNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-11-07;13ma03940 ?
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