Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2013, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par MeC... ;
Mme B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1203852 du 18 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 octobre 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et en fixant la Biélorussie comme pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2014, le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur ;
1. Considérant que, par jugement en date du 18 février 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de MmeB..., de nationalité biélorusse, tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 octobre 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ladite décision d'une obligation de quitter le territoire français et en fixant la Biélorussie comme pays de destination ; que Mme B...relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que Mme B...soutient que les premiers juges auraient écarté à tort certains de ses arguments, liés à l'existence de son activité salariée qui justifiaient, selon elle, que l'administration procède à une nouvelle instruction de sa demande, à la suite d'un moyen d'ordre public qui lui a été communiqué ; que s'il ressort des pièces du dossier de première instance qu'un moyen a été soulevé d'office, le 14 janvier 2013, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requérante tendant au réexamen de sa demande de titre de séjour sur la base des conditions posées par la circulaire N° INTK1229185C du ministre de l'intérieur en date du 28 novembre 2012, il résulte de la lecture du jugement attaqué que de telles conclusions ont en réalité été rejetées par voie de conséquence du rejet des conclusions de Mme B...tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté préfectoral du 12 octobre 2012, ce qui n'impliquait aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité au motif que les premiers juges auraient analysé à tort ses conclusions comme une demande nouvelle irrecevable ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ;
4. Considérant que MmeB..., qui déclare être entrée en France à la fin de l'année 2006, a formé une demande d'asile politique en janvier 2007, qui a été rejetée de façon définitive par la Cour nationale du droit d'asile le 17 juillet 2009 ; qu'elle a fait l'objet d'une première décision de refus de séjour, par un arrêté du 2 avril 2010 du préfet des Alpes-Maritimes assorti d'une obligation de quitter le territoire français, avant d'effectuer une nouvelle demande de titre de séjour le 3 août 2012, rejetée à nouveau par l'arrêté en litige ; que l'intéressée qui, selon ses propres déclarations, est célibataire depuis son divorce, a un fils qui réside en Biélorussie tandis que ses parents résident dans une zone russe frontalière de la Biélorussie, ne soutient pas avoir des membres de sa famille en France ; que si sa présence habituelle sur le territoire national est établie à compter de l'année 2008 et si elle fait valoir qu'elle y a noué des relations amicales, qu'elle a suivi des cours de français et qu'elle est bien intégrée dans la société française, ces seules circonstances ne sont pas suffisantes pour considérer qu'elle a établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France ; qu'enfin, la requérante n'établit pas être dépourvue d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu au mieux jusqu'à l'âge de quarante ans ; que dès lors, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté et n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'enfin, pour les mêmes raisons, le préfet n'a pas davantage entaché son appréciation d'une erreur manifeste au regard des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de MmeB..., alors même qu' elle dispose de promesses d'embauche et soutient avoir toujours travaillé depuis 2007, sans l'établir au demeurant ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B...soutient que le préfet a commis une erreur de fait en indiquant dans son arrêté qu'elle " ne démontre pas résider en France de manière continue depuis 2007 par la production de documents probants " ; que toutefois, à supposer que l'intéressée ait communiqué, à l'appui de sa demande de titre de séjour, des pièces suffisamment probantes pour établir sa présence en France, cette mention n'est pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté attaqué, dès lors que la décision de refus de séjour est fondée à titre principal sur le fait qu'elle ne justifie pas remplir les conditions posées par les dispositions de l'article L. 311-13 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni aucune des autres conditions de ce code pour être admise au séjour à un autre titre ;
6. Considérant, en troisième lieu, que les articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile disposent que : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). / La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles précités auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;
8. Considérant que Mme B...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
En ce qui concerne la décision fixant la Biélorussie comme pays de destination :
9. Considérant qu'aux termes de l' article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible./ Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; et qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants. " ;
10. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui est obligé de quitter le territoire français de s'assurer, sous le contrôle du juge, en application de l'article L. 513-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si l'autorité administrative est en droit de prendre en considération, à cet effet, les décisions qu'ont prises, le cas échéant, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Commission nationale du droit d'asile (CNDA) saisis par l'étranger de demandes d'asile, l'examen et l'appréciation par ces dernières instances des faits allégués par le demandeur d'un tel statut et des craintes qu'il énonce ne lient pas l'autorité administrative et sont sans influence sur l'obligation qui est la sienne de vérifier, au vu du dossier dont elle dispose, que les mesures qu'elle prend ne méconnaissent pas les dispositions susmentionnées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort de la rédaction de l'arrêté attaqué que si le préfet des Alpes-Maritimes a, en l'espèce, cité les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, il a porté sa propre appréciation sur les faits allégués par Mme B...pour considérer que les risques dont elle se prévalait en cas de retour dans son pays d'origine n'étaient pas avérés ; que par suite, le préfet des Alpes-Maritimes ne s'est pas cru en situation de compétence liée par lesdites décisions, contrairement à ce qui est soutenu ; qu'en outre, il ne ressort pas de cet arrêté que le préfet n'aurait pas examiné les éléments apportés par MmeB..., relatifs aux risques qu'elle encourt en cas de retour en Biélorussie ; qu'enfin, le simple fait d'avoir indiqué, dans l'arrêté attaqué, que le refus de son admission au séjour n'était pas contraire aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, après avoir précisé qu'elle ne prouvait pas être dépourvue d'attaches familiales en Biélorussie, ne signifie pas que le préfet aurait commis une erreur de droit dans l'application des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
12. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que Mme B...fait valoir qu'elle ne peut retourner en Biélorussie, car elle est toujours recherchée par les autorités de son pays, ayant été arrêtée par les services de police pour avoir pris des photographies lors d'une manifestation en 2006, qui auraient ultérieurement servi à la réalisation d'affiches dénonçant les atteintes du régime politique en place aux libertés individuelles, puis ayant été placée sous surveillance en raison de son activité " subversive " contre ce régime ; que toutefois, la réalité des risques qu'elle invoque n'a pas été considérée comme établie par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que, par ailleurs, si la requérante produit plusieurs convocations émanant des services du ministère de l'intérieur de Biélorussie, " pour témoignage " dans le cadre d'une enquête pénale, dont l'une en date du 16 janvier 2009 est antérieure à la décision de la Cour nationale du droit d'asile, ces éléments ne peuvent être regardés comme étant suffisants pour considérer qu'elle serait effectivement et personnellement exposée à une menace grave en cas de retour dans son pays; qu'en outre, ses affirmations, mentionnées en termes généraux, selon lesquelles elle risque également d'être emprisonnée pour sortie illégale du territoire biélorusse, conformément au code pénal de son pays, ne sont assorties d'aucun élément de preuve quant aux conséquences effectives de cette législation sur sa situation personnelle ; que par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant la Biélorussie comme pays de destination, aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
14. Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme B...n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions susvisées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à par Mme B...de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
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N° 13MA01143 4
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