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07/10/2014 | FRANCE | N°12MA00590

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 07 octobre 2014, 12MA00590


Vu la requête, enregistrée le 14 février 2012, présentée pour Mme A... C..., demeurant..., par MeB... ; Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104111 du 6 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui déliv

rer un titre de séjour, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre ...

Vu la requête, enregistrée le 14 février 2012, présentée pour Mme A... C..., demeurant..., par MeB... ; Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104111 du 6 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Cap-Vert relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire (ensemble trois annexes), signé à Paris le 24 novembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu la lettre du 10 juillet 2014 invitant les parties à faire connaître leurs observations sur une substitution de base légale de l'arrêté attaqué ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2014, le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur ;

1. Considérant que, par jugement en date du 6 janvier 2012, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de MmeC..., de nationalité capverdienne, tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ladite décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme C...relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; que selon l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention " salarié " lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. (...) " ; que selon l'article L. 313-14 dudit code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) " ; qu'aux termes de l'article 3.2.3 de l'accord entre la France et le Cap-Vert, entré en vigueur le 11 avril 2011 : " Un titre de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée d'un an renouvelable est délivré à un ressortissant cap-verdien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire métropolitain de la France, de l'un des métiers énumérés en annexe II au présent accord sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi. Cette liste de métiers peut être modifiée par échange de lettres entre les deux Parties. Pour faciliter la formation professionnelle, l'accueil et l'insertion en France des intéressés, le nombre de titres de séjour temporaires mentionnés au premier alinéa du présent paragraphe susceptibles d'être délivrés chaque année par la France à des ressortissants du Cap-Vert est limité à 500 " ;

3. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3.2.3. de l'accord entre la France et le Cap-Vert prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant cap-verdien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ; qu'en faisant application de ces dispositions pour rejeter la demande de MmeC..., le préfet des Alpes-Maritimes en a méconnu le champ d'application ; que, toutefois, les stipulations de l'accord entre la France et le Cap-Vert n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant capverdien qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié ;

4. Considérant que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

5. Considérant que la décision en litige trouve un fondement légal dans l'exercice par le préfet du pouvoir de régularisation discrétionnaire dont il dispose ; que ce fondement peut être substitué au fondement erroné retenu par l'administration ainsi qu'il a été dit au point 3, dès lors que cette substitution ne prive l'intéressée d'aucune garantie procédurale et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation que lorsqu'elle examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant que si Mme C...fait valoir qu'elle exerce une activité professionnelle salariée en France depuis l'année 2006, les bulletins de salaire produits au soutien de cette allégation ne couvrent qu'une partie de la période concernée, notamment en 2006 et 2007, alors qu'elle n'a pas versé aux débats le contrat de travail dont elle affirme être titulaire ; que l'intéressée, entrée en France en février 2004, soutient également qu'elle y résiderait de façon continue depuis lors ; que, toutefois, les éléments qu'elle a versés aux débats pour les années 2004 à 2007, constitués d'avis d'impôt sur les revenus et d'un relevé de compte sur livret faisant apparaître quelques opérations, ne sauraient à eux seuls établir le caractère habituel de son séjour en France pendant cette période ; que si Mme C...fait valoir qu'elle est bien intégrée dans la société française et que ses parents ainsi que son frère et sa soeur résident régulièrement sur le territoire français, l'intéressée, célibataire et sans enfants, ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-huit ans ; qu'ainsi, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pur l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ;

8. Considérant que pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées au point 6, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté au droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté ; que, par suite, il n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; que selon les dispositions de l'article L. 911-3 : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par MmeC..., n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions à fin d'injonction formées par la requérante ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à Mme C...quelque somme que ce soit au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00590
Date de la décision : 07/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-10-07;12ma00590 ?
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