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10/04/2014 | FRANCE | N°13MA01644

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 10 avril 2014, 13MA01644


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 13MA01644, le 26 avril 2013, présentée pour M. A...E..., demeurant..., par MeC... ;

M. E...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205306 du 29 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le dé

lai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignemen...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 13MA01644, le 26 avril 2013, présentée pour M. A...E..., demeurant..., par MeC... ;

M. E...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205306 du 29 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté susvisé du 26 juin 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer dans un délai de 7 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et pendant l'instruction de sa demande un récépissé valant autorisation de séjour et de travail et de prendre une décision dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le paiement de la somme de 1 500 euros à son conseil, MeC..., qui s'engage dans ce cas à renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille du 9 septembre 2013 désignant Mme D...Buccafurri, présidente-assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Lilian Benoit, président de la 1ère chambre ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique modifiée et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2014 :

- le rapport de Mme Buccafurri, présidente-assesseure,

- et les observations de Me F...substituant Me C...pour M.E...;

1. Considérant que M. E..., de nationalité algérienne, est entré en France le 2 juin 2002 sous couvert d'un visa de trente jours et soutient ne plus avoir quitté le territoire national depuis cette date ; que l'intéressé a sollicité aussitôt la reconnaissance du statut de réfugié ; que, toutefois, cette demande a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par une décision du 4 décembre 2003, confirmée par une décision de la cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 17 juillet 2006 ; qu'après avoir fait l'objet, le 19 avril 2007, d'un arrêté de reconduite à la frontière qui n'a pas été mis à exécution, M. E...a sollicité, le 22 juin 2007, la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé et des autorisations provisoires de séjour de 6 mois puis de 3 mois lui ont été délivrées ; que l'intéressé a, par la suite, obtenu trois certificats de résidence, en raison de son état de santé, dont le dernier est arrivé à expiration le 24 décembre 2011 ; que, le 23 novembre 2011, M. E...a sollicité le renouvellement de son titre de séjour ; que, par un arrêté en date du 26 juin 2012, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté cette demande, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que M. E...relève appel du jugement du 29 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2012 précité ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté du 26 juin 2012 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que si M. E...a présenté une demande de renouvellement de titre de séjour sur le fondement de l'article 6 alinéa 1 -7 de l'accord franco-algérien, en raison de son état de santé, il résulte des motifs de l'arrêté en litige que le préfet s'est également fondé pour refuser à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour sur les stipulations de l'article 6 alinéa 1-1 de ce même accord ; que, par suite, M. E...peut utilement contester la légalité de l'arrêté du 26 juin 2012 au regard de ces dernières stipulations ;

4. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que M. E...est entré sur le territoire national le 2 juin 2002 ; que le préfet ne conteste pas la présence continue en France de l'intéressé pour la période courant d'avril 2007, date de son interpellation, à la date de l'arrêté contesté dans la présente instance ; que si le préfet fait toutefois valoir que M. E... s'est rendu dans son pays d'origine en 2011 pour épouser, le 1er septembre 2011, une ressortissante algérienne, il ressort des pièces du dossier, notamment de la demande de regroupement familial déposée par M.E..., le 18 octobre 2011, ainsi que des justificatifs, versés au dossier par l'intéressé dont notamment des factures d'électricité, des relevés de comptes bancaires faisant état de retraits au cours du mois de novembre 2011, que ce séjour d'une durée inférieure à deux mois n'a pas eu pour effet de mettre fin au séjour habituel de l'intéressé, durant cette période ;

5. Considérant, en outre, que, pour la période courant de juin 2002 à avril 2007, il ressort des pièces du dossier, notamment des justificatifs nouveaux produits en appel par l'intéressé, que M. E...établit sa présence en France entre juin et décembre 2002, pour chacun des mois de cette période, à l'exception du mois de juillet, notamment par un courrier de convocation à la préfecture des Bouches-du-Rhône, des attestations d'hébergements établies par une association d'hébergement d'urgence et un courrier adressé par l'OFPRA ; que, pour l'année 2003, le requérant établit sa présence continue en France entre août et décembre 2003, notamment par la production de la décision de rejet de l'OFPRA du 4 décembre 2003, une attestation de domiciliation administrative établie par la Croix Rouge Française en novembre 2003, un récépissé de dépôt d'une demande de statut de réfugié déposée le 18 août 2003, un avis de paiement de l'allocation d'insertion émanant des ASSEDIC pour le mois d'octobre, des relevés de prestations d'assurance maladie en, septembre, octobre, novembre et décembre 2003, un accusé de réception postal d'un pli retiré par l'intéressé en octobre 2003, une attestation de domiciliation à Bastia de septembre 2003, un justificatif d'ouverture d'un Livret A délivré par la Poste en août 2003 et un accusé de réception d'un courrier à cette même date ; qu'il en va de même, pour la période allant de janvier à août 2003, période pour laquelle M. E...a produit des pièces nouvelles en appel dont notamment un accusé de réception postal d'un pli qu'il avait adressé à l'OFPRA en juillet 2003, un courrier notifié en juillet 2003 émanant de la préfecture des Bouches-du-Rhône, une ordonnance médicale de mars 2003, une déclaration de ressources déposée aux ASSEDIC en juin 2003, des courriers émanant de la préfecture et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) établis en janvier 2003 ; que, si, pour cette dernière période, le requérant n'a pas produit de pièces pour les mois de février et avril 2003, cette circonstance, qui ne concerne que deux mois dans l'année considérée, n'est pas de nature à remettre en cause la permanence de la présence en France de M.E... ; que, s'agissant de l'année 2004, M. E...établit, notamment par la production de bulletins de paie, de convocations adressées par la préfecture des Bouches-du-Rhône, des relevés de prestations d'assurance maladie et des avis de paiement des ASSEDIC, sa présence en France durant chaque mois de l'année considérée, à l'exception des mois de juillet et août de ladite année, sans que cette carence, qui ne concerne que deux mois de l'année considérée, soit de nature à remettre en cause la justification de la présence en France de l'intéressé ; que, concernant l'année 2005, M.E..., qui a produit notamment des bulletins de paie délivrés de janvier à décembre 2005 ainsi que des ordonnances médicales pour certains mois de l'année considérée, établit ce faisant sa présence continue en France durant cette période ; que, cette preuve est également rapportée, concernant l'année 2006 pour laquelle M. E...a produit notamment une attestation de domiciliation établie par la Fondation Abbé B...en décembre 2006, des courriers de la CPAM adressés en novembre 2006, des justificatifs de retraits sur son Livret A effectués en mars, avril, mai, juin, juillet, août, septembre et octobre 2006, ainsi que des bulletins de paie établis de janvier à octobre 2006 ; qu'enfin, concernant la période allant de janvier à avril 2007, M. E...a justifié de sa présence continue en France par la production d'ordonnances médicales en mars et début avril 2007, de consultation hospitalière en mars 2007, de décomptes de prestations d'assurance maladie, des justificatifs de retraits opérés sur son Livret A en janvier 2007 et enfin une notification de l'aide médicale d'Etat en février 2007 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.E..., présent en France depuis le 2 juin 2002, justifiait, à la date de l'arrêté contesté du 26 juin 2012, d'une résidence habituelle en France de plus de dix ans et qu'ainsi il pouvait se prévaloir des stipulations précitées du 1 de l'article 6 alinéa 1er de l'accord franco-algérien susvisé ; qu'en refusant l'admission au séjour de l'intéressé, le préfet des Bouches-du-Rhône a méconnu ces stipulations ; que, par suite, M. E...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 29 octobre 2012, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ; que, dès lors, le jugement dont s'agit doit être annulé ainsi que l'arrêté du 26 juin 2012 en tant qu'il emporte refus d'admission au séjour ainsi que, par voie de conséquence, en tant qu'il oblige l'intéressé à quitter le territoire français et qu'il fixe le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté contesté, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Bouches-du-Rhône délivre à M. E...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu, par suite, d'ordonner au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer ce titre dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisé du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros à MeC..., sur le fondement des dispositions susvisées, sous réserve que Me C...renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1205306 du tribunal administratif de Marseille du 29 octobre 2012 ensemble l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 26 juin 2012 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. E...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat (ministère de l'intérieur) versera à Me C...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me C...renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M.E..., au préfet des Bouches-du-Rhône, au ministre de l'intérieur et à MeC....

Copie en sera adressée au procureur près le tribunal de grande instance de Marseille.

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N° 13MA01644


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01644
Date de la décision : 10/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : QUINSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-04-10;13ma01644 ?
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