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07/03/2014 | FRANCE | N°13MA03914

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 07 mars 2014, 13MA03914


Vu la requête, enregistrée le 3 octobre 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me B... Ahmed ;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201153 - 1301505 du 19 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite du 19 février 2012, par laquelle le préfet de Vaucluse lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, et à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2013, par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à

quitter le territoire français dans le délai d'un mois et lui a fixé un pays de des...

Vu la requête, enregistrée le 3 octobre 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me B... Ahmed ;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201153 - 1301505 du 19 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite du 19 février 2012, par laquelle le préfet de Vaucluse lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, et à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2013, par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et lui a fixé un pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et les décisions du 10 mai 2013 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation d'un pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ou salarié dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2014 :

- le rapport de M. Pourny,

- et les observations de Me Ahmed, avocat de M.C... ;

1. Considérant que M. A...C..., ressortissant algérien, conteste le jugement du 19 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant, la première, à l'annulation de la décision implicite du 19 février 2012, par laquelle le préfet de Vaucluse lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, et, la seconde, à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2013 par lequel le préfet de Vaucluse lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en assortissant ce refus de décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixation d'un pays de destination ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si le jugement attaqué mentionne en première page l'année 2009, au lieu de l'année 2013, dans l'indication des dates d'audience et de lecture, pour des affaires enregistrées en 2012 et 2013, il mentionne correctement, en page 4, la date d'audience du 5 septembre 2013 et, en dernière page, des dates d'audience et de lecture des 5 et 19 septembre 2013, conformes à celles indiquées sur les fiches de suivi informatique des demandes du requérant ; qu'il est dès lors manifeste que la mention de l'année 2009 constitue une simple erreur de plume qui, pour regrettable qu'elle soit, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

Sur la légalité de la décision implicite du 19 février 2012 :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 : " La motivation exigée par le présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " et qu'aux termes de l'article 5 de la même loi : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. (...) " ; que le préfet de Vaucluse a communiqué en temps utile à M.C..., par une lettre du 28 février 2012 reçue le 1er mars 2012, les motifs de droit et de fait sur lesquels il a fondé sa décision implicite du 19 février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que cette lettre mentionne que le requérant est dépourvu de visa de long séjour et que, eu égard au caractère récent de son entrée sur le territoire et au fait qu'il ne peut prétendre être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ou en Espagne, il n'est pas fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ni de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la circonstance que cette lettre énoncerait de nombreux éléments de faits inexacts serait en tout état de cause sans incidence sur le caractère suffisant de cette motivation, qui satisfait aux exigences de l'article 3 de la loi 11 juillet 1979 ; que par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite de rejet doit être écarté comme manquant en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si M. C...soutient que la décision du 19 février 2012 est fondée sur des nombreux éléments de faits inexacts concernant sa situation familiale, le préfet n'ayant pas tenu compte du fait que sa compagne attendait un deuxième enfant, la lettre du 28 février 2012 mentionne bien la relation de M. C...avec une de ses compatriotes et la naissance de leur premier enfant ; que si cette lettre ne mentionne pas que la compagne de M. C...était de nouveau enceinte, il n'en résulte pas que le préfet aurait fondé sa décision sur des éléments erronés ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si le préfet a relevé que M. C...était dépourvu de visa de long séjour, il a fondé son refus de lui délivrer un certificat de résidence sur le fondement des stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié sur l'absence d'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard au caractère récent de son entrée en France et au fait que l'intéressé ne justifiait pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie ou en Espagne ; que le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en fondant sa décision de refus sur l'absence de visa de long séjour doit ainsi être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susmentionné : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., titulaire d'une carte de séjour espagnole valable de 2005 à 2010, est entré sur le territoire français au cours de l'année 2009 ; que s'il ressort des pièces du dossier que M. C...vivait avec une de ses compatriotes, titulaire d'un certificat de résidence valable jusqu'en 2018, dont il a eu un fils, né le 3 novembre 2010, et une fille née le 9 juillet 2012, et qu'il disposait d'une promesse d'embauche, il en ressort également que sa compagne, entrée en France en 2008, n'a divorcé de son époux, ressortissant français, qu'en octobre 2010, alors que M. C...n'a divorcé de son épouse algérienne qu'en juillet 2011 ; que, dès lors, eu égard au caractère récent de l'entrée en France de M.C..., au cours de l'année 2009, au caractère encore récent de ses relations avec sa compagne et au fait que les intéressés n'étaient pas dépourvus d'attaches familiales en Algérie, le préfet de Vaucluse a pu refuser à M. C...la délivrance d'un titre de séjour en février 2012 sans porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que les moyens tirés de ce que le préfet aurait méconnu les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation peuvent ainsi être écartés ;

Sur la légalité de l'arrêté du 10 mai 2013 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...a sollicité le 20 mars 2012 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; qu'à la date de l'arrêté attaqué, le 10 mai 2013, le requérant vivait en France depuis près de quatre ans, avec une de ses compatriotes avec laquelle il a eu deux enfants, nés en France, en 2010 pour le premier, et 2012, pour la deuxième ; que M. C...devait ainsi être regardé comme ayant transféré le centre de sa vie privée et familiale en France ; que si M. C...et sa compagne ne sont pas dépourvus d'attaches familiales en Algérie, il ressort des pièces du dossier que la compagne de M. C...bénéficiait, à la date de l'arrêté attaqué, d'un certificat de résidence valable dix ans, jusqu'en 2018, et qu'elle disposait d'un emploi stable en France, où résident également en situation régulière plusieurs membres de sa fratrie ; qu'il n'est en outre pas allégué que la présence en France de M. C...troublerait l'ordre public ; que, dès lors, même si M. C...n'a pas épousé sa compagne et même si leurs enfants sont encore en bas âge, le requérant est fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui est opposé porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs de ce refus et qu'il méconnait de ce fait les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce refus doit par suite être annulé, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixation de pays de destination ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2013 ;

Sur l'application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique que le préfet de Vaucluse délivre à M.C..., dans un délai d'un mois, le certificat de résidence valable un an qu'il sollicite sur le fondement des stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, au profit de M.C..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'arrêté du 10 mai 2013 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé la délivrance d'un certificat de résidence à M. C...est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Vaucluse de délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 19 septembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

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13MA03914


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03914
Date de la décision : 07/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Francois POURNY
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : AHMED

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-03-07;13ma03914 ?
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