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28/02/2014 | FRANCE | N°12MA02476

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 28 février 2014, 12MA02476


Vu le recours, enregistré le 19 juin 2012, présenté par le ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur ;

Le ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1001037 du 31 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à M. et Mme A...la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 ;

2°) de remettre à la charge des in

timés les droits pour un montant de 20 000 euros et les pénalités pour un montant de 2 ...

Vu le recours, enregistré le 19 juin 2012, présenté par le ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur ;

Le ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1001037 du 31 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à M. et Mme A...la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 ;

2°) de remettre à la charge des intimés les droits pour un montant de 20 000 euros et les pénalités pour un montant de 2 000 euros, dégrevés en impôt sur le revenu en exécution du jugement attaqué au titre des années 2007 et 2008 ;

....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code du travail ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2014:

- le rapport de M. Haïli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Maury, rapporteur public ;

- et les observations de Me Di Cesare, avocat de M. et MmeA... ;

1. Considérant que M. et Mme A...ont mentionné, comme dépenses à déduire, dans leurs déclarations de revenus souscrites au titre des années 2007 et 2008 des sommes versées pour l'emploi d'un salarié à domicile s'élevant respectivement à 30 679 euros et 21 953 euros, correspondant aux salaires que M.A..., handicapé, avait versés à son épouse en qualité d'auxiliaire de vie ; que ce foyer fiscal a ainsi bénéficié de deux crédits d'impôts à concurrence de 50 % du plafond annuel de 20 000 euros des salaires versés au titre de ces deux années, soit 10 000 euros chaque année ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces de ces déclarations de revenus de M. et MmeA..., l'administration fiscale, par proposition de rectification du 17 juillet 2009, a remis en cause les deux crédits d'impôt successifs de 10 000 euros dont avaient bénéficié les intéressés à raison de l'emploi d'un salarié à domicile ; que par jugement du 31 janvier 2012, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande des époux A...en leur accordant la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008, au motif que l'administration s'était bornée à opposer sa doctrine référencée au BOI 5 B-1-08 du 14 janvier 2008, selon laquelle le salarié ne pouvait être un membre du foyer fiscal, alors qu'il résultait des dispositions de l'article 199 sexdecies du code général des impôts que la loi ne prévoyait pas une telle condition ; que le ministre chargé du budget interjette régulièrement appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 199 sexdecies du code général des impôts dans sa version applicable aux impositions en litige : " 1. Lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories, ouvrent droit à une aide les sommes versées par un contribuable domicilié en Franceau sens de l'article 4 B pour : / a) L'emploi d'un salarié ou le recours à une association ou à une entreprise agréée par l'Etat, qui rend des services définis aux articles D. 129-35 et D. 129-36 du code du travail ; (...) ; / 2. L'emploi doit être exercé à la résidence, située en France, du contribuable ou d'un de ses ascendants remplissant les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 232-2 du code de l'action sociale et des familles. (...) ; / 3. Les dépenses mentionnées au 1 sont retenues, pour leur montant effectivement supporté, dans la limite de 12 000 euros, en tenant compte prioritairement de celles ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt mentionné au 4. / Cette limite est portée à 20 000 euros pour les contribuables mentionnés au 3° de l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale, ainsi que pour les contribuables ayant à leur charge une personne, vivant sous leur toit, mentionnée au même 3°, ou un enfant donnant droit au complément d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 541-1 du même code. (...) ; / 4. L'aide prend la forme d'un crédit d'impôt sur le revenu égal à 50 % des dépenses mentionnées au 3 du présent article au titre des services définis aux 4° et 5° de l'article D. 129-35 du code du travail, supportées pour l'emploi d'un salarié à leur résidence et payées à l'aide du chèque emploi-service universel prévu à l'article L. 129-5 du même code par : (...) / b) Les personnes mariées ou ayant conclu un pacte civil de solidarité, soumises à une imposition commune, qui exercent toutes deux une activité professionnelle au cours de l'année du paiement des dépenses. (...) ; / 5. L'aide prend la forme d'une réduction d'impôt sur le revenu égale à 50 % des dépenses mentionnées au 3 supportées par : / a) Les personnes autres que celles mentionnées au 4 ; (...). / 6. L'aide est accordée sur présentation des pièces justifiant du paiement des salaires et des cotisations sociales, de l'identité du bénéficiaire, de la nature et du montant des prestations payées à l'association, l'entreprise ou l'organisme définis au 1. " ;

3. Considérant que le ministre soutient à juste titre que le 1 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts prévoit que seules les dépenses qui n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus catégoriels peuvent ouvrir droit à l'avantage fiscal, consistant en l'espèce en un crédit d'impôt, et que la doctrine référencée BOI 5 B-1-08 du 14 janvier 2008, loin d'ajouter une condition non prévue par la loi, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, se borne à commenter ces dispositions législatives, à l'alinéa 36 du paragraphe A, 1, de la section 1 du chapitre 2, en précisant que " le salarié ne peut pas être un membre du foyer fiscal du contribuable ", dès lors que, comme en l'espèce, les salaires versés à l'un des conjoints au titre des prestations de services à la personne à domicile effectuées au profit de l'autre, sont imposables dans la catégorie des traitements et salaires du foyer fiscal et entrent donc en compte pour l'évaluation de cette catégorie de revenus ; que les requérants ne se prévalent pas utilement du n° 25 de la doctrine administrative pour soutenir que le 1 de l'article 199 sexdecies ne viserait que le cas de déduction d'une dépense d'un revenu catégoriel et non l'inclusion de ressources, tels les salaires de l'un des conjoints versés par l'autre, dans la catégorie des traitements et salaires ;

4. Considérant que, comme il vient d'être dit au point précédent, pour l'évaluation des revenus des différentes catégories au sens du 1 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, les sommes versées par l'employeur à raison de l'emploi direct d'un salarié, membre de son foyer fiscal, affecté à son service privé, doivent être regardées comme susceptibles d'être prises en compte dans la catégorie des traitements et salaires des membres de ce foyer fiscal ; que par conséquent, les dépenses exposées par M.A..., au titre de l'emploi salarié de son épouse comme aide à domicile, ne pouvaient donner lieu aux crédits d'impôt en litige ; que par suite, c'est à tort que les premiers juges ont jugé que M. et Mme A...étaient fondés à bénéficier des crédits d'impôts relatifs à l'emploi d'un salarié à domicile ;

5. Considérant que les intimés répliquent que la condition légale de non-appartenance au foyer fiscal du contribuable incluse dans les dispositions de l'article 199 sexdecies du code général des impôts serait contraire aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combinées avec celles de l'article 1er de son premier protocole additionnel, en tant qu'opérant une discrimination injustifiée entre les contribuables mariés ou unis par un pacte civil de solidarité et ceux vivant en concubinage ; qu'un contribuable qui invoque ces stipulations combinées pour soutenir que la loi fiscale serait à l'origine de discriminations injustifiées doit établir que des personnes placées dans des situations analogues ou comparables en la matière jouissent d'un traitement préférentiel, et que cette distinction ne trouve aucune justification objective et raisonnable, en rapport avec les buts de la loi ; que toutefois, les couples mariés ou " pacsés ", soumis à une imposition commune, sont dans une situation différente de celle des concubins, qui n'y sont pas soumis ; que les intimés ne sauraient par suite utilement soutenir que la prise en compte par l'avantage fiscal litigieux de la solidarité légale entre époux pour le paiement de l'impôt sur le revenu constitue une discrimination ; que le législateur n'est pas tenu d'appliquer des règles identiques à des situations différentes et que les dispositions en cause n'ont pas pour effet d'instituer, au détriment des couples mariés ou " pacsés ", un traitement discriminatoire au regard du droit au respect des biens ; que par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 199 I sexdecies sont contraires à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combiné avec l'article 1er de son premier protocole additionnel doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre chargé du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a accordé à M. et Mme A... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1001037 du 31 janvier 2012 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A...ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 et dont ils ont obtenu la décharge devant le tribunal administratif de Marseille, sont remis à leur charge, en droits et pénalités.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à M. et Mme B... A.en France

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 12MA02476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA02476
Date de la décision : 28/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LE REVENU. ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT. RÉDUCTIONS ET CRÉDITS D`IMPÔT. - AVANTAGE FISCAL PRÉVU À L''ARTICLE199 SEXDECIES DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS, À COMPTER DE L'IMPOSITION DES REVENUS DE 2007, SOUS FORME, SELON LE CASS SITUATIONS, D'UN CRÉDIT D'IMPÔT SUR LE REVENU OU D'UNE RÉDUCTION D'IMPÔT SUR LE REVENU, AU TITRE DES SOMMES VERSÉES POUR L'EMPLOI D'UN SALARIÉ À DOMICILE AUX CONTRIBUABLES QUI ONT RECOURS, À TITRE PRIVÉ, DANS LEUR RÉSIDENCE (PRINCIPALE OU SECONDAIRE) AUX SERVICES D'EMPLOYÉS DÉCLARÉS, NOTAMMENT EN CAS D'EMPLOI DIRECT D'UN SALARIÉ.

19-04-01-02-05-03 En vertu du 1 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, seules les dépenses qui n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus catégoriels, peuvent ouvrir droit à l'avantage fiscal. Par suite, le salarié ne peut pas être un membre du foyer fiscal du contribuable, dès lors que, comme en l'espèce, les salaires versés à l'un des conjoints au titre des prestations de services à la personne à domicile effectuées au profit de l'autre, sont imposables dans la catégorie des traitements et salaires des membres du foyer fiscal et entrent donc en compte pour l'évaluation de cette catégorie de revenus.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : DI CESARE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-28;12ma02476 ?
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