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25/02/2014 | FRANCE | N°12MA00294

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 25 février 2014, 12MA00294


Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2012 présentée pour la SA Cirinvest, dont le siège social est situé centre Hermès, ZAC de Valgora, Ilôt n° 5, à La Valette-du-Var (83160), par Me A... ;

1°) de réformer le jugement n° 0901982 et n° 0903122, en date du 24 novembre 2011, par lequel le tribunal administratif de Toulon a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contributions à cet impôt et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de

la période correspondant aux années 2001 et 2002 et des pénalités correspondantes ...

Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2012 présentée pour la SA Cirinvest, dont le siège social est situé centre Hermès, ZAC de Valgora, Ilôt n° 5, à La Valette-du-Var (83160), par Me A... ;

1°) de réformer le jugement n° 0901982 et n° 0903122, en date du 24 novembre 2011, par lequel le tribunal administratif de Toulon a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contributions à cet impôt et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant aux années 2001 et 2002 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2014 :

- le rapport de Mme Paix, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

1. Considérant que la SA Cirinvest qui exerce une activité de holding, interjette appel du jugement en date du 24 novembre 2011 par le tribunal administratif de Toulon a partiellement rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution à cet impôt, des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que la SA Cirinvest soutient que le jugement attaqué aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière, le tribunal administratif de Toulon ayant d'office substitué les pénalités au taux de 40 % aux pénalités appliquées par l'administration fiscale au taux de 80 % sans l'en informer préalablement conformément aux exigences de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; que, toutefois, la société contestait, dans sa demande de première instance, le bien-fondé des pénalités pour manoeuvres frauduleuses appliquées au taux de 80 % ; que, par suite, en jugeant que la mauvaise foi de la société était établie et justifiait donc, en application de l'article 1729 du code général des impôts, une majoration de 40 % mais que les pénalités pour manoeuvres frauduleuses n'étaient pas fondées, le tribunal administratif de Toulon n'a fait que répondre au moyen qui lui était soumis ; que, dans ces conditions, le respect du principe du contradictoire n'a pas été méconnu ; qu'il en résulte que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 39 alors applicable du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre (...) ";

4. Considérant que, si en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

5. Considérant, en premier lieu, que, pour rejeter la déduction de salaires et des charges sociales y afférentes versées à Mme B...au titre des années 2001 et 2002, l'administration fiscale a relevé que la société n'établissait pas la réalité des contreparties, pour la société, des salaires versés à celle-ci ; que, pas davantage en appel que devant les premiers juges, la SA Cirinvest n'établit la réalité des prestations effectuées par Mme B...en sa qualité d'agent commercial ; qu'aucune pièce justificative n'a notamment été produite sur les taches de marketing ou les tâches de secrétariat invoquées ; que la seule circonstance que, par jugement du 20 mai 2010, le tribunal administratif de Paris a jugé que l'administration fiscale n'établissait pas l'absence des prestations de service facturées par la SA Cirinvest à sa filiale, la SA Barthe, ne suffit pas à établir l'effectivité de l'activité de Mme B...au sein de la SA Cirinvest ; que c'est donc à bon droit que le tribunal administratif de Toulon a rejeté le moyen ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la SA Cirinvest a acquis le 8 janvier 2001, pour 760 000 francs, un avion de tourisme de type " Mooney " ; qu'au titre des exercices 2001 et 2002, l'administration a constaté une discordance très importante entre les produits tirés de la location de cet appareil et les charges déduites par la SA Cirinvest ; qu'ainsi, les recettes retirées de la location de cet avion ont représenté 23,06 % et 12,65 % des charges y afférentes, 50 % environ des recettes provenant de locations consenties à M. B...ou à la SA Barthe ; que l'administration fiscale a donc réintégré les charges ainsi déduites, comme non engagées dans l'intérêt de l'entreprise, le pourcentage d'utilisation à des fins personnelles, ayant été diminué après avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaire pour être fixé finalement à 25 % ; que si la SA Cirinvest soutient que cette réintégration serait injustifiée, dès lors que M. B... a acquitté, à titre personnel, ses heures de vol auprès de la société, elle ne conteste pas que de nombreuses heures n'ont pas été facturées, 47 sur 124 en 2001 et 36 sur 97 en 2002 ; que dans ces conditions, la société requérante n'établit pas le caractère excessif de la réintégration ;

7. Considérant, en troisième lieu, que pas davantage en appel que devant les premiers juges, la SA Cirinvest n'établit le caractère professionnel du matériel d'atelier et de bureau dont la dotation aux amortissements a été remise en cause par l'administration fiscale ; que ces biens comprennent notamment une tronçonneuse, une scie à ruban, des matelas, des billards, biens dont la société ne peut sérieusement invoquer l'utilité pour les prestations de service effectuées au profit de sa filiale, la SA Barthe ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Toulon a rejeté les prétentions de la SA Cirinvest sur ce point ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que la SA Cirinvest conteste la réintégration de frais de déplacement et d'indemnités kilométriques au titre de chacune des années 2001 et 2002 ; qu'il résulte de l'instruction que ces frais correspondent à des frais de déplacements pour des trajets effectués entre le domicile de M. et Mme B...et leur résidence secondaire ou le port d'attache de différents bateaux à la Trinité-sur-Mer et à Quiberon et à des indemnités kilométriques ayant le même objet ; que ces déplacements ne sont pas davantage justifiés en appel qu'en première instance et ne peuvent davantage être expliqués par les prestations effectuées au profit de la SA Barthe ; que le moyen a donc été à bon droit rejeté par le tribunal administratif de Toulon ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) " ; qu'aux termes de l'article 230 alors applicable de l'annexe II audit code : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (... ) " ; qu'aux termes de l'article 237 alors applicable de l'annexe II au code général des impôts : " Les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, qui constituent une immobilisation ou, dans le cas contraire, lorsqu'ils ne sont pas destinés à être revendus à l'état neuf, n'ouvrent pas droit à déduction. Il en est de même des éléments constitutifs, des pièces détachées et accessoires de ces véhicules et engins. Toutefois, cette exclusion ne concerne pas : Les véhicules routiers comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises, et utilisés par des entreprises pour amener leur personnel sur les lieux du travail ; Les véhicules ou engins acquis par les entreprises de transports publics de voyageurs et affectés de façon exclusive à la réalisation desdits transports " et qu'en vertu de l'article 241 alors applicable de la même annexe : " Les services de toute nature afférents à des biens, produits ou marchandises exclus du droit à déduction n'ouvrent pas droit à déduction " ;

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

10. Considérant que la SA Cirinvest conteste le refus de déduction de taxe sur la valeur ajoutée, opposé par l'administration fiscale, en ce qui concerne les équipements de l'avion " Merlin IV ", de l'avion " Mooney " et des bateaux " Ventôse " et " Thermidor " ; que, toutefois, elle ne conteste pas que les biens constitués par ces engins maritimes et aériens étaient à usage de transport de personnes ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de s'interroger sur leur intérêt pour l'exploitation de la SA Cirinvest, ou sur la perception de recettes taxables, les dépenses relatives à ces biens ne pouvaient, à raison de la nature de ceux-ci, donner lieu à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; que c'est donc à bon droit que le tribunal administratif de Toulon a, sur le terrain de la loi fiscale, rejeté l'argumentation de la société sur ce point ;

S'agissant du bénéfice de la doctrine administrative :

11. Considérant que la SA Cirinvest entend se prévaloir des termes du paragraphe 35 de l'instruction administrative référencée 3 D-3-04 du 23 février 2004, décidant de ne plus appliquer le dispositif d'exclusion du droit à déduction aux avions et hélicoptères lorsqu'ils sont utilisés, même de façon alternative, pour la réalisation à titre onéreux de prestations de services aériens ; que, toutefois, le point 12 de cette instruction précise que les entreprises concernées doivent être en mesure de justifier strictement de l'utilisation effective qui est faite de ces aéronefs ; que tel n'est pas le cas de la SA Cirinvest dont il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que de nombreuses heures de vol n'ont fait l'objet d'aucune facturation ; que, dans ces conditions, la société n'est pas fondée à se prévaloir des termes de cette instruction administrative dans les prévisions de laquelle elle ne rentre pas ;

Sur l'application des pénalités :

12. Considérant que la SA Cirinvest conteste l'application des pénalités de mauvaise foi sur les redressements en litige, qui ont été substituées, par le tribunal administratif de Toulon, aux majorations pour manoeuvres frauduleuses initialement notifiées par l'administration fiscale ; que, toutefois, les infractions sont constituées par l'utilisation privative de biens, dont certains, l'avion " Merlin IV ", n'étaient pas la propriété de la société, par des déductions systématiques de frais non justifiés et par l'exercice à travers une société holding d'activités dont l'intérêt pour la SA Cirinvest n'est pas établi ; qu'au surplus, M.B..., dirigeant de la société, ne pouvait, eu égard à ses fonctions antérieures d'ancien expert comptable, ignorer le caractère non déductible des charges et déductions opérées à travers une société écran ; que, dans ces conditions, la SA Cirinvest n'est pas fondée à demander la décharge des pénalités de mauvaise foi qui ont été substituées par le tribunal administratif de Toulon aux pénalités pour manoeuvres frauduleuses qui lui avaient été initialement assignées ;

13. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SA Cirinvest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a partiellement rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; que ces dispositions s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la SA Cirinvest ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SA Cirinvest est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Cirinvest et au ministre de l'économie et des finances.

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N° 12MA002942

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00294
Date de la décision : 25/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CHORUS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-25;12ma00294 ?
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