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21/02/2014 | FRANCE | N°13MA03153

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 21 février 2014, 13MA03153


Vu la décision n° 354683 en date du 17 juillet 2013 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par M. A...B..., annulé l'arrêt n° 09MA04660 de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 9 juin 2011 et a renvoyé l'affaire devant la même Cour ;

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2009 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 09MA04660, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Christol, avocat ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803224 du 6

novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa deman...

Vu la décision n° 354683 en date du 17 juillet 2013 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par M. A...B..., annulé l'arrêt n° 09MA04660 de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 9 juin 2011 et a renvoyé l'affaire devant la même Cour ;

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2009 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 09MA04660, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Christol, avocat ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803224 du 6 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 30 mai 2008 par laquelle le préfet de l'Hérault a fixé les indemnités de renouvellement de cheptel à un montant de 93 360 euros, et à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de lui verser la somme de 599 832 euros, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, au titre de l'indemnité due suite à l'abattage de son cheptel ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision en date du 30 mai 2008 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de lui verser la somme de 599 832 euros dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code rural ;

Vu l'arrêté en date du 6 juillet 1990 fixant les mesures financières relatives à la lutte contre la brucellose bovine et la lutte contre la tuberculose bovine et caprine ;

Vu l'arrêté du 30 mars 2011 fixant les modalités de l'estimation des animaux abattus et des denrées et produits détruits sur ordre de l'administration ;

Vu l'arrêté en date du 15 septembre 2003 fixant les mesures techniques et administratives relatives à la prophylaxie collective et à la police sanitaire de la tuberculose des bovinés et des caprins ;

Vu la décision n° 2012-266 QPC du 20 juillet 2012 statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.B... ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2014 :

- le rapport de Mme Pena, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Marzoug, rapporteur public ;

- et les observations de Me C...substituant la SCP Christol et Inquimbert, pour M. A...B....

Après la note en délibéré du 03 février 2014 ; présentée pour M. B...par Me Christol ;

1.Considérant qu'à l'occasion d'enquêtes réalisées sur quatre manades infectées par la tuberculose, la direction départementale des services vétérinaires (DDSV) de l'Hérault a constaté des liens épidémiologiques entre le cheptel de M. B...et ces manades ; que la DDSV a, en conséquence, le 17 février 2006, demandé à l'intéressé de faire réaliser un dépistage sur les bovins de son troupeau et mis celui-ci le 6 avril suivant, par arrêté préfectoral, sous surveillance ; que, douze bovins ayant présenté un résultat positif suite aux prélèvements effectués du 30 juin au 9 novembre 2006, la DDSV a demandé l'abattage à des fins diagnostiques de ces bovins afin de rechercher des lésions évocatrices de tuberculose et de faire réaliser sur ces lésions une recherche d'agents infectieux de la tuberculose chez l'homme et chez les bovins ; que sept animaux ont présenté des lésions évocatrices de la tuberculose et deux se sont avérés porteurs de mycobactérium bovis ; que, le 13 février 2007, l'exploitation a été placée sous arrêté préfectoral portant déclaration d'infection ; que M. B...a alors demandé, et obtenu à titre dérogatoire, la mise en oeuvre de l'abattage sélectif des seuls bovins positifs ; que les dépistages opérés du 8 au 17 janvier et du 5 au 19 mars 2007 ont révélé un résultat positif sur sept nouveaux bovins, confirmé par la mise en évidence de lésions tuberculeuses sur ces animaux à la suite de leur abattage diagnostic ; que M. B...a finalement demandé l'abattage total de son cheptel, dont la valeur a été évaluée le 10 juillet 2007 à 599 832 euros ; que, cependant, l'intéressé a, lors de l'été 2006, alors que sa manade était mise sous surveillance, fait sortir la vache n° 3449594240, sans le notifier à la DDSV, pour la confier à un tiers afin qu'elle soit abattue clandestinement ; que, de surcroît, il a substitué du sang de cheval au sang de ses bovins dans vingt-deux prélèvements réalisés les 3 et 4 avril 2007 ; que la DDSV a en conséquence informé M. B...par courrier du 26 octobre 2007 de son intention de proposer au préfet une décision de non- attribution de l'ensemble des indemnités consécutives à l'abattage total de son troupeau ; qu'après avis du 23 janvier 2008 de la commission instituée par l'article R. 224-7 du code rural, le préfet de l'Hérault a, le 30 mai 2008, refusé de lui attribuer les indemnités concernant la valeur marchande objective de ses animaux suite à l'abattage total du troupeau, et lui a accordé la somme de 93 360 euros au titre des indemnités de renouvellement du cheptel ; que le tribunal administratif, par un jugement du 6 novembre 2009, a rejeté la demande de M. B... dirigée contre cette décision et tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 599 832 euros ; que M. B...s'est pourvu en cassation contre l'arrêt du 9 juin 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, après avoir annulé ledit jugement pour omission à statuer, rejeté la demande de première instance ; que par décision du 17 juillet 2013, le Conseil d'Etat a annulé l'article 2 de cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la Cour ; que, dans le dernier état de ses conclusions, M. B...relève appel du jugement sus-analysé en date du 6 novembre 2009 du tribunal administratif de Montpellier, demande l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault en date du 30 mai 2008, qu'il soit enjoint à l'Etat de lui verser la somme de 599 832 euros dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et enfin, la mise à la charge de ce dernier d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, seul l'article 2 de l'arrêt de la Cour de céans du 9 juin 2011 a été annulé par la décision du Conseil d'Etat du 17 juillet 2013 ; que l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 novembre 2009 prononcée par l'article 1er dudit arrêt étant dès lors devenue définitive, il n'y a pas lieu de se prononcer sur la régularité du jugement contesté ; qu'il y a dès lors lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Montpellier :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-2 du titre II : La lutte contre les maladies des animaux, du code rural dans ses dispositions en vigueur à la date de la décision litigieuse : " Des arrêtés conjoints du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances fixent les conditions d'indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l'ordre de l'administration, ainsi que les conditions de la participation financière éventuelle de l'Etat aux autres frais obligatoirement entraînés par l'élimination des animaux. Toute infraction aux dispositions du présent titre et aux règlements pris pour leur application peut entraîner la perte de l'indemnité. La décision appartient au ministre chargé de l'agriculture, sauf recours à la juridiction administrative. " ;

que la décision du 30 mai 2008 par laquelle le préfet de l'Hérault a limité l'indemnisation de M. B... à raison de l'abattage de son troupeau à la somme de 93 630 euros a été prise sur le fondement desdites dispositions ; que, par une décision n° 2012-266 QPC du 20 juillet 2012, le Conseil Constitutionnel, saisi d'une demande de M.B..., a jugé que la décision administrative de retrait d'indemnité avait le caractère d'une sanction administrative ; que par suite, et contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, la demande de première instance de M. B... ne saurait être regardée comme une action indemnitaire ;

4. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient que la décision litigieuse serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il ne serait pas démontré que la commission prévue par l'article R. 224-57 du code rural qui a rendu son avis le 23 janvier 2008 a été créée par décret pour une durée maximale de cinq ans, que cette création a été précédée de la réalisation d'une étude permettant de vérifier que la mission impartie à la commission répond à une nécessité et n'est pas susceptible d'être assurée par une commission existante, enfin que la composition de la commission était régulière au regard des exigences de l'article R. 224-57 du code rural ; que l'appelant fait également valoir qu'il n'est pas davantage établi que les membres de cette commission ont régulièrement été convoqués et que les règles de quorum ont été respectées ; qu'il ressort toutefois des visas de l'arrêté contesté que la commission consultative prévue à l'article R. 224-57 du code rural a bien rendu un avis le 23 janvier 2008 et que s'agissant des irrégularités qui entacheraient cet avis, M. B...se contente de simples allégations sans apporter le moindre commencement de preuve de celles-ci ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 30 mai 2008 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté manque en fait et ne peut donc qu'être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si le cumul des sanctions administrative et pénale est admis, il appartient au juge administratif de s'assurer que le montant global des sanctions ainsi prononcées n'excède pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues, soit en l'espèce, la valeur de remplacement du bétail fixée à la somme de 599 832 euros, le plafond de l'amende pénale prévue par les articles 223-7 et 441-6 alinéa 1 du code pénal pour les infractions relevées à l'encontre de M. B...étant quant à lui fixé à la somme de 30 000 euros ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a été condamné par un arrêt définitif de la cour d'appel de Montpellier en date du 6 mai 2010, à une amende de 7 000 euros pour les mêmes infractions que celles ayant justifié la réduction de l'indemnité due pour abattage de son troupeau ; que l'indemnité de renouvellement de cheptel accordée à M. B... par l'arrêté litigieux ayant été fixée à la somme de 93 360 euros, le montant de la sanction administrative prononcée à l'encontre de l'intéressé correspond à une perte d'indemnité d'un montant de 506 472 euros ; qu'ainsi, le montant global des sanctions prononcées à l'encontre de M. B...s'élève à la somme de 513 472 euros, montant qui reste inférieur au montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues, soit 599 832 euros ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-cumul des peines tel que prévu par l'article 14-7 du pacte international relatif aux droits civils et politiques et l'article 4 du protocole additionnel n°7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les faits à l'origine de la sanction infligée à M. B...et pour lesquels il a été condamné par la Cour d'appel de Montpellier ont consisté dans un premier temps à avoir soustrait une vache de son cheptel pour la confier à un tiers en vue de son abattage clandestin au cours de l'été 2006, puis dans un second temps à avoir substitué du sang bovin par du sang équin et ainsi à falsifier vingt-deux prélèvements de sang opérés dans sa manade, faits respectivement réprimés, ainsi qu'il a été dit, par les articles 223-7 et 441-6 alinéa 1 du code pénal ; qu'en agissant de la sorte, M. B... a fait obstacle au dépistage précoce de cette épizootie ; qu'il doit dès lors être regardé comme ayant contribué à la propagation du virus et, ce faisant, à la situation à l'origine de l'abattage de son troupeau ;

9. Considérant, en cinquième lieu, que l'appelant soutient que l'article 14-6° de l'arrêté du 6 juillet 1990 fixant les mesures financières relatives à la lutte contre la tuberculose bovine et caprine, selon lequel les indemnités ne sont pas dues dans le cas où toutes circonstances font apparaître une intention abusive de l'éleveur afin de détourner la réglementation de son objet serait illégal en tant qu'il méconnaîtrait tant le principe de légalité des délits en raison de son caractère évasif et ambigu que celui de sécurité juridique ; que cette disposition est toutefois suffisamment précise et complète et ne soumet pas l'intéressé, contrairement à ce qu'il affirme, à un " risque permanent de se voir à nouveau refuser une indemnité pour abattage " ;

10. Considérant, en sixième lieu, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que seules les dispositions des articles R. 224-49 et R. 224-57 du code rural, lesquelles sanctionnent l'inobservation par un éleveur des mesures de prophylaxie dans le cadre de l'exploitation habituelle de son élevage, lui étaient applicables, alors qu'il a enfreint, de par son comportement, les règles de prophylaxie prises en application de l'article L. 221-2 de ce même code ;

11. Considérant, en septième et dernier lieu, que le refus d'indemnisation étant fondé, comme il vient d'être dit, sur les dispositions de l'article L. 221-2 du code rural, M. B...ne saurait utilement invoquer la méconnaissance du principe de légalité des peines en se fondant sur les sanctions prévues aux articles R. 224-49 et R. 224-57 du code rural ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier doit être rejetée ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées en appel ne peuvent par voie de conséquence qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B...la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 13MA03153

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03153
Date de la décision : 21/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Agriculture et forêts - Produits agricoles - Élevage et produits de l'élevage - Élevage.

Santé publique - Protection générale de la santé publique - Police et réglementation sanitaire - Lutte contre les épidémies.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: Mme MARZOUG
Avocat(s) : SCP CHRISTOL et INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-21;13ma03153 ?
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