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14/02/2014 | FRANCE | N°11MA03294

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 14 février 2014, 11MA03294


Vu la requête, enregistrée le 10 août 2011, présentée pour la SARL Royal Café, dont le siège est Place de la Libération au Grau du Roi (30240), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Pellegrin-Soulier, agissant par Me Pellegrin ;

La SARL Royal Café demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001755 du 24 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2006 et 2007, des droits

supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, mis à sa charge pour la période du 1...

Vu la requête, enregistrée le 10 août 2011, présentée pour la SARL Royal Café, dont le siège est Place de la Libération au Grau du Roi (30240), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Pellegrin-Soulier, agissant par Me Pellegrin ;

La SARL Royal Café demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001755 du 24 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2006 et 2007, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 janvier 2014 :

- le rapport de M. Sauveplane,

- les conclusions de M. Maury, rapporteur public ;

- et les observations de Me Pellegrin, avocat de la SARL Royal Café ;

1. Considérant que la SARL Royal Café, qui exploite un commerce de bar glacier au Grau du Roi, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration, après avoir écarté la comptabilité comme non probante, a procédé à une reconstitution de recettes qui a mis en évidence des insuffisances de 120 274 euros et 139 276 euros des chiffres d'affaires hors taxe de 232 067 et 249 953 euros respectivement déclarés pour 2006 et 2007 ; que la SARL Royal Café a en conséquence été assujettie, en suivant la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 2006 et 2007 et déclarée redevable d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007, ces impositions étant assorties des majorations de 40 ou 80 p. cent prévues à l'article 1729 du code général des impôts ; que la SARL Royal Café relève appel du jugement du 24 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le débat oral et contradictoire :

2. Considérant que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ;

3. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité s'est déroulée, à la demande du contribuable, dans les locaux de l'expert comptable de la société ; que le vérificateur a rencontré le gérant pour la première fois le 27 août 2008, ainsi qu'à sept autres reprises jusqu'au 7 novembre 2008 ; qu'en raison du changement de gérance intervenue antérieurement le 16 février 2008, l'administration soutient, sans être contredite, qu'elle n'a pas pu se rendre dans les locaux du bar glacier exploité jusqu'alors par la SARL Royal Café ; que, dès lors, en se bornant à alléguer que l'administration n'a procédé à aucune constatation sur place, la SARL Royal Café n'apporte pas la preuve que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vue ; que ce moyen doit par suite être écarté ;

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon utile ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 18 décembre 2008 comporte, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, l'énonciation des différents motifs de rejet de la comptabilité, à savoir une insuffisance des pièces justificatives des recettes, des anomalies dans les factures d'achats, la tenue du stock, la variation du coefficient d'exploitation et l'existence d'achats dissimulés ; que s'agissant de la reconstitution du chiffre d'affaires, la proposition de rectification détaille, outre la méthode suivie, les quantités à partir desquelles la reconstitution a été effectuée ; qu'en outre, la proposition de rectification distingue le chiffre d'affaires reconstitué issu des achats de la société du chiffre d'affaires reconstitué issu des achats de l'association " Ralau " ; qu'une telle motivation était ainsi suffisante pour permettre à la SARL Royal Café de formuler utilement ses observations ; que la circonstance que l'administration n'a joint en annexe à la proposition de rectification qu'un extrait du procès-verbal d'enquête du 28 novembre 2007 expurgé des mentions relatives à d'autres contribuables n'est pas de nature à faire regarder la motivation comme insuffisante ; que, de même, la circonstance, à la supposer établie, que ledit procès-verbal d'enquête contiendrait des contradictions " évidentes " est sans incidence sur la régularité de la motivation ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L.76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure de rectification mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis auprès de tiers afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 18 décembre 2008 comporte l'indication que l'administration a diligenté une enquête, sur le fondement des articles L. 80 F à H du livre des procédures fiscales, auprès de la SARL EtablissementsA..., fournisseur de boissons de la SARL Royal Café, qui a permis de mettre en évidence l'existence d'achats payés en espèces d'un montant de 9 331 euros TTC en 2006 et 10 272 euros en 2007 et facturés à une association " Ralau ", qui n'a aucune existence légale ou réelle, et qui ont été livrés à l'adresse de la SARL Café Royal, selon les dires de M.A..., gérant des EtablissementsA... ; que les déclarations du gérant ont été consignées dans un procès verbal du 28 novembre 2007 annexé à la proposition de rectification ; que, ce faisant, l'administration a satisfait aux exigences de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; que la circonstance que le procès-verbal du 28 novembre 2007 était expurgé des mentions relatives à d'autres contribuables et qui ne concernaient pas la société requérante est sans incidence ; que si la société requérante soutient que ni les factures de l'association " Ralau " ni les bons de livraisons n'ont pas été versés au dossier, l'administration soutient, sans être contredite, que les Etablissements A...n'établissaient pas de bons de livraison pour les achats de l'association et que la SARL Royal Café n'a pas demandé communication des factures établies au nom de l'association avant la mise en recouvrement des impositions ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration n'avait pas à informer la société requérante de son droit à demander copie des pièces obtenues de tiers ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai. " ;

9. Considérant qu'il ressort de l'instruction que la proposition de rectification du 18 décembre 2008 comporte l'indication du montant des droits et pénalités résultant de la reconstitution du chiffre d'affaires effectué par l'administration, tant en matière d'impôt sur les sociétés que de taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, elle satisfaisait aux exigences de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ; que si la SARL Royal Café conteste l'intégration par l'administration, dans le chiffre d'affaires reconstitué, des achats de l'association " Ralau ", cette contestation, à la supposer même fondée, est toutefois sans incidence sur l'existence formelle de l'indication dans la proposition de rectification du montant des droits et pénalités résultant de la rectification envisagée par l'administration ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, ou que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;

11. Considérant que la SARL Royal Café soutient que la procédure d'imposition est irrégulière, faute pour l'administration d'avoir mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales alors qu'elle lui a opposé le caractère fictif de l'association " Ralau " ; que, toutefois, en intégrant dans la reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL Royal Café les achats effectués sous couvert de l'association " Ralau ", l'administration n'a pas écarté comme lui étant inopposable, ni explicitement ni même implicitement, un acte passé par la SARL Royal Café ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le moyen titré de la méconnaissance des droits de la défense et du principe d'impartialité :

12. Considérant que la SARL Royal Café soutient que les opérations de vérification diligentées à son encontre ont été conduites en méconnaissance du principe d'impartialité qui s'impose aux agents de l'administration fiscale et que l'administration a méconnu la présomption d'innocence, qui fait partie des droits de la défense, en rattachant à sa comptabilité, sans aucune preuve, les achats de l'association " Ralau " ;

13. Considérant que les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale ; qu'il s'ensuit que le contribuable ne peut, en tout état de cause, utilement les invoquer pour contester la régularité de la procédure d'imposition ; qu'il est loisible à l'administration d'opposer à un contribuable les constatations de fait qu'elle estime devoir conduire à une rectification de son revenu imposable, selon les règles fiscales en vigueur, sans qu'il puisse être déduit de l'absence de prise en compte des observations ou explications du contribuable un manque d'impartialité de l'administration ou une violation de la " présomption d'innocence " ; qu'il appartient ensuite au contribuable de combattre devant le juge, dans le respect des règles gouvernant la dévolution de la charge de la preuve, les constatations de fait et l'application de la règle de droit faite par l'administration ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la procédure de " rectification d'office " :

14. Considérant que la SARL Royal Café soutient que l'administration a rejeté à tort la comptabilité comme non probante et a eu recours à une procédure de " rectification d'office " alors qu'au regard des irrégularités mineures de la comptabilité, elle aurait dû se voir notifier " un redressement à due concurrence " ;

15. Considérant toutefois qu'il est constant que l'administration n'a pas suivi une procédure de " rectification d'office " mais la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; qu'à supposer que l'administration aurait, à tort, rejeté la comptabilité comme non probante, cette irrégularité serait sans incidence sur la régularité du recours à la procédure de rectification contradictoire suivie en l'espèce par l'administration ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge... " ; qu'il résulte de ce qui précède que la charge de la preuve des irrégularités entachant la comptabilité de la société incombe toujours à l'administration ;

17. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de la SARL Royal Café a porté sur les trois exercices 2005, 2006 et 2007 ; que s'agissant de l'exercice 2005, la comptabilité a été estimée sincère et probante par l'administration en dépit de quelques anomalies ponctuelles ; qu'en revanche, s'agissant de l'exercice 2006, l'administration a relevé que les tickets " Z " n'avaient été fournis que pour la période du 1er janvier au 7 mars 2006 et, pour la période postérieure, que les recettes journalières étaient reprises de façon manuscrite sur des feuilles avec mention des quantités vendues et du chiffre d'affaires généré par type de boissons ou de glaces sans distinction des conditions de vente en salle, au comptoir ou lors d'évènement spécial, ni mention des offerts et des pertes ; que, de surcroit, 35 journées avaient été omises sur ces relevés pendant la période allant du mois de juin à novembre 2006 ; que, pour l'année 2007, les relevés ont été totalement omis pendant la période allant du 20 septembre au 21 décembre 2007 ; que l'administration a par ailleurs relevé diverses autres anomalies, telles que l'absence de factures d'achat pour certains produits vendus et des incohérences dans l'état des stocks, comme l'absence d'achats et la constance des stocks pour certains produits d'utilisation courante et des stocks négatifs pour certains produits ; que l'administration a par ailleurs constaté une baisse du taux de bénéfice brut de 4,48 en 2005 à respectivement 3,91 et 3,41 en 2006 et 2007, alors que les achats ont progressé de 16 p. cent et 24 p. cent en 2006 et 2007 et le chiffre d'affaires de seulement 1 p. cent et 8 p. cent pendant la même période ; qu'enfin, une enquête diligentée en application des articles L. 80 F à H du livre des procédures fiscales auprès de la SARL EtablissementsA..., fournisseur de boissons de la SARL Café Royal, a permis de mettre en évidence l'existence d'achats payés en espèces et facturés à une association " Ralau ", qui n'a aucune existence ni légale ni réelle, d'un montant de 9 331 euros TTC en 2006 et 10 272 euros TTC en 2007, lesquels ont été livrés, selon les dires du gérant des EtablissementsA..., à l'adresse de la SARL Royal Café ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve des irrégularités qui entachaient la comptabilité de la SARL Royal Café ; qu'ainsi c'est à bon droit que l'administration a rejeté la comptabilité comme non probante pour les exercices 2006 et 2007 ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :

18. Considérant que la reconstitution du chiffre d'affaires a été faite compte tenu d'une répartition des ventes de 50 p. cent au comptoir, 40 p. cent en salle et 10 p. cent pendant les évènements spéciaux, estimée d'après l'étude des tickets " Z " de l'année 2005 et en accord avec le gérant de la SARL Royal Café ; que l'administration a ensuite valorisé l'ensemble des produits achetés, y compris ceux effectués par le biais de l'association " Ralau ", en fonction des doses et quantités estimées et débattues au cours du débat oral et contradictoire, y compris s'agissant des pertes, des offerts et des prélèvements pour consommation personnelle ; que le chiffre d'affaires toutes taxes comprises ainsi reconstitué s'est élevé à 421 400 euros en 2006 et 465 518 euros en 2007 ;

19. Considérant, en premier lieu, s'agissant de la reconstitution issue des seuls achats régulièrement comptabilisés de la SARL Royal Café, qu'en valorisant ces achats en fonction des doses et quantités utilisées ainsi que des pertes, des offerts et des prélèvements pour consommation personnelle, débattus au cours du débat oral et contradictoire, la méthode suivie par l'administration pour reconstituer le chiffre d'affaires ne peut être qualifiée ni de radicalement viciée ni d'excessivement sommaire ;

20. Considérant, en second lieu, s'agissant de la reconstitution issue des achats effectués par le biais de l'association " Ralau ", que l'administration s'est basée sur les dires du gérant de la SARL EtablissementsA..., fournisseur de boissons de la SARL Royal Café, consignés dans un procès verbal du 28 novembre 2007 annexé à la proposition de rectification, selon lequel le compte ouvert au nom de l'association " Ralau " était rattaché au compte de la SARL Royal café et les achats payés en espèces et facturés à l'association étaient livrés à l'adresse de la SARL Royal Café ; qu'elle a donc reconstitué le chiffre d'affaires issu des achats sous couvert de l'association " Ralau " en suivant la même méthodologie utilisée pour les achats régulièrement comptabilisés de la SARL Royal Café ;

21. Considérant que si la SARL Royal Café conteste être liée à l'association " Ralau " et soutient n'avoir jamais commandé, payé et pris livraison des produits mentionnés sur les factures, l'administration fiscale a, avant d'opposer à la SARL Royal Café au cours du débat contradictoire les dires du gérant de la SARL Etablissements A...sur l'existence d'achats dissimulés sous couvert de l'association " Ralau ", diligenté une enquête qui a montré notamment que l'association était inconnue tant des services fiscaux que de l'administration préfectorale et que l'adresse de l'association " place de l'Eglise " au Grau du Roi était fictive ; qu'au vu de cette enquête, l'administration était fondée à opposer à la SARL Royal Café au cours du débat contradictoire les dires du gérant de la SARL Etablissements A...sur l'existence d'achats dissimulés sous couvert de l'association " Ralau " ; qu'à cet égard si la société requérante se prévaut de l'absence de démonstration par l'administration de " flux " entre elle et l'association " Ralau ", cette absence est sans signification aucune dès lors que, par principe, le recours à un tiers pour dissimuler des achats implique la volonté de s'affranchir de tels flux ; que s'il ne saurait être exigé de la SARL Royal Café qu'elle apporte la preuve négative, donc impossible, de l'absence de lien avec l'association " Ralau ", il appartient toutefois à la Cour de relever que, dès la réponse aux observations du contribuable du 30 avril 2009, l'administration avait souligné l'absence de dépôt de plainte en diffamation par la SARL Royal Café à l'encontre du gérant de la SARL EtablissementsA..., alors que cette plainte en diffamation était de nature à rendre plus crédibles les dénégations de la société face aux indications précises et non contradictoires du gérant de la SARL EtablissementsA... ; que si la SARL Royal Café fait valoir qu'elle n'était nullement obligée de déposer plainte, force est toutefois de constater qu'elle n'a ainsi pas donné suffisamment de crédibilité à ses dénégations ; qu'enfin, si la société requérante soutient que la méthode est radicalement viciée du fait de la prise en compte d'éléments extérieurs à l'entreprise et non corroborés par des constatations à l'intérieur de l'entreprise, l'administration a toutefois écarté la comptabilité de la société comme non probante pour les exercices 2006 et 2007 et ainsi corroboré le rattachement des factures par des constatations tirées du fonctionnement de l'entreprise ; qu'ainsi l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence d'achats effectués par la SARL Royal Café sous couvert de l'association " Ralau " ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a rattaché à la SARL Royal Café ces achats dissimulés ; qu'en valorisant les achats facturés à l'association " Ralau " selon la même méthode que celle utilisée pour les achats régulièrement comptabilisés par la SARL Royal Café, la méthode suivie par l'administration pour reconstituer le chiffre d'affaires ne peut être qualifiée ni de radicalement viciée ni d'excessivement sommaire ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

22. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence d'une insuffisance de chiffre d'affaires déclaré à hauteur des montants de 120 274 euros hors taxe et 143 848 euros toutes taxes comprises en 2006 et 139 276 euros hors taxe et 166 574 euros toutes taxes comprises en 2007 ;

23. Considérant que la SARL Royal Café propose, à titre subsidiaire une nouvelle méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires fondée sur l'application du coefficient de marge de 4,48 réalisé en 2005 par la société et non remis en cause par l'administration et qui aboutit à un chiffre d'affaires reconstitué de 290 904 euros en 2006 et 318 438 euros en 2007 ; que toutefois, la requérante n'apporte pas la preuve que les conditions d'exploitation n'ont pas varié entre l'exercice 2005 et les exercices 2006 et 2007 en litige ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur les pénalités :

24. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; b. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat. " ;

25. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a appliqué la majoration de 40 p. cent que sur les seuls droits supplémentaires issus de la reconstitution du chiffre d'affaires à partir des achats régulièrement comptabilisés par la société ; que, s'agissant des droits supplémentaires issus de chiffre d'affaires reconstitué à partir des achats de l'association " Ralau ", l'administration a appliqué la majoration de 80 p. cent ; qu'ainsi et contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration n'a procédé à aucun cumul de pénalités ;

26. Considérant, en premier lieu, s'agissant de la majoration de 40 p. cent, qu'en faisant valoir les irrégularités comptables qui ont fait obstacle aux opérations de contrôle en rendant nécessaire la reconstitution du chiffre d'affaires, ainsi que l'importance des minorations de chiffre d'affaires hors taxe de 120 274 euros en 2006 et 139 276 euros en 2007, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la SARL Royal Café de se soustraire à l'impôt et, par suite, du bien-fondé de l'application de la majoration ;

27. Considérant, en second lieu, s'agissant de la majoration de 80 p. cent, qu'en faisant valoir que la société requérante avait procédé à des achats dissimulés payés en espèces sous couvert d'une association sans existence réelle, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la SARL Royal Café d'égarer l'administration dans son pouvoir de contrôle et, par suite, du bien-fondé de l'application de la majoration pour manoeuvres frauduleuses ;

28. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Royal Café n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Royal Café est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Royal Café et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 11MA03294


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA03294
Date de la décision : 14/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Établissement de l'impôt - Bénéfice réel - Redressements.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Procédure de taxation - Procédure de rectification (ou redressement).


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS PELLEGRIN - SOULIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-14;11ma03294 ?
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