Vu, enregistrée le 30 juillet 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 12MA03203, la décision n° 349747, 349895 du 13 juillet 2012 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour la société Eco Delta Développement et d'un second présenté par la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 09MA01499 du 31 mars 2011 et renvoyé l'affaire devant la Cour ;
Vu la requête, enregistrée le 27 avril 2009, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 09MA01499, présentée pour l'association Chabannaise pour la qualité de vie (A.C.Q.V.I.E.), dont le siège est sis chez M. B...J...à Chateauneuf Val Saint-Donat (04200), agissant par son président, M. B...D...demeurant..., M. I...G..., demeurant..., Mme E...H...demeurant..., et Mme F...C...demeurant ...par Me Sebag, avocat ; l'association chabannaise pour la qualité de vie et autres demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0705546 du 25 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 23 février 2007, par lequel le préfet des Alpes de Haute-Provence a délivré un permis de construire à la société Eco Delta Développement pour la construction de cinq éoliennes d'une hauteur de 125 mètres, au lieudit " Les Marines " à Châteauneuf Val Saint-Donnat (04200) ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté précité ;
3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Eco Delta Développement la somme de 8 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 9 septembre 2013 désignant Mme Isabelle Buccafurri, présidente-assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Lilian Benoit, président de la 1ère Chambre ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :
- le rapport de Mme Simon, première-conseillère,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de Me Sebag pour l'association Chabannaise pour la qualité de vie et autres et de Me A...pour la société Eco Delta Développement ;
Après avoir pris connaissance des notes en délibéré, enregistrées au greffe de la Cour les 20 et 31 décembre 2013, présentées pour la société Eco Delta Développement et celles enregistrées le 20 décembre 2013 et le 2 janvier 2014 présentées pour l'association chabannaise pour la qualité de vie et autres ;
1. Considérant que, par un arrêté du 23 février 2007, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a délivré à la société Eco Delta Développement un permis de construire un parc éolien composé de cinq éoliennes, d'une puissance de 2,4 MW et d'une hauteur de 125 mètres chacune, au lieudit " Les Marines " sur le territoire de la commune de Châteauneuf Val Saint-Donat ; que, par un jugement du 25 février 2009, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande d'annulation de ce permis de construire présentée par l'association chabannaise pour la qualité de vie, MM. B...D...et I...G...et K...F...C...et E...H...; que, par décision en date du 13 juillet 2012, le Conseil d'Etat a, d'une part, annulé l'arrêt du 31 mars 2011 par lequel la cour de céans avait annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille ainsi que le permis de construire litigieux et, d'autre part, renvoyé l'affaire devant la Cour ;
Sur les fins de non recevoir opposées par la société Eco Delta Développement à la requête d'appel :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4 (...) " ;
3. Considérant que le jugement du 25 février 2009 a été notifié le 28 février 2009 à MM. B...D...et I...G...et K...F...C...et E...H...et le 10 mars suivant à l'association Chabannaise pour la qualité de vie ; que, dans ces conditions, leur requête d'appel enregistrée au greffe de la cour le 27 avril 2009 n'est pas tardive ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R.600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) un permis de construire, d'aménager ou de démolir. (...) La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'association Chabannaise pour la qualité de vie et autres ont adressé en recommandé avec accusé de réception une copie de leur requête d'appel le 27 avril 2009 au préfet des Alpes-de-Haute-Provence et le lendemain à la société Eco Delta Développement ; que la fin de non recevoir tirée du non respect des formalités prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme dont les dispositions n'imposent pas que soient jointes à l'envoi de la requête les pièces qui y sont annexées, doit, par suite, être écartée ;
Sur la recevabilité de la demande devant le tribunal :
6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ;
7. Considérant que, si la décision du préfet des Alpes-de-Haute-Provence du 6 juillet 2007 portant rejet du recours gracieux exercé à l'encontre de l'arrêté en litige du 23 février 2007 par l'association Chabannaise pour la qualité de vie et autres et par ailleurs régulièrement notifié à la société Eco Delta Développement a été notifiée aux intéressés le 9 juillet 2007, leur requête transmise par télécopie a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Marseille le 10 septembre 2007 et a fait l'objet d'une régularisation par voie postale reçue le lendemain ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier l'association chabannaise pour la qualité de vie et autres ont adressé le préfet des Alpes-de-Haute-Provence et la société Eco Delta Développement le 11 septembre 2007 par recommandé avec accusé de réception une copie de leur requête de première instance à laquelle ils n'étaient pas tenus de joindre, comme il a été dit précédemment, les pièces annexées à ladite requête ; que, dés lors, la fin de non recevoir tirée du non respect des formalités prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme doit être écartée ;
9. Considérant, en troisième lieu, que d'une part, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la contre-étude d'impact réalisée du 15 juin au 15 juillet 2006 à la demande des appelants et dont les éléments ne sont pas sur ce point contestés en défense, qu'au moins une éolienne sera visible depuis le quartier Le Thoron où résident M. I...G...et Mme F... C...lequel est situé à moins de 500 mètres du terrain d'assiette du projet ; que, d'autre part, si la propriété de Mme H...est située dans le village à environ un kilomètre dudit terrain, il ressort de l'étude d'impact elle-même que les éoliennes autorisées seront visibles depuis la place du village ; qu'ainsi, ces trois habitants de la commune de Châteauneuf Val Saint-Donnat justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre du permis de construire en litige ;
10. Considérant en revanche que si M. B... D...demeure et exploite un élevage au lieu-dit Le Jas du Coeur, il ne produit aucune pièce de nature à établir que les éoliennes autorisées seront visibles depuis sa propriété, ce qui ne ressort pas des photomontages produits par la société défenderesse, ou qu'il sera touché par les nuisances sonores ou lumineuses de ces machines ; que dans ces conditions, et nonobstant la hauteur de 125 m de ces éoliennes, M. B... D...sur lequel repose la charge de la preuve de son intérêt pour agir, n'était pas recevable à demander devant le tribunal l'annulation du permis de construire en cause ;
11. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'objet social de l'association chabannaise pour la qualité de vie, tel qu'il est défini à l'article 2 de ses statuts, est " la protection de la nature et de l'environnement, la défense concernant la mise en valeur du patrimoine et la protection contre les nuisances diverses " ; qu'eu égard, d'une part, à la généralité de son objet et, d'autre part, à son champ d'action qui, faute de toute précision dans les statuts, ne peut être regardé, nonobstant sa dénomination, que comme national, ladite association ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté, aux effets exclusivement locaux, du 23 février 2007 ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que seuls M. I...G..., Mme F...C...et Mme H...étaient recevables à demander devant le Tribunal l'annulation de l'arrêté en litige du 23 février 2007 ; qu'il suit de là que la présente requête doit, en tant qu'elle émane de l'association chabannaise pour la qualité de vie et M. B...D..., être rejetée ;
Sur la légalité de l'arrêté du 23 février 2007 :
13. Considérant qu'aux termes de l'article ND1-b du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Châteauneuf Val Saint-Donat : " Ne sont admises que les occupations et utilisations du sol suivantes : (...) Excepté dans les secteurs NDa et NDv, les ouvrages techniques d'intérêt public, à condition qu'ils soient compatibles avec les occupations du sol destinées à l'exploitation du milieu, notamment vis à vis des nuisances engendrées (...) " ; qu'aux termes de l'article ND2 : " Sont interdites toutes les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l'article ND1 " ; et qu'aux termes de l'article ND13 intitulé " Espaces libres, plantations, espaces boisés classés " : " Les plantations existantes doivent être maintenues, sauf si elles entravent la pratique agricole ou pour les besoins d'une bonne gestion forestière " ;
14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'étude d'impact, que la réalisation du projet litigieux nécessite la suppression d'une partie importante d'arbustes, d'arbrisseaux, de genêts et de chênes pubescents présents sur l'emprise de la future construction lesquels constituent, alors même que leur présence ne résulte pas d'une intervention humaine, des plantations au sens de l'article ND13 précité ; qu'ainsi, alors même que l'absence de revégétalisation de ces espaces après travaux constitue un choix technique opéré par la société Eco Delta Développement dans l'objectif de respecter au mieux le milieu naturel, l'arrêté contesté méconnait les prescriptions de cet article, lesquelles sont s'agissant d'une zone naturelle à protéger d'interprétation stricte et ne sont pas incompatibles avec les dispositions précitées de l'article ND1-b qui admet dans cette zone, sous certaines conditions, les ouvrages techniques d'intérêt public ; que ce vice ne peut être régularisé par la délivrance d'un permis de construire modificatif dés lors que l'article ND13 ne prévoit pas à titre alternatif le remplacement des plantations existantes dont la destruction est rendue nécessaire par l'édification des constructions autorisées ; que, dans ces conditions, il y a lieu de prononcer pour ce motif invoqué pour la première fois en appel, l'annulation totale de l'arrêté querellé du 23 février 2007 ;
15. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis à la Cour, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner l'annulation de l'arrêté en litige ;
16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. I...G..., Mme F...C...et Mme H...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ; qu'il y a lieu, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, de prononcer l'annulation dudit jugement ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
18. Considérant, en premier lieu, que les conclusions présentées au titre de ces dispositions par l'association Chabannaise pour la qualité de vie et M. B...D...dont la demande d'annulation devant le tribunal était irrecevable doivent être rejetées par voie de conséquence ;
19. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. I...G..., Mme F...C...et MmeH..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, versent à la société Eco Delta Développement la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par cette société à l'encontre de l'association Chabannaise pour la qualité de vie et M. B...D... ;
20. Considérant en dernier lieu que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par M. I...G..., Mme F...C...et MmeH... ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête est, en tant qu'elle émane de l'association Chabannaise pour la qualité de vie et de M. B...D..., rejetée.
Article 2 : Le jugement n° 0705546 du 25 février 2009 en tant qu'il rejette la demande de M. I... G..., Mme F...C...et Mme E...H...et l'arrêté, en date du 23 février 2007, par lequel le préfet des Alpes de Haute-Provence a délivré un permis de construire à la société Eco Delta Développement pour la construction de cinq éoliennes d'une hauteur de 125 mètres, au lieudit " Les Marines " à Chateauneuf Val Saint-Donnat sont annulés.
Article 3 : Les conclusions de la société Eco Delta Développement tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. I...G..., Mme F...C...et de Mme E... H...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Chabannaise pour la qualité de vie, à M. B... D..., à M. I...G..., à Mme F...C..., à Mme E... H..., à la société Eco Delta Developpement et à la ministre de l'égalité des territoires et du logement.
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