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10/12/2013 | FRANCE | N°11MA02748

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 10 décembre 2013, 11MA02748


Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 9 mai 2012, présentés pour M. D... A..., demeurant..., par Me B...C... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806300 du 16 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a, à la demande de la commune de Noyers-sur-Jabron, condamné à libérer dans un délai de trois mois à compter de sa notification, le logement communal qu'il occupe, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce déla i, et à payer à ladite

commune au titre de l'occupation sans droit ni titre du domaine public la somm...

Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 9 mai 2012, présentés pour M. D... A..., demeurant..., par Me B...C... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806300 du 16 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a, à la demande de la commune de Noyers-sur-Jabron, condamné à libérer dans un délai de trois mois à compter de sa notification, le logement communal qu'il occupe, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce déla i, et à payer à ladite commune au titre de l'occupation sans droit ni titre du domaine public la somme de 381,12 euros par mois du 1er juillet 2006 au 10 septembre 2008 et la somme de 460 euros par mois à compter de cette dernière date et jusqu'à la libération complète des locaux, sous déduction éventuelle des loyers qui auraient été versés pour cette période, a mis à sa charge une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté ses conclusions reconventionnelles ainsi que celles présentées au titre des mêmes dispositions ;

2°) de rejeter la demande de la commune de Noyers-sur-Jabron, à titre principal, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, et, à titre subsidiaire, au fond ;

3°) de dire et juger que la commune de Noyers-sur-Jabron bénéficie d'un enrichissement sans cause d'un montant de 5 318,07 euros au 1er juillet 2006 compte tenu des travaux qu'il a effectués et des paiements qu'il a opérés et de constater qu'il paie un loyer de 76,22 euros mensuel depuis le 1er juillet 2006 et, en conséquence, de procéder à la compensation entre les sommes réclamées et l'enrichissement sans cause et les sommes déjà réglées ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de modérer l'indemnité d'occupation sollicitée pour la ramener à de plus justes proportions compte tenu de l'évolution de l'indice INSEE du coût de la construction, de l'état des lieux et des travaux réalisés et restant à réaliser ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Noyers-sur-Jabron une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques :

Vu la décision du président de la Cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de Mme Evelyne Paix, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Bédier, président de la 7ème Chambre ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 2013 :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, rapporteur,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

1. Considérant que par convention en date du 30 avril 1993, la commune de Noyers-sur-Jabron a donné à bail à M. A...les locaux de l'ancienne école communale moyennant le versement d'un loyer mensuel de 1 000 francs (152,44 euros), dont celui-ci était déchargé en contrepartie de travaux de réhabilitation des locaux ; que par convention de mise à disposition du domaine public en date des 13 juin et 4 juillet 1996, la commune a mis les mêmes locaux à disposition de M. A...pour une durée de 9 années, à compter du 1er juillet 1996 et jusqu'au 30 juin 2005, moyennant un loyer mensuel de 2 500 francs (381,12 euros) ramené à la somme de 500 francs (76,22 euros), également à charge pour celui-ci de réhabiliter les locaux ; que par délibération en date du 29 mars 2005, le conseil municipal a décidé de transformer ladite convention, à son expiration, en " bail d'habitation traditionnel " moyennant un loyer mensuel de 460 euros ; qu'alors que ce nouveau contrat n'a jamais été signé, au motif, en particulier, que M. A...estimait le montant du loyer demandé trop élevé, la commune a signifié à celui-ci, par courrier recommandé avec accusé de réception du 30 novembre 2005, qu'elle mettait fin à ladite convention à compter du 1er juillet 2006 ; que M. A...relève appel du jugement du 16 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a, à la demande de la commune de Noyers-sur-Jabron, condamné à libérer dans un délai de trois mois à compter de sa notification, le logement communal qu'il occupe, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai, et à payer à ladite commune au titre de l'occupation sans droit ni titre du domaine public la somme de 381,12 euros par mois du 1er juillet 2006 au 10 septembre 2008 et la somme de 460 euros par mois à compter de cette dernière date et jusqu'à la libération complète des locaux, sous déduction éventuelle des loyers qui auraient été versés pour cette période, et a mis à sa charge une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté ses conclusions reconventionnelles ainsi que celles présentées au titre des mêmes dispositions ;

Sur l'exception d'incompétence de la juridiction administrative et la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public. " ; qu'aux termes de l'article L. 2331-1 dudit code : " Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : 1° Aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires " ; qu'aux termes de l'article L. 2141-1 du même code : " Un bien d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement. " ; qu'en application de ces dernières dispositions, le bien d'une personne publique qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public continue toutefois, en l'absence d'acte administratif exprès constatant son déclassement, à faire partie de son domaine public ;

3. Considérant que relèvent de la compétence de la juridiction administrative les litiges relatifs à la passation, à l'exécution ou à la résiliation des contrats comportant occupation du domaine public ainsi que, sous réserve de dispositions législatives spéciales, et sauf dans le cas de voie de fait ou dans celui où s'élève une contestation sérieuse en matière de propriété, les litiges nés de l'occupation sans titre du domaine public, que celle-ci résulte de l'absence de tout titre d'occupation ou de l'expiration, pour quelque cause que ce soit, du titre précédemment détenu ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le bâtiment à usage d'habitation dénommé " ancienne école du Couvent ", qui était à l'origine affecté au service public scolaire en étant spécialement aménagé à cet effet, faisait partie du domaine public de la commune de Noyers-sur-Jabron ; que la circonstance que ledit bâtiment, inoccupé depuis la fermeture de l'école en 1960, a fait l'objet, après avis favorable du 13 septembre 2002 du préfet des Alpes-de-Haute-Provence, d'une désaffectation matérielle, ne saurait avoir pour objet ou pour effet de modifier la qualification juridique dudit bien ; que, si, par délibération en date du 29 mars 2005, le conseil municipal de la commune a décidé, ainsi que cela a été exposé précédemment, de transformer la convention de mise à disposition du domaine public, à son expiration, en " bail d'habitation traditionnel ", cette délibération ne peut être regardée, contrairement à ce que soutient le requérant, comme constitutive d'un acte administratif prononçant le déclassement du bâtiment litigieux ; qu'ainsi ledit bâtiment, en l'absence de tout acte exprès de déclassement, constitue une dépendance du domaine public de la commune ; que dans ces conditions, l'exception d'incompétence ne peut qu'être écartée et le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sur l'occupation sans droit ni titre du domaine public et l'indemnité y afférente :

5. Considérant, en premier lieu, que la convention de mise à disposition signée entre la commune de Noyers-sur-Jabron et M. A...en date des 13 juin et 4 juillet 1996, qui était relative à l'occupation du domaine public, n'était pas, contrairement à ce que soutient le requérant, soumise à la législation sur les baux d'habitations de droit commun et a pu légalement prévoir que " la mise à disposition est consentie pour une durée de 9 années à compter du 1er juillet 1996 pour se terminer le 30 juin 2005 de mise à disposition. A l'expiration de cette première période, cette mise à disposition se continuera par tacite reconduction d'année en année, sauf à la partie qui entendra s'y opposer à aviser l'autre trois mois avant l'arrivée du terme " ; qu'en application de ces stipulations, la commune a pu régulièrement signifier à M. A..., par courrier recommandé avec accusé de réception du 30 novembre 2005, soit plus de trois mois avant l'arrivée à terme de cette convention de mise à disposition dudit bien le 30 juin 2006, qu'elle mettait fin à ladite convention à compter du 1er juillet 2006 ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que M. A...occupait sans titre le logement communal depuis le 1er juillet 2006 et lui ont enjoint de libérer les lieux dans le délai de trois mois suivant la notification du jugement et sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. " ;

7. Considérant que la commune de Noyers-sur-Jabron a droit à une indemnité compensant les loyers dont elle a été privée à compter du 1er juillet 2006 et jusqu'à la fin de l'occupation irrégulière de son domaine public ; que M. A...soutient que la somme mensuelle de 460 euros réclamée par la commune à ce titre constitue une augmentation disproportionnée du montant du loyer ; que toutefois, si le montant initial du loyer, en 1996, s'élevait à la somme de 381,12 euros, ramenée à celle de 76, 22 euros, il ressort des pièces du dossier que ce montant correspondait à un loyer minoré afin de compenser le coût des travaux de réhabilitation pris en charge par M.A... ; que par ailleurs, eu égard à la nature de l'occupation irrégulière en cause, s'agissant d'un logement de type T4 avec terrain, le montant de l'indemnité compensatrice de loyer mensuel de 460 euros, montant qui a en outre été ramené à la somme de 381,12 euros par les premiers juges pour la période allant du 1er juillet 2006 au 10 septembre 2008, n'apparaît pas, nonobstant la circonstance que des travaux restent à réaliser, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, le moyen tiré de l'existence d'une telle erreur doit être écarté ;

Sur la demande de compensation présentée par M. A...:

8. Considérant que la demande indemnitaire présentée à titre reconventionnel par M. A... devant le tribunal tendant à ce que soit effectuée une compensation entre l'enrichissement sans cause dont aurait, selon lui, bénéficié la commune pour un montant de 5 318,07 euros, compte tenu des travaux qu'il a effectués et des paiements qu'il a opérés jusqu'au 1er juillet 2006, et les sommes réclamées relève, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges qui ont rejeté cette demande sur le fond, d'un litige distinct du présent litige, qui concerne l'occupation sans droit ni titre par M. A...du domaine public communal à compter du 1er juillet 2006 ; que, dès lors, cette demande ainsi que les conclusions présentées par M. A... en appel et tendant aux mêmes fins doivent être rejetées comme irrecevables ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à quitter les lieux et à payer à la commune de Noyers-sur-Jabron les sommes susmentionnées et a rejeté ses demandes et à demander l'annulation dudit jugement et le rejet de la demande de la commune de Noyers-sur-Jabron présentée devant le tribunal ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et à la commune de Noyers-sur-Jabron.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA02748
Date de la décision : 10/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction - Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel - Domaine - Domaine public - Occupation.

Domaine - Domaine public - Consistance et délimitation - Domaine public artificiel - Biens faisant partie du domaine public artificiel.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : MICHEL CHAPUIS et ARNAULT CHAPUIS AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-12-10;11ma02748 ?
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