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21/06/2013 | FRANCE | N°11MA00307

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 21 juin 2013, 11MA00307


Vu la requête, enregistré le 24 janvier 2011, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me C... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0801255 et 0805291 du 16 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités correspondantes qui lui sont réclamés au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat

la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...

Vu la requête, enregistré le 24 janvier 2011, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me C... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0801255 et 0805291 du 16 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités correspondantes qui lui sont réclamés au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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...........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2013 :

- le rapport de M. Haïli, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., artisan taxi, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des années 2003 et 2004, engagée par avis du 16 janvier 2006, à l'issue de laquelle un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité a été établi le 26 avril 2006 et une reconstitution des recettes opérée, en distinguant d'une part le chiffre d'affaires provenant de l'exploitation des deux véhicules de M.B..., d'autre part celui correspondant aux versements constatés sur un compte bancaire en provenance de divers organismes de sécurité sociale et mutuelles pour un service de transport sanitaire ; que les rectifications subséquentes ont été notifiées par lettre n° 3924 du 29 août 2006, confirmées par lettre 3926 du 6 novembre 2006 en matière de bénéfices industriels et en matière de taxe sur la valeur ajoutée, selon la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; que M. B...relève appel du jugement du 16 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités correspondantes qui lui sont réclamés au titre des années 2003 et 2004 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, compte tenu de la nature de l'impôt sur le revenu et de celle de la taxe sur la valeur ajoutée, et quels qu'aient été en l'espèce les liens de fait et de droit entre ces deux impositions, eu égard à l'existence de deux contribuables distincts, M. B...d'une part, le foyer fiscal constitué par M. et MmeB..., d'autre part, le tribunal devait statuer par deux jugements séparés respectivement à l'égard du foyer fiscal que formaient M. et MmeB..., en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, et M. B...en tant que seul redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ; que c'est en méconnaissance de cette règle d'ordre public que les premiers juges ont statué par un seul jugement sur l'ensemble des conclusions présentées dans deux demandes distinctes dont ils ont à tort opéré la jonction ; que, par suite, il y a lieu pour la Cour d'annuler le jugement attaqué, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Marseille en tant qu'elle concerne les suppléments de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes qui lui sont réclamés au titre des années 2003 et 2004, alors que les mémoires et les pièces se rapportant au litige correspondant à l'impôt sur le revenu et les pénalités correspondantes que M. et Mme B...contestent ont été enregistrés par le greffe de la Cour sous le numéro distinct 11MA01262 ; qu'il est statué sur ce dernier litige par un arrêt distinct de ce même jour ;

Sur le bien fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. " ;

4. Considérant qu'il est constant que M. B... n'a pas présenté de comptabilité ; qu'il appartient, dès lors, au requérant, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération de l'ensemble des impositions litigieuses ; qu'il lui revient, dès lors, de démontrer soit que la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires est excessivement sommaire ou radicalement viciée dans son principe, soit de proposer une méthode de reconstitution plus précise que celle retenue par l'administration ;

En ce qui concerne la méthode de reconstitution des recettes suivie par l'administration :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour reconstituer le chiffre d'affaires réalisé et taxable en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004, l'administration fiscale a déterminé le kilométrage global réalisé par les deux véhicules de taxi du requérant en retenant le kilométrage et le pourcentage de 50 % de roulage à vide proposés par le contribuable puis a déterminé un tarif de course moyenne de 12, 26 euros pour 2003 et de 12, 61 euros pour 2004 à partir d'un kilométrage moyen de 7 km, mais en écartant la méthode du requérant basée sur un protocole d'accord entre la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et des organisations syndicales de taxis présentant une estimation du tarif d'une course moyenne, en partie basée sur le " tarif A ", soit un retour en charge, dès lors que le requérant avait estimé lui-même le roulage à vide sans client à 50 % du kilométrage effectué au cours de l'année ; que le service a ainsi calculé la course moyenne en course de jour selon les tarifs en vigueur issus de l'arrêté préfectoral pour l'ensemble des courses de taxi sur le département, notamment le " tarif C " ;

6. Considérant que si à l'appui de sa requête d'appel, M. B...conteste l'application d'un " tarif C " correspondant à un retour à vide au lieu d'un " tarif A " relatif à des courses avec retour en charge, le service n'a retenu ce dernier qu'après avoir appliqué un abattement de 50 % sur le nombre de kilomètres parcourus pour tenir compte justement du roulage à vide ; qu'en outre la prise en compte d'un " tarif A ", qui devrait alors s'appliquer à la totalité du kilométrage au compteur des véhicules, alors que le requérant ne justifie pas d'une proportion d'activité de 100 % avec retour en charge, fait apparaître, ainsi que le démontrent les calculs effectués par l'administration dans sa décision de rejet de la réclamation de l'intéressé, un chiffre d'affaires supérieur à celui déterminé par le service à partir de la combinaison " tarif C " et " tarif A " ; que par ailleurs, M. B...propose une autre méthode à partir d'une étude parue en août 2006 dans la revue " L'artisan du taxi " selon laquelle le prix moyen de la course de sept kilomètres ressortirait à 8, 63 euros dans le département des Bouches-du-Rhône ; que toutefois, ce prix ne correspond pas aux tarifs admis par M. B...dans un courrier du 12 avril 2006, de 8, 94 euros en 2003 et de 9, 14 euros en 2004 ; que le requérant ne saurait utilement, pour infirmer la méthode retenue par le vérificateur, invoquer des éléments tirés, non de sa propre exploitation, mais d'études professionnelles générales faisant apparaître des normes moyennes qui ne sont pas identiques à celles qu'il pratique, concernant notamment les tarifs ; qu'enfin, le vérificateur a exclu de sa méthode la totalité des suppléments de prix, comme les suppléments pour bagages, quatrième personne, animaux ou péages, ainsi que les prises en charge en gares et enceintes portuaires ; que le requérant ne propose pas de méthode de reconstitution plus précise que celle retenue par l'administration ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'établit pas que la méthode de reconstitution retenue par l'administration serait viciée dans son principe ou excessivement sommaire ; que, dès lors, M. B...qui n'apporte aucun élément de nature à établir l'exagération de la base d'imposition retenue par le service en matière de taxe sur la valeur ajoutée, n'est pas fondé à demander la décharge des impositions qui résultent de la reconstitution de son chiffre d'affaires ;

En ce qui concerne l'application de la taxe sur la valeur ajoutée sur les crédits bancaires constatés sur le compte bancaire ouvert à la " Bonasse Lyonnaise de Banque " :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : "I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel." ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soit le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) " ;

9. Considérant que dans le cadre de la vérification de comptabilité et après l'exercice de son droit de communication auprès d'organismes de sécurité sociale, le service a constaté que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône versait des rémunérations à M. B...en qualité d'artisan taxi pour des prestations de transport médicalisé par taxi ; que le recoupement des comptes bancaires avec la comptabilité présentée par M. B...n'ayant pas permis d'effectuer des correspondances, le service a obtenu du contribuable la présentation d'un compte bancaire " Bonnasse Lyonnaise de Banque " où apparaissent des versements de divers organismes de sécurité sociale ; que le service a relevé que ce compte non retracé en comptabilité était cependant régulièrement crédité par les rémunérations des prestations de services effectuées pour le compte des assurés sociaux de ces organismes ;

10. Considérant qu'à l'appui de sa contestation, le requérant fait valoir que ce n'est pas lui qui effectue les prestations mais d'autres taxis par l'intermédiaire de l'association " radio TUPP taxi " dont il est le président, dès lors qu'il est le seul bénéficiaire de l'agrément de sécurité sociale et que les organismes sociaux refusent d'agréer les personnes morales de type associatif ; que, selon ses dires, c'est donc par son intermédiaire en sa qualité d'artisan taxi que transitent par le compte bancaire en litige les paiements des organismes sociaux vers l'association qui rémunère ensuite les taxis prestataires de ces services ; que toutefois, alors que l'association n'a pu présenter à l'administration des pièces prouvant la réalisation des prestations par d'autres taxis, l'administration a relevé des factures à l'en-tête de l'association présentant M. B...comme artisan taxi prestataire des services effectués ; que par suite, l'administration, tirant les conséquences du défaut d'écritures des mouvements bancaires dans la comptabilité de M.B..., du défaut de justificatifs des prestations effectuées par des taxis tiers et de la présentation desdites factures, a regardé comme soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, selon les dispositions de l'article 256 du code général des impôts, les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel et a appliqué le taux de 5, 5 % en vigueur pour les transports de taxi pendant les exercices 2003 et 2004 ; que M. B...n'établit pas que certaines sommes constatées en entrées sur ses comptes bancaires se rapportent à des prestations effectuées par ses confrères dont la rémunération leur est ensuite attribuée, après que lui-même en ait reversé le montant au groupement ; qu'ainsi M. B...ne justifie pas que tout ou partie de ces entrées bancaires ne seraient pas constitutives de recettes professionnelles personnelles ; que si le requérant conteste le principe de la fourniture de prestations de transport médicalisé, soit directement soit par l'intermédiaire de l'association "radio TUPP taxi ", il résulte des éléments précédents que l'intéressé doit être regardé comme exerçant, à titre individuel, une activité indépendante de prestataire de services ; que, dès lors, les livraisons de biens et les prestations de service effectuées par lui à titre onéreux sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'enfin si M. B...soutient que la réintégration d'une partie des sommes figurant sur ses comptes bancaires ferait double emploi avec la reconstitution opérée par ailleurs, l'administration indique, sans être sérieusement contredite, que la prise en compte de ces sommes à titre de suppléments de recettes ne signifie pas nécessairement qu'elles rémunéreraient des prestations de transport médicalisé que M. B... effectuerait personnellement avec les deux seuls véhicules dont il dispose, mais constituent la contrepartie commerciale de son intervention dans ce type de transport effectué par des tiers en liaison avec l'organisme " radio TUPP taxi" ;

Sur les pénalités :

11. Considérant que pour demander la décharge de la majoration de 40 % dont les droits mis à sa charge ont été assortis, M. B...fait valoir que la reconstitution par l'administration de son chiffre d'affaires et le montant des rectifications ne suffisent pas à établir sa mauvaise foi ; que toutefois le défaut de présentation de la comptabilité de son entreprise, qui était de nature à faire obstacle à l'identification des recettes perçues au titre de la période en litige, et les omissions de recettes pour des montants significatifs, dont l'intéressé ne pouvait ignorer l'existence, traduisent le caractère délibéré des omissions constatées ; que de même, en l'absence de tout justificatif de la part du contribuable, l'administration a démontré que le requérant avait encaissé des recettes non déclarées pour son intervention dans les opérations de transport sanitaire réalisées en liaison avec l'organisme " radio TUPP taxi " ; que par suite, l'administration a pu valablement assortir les droits en principal de la majoration prévue à l'article 1728-3 du code général des impôts ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à obtenir la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux auxquels il a été assujetti ; que, par voie de conséquence, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 novembre 2010 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Marseille tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes au titre de la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 11MA00307


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA00307
Date de la décision : 21/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : MONDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-06-21;11ma00307 ?
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