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27/05/2013 | FRANCE | N°13MA00917

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 27 mai 2013, 13MA00917


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 4 mars 2013 sous le n° 13MA00917, présentée pour Mme E... A...B..., demeurant au..., par Me Betrom ;

Mme A... B...demande à la Cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution du jugement n° 1203063 du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 octobre 2012 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un

titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 4 mars 2013 sous le n° 13MA00917, présentée pour Mme E... A...B..., demeurant au..., par Me Betrom ;

Mme A... B...demande à la Cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution du jugement n° 1203063 du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 octobre 2012 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

2°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour provisoire en attendant la décision au fond ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me Betrom

au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient qu'elle est mariée, depuis dix sept ans, avec un ressortissant marocain titulaire d'une carte de résident de dix ans ; que de cette union sont nés quatre enfants tous titulaires d'un document de circulation ; que les deux premiers enfants, Achraf et Oumel, nés en 2000 et 2005 au Maroc, sont entrés en France avec leur père et sont régulièrement scolarisés ; que Achraf souffre de troubles psychomoteurs et est pris en charge par une structure spécialisée ; qu'elle est entrée en France sous couvert d'un visa Schengen le 1er février 2010 et a donné naissance à deux enfants Amir et Immane âgés de 2 ans et de 21 mois à la date de la décision attaquée ; qu'elle ne peut pas bénéficier de la procédure de regroupement familial faute de revenus suffisants ; qu'elle a accouché le jour de la décision attaquée ; qu'elle n'a pas bénéficié d'un prolongement de délai de départ conformément à la directive 2008/115/CE ; que par suite, la décision contestée viole les dispositions des articles L. 313-11 7° code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le jugement entraîne donc des conséquences difficilement réparables et que les moyens énoncés sont suffisamment sérieux en l'état de l'instruction pour prononcer le sursis à exécution contre la décision l'obligeant à quitter le territoire ;

Vu la requête au fond, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 1er mars 2013 sous le n° 13MA00910 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2013, présenté par le préfet du Gard qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que les moyens en l'état de l'instruction ne sont pas sérieux; que l'intéressée peut bénéficier du regroupement familial ; qu'elle est entrée sur le territoire en 2010 soit depuis seulement deux ans et demi à la date de la décision attaquée alors qu'elle a été séparée depuis 1995 de son conjoint; que rien n'empêche la cellule familiale de s'établir au Maroc du fait du jeune âge des enfants ; que l'autorité administrative n'avait pas connaissance du handicap du fils aîné; que la décision ne viole ni les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article L. 311-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressée ne pouvait prétendre à l'allongement du délai de départ conformément aux dispositions de la directive 2008/115/CE dès lors, qu'elle n'a pas porté à la connaissance de l'administration son état de grossesse ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 9 avril 2013, admettant Mme A...B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2012 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. C...Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2013, le rapport de M. Marcovici, rapporteur ;

1. Considérant que Mme A...B..., de nationalité marocaine, demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 octobre 2012 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative : " (...) le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction " ;

3. Considérant que le jugement par lequel un tribunal administratif rejette une demande tendant à l'annulation d'un refus de délivrance d'un titre de séjour n'entraîne, en tant que tel, aucune mesure d'exécution susceptible de faire l'objet du sursis prévu à l'article R. 811-17 précité ; qu'il appartient seulement au requérant, le cas échéant, de demander la suspension de la décision administrative dont il estime que l'exécution serait susceptible de créer une situation d'urgence ; qu'il suit de là que la requête à fin de sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nîmes présentée par Mme A...B..., en tant qu'elle est dirigée contre le rejet de ses conclusions de première instance tendant à l'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé, ne peut qu'être rejetée ; qu'en revanche, l'exécution du jugement attaqué a mis fin au caractère suspensif, en vertu des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la demande de première instance pour ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, laquelle peut être mise en oeuvre d'office à tout moment par l'administration ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A... B...mariée depuis 1995 avec M. D...titulaire d'une carte de résident de dix ans, est entrée en France sous couvert d'un visa Schengen le 1er février 2010 ; qu'elle a donné naissance à deux enfants en 2010 et 2012 ; que la requérante et son époux ont également trois enfants, nés au Maroc qui résident en France ; que le fils aîné, Achraf, souffre de troubles psychomoteurs et est pris en charge par un centre spécialisé ; qu'il ressort des différents attestations que l'intéressée participe à la vie scolaire de ses enfants ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que son fils Achraf, souffrant de troubles psychomoteurs, a besoin de la présence de sa mère comme l'atteste le principal du collège ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire est intervenue alors que l'intéressée a accouché de son quatrième enfant en l'état d'allaitement ; que les enfants de l'intéressée sont régulièrement scolarisés et que son mari est titulaire d'une carte de séjour de dix ans et qu'il a donc vocation à s'établir en France avec ses enfants ; que par suite, l'exécution du jugement, en tant qu'il rejette les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, est susceptible d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :" 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

5. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention de New York sur les droits de l'enfant sont en l'état de l'instruction sérieux ; que Mme A...B...est par suite fondée à demander le sursis à exécution du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions présentées à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français ; que la présente décision implique qu'il soit enjoint au préfet du Gard de lui délivrer une autorisation de séjour provisoire en attendant la décision de la Cour de céans sur la requête qu'elle a présentée, tendant à l'annulation du jugement ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

7. Considérant que, par application de ces dispositions, et sous réserve que Me Betrom, avocat de Mme A...B..., renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il est sursis à l'exécution du jugement n° 1203063 du 7 février 2013 du tribunal administratif de Nîmes, en tant qu'il rejette les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête n° 13MA00910 présentée par Mme A...B....

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Gard de délivrer à Mme A... B...une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que la Cour ait statué sur la requête 13MA00910.

Article 3 : L'Etat versera à Me Betrom, sous réserve que celui-ci renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, une somme de 1 200 euros (mille deux cents euros), en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

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N° 13MA00917


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00917
Date de la décision : 27/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : BETROM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-05-27;13ma00917 ?
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