Vu la requête, enregistrée par télécopie le 13 août 2010, régularisée par courrier le 18 août 2010, sous le n° 10MA03276, présentée pour la Sarl Le Pressoir, dont le siège social est 7 rue Joseph Cers à Grau d'Agde (34300), par Me Maurel, avocat ;
La Sarl Le Pressoir demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900524, 0900525 en date du 17 juin 2010, par lesquels le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et les droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 2001 à 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des sommes correspondantes ;
3°) de condamner l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à lui verser la somme de 3 000 euros ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2013,
- le rapport de M. Louis, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la Sarl Le Pressoir, qui exploitait un hôtel-restaurant à Saint-Chinian a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos au cours des années 2001 à 2003 ; que le vérificateur a considéré la comptabilité qui lui a été présentée comme n'étant ni régulière ni probante, l'a écartée et a reconstitué le chiffre d'affaires et les résultats des exercices selon la méthode, dite " des vins " ; que le service a alors notifié à la société requérante des redressements selon la procédure contradictoire en matière d'impôt sur les sociétés et selon la procédure de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que la Sarl Le Pressoir a contesté ces redressements et demandé la saisine de la commission départementale des impôts ; que l'avis émis par cette dernière n'a pas été suivi par l'administration qui a assujetti la Sarl à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt au titre des trois années en cause et à un complément de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période correspondant aux mêmes années ; que la Sarl Le Pressoir relève régulièrement appel du jugement en date du 17 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, après avoir joint les deux requêtes dont il était saisi en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, les a rejetées ;
Sur le caractère probant de la comptabilité :
2. Considérant que la société requérante soutient que le rejet de sa comptabilité n'est pas justifié, en tant qu'il portait sur l'exercice clos en 2003 et fait valoir que les motifs invoqués par le service ne concernent en réalité que les seules irrégularités constatées au titre des exercices 2001 et 2002 ; que si, ainsi que le soutient la requérante, la régularité de la comptabilité est appréciée exercice par exercice et si la commission départementale des impôts a relevé qu'une partie des griefs émis dans la proposition de rectification à l'encontre de la comptabilité de l'exercice clos le 31 mars 2003 concernaient en réalité celles des exercices clos en 2001 et 2002, le service, dans ses écritures en défense fait valoir sans être contredit, qu'au même titre que pour les exercices clos en 2001 et 2002, les recettes de l'exercice clos en 2003 ont été portées pour un montant globalisé sur un agenda en fin de journée et qu'aucune distinction n'a été opérée entre les recettes d'espèces, celles en provenance des cartes bleues et celles issues des chèques encaissés ; que les montants journaliers de recettes ne proviennent ainsi que de la seule totalisation des sommes inscrites sur le double des notes remises aux clients ; que ces doubles étaient au demeurant utilisés tant pour l'activité de restauration que pour celle d'hôtellerie ; que le vérificateur a également constaté que de nombreuses fiches ne comportaient pas de mode de paiement et que les montants inscrits dans les agendas ont été ensuite portés en comptabilité au débit du compte 530, et ce, quel que soit le mode de paiement ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et dès lors qu'une comptabilité qui ne distingue pas les recettes provenant d'activités distinctes et qui enregistre globalement les recettes en fin de journée sans les justifier par des pièces exhaustives et sans que les encaissements puissent se voir attribuer une chronologie fiable, ne présente pas de caractère probant, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du caractère non probant de la comptabilité de l'ensemble des exercices courant de 2001 à 2003 ; que la seule circonstance, invoquée par la société, que les modalités de paiement ont été portées sur certaines notes remises aux clients n'est pas de nature à remettre en cause le rejet de la comptabilité, dès lors que la société requérante ne produit au soutien de ses allégations que trois notes ; que c'est donc à bon droit que le vérificateur a pu rejeter comme étant affectée de graves irrégularités la comptabilité de la société, y compris celle de l'exercice clos en 2003, avant de reconstituer son chiffre d'affaires ;
Sur la charge de la preuve :
4. Considérant en premier lieu, qu'ainsi que le soutient l'administration, la charge de la preuve en matière de taxe sur la valeur ajoutée pèse sur la Sarl Le Pressoir, la société ayant été régulièrement taxée d'office ;
5. Considérant qu'en matière d'impôt sur les sociétés et contrairement à l'appréciation des premiers juges, dès lors que la commission départementale des impôts, dans l'avis qu'elle a émis le 14 mars 2006, a relevé que " s'agissant de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires, à supposer que la méthode des vins puisse paraître opérante, la commission estime qu'il aurait été plus pertinent, en ce qui concerne la reconstitution des recettes de l'hôtel, d'utiliser celle " des draps lavés ", dès lors qu'il apparaît que l'exploitant comptabilisait des factures de pressing " et qu'elle a estimé, contrairement à l'administration, que la comptabilité de l'exercice 2003 était probante et qu'elle a relevé, pour les exercices 2001 et 2002, la pertinence du recours à une autre méthode que celle utilisée par le vérificateur, elle ne saurait être regardée comme ayant émis un avis favorable à l'administration ; que celle-ci, n'ayant pas suivi cet avis, supporte, en matière d'impôt sur les sociétés, la charge de la preuve, nonobstant les irrégularités dont est entachée la comptabilité de la société, s'agissant des trois exercices en litige ;
Sur la méthode de reconstitution :
6. Considérant que pour reconstituer les recettes, le vérificateur a globalisé les recettes afférentes aux activités de restauration et d'hôtellerie ; qu'il a utilisé la méthode des vins, consistant à dépouiller les factures d'achat de vins et les doubles des notes remises aux clients et à faire ainsi apparaître le rapport existant entre le montant total de la note et celui des vins consommés ; que s'agissant des exercices clos en 2001 et 2002, le vérificateur a constaté que toutes les recettes, quelle que soit la nature de l'activité qui était à l'origine desdites recettes, étaient enregistrées sur les doubles des notes remises au client, la société portant sur ces notes, à la fois les recettes d'hôtel et celles de restauration, les forfaits de pension complète et de demi-pension n'incluant pas les ventes des vins ; que le vérificateur ayant, d'une part, isolé les recettes provenant de la vente de vins et de boissons et ayant, ainsi qu'il a été dit plus haut, à partir du dépouillement des notes, établi le pourcentage qu'elles représentaient par rapport aux recettes de la société ; qu'il a, dans un second temps, procédé au dépouillement exhaustif des factures d'achat de vins en vue de déterminer les achats revendus au titre de chaque exercice, après correction des stocks d'entrée et de sortie et en prenant en compte la totalité des notes remises aux clients en 2001 et 2002, ainsi que seize des vingt et un carnets de ces notes pour l'année 2003, il a appliqué aux quantités ainsi déterminées les prix relevés sur les notes remises aux clients, prenant en compte pour l'exercice 2002, les observations de la société à propos des fiches repas en retenant pour ces fiches une bouteille de vins pour quatre personnes ;
7. Considérant que si la Sarl Le Pressoir soutient que la méthode dite " des vins " est dépourvue de toute pertinence, s'agissant de l'activité d'hôtellerie, le service justifie, au contraire, la globalité du recours à cette méthode par la circonstance que la comptabilité, si elle distingue les recettes selon la nature de l'activité, repose sur des pièces justificatives qui mêlent les deux activités ;
8. Considérant qu'à supposer même que soit admis le caractère sommaire de la méthode suivie en vue de la reconstitution du chiffre d'affaire d'une activité composite, la société requérante, qui se borne à reprendre la proposition de la commission départementale des impôts suggérant le recours à la méthode des notes de blanchisserie, ne propose de lui substituer aucune autre méthode, plus appropriée aux données propres à l'entreprise et susceptible de mettre la Cour en mesure de prononcer une décharge partielle ; que le service fait valoir, sans être contredit, que la Sarl requérante blanchissait elle-même ses draps et sa literie, privant de ce fait le vérificateur de toute possibilité d'extrapoler à partir des factures de blanchisserie le chiffre d'affaires de l'activité d'hôtellerie ; que dès lors, l'administration doit être regardée comme s'étant trouvée, dans les circonstances particulières de l'espèce, dans l'impossibilité de recourir à une autre méthode que celle des vins ;
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la Sarl Le Pressoir n'est pas fondée à se plaindre que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des droits supplémentaires en matière de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 2001 à 2003 ; que doivent également être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la Sarl Le Pressoir est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Le Pressoir et au ministre de l'économie et des finances.
''
''
''
''
N° 10MA03276 2
fn