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22/03/2013 | FRANCE | N°09MA03885

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 22 mars 2013, 09MA03885


Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2009, présentée pour la SARL Mosaïques, (anciennement L'Amnésia), dont le siège est Ile des Loisirs à Cap d'Agde (34300), représentée par M. André Boudou son gérant en exercice, par Me Di Dio ;

La SARL Mosaïques demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602078 du 5 avril 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et des pénalités corre

spondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 e...

Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2009, présentée pour la SARL Mosaïques, (anciennement L'Amnésia), dont le siège est Ile des Loisirs à Cap d'Agde (34300), représentée par M. André Boudou son gérant en exercice, par Me Di Dio ;

La SARL Mosaïques demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602078 du 5 avril 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003, et d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er octobre 2001 au 30 septembre 2003,

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros HT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2013 :

- le rapport de M. Haïli, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL Mosaïques, précédemment dénommée L'Amnésia, dont le gérant est M. André Boudou, qui exploite durant les deux mois d'été une discothèque en plein air au Cap d'Agde, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2003 ; que l'administration fiscale a notifié à la société vérifiée selon la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales une proposition de rectification n° 3924 du 23 juillet 2004, puis à la suite des observations formulées par la société, a notifié des rectifications modifiées par lettres n° 3926 du 15 septembre 2004 et du 5 octobre 2004 ; que la SARL Mosaïques fait régulièrement appel du jugement du 24 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, et des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le moyen tiré du manquement à l'obligation d'impartialité :

2. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " ; que le paragraphe 5 du chapitre I de la charte, dans sa version alors applicable, permet aux contribuables qui rencontrent des difficultés lors du déroulement de la vérification de comptabilité dont ils font l'objet, de s'adresser à l'inspecteur départemental ou principal et ensuite à l'interlocuteur départemental spécialement désigné par le directeur des services fiscaux ; que selon le paragraphe 5 du chapitre III de la même charte : " si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal. Si après ces contacts des divergences subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur " ; que ces dispositions assurent au contribuable la garantie substantielle de pouvoir, pendant le déroulement de la vérification et lors de la conclusion de cette vérification puis avant la mise en recouvrement des impositions, s'adresser à l'inspecteur principal et à l'interlocuteur départemental pour un examen de ses divergences avec le vérificateur par un fonctionnaire soumis, en tant que tel, à l'obligation générale d'impartialité " subjective " ;

3. Considérant que la société appelante soutient, à l'appui du moyen tiré du non respect des conditions d'impartialité " subjective " et " objective " lors de la procédure de vérification de comptabilité litigieuse, que compte tenu des " interventions intempestives " de M. Garcia, inspecteur principal, notamment lors de la première vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL Mosaïques au titre de la période du 1er octobre 1995 au 31 décembre 1997, l'administration fiscale a illégalement confié la supervision et le suivi de la vérification sur place de la comptabilité de la SARL Mosaïques au même inspecteur principal ; que la circonstance que cet inspecteur principal, qui a contresigné la proposition de rectification du 23 juillet 2004 et les réponses aux observations du contribuable des 15 septembre et 5 octobre 2004, en apposant son visa pour l'application des sanctions exclusives de bonne foi, avait déjà exprimé son sentiment sur certains arguments présentés à l'occasion d'autres litiges fiscaux, n'implique pas à elle seule que ce fonctionnaire ait manqué à ses obligations, dès lors qu'il ne ressort pas de l'instruction qu'il ait manifesté une animosité personnelle à l'égard de la contribuable ou fait preuve de partialité ; que de même, la circonstance que le même agent ait pu intervenir à plusieurs reprises lors de la précédente vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL Mosaïques, ne suffit pas établir un parti pris ni à caractériser une atteinte à l'obligation d'impartialité " objective " ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de double recours hiérarchique :

4. Considérant que les dispositions de la charte citées au considérant n° 2 assurent au contribuable la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de rectification, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur sur les points où persiste un désaccord avec ce dernier ; que l'utilité d'un tel débat n'est pas affectée par la circonstance que le supérieur hiérarchique a participé aux opérations de vérification et co-signé la proposition de rectification ; que la SARL Mosaïques n'a pas été privée de la garantie prévue par les dispositions précitées de la charte du fait qu'en l'espèce, le supérieur hiérarchique du vérificateur, auquel il lui était indiqué qu'elle pourrait faire appel sur l'avis de vérification, a participé aux opérations de vérification ; qu'au surplus, elle n'a, à aucun moment de la procédure de vérification, manifesté son intention de demander à bénéficier de la garantie offerte par la charte du contribuable et ne peut donc utilement soutenir devant le juge de l'impôt qu'elle aurait été privée de cette garantie et que la procédure d'imposition serait, pour ce motif, irrégulière; qu'il n'est pas plus établi que la présence du supérieur hiérarchique, lors des opérations de contrôle, aurait privé la société d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

En ce qui concerne la durée de la vérification sur place :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales applicable aux rectifications en litige : " Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel de recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...). ", soit 5 000 000 francs ou 763 000 euros, s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, soit 1 500 000 francs ou 230 000 euros, s'il s'agit d'autres entreprises, ces limites s'appréciant en faisant abstraction de la taxe sur la valeur ajoutée et des taxes assimilées ; qu'il appartient au juge de l'impôt d'apprécier si la limite ainsi fixée a été ou non dépassée en tenant compte des rectifications apportées à bon droit par l'administration au chiffre d'affaires de l'entreprise ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui est dit ci-après que le chiffre d'affaires hors taxe de la SARL L'Amnésia reconstitué à bon droit excède la limite de 5 000 000 francs, soit 763 000 euros, qui lui était applicable en raison de la nature de son activité d'exploitation d'une discothèque ; que par suite, la procédure de vérification qui s'est déroulée du 17 février 2004 au 21 juillet 2004, au-delà de la durée de trois mois prévue par les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales n'est entachée d'aucune irrégularité ;

En ce qui concerne le débat oral et contradictoire :

7. Considérant que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une société commerciale a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat, soit avec les mandataires sociaux, soit avec leurs conseils, préposés ou mandataires de droit ou de fait ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors de la vérification de la comptabilité de la société requérante, qui s'est effectuée, à la demande de son gérant, dans les locaux de son comptable, le vérificateur s'est néanmoins rendu à quatre reprises sur place, afin de débattre avec son gérant ; qu'en outre, le vérificateur, qui a débuté ses investigations lors de la première visite sur place du 17 février 2004, a adressé ultérieurement, soit le 18 mai 2004, par écrit, à la demande du gérant qui ne souhaitait pas assister aux entrevues proposées, un questionnaire de demandes d'éclaircissements ; que dans ces conditions, la SARL Mosaïques n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie du débat oral et contradictoire, dès lors qu'il n'est pas établi qu'au cours des opérations de contrôle, le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues sur les constatations opérées ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission départementale des impôts :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, soit de la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 H du même code, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l'article 667 du même code. Les commissions peuvent également être saisies à l'initiative de l'administration. " ; qu'aux termes de l'article 1651 du code général des impôts : " La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est présidée par le président du tribunal administratif, ou par un membre de ce tribunal désigné par lui, ou par un membre de la cour administrative d'appel désigné, à la demande du président du tribunal, par celui de la cour. Elle comprend en outre trois représentants des contribuables et deux représentants de l'administration ayant au moins le grade d'inspecteur départemental. Pour les matières visées aux articles 1651 A et 1651 B, l'un des représentants des contribuables est un expert-comptable. Le président a voix prépondérante. " ; qu'aux termes du III de l'article 1651 A du même code : " Le contribuable peut demander que l'un des représentants des contribuables soit désigné par une organisation ou un organisme professionnel ou interprofessionnel, national, régional ou local, de son choix. Ce représentant doit être membre de cette organisation ou de cet organisme ou, à défaut, y exercer des fonctions salariées. " ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a rendu un avis le 5 avril 2005, sur saisine à l'initiative de l'administration, sur le différend l'opposant à la SARL L'Amnésia en ce qui concerne la détermination du montant du chiffre d'affaires réalisé et des résultats accusés par la société au cours de la période du 1er janvier 2000 au 30 septembre 2003 ; que la société, avisée par courrier du secrétariat de la commission en date du 26 novembre 2004 de la saisine par l'administration de cet organe consultatif, n'établit pas avoir demandé la présence d'un membre d'une organisation professionnelle de son choix lors de la séance où la commission départementale devait se prononcer sur son cas ; que, par suite, le moyen tiré d'une prétendue irrégularité de la composition de la commission départementale, du fait de la méconnaissance des dispositions précitées, ne peut être retenu ; que par ailleurs, la SARL Mosaïques, qui expose les règles de convocation, de quorum, de communication de documents aux membres de la commission, exigées par les dispositions applicables en l'espèce, n'articule aucun grief précis s'appuyant sur ses références textuelles et juridiques ; que par suite, cette branche du moyen, non assortie de précisions suffisantes, ne peut être qu'écartée ; que la circonstance que le magistrat ayant présidé la commission au cours de laquelle ont été appréciées les bases des impositions en litige ait jugé à l'audience du 5 avril 2005 du tribunal administratif de Montpellier une affaire concernant un précédent litige fiscal opposant la SARL Mosaïques à l'administration fiscale est sans incidence sur la régularité de la procédure de rectification litigieuse ; qu'en tout état de cause, en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont pas, par suite, de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications soumises à l'examen de la commission ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de signature de l'inspecteur départemental sur le courrier en date du 29 avril 2005 :

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par lettre du 29 avril 2005, l'administration fiscale a adressé à la SARL Mosaïques l'avis de la commission départementale des impôts et lui a indiqué les bases ou droits après avis de la commission qu'elle envisageait de retenir, en joignant un tableau récapitulant les bases des impositions et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée retenus aux différentes étapes de la procédure ; qu'aux fins d'obtenir la décharge des droits et pénalités en litige, la société appelante soutient que la procédure suivie à son encontre était irrégulière, au motif que, contrairement à la proposition de rectification et à la réponse aux observations du contribuable qui ont été contresignées par M. Garcia, inspecteur principal, pour la décision d'appliquer la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts, ce courrier du 29 avril 2005, qui renouvelle l'information sur les conséquences financières des rectifications apportées aux bases d'imposition à la suite de l'avis de la commission départementale, ne comporte pas le visa que l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales requiert d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal ;

12. Considérant toutefois qu'aux termes de l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales : " L'administration notifie l'avis de la commission au contribuable et l'informe en même temps du chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition. "; que le document par lequel l'administration notifie l'avis de la commission départementale des impôts et l'informe du chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition doit comporter l'ensemble des mentions permettant au contribuable de s'assurer de la compétence de l'agent signataire de ce document ; qu'en l'espèce, la notification de l'avis de la commission départementale comporte l'ensemble des mentions permettant au contribuable de s'assurer de la compétence de l'agent signataire, notamment son identité et son grade ; que le tableau assortissant le courrier du 29 avril 2005 fait apparaître que les bases ou droits notifiés et soumis à l'avis de la commission, les bases ou droits retenus par la commission et les bases ou droits retenus par l'administration sont identiques ; que ce courrier n'a par ailleurs modifié ni la base légale, ni la qualification ni les motifs des pénalités que l'administration avait initialement envisagé d'appliquer au contribuable, que dans ces conditions, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition pour absence du contreseing de l'inspecteur départemental sur le courrier du 29 avril 2005 doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve et le rejet de la comptabilité :

13. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : "Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis, soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l'article 667 du même code." ; que selon les dispositions de l'article R. 60-3 du livre des procédures fiscales : "L'avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé. (...)" ; qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) La charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge " ;

14. Considérant que la société requérante soutient que l'avis de la commission départementale des impôts est insuffisamment motivé et par suite, inopposable au contribuable, en sorte que la charge de prouver l'insuffisance du chiffre d'affaires déclaré incomberait à l'administration ; qu'il résulte de l'instruction que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a indiqué, dans l'avis rendu au cours de sa séance du 5 avril 2005 sur le litige, avec une précision suffisante les motifs pour lesquels elle a estimé que la comptabilité présentée par la société était dépourvue de valeur probante et que les bases d'imposition litigieuses pouvaient être, en vue de leur rectification, reconstituées par la méthode retenue par l'administration fiscale ; qu'il suit de là, que l'avis de la commission départementale est opposable à la société appelante ;

15. Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté par la SARL Mosaïques que toutes les bandes des caisses enregistreuses utilisées par la discothèque exploitée par elle étaient inexistantes pendant la période vérifiée et ne peuvent de ce fait être regardées comme justifiant le détail des recettes de l'activité " Bar " prépondérante, dont le cumul journalier était porté globalement en comptabilité ; que pour rejeter la comptabilité de la société comme dépourvue de valeur probante et procéder à la reconstitution des recettes de celle-ci, l'administration fiscale a également relevé que seuls des tickets totalisateurs journaliers récapitulatifs ont été produits et a constaté des anomalies figurant sur ces tickets au regard de recettes inscrites sur des fiches récapitulatives de toutes les recettes journalières portées en comptabilité sur l'ensemble des exercices vérifiés ; que compte tenu de ce défaut de bandes de caisses enregistreuses et de la globalisation des recettes en fin de chaque soirée, et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la portée des autres anomalies relevées par le vérificateur, c'est à bon droit, qu'après avoir écarté la comptabilité comme non probante, l'administration fiscale a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires et des bénéfices de la SARL Mosaïques pour les exercices 2001 à 2003 ;

16. Considérant que les bases des impositions litigieuses ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il appartient donc à la société requérante de démontrer leur exagération ;

En ce qui concerne l'exagération des bases reconstituées :

17. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a procédé à la reconstitution des recettes de la SARL L'Amnésia en distinguant l'activité prépondérante de bar, les recettes complémentaires de billetterie et les recettes accessoires des vestiaires ; que pour reconstituer les recettes du bar, à partir des prix fournis par le gérant et ceux résultant de l'examen de la billetterie, l'administration a fixé une clé de répartition conforme aux pratiques normales dans l'exploitation des discothèques, de vente au verre et de vente à la bouteille en fonction de la contenance et de la nature courante des alcools ; que la société appelante, qui critique le caractère arbitraire de cette méthode, n'apporte aucun justificatif, notamment de caisse, permettant une autre répartition et un autre dosage, alors que les achats consommés de champagne, dont la société conteste la répartition des pourcentages et par suite la reconstitution des recettes correspondantes, ne représentent pas plus de 4 % des ventes ; que si la société requérante fait valoir que c'est un minimum de 25 % du total des achats consommés que le vérificateur aurait dû déduire au titre des pertes, casses, offerts à la clientèle et consommation du personnel, pour déterminer le total des achats effectivement revendus au verre et générateur de chiffre d'affaires, le vérificateur a intégré ces paramètres correcteurs en appliquant des pourcentages plus élevés que ceux en usage dans la profession, soit 8 % et 10 % pour les offerts à la bouteille et au verre, 1 % pour les pertes et casses et 1 % pour la consommation du personnel sur les ventes au verre ; que le vérificateur a pris en compte les recettes complémentaires provenant de la billetterie sur les entrées, et calculées à partir des billets vendus aux différents tarifs ; qu'enfin, le service a comptabilisé les recettes des vestiaires à partir d'une évaluation de la fréquentation par la billetterie informatisée pour l'année 2003, transposée pour les années 2001 et 2002 à défaut de tout élément probant ; qu'il en résulte que la société requérante, qui ne propose aucune autre méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires, n'apporte la preuve, ni du caractère sommaire de la méthode suivie par le vérificateur, ni de l'exagération des rehaussements d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés à raison de la reconstitution de son chiffre d'affaires ;

En ce qui concerne les charges non justifiées :

18. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 de ce code : " 1 (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés (...) " ; qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient dès lors au contribuable, pour l'application des dispositions de l'article 39, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

19. Considérant que le service a constaté différentes opérations de trésorerie sur les trois exercices vérifiés ayant eu pour effet d'obérer les comptes de la société ; que d'une part, les recettes en espèce n'ont pas été aussitôt déposées sur le comptes bancaires de la société mais appréhendées à titre personnel puis reversées sur les comptes bancaires de la société en fonction des besoins de trésorerie lorsque les découverts bancaires devenaient trop importants ; que d'autre part, des sommes ont été virées sans contrepartie au profit de la SCI Agathe détenant 60 % du capital social de la SARL L'Amnésia, et de la SCP Elyette, propriétaire de l'immeuble exploité par la société vérifiée ; que la société requérante n'établit pas avoir un intérêt propre à prendre en charges ces frais bancaires engendrés par un dépôt différé des recettes en espèces sur ses comptes bancaires et ne démontre pas que les sommes dont s'agit versées à ces sociétés ont été exposées dans l'intérêt de l'entreprise ; qu'enfin, la société requérante n'assortit d'aucun justificatif l'affirmation selon laquelle certains des frais financiers comptabilisés, incluant des commissions sur encaissement des cartes bleues, auraient à tort été écartés en dépit des documents tenus à la disposition du vérificateur ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, la société requérante n'apportant pas la preuve qui lui incombe du caractère déductible des charges en cause, c'est à bon droit que l'administration fiscale a réintégré le montant de ces charges au résultat imposable de la société au titre des exercices 2001, 2002 et 2003 ;

Sur les pénalités :

En ce qui concerne les pénalités exclusives de bonne foi :

21. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1729 alors applicable du code général des impôts : "1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...)" ;

22. Considérant que pour motiver les pénalités exclusives de bonne foi, la proposition de rectification du 23 juillet 2004 se réfère d'une part, aux irrégularités graves et répétées qui ont été révélées par l'examen de la comptabilité et qui affectent notamment l'enregistrement des recettes, aux insuffisances chroniques de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée d'autre part, au caractère répétitif des infractions, et enfin à l'importance du montant des rectifications générées par les minorations de recettes ; que cette motivation est suffisante en la forme ; qu'elle est également de nature à démontrer, le caractère délibéré et répété des manquements constatés et l'intention d'éluder l'impôt ; que l'administration établit ainsi le bien-fondé des pénalités litigieuses, tant en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés que la taxe sur la valeur ajoutée;

En ce qui concerne la pénalité de l'article 1763 A du code général des impôts :

23. Considérant qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts applicable au litige : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1763 A " ; qu'aux termes de l'article 1763 A du même code, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article 1759 : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. (...) " ;

24. Considérant que la proposition de rectification du 23 juillet 2004, par laquelle l'administration a informé la société des résultats du contrôle opéré et l'a invitée à désigner les bénéficiaires des revenus regardés comme distribués, mentionne les articles du code général des impôts dont il est fait application ainsi que la quotité de l'amende encourue à défaut d'une telle désignation ; qu'elle précise que la demande s'applique aux rectifications notifiées au titre des rehaussements de recettes non déclarées ; que la société requérante ne saurait dès lors soutenir que la demande de désignation de ces bénéficiaires serait insuffisamment motivée ;

25. Considérant qu'il résulte de l'instruction et contrairement à ce que soutient la société requérante, que le vérificateur l'a avisée par lettre du 15 septembre 2004, dont elle a accusé réception le 17 septembre 2004, que faute d'avoir répondu à la demande de désignation des bénéficiaires des revenus distribués, elle était passible de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la pénalité doit être écarté ;

26. Considérant que le paragraphe 3 de l'article 14 du pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule que " Toute personne accusée d'une infraction pénale a droit en pleine égalité au moins aux garanties suivantes : (...) g) à ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable. " ; que ces stipulations ont pour objet de protéger les droits des personnes accusées d'une infraction pénale ; que, par suite, la SARL Mosaïques ne peut utilement s'en prévaloir à l'appui de sa contestation de l'amende fiscale mise à sa charge qui, alors même qu'elle présente le caractère d'une accusation en matière pénale, ne sanctionne pas une infraction pénale ;

27. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle... " ; que les dispositions précitées de l'article 1763 A du code général des impôts ont pour objet et pour effet d'inciter une personne morale passible de l'impôt sur les sociétés à révéler, à la demande de l'administration présentée sur le fondement de l'article 117 du même code, l'identité des bénéficiaires de l'excédent des distributions auxquelles elle a procédé ; qu'elles n'obligent pas cette personne morale à s'incriminer elle-même et, par suite, ne méconnaissent pas les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en tant que ces stipulations sont regardées comme garantissant le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination ;

28. Considérant que la SARL Mosaïques n'est dès lors pas fondée à contester l'application de la pénalité prévue par l'article 1763 A du code général des impôts ;

29. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la SARL Mosaïques, qui vient aux droits de la SARL L'Amnésia, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

30. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par la SARL Mosaïques, ex-SARL L'Amnésia, et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Mosaïques est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Mosaïques et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 09MA03885


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03885
Date de la décision : 22/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : DI DIO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-03-22;09ma03885 ?
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