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21/03/2013 | FRANCE | N°11MA03688

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 21 mars 2013, 11MA03688


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 19 septembre 2011 sous le n°11MA03688, présentée pour la société Le Krystal, dont le siège social est Chemin du Krystal à Moules (13200), prise en la personne de son représentant légal, par Me Varaut ;

La société Le Krystal demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905860 du 13 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 45 868 euros en réparation de son préjudice impu

table à la fermeture administrative illégale du 24 décembre au 31 décembre 2008 ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 19 septembre 2011 sous le n°11MA03688, présentée pour la société Le Krystal, dont le siège social est Chemin du Krystal à Moules (13200), prise en la personne de son représentant légal, par Me Varaut ;

La société Le Krystal demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905860 du 13 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 45 868 euros en réparation de son préjudice imputable à la fermeture administrative illégale du 24 décembre au 31 décembre 2008 de la discothèque " Le Krystal " et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 45 868 euros en réparation de son préjudice imputable à la fermeture administrative illégale du 23 décembre au 31 décembre 2008 de la discothèque " Le Krystal ", majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2013 :

- le rapport de Mme Marzoug, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;

- et les observations de Me Michalauskas substituant Me Varaut, pour la société Le Krystal ;

1. Considérant que par arrêté du 23 décembre 2008, le préfet des Bouches-du-Rhône a, sur le fondement des dispositions des 2 et 4 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, prononcé la fermeture administrative du débit de boissons " Le Krystal " pour une durée de deux mois au motif que deux accidents mortels avaient été provoqués par la surconsommation d'alcool dans cet établissement le 19 octobre 2008 et le 15 novembre 2008 ; que, par l'ordonnance n° 0808893 en date du 31 décembre 2008, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution de cet arrêté, le moyen tiré de ce que la procédure contradictoire prévue par les dispositions de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 n'avait pas été respectée étant de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la mesure de fermeture ; que, suite à cette ordonnance, le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé, le 13 janvier 2009, de retirer l'arrêté du 23 décembre 2008 prononçant la fermeture administrative pour une durée de deux mois du débit de boissons " Le Krystal " ; que la société Le Krystal, qui affirme avoir subi un préjudice consécutif à la fermeture de l'établissement du 24 au 31 décembre 2008, a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande indemnitaire, qui a été rejetée par un jugement en date du 13 juillet 2011 ; que la société Le Krystal relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne les fautes commises par le préfet des Bouches-du-Rhône :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique dans sa version applicable à la date de l'arrêté du 23 décembre 2008 : " (...) 2. En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois. (...) 4. Les crimes et délits ou les atteintes à l'ordre public pouvant justifier les fermetures prévues au 2 et au 3 doivent être en relation avec la fréquentation de l'établissement ou ses conditions d'exploitation. 5. Les mesures prises en application du présent article sont soumises aux dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ainsi qu'aux dispositions de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. (...) " ; qu'aux termes de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique./ Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière. " ;

3. Considérant qu'il est constant que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas respecté, avant de prononcer par arrêté du 23 décembre 2008 la fermeture administrative du débit de boissons " Le Krystal " pour une durée de deux mois sur le fondement des dispositions des 2 et 4 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cet arrêté serait intervenu dans une situation d'urgence, plus d'un mois s'étant écoulé entre le second accident de la circulation et son édiction ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône a entaché d'illégalité l'arrêté du 23 décembre 2008 ; que cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir mis en oeuvre la procédure contradictoire prévue par les dispositions de la loi du 12 avril 2000, le préfet des Bouches-du-Rhône a de nouveau décidé le 5 mai 2009 de prononcer la fermeture administrative de la discothèque " Le Krystal " pour les mêmes motifs que ceux à l'origine de l'arrêté du 23 décembre 2008 ; que, cependant, cet arrêté du 23 décembre 2008, qui a été retiré par le préfet le 13 janvier 2009, doit être regardé comme n'ayant jamais existé ; que, par suite, en tout état de cause, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en méconnaissant le principe " non bis in idem " ;

En ce qui concerne le droit à réparation :

5. Considérant que, si l'illégalité de l'arrêté du 23 décembre 2008 a constitué une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de la société Le Krystal, celle-ci n'est en droit d'obtenir réparation que pour autant qu'il en est résulté pour elle un préjudice direct et certain ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal d'audition du 21 octobre 2008, du rapport du 3 décembre 2008 établi par les services de la gendarmerie nationale, du courrier en date du 18 décembre 2008 transmis par le substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Tarascon au préfet des Bouches-du-Rhône et du rapport du 18 décembre 2008 émanant du directeur départemental de la sécurité publique, qu'un accident mortel de la circulation routière s'est produit le 19 octobre 2008 à Saint-Martin de Crau alors que le conducteur du seul véhicule accidenté venait de passer la soirée à la discothèque " Le Krystal " ; que cet accident a été causé par une perte de contrôle du véhicule par son conducteur imputable à une surconsommation d'alcool au sein de cet établissement, la prise de sang réalisée sur ce conducteur ayant révélé un taux d'alcoolémie correspondant à 1,66 gr/l et largement supérieur à la limite autorisée ; qu'un deuxième accident mortel causé par une consommation excessive d'alcool, un taux d'alcoolémie de 1,63 gr/l ayant été relevé sur le conducteur, a eu lieu le 15 novembre 2008 à Saint-Mitre les Remparts, alors que les personnes impliquées dans cet accident venaient de quitter la discothèque " Le Krystal " où ils avaient passé leur soirée ; qu'eu égard à la chronologie de ces faits et aux causes des deux accidents mortels imputables à une consommation excessive d'alcool, le lien entre ces troubles à l'ordre public et la fréquentation de la discothèque " Le Krystal " est établi ; que les deux attestations produites par la société Le Krystal ne suffisent pas en remettre en cause les pièces produites par le préfet des Bouches-du-Rhône pour démontrer ce lien ; qu'eu égard à ces éléments, les troubles graves à l'ordre public que constituent les deux accidents mortels, ayant eu pour origine une consommation excessive d'alcool au sein de la discothèque " Le Krystal ", justifient au fond l'édiction de la mesure de fermeture prise le 23 décembre 2008 ; qu'il résulte de l'instruction que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait pris la même décision si le vice de procédure précité n'avait pas été commis ; que, par suite, le préjudice subi par la société Le Krystal n'est pas imputable à l'illégalité fautive commise par le préfet et tirée de l'absence de respect de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, mais il est la conséquence de l'application des dispositions du 2 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Le Krystal n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 45 868 euros en réparation de son préjudice imputable à la fermeture administrative illégale du 24 décembre au 31 décembre 2008 de la discothèque " Le Krystal " ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens " ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la société Le Krystal et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Le Krystal est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Le Krystal et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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N° 11MA03688

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA03688
Date de la décision : 21/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-04 Police. Polices spéciales. Police des débits de boissons.


Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Sanaa MARZOUG
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : VARAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-03-21;11ma03688 ?
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