Vu 1°) la requête sommaire, enregistrée le 28 janvier 2011, sous le numéro 11MA00395, présentée pour la commune de Sari Solenzara, représentée par son maire en exercice, sis en cette qualité Hôtel de Ville Sari Village à Sari Solenzara (20145), par Me Mauduit, avocat ; la commune de Sari Solenzara demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900701 du 26 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia l'a condamnée à verser à M. J...I...et autres la somme de 356 413,62 euros portant intérêts au taux légal et capitalisés en réparation du préjudice subi résultant de la perte de leur exploitation agricole suite à un incendie ;
2°) de condamner A...consorts I...à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu 2°) enregistrée le 9 mars 2012, sous le numéro 12MA00997, la requête présentée pour la commune de Sari Solenzara, représentée par son maire en exercice, sis en cette qualité Hôtel de Ville Sari Village à Sari Solenzara (20145), par la société d'avocats Mauduit-Lopasso ; la commune de Sari Solenzara demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0900701 du 26 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia l'a condamnée à verser à M. J...I...et autres la somme de 356 413,62 euros portant intérêt au taux légal et capitalisés ;
..........................................................................................................
Vu A...autres pièces du dossier ;
Vu le 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble cette convention ;
Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 modifiée du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, relative à la prescription des créances sur l'Etat, A...départements, A...communes et A...établissements publics ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
A...parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2013 :
- le rapport de MmeH..., rapporteure ;
- A... conclusions de MmeB..., rapporteure publique ;
- et A...observations de Me Mauduit pour la commune de Sari Solenzara et de Me K...substituant le cabinet Leroy-Freschini pour A...consortsI... ;
Vu, enregistrée le 15 février 2013, la note en délibéré présentée pour la commune de Sari Solenzara, représentée par son maire en exercice, par la société d'avocats Mauduit-Lopasso ;
1. Considérant que la commune de Sari Solenzara relève appel du jugement du 26 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia l'a condamnée à verser aux consorts I...la somme de 356 413,62 euros, portant intérêt au taux légal et capitalisés, en réparation du préjudice subi résultant de la perte de leur exploitation agricole suite à un incendie ; qu'elle demande, en outre, à la Cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement ;
Sur la jonction :
2. Considérant que A...requêtes enregistrées sous A...numéros 11MA00395 et 12MA00997 présentées par la commune de Sari Solenzara concernent la même affaire ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de A...joindre pour y statuer par un même arrêt ;
Sur A...conclusions de la requête n° 12MA00997 aux fins de sursis à exécution du jugement contesté :
3. Considérant que, dès lors qu'elle se prononce sur A...conclusions de la commune de Sari Solenzara tendant à l'annulation du jugement litigieux, il n'y a pas lieu pour la Cour de statuer sur A...conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;
Sur A...conclusions de la requête n° 11MA00395 à fin d'annulation du jugement contesté :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
4. Considérant qu'une indivision est dépourvue de personnalité juridique ;
5. Considérant que le tribunal administratif de Bastia a été saisi d'une demande présentée par M. J...I..., M. C...I...et Mme F...D..., veuve G...I..., tous trois pris en leur qualité de participants co-indivisaires de la société en participation Solenzara ; que cette demande, si elle tendait à la condamnation de la commune de Sari Solenzara à leur verser une somme globale de 356 413, 62 euros à titre de dommages et intérêts, exposait que ladite société avait été créée à la suite de la non-immatriculation au 1er novembre 2002 de la société civile particulière Solenzara dont ils étaient A...anciens associés et était accompagnée, en pièces jointes, d'une part des statuts de la société civile particulière dont l'article 6 précisait que M. J...I..., M. C...I...et M. G...I...détenaient chacun un tiers du capital et, d'autre part, des actes de renonciation à succession enregistrés au greffe du tribunal de grande instance d'Avignon attestant, comme il y était soutenu, que Mme F...I...agissait en qualité d'héritière unique de M. G...I..., décédé ;
6. Considérant que, dans ces conditions, si A...premiers juges ont pu régulièrement accueillir la requête collective présentée conjointement par M. J...I..., M. C...I...et Mme F...D..., veuve G...I..., tous trois pris en leur qualité de participants co-indivisaires de la société en participation Solenzara, ils ne pouvaient allouer une indemnité globale aux trois requérants sans opérer, au vu de leurs écritures, dans A...motifs ou le dispositif du jugement, une répartition de cette indemnité entre ces derniers ou, s'ils s'estimaient insuffisamment informés sur ce point, sans A...inviter à préciser leur demande ; que, par suite, la commune de Solenzara est fondée à soutenir que, pour avoir allouer une indemnité globale à M. J...I..., M. C...I...et Mme F...I..., le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité de nature à entraîner son annulation ;
7. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande des consorts I...présentée devant le tribunal administratif de Bastia et devant la cour ;
En ce qui concerne la recevabilité de la demande :
8. Considérant, en premier lieu, que la requête a été présentée par M. J...I..., M. C...I...et Mme F...D..., veuve G...I..., tous pris en leur qualité de participants co-indivisaires de la société civile particulière (SCP) la Solenzara, dont ils étaient A...anciens associés ; que la seule circonstance qu'une indivision soit dépourvue de la personnalité juridique ne rend pas cette demande, dans A...termes dans lesquelles elle a été formulée, irrecevable ;
9. Considérant, en deuxième lieu, que la commune de Sari Solenzara conteste que M. C...I...et Mme F...I...puissent prétendre disposer, avec M. J...I..., des autres droits d'associés de la société et donc d'un quelconque intérêt à agir, dès lors que, d'une part, ils ont dans le cadre d'une précédente instance devant la Cour ayant donné lieu à un arrêt du 18 mai 2006, produit des attestations mentionnant qu'ils avaient cédé leurs droits au début des années 1980 à M. J...I...et, d'autre part, que d'autres héritiers de M. G...I...étaient intervenus dans cette instance ;
10. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que l'exploitation agricole, qui a été victime le 1er août 1989, de l'incendie litigieux, appartenait à la SCP la Solenzara, dont A...associés étaient M. G...I..., le père et ses deux fils Jean-Paul et HervéI..., lesquels avaient signé le 10 décembre 1969 un bail emphytéotique avec le propriétaire du terrain ; que cette SCP a été transformée de plein droit, en application de l'article 44 de la loi du 15 mai 2001, en société en participation Solenzara, du fait de sa non-immatriculation, avant le 1er novembre 2002, au registre du commerce et des sociétés ; que, pour établir que A...trois requérants agissent en qualité de seuls participants co-indivisaires de cette société, ces derniers produisent une attestation notariée du 5 novembre 2012, qui établit que, depuis le décès en 1999 de M. G...I..., sa veuve, F...I..., eu égard aux renonciations à succession des autres héritiers, a seule hérité de la succession de son défunt époux, lequel possédait un tiers des parts de cette ancienne société ; que Jean-Paul I...et HervéI..., en leur qualité d'anciens associés de la SCP La Solenzara, ont chacun un tiers des parts de la société en participation, en application de l'article 6 des statuts de la SCP ; que, par ailleurs, ainsi que l'a relevé la cour d'appel de Bastia dans un arrêt du 15 février 2006, A...attestations dont se prévaut la commune ne peuvent être regardées comme démontrant la cession des parts sociales, alors qu'elles mentionnent seulement que seul M. J...I...continuera à exploiter la société Solenzara ; que, par suite, et sans qu'elle puisse se prévaloir utilement du principe de l'estoppel ou de l'adage " nemo auditur propriam turpitudinem allegans ", l'argumentation sur ce point de la commune ne peut qu'être écartée ;
11. Considérant, en troisième lieu, que si, dans l'arrêt devenu définitif n° 98MA02116-99MA00601 du 18 mai 2006, la Cour, après avoir estimé que M. J...I..., en tant que personne physique et en qualité d'associé de la SCP Solenzara, ne justifiait d'aucun préjudice personnel à raison de la destruction, à la suite d'un incendie, de l'exploitation agricole, a également examiné A...prétentions du requérant en sa qualité de propriétaire indivis des biens de la SCP Solenzara, elle n'a écarté ces prétentions qu'au seul motif qu'elles étaient irrecevables pour être nouvelles en appel, sans se prononcer sur leur bien-fondé ; que, par suite, la commune de Sari Solenzara n'est pas fondée à soutenir que l'autorité de la chose jugée qui s'attacherait à l'arrêt du 18 mai 2006 s'opposerait à la recevabilité des conclusions présentées par M. J...I... ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande était recevable ;
En ce qui concerne le refus, par A...premiers juges, de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité de la commune :
13. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-12 du code de justice administrative: " Lorsque, en application du dernier alinéa de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, l'une des parties entend contester, à l'appui d'un appel formé contre la décision qui règle tout ou partie du litige, le refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité opposé par le premier juge, il lui appartient, à peine d'irrecevabilité, de présenter cette contestation avant l'expiration du délai d'appel dans un mémoire distinct et motivé, accompagné d'une copie de la décision de refus de transmission " ; que la commune, dans sa requête d'appel tendant à l'annulation du jugement attaqué, conteste le refus, opposé par l'article 1 de ce jugement, à sa demande de transmission au Conseil d'Etat de la question prioritaire de constitutionnalité qu'elle avait soumise aux premiers juges ; que, toutefois, cette contestation n'a pas été présentée par mémoire distinct, en méconnaissance des dispositions susvisées ; qu'elle est, par suite, irrecevable ;
En ce qui concerne la question prioritaire de constitutionnalité portée directement devant la cour par la commune :
14. Considérant que la commune de Sari Solenzara a présenté le 19 juin 2012 dans l'instance 11MA00395 la question prioritaire de constitutionnalité portant sur A...dispositions de l'article 2 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 susvisée, au regard des dispositions de l'article 72-2 de la Constitution et des articles 1er, 2, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que, par ordonnance n° 11MA00395 du 6 juillet 2012, le président de la 2ème chambre de la Cour de céans a estimé que cette question prioritaire de constitutionnalité ne présentait pas de caractère sérieux et qu'il n'y avait pas lieu en conséquence de renvoyer au conseil d'Etat cette question ; que A...conclusions présentées sur ce point par la commune sont ainsi devenues sans objet ;
En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, A...opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; qu'aux termes de l'article 1 du premier protocole additionnel à cette convention : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans A...conditions prévues par la loi et A...principes généraux du droit international" ; qu'aux termes de l'article 2 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée relative à la prescription des créances sur l'Etat, A...départements, A...communes et leurs établissements publics dispose que : " La prescription est interrompue par : (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance.(...) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée " ;
16. Considérant, en premier lieu, que la commune soutient que A...dispositions de l'article 2 précité de la loi du 31 décembre 1968, en ce qu'elles permettent d'accorder une valeur interruptive de prescription à tout recours juridictionnel, même s'il se solde par un échec, alors que l'article 2243 du code civil répute non avenue l'interruption de la prescription réalisée par une demande en justice qui a été rejetée, méconnaissent tant l'article 1 suscité du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme que l'article 14 de cette convention ;
17. Considérant, toutefois, que A...articles 1, 2 et 3 de la loi du 31 décembre 1968 ont pour objet de prescrire au profit des collectivités publiques qui y sont visées, A...créances non payées dans un délai de 4 ans à partir du premier jour de l'année suivante celle au cours de laquelle A...droits ont été acquis, tout en prévoyant des mécanismes d'interruption de ce délai de prescription permettant aux créanciers de faire valoir leurs demandes ou leurs réclamations dès lors qu'elles ont trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; que ces articles ont été édictés dans un but d'intérêt général, en vue notamment de garantir la sécurité juridique des collectivités publiques en fixant un terme aux actions, sans préjudice des droits qu'il est loisible aux créanciers de faire valoir dans A...conditions et A...délais fixés par ces textes ; que la reconnaissance d'une valeur interruptive de prescription à tout recours juridictionnel est notamment la contrepartie d'un délai de prescription sensiblement plus court que celui applicable aux créances privées ; que, par suite, A...dispositions de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 ne peuvent être regardées comme portant atteinte aux droits garantis tant par l'article 1 du premier protocole additionnel que par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
18. Considérant, en second lieu, que la commune soutient que la créance dont se prévalent A...requérants est atteinte par la prescription ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la prescription de la créance, née du dommage causé par l'incendie survenu le 1er août 1989 sur l'exploitation des demandeurs, a été interrompue en 1991, année de la saisine de la juridiction administrative par M. J...I..., jusqu'à la date de l'arrêt susmentionné de la cour administrative d'appel de Marseille du 18 mai 2006 ; que le nouveau délai de prescription n'a commencé à courir, conformément aux dispositions de l'article 2 précité de la loi du 31 décembre 1968, qu'à compter du 1er janvier 2007 ; que la demande préalable indemnitaire ayant été notifiée au maire de la commune de Sari Solenzara le 27 avril 2009, elle a été présentée dans ce délai ; qu'ainsi, la commune n'est pas fondée à opposer l'exception de prescription quadriennale prévue par ces dispositions ;
En ce qui concerne la responsabilité de la commune :
19. Considérant que l'ensemble des co-indivisaires de la société La Solenzara a la qualité de tiers par rapport à l'ouvrage public litigieux ; que la responsabilité du maître de l'ouvrage public est susceptible d'être engagée, même sans faute, à l'égard des demandeurs tiers par rapport à cet ouvrage ; qu'il appartient toutefois aux appelants d'apporter la preuve de la réalité des préjudices qu'ils allèguent avoir subis et de l'existence d'un lien de causalité entre l'ouvrage public et lesdits préjudices, qui doivent en outre présenter un caractère anormal et spécial ;
20. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'incendie qui a détruit le 1er août 1989 en totalité l'exploitation agricole de la SCP Solenzara a démarré d'une décharge, située dans une zone de maquis, utilisée depuis une dizaine d'année par la commune pour A...besoins de son service public de ramassage des ordures et qu'elle avait aménagé à cet effet ; que l'incendie s'est propagé, à la suite d'un vent violent, jusqu'à la propriété agricole ; qu'ainsi, le lien de causalité entre l'ouvrage public et le sinistre est établi ; que la commune n'établit pas que le dommage résulte d'une faute de la victime ou d'un cas de force majeure ; que le dommage subi par l'ensemble des co-indivisaires est spécial et anormal ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner si la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, la responsabilité sans faute de la commune est engagée ;
En ce qui concerne le préjudice :
S'agissant de la régularité des opérations d'expertise :
21. Considérant que l'expert agricole et foncier, agréé près de la cour d'appel de Bastia, désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Bastia en 1994 pour évaluer l'ensemble des préjudices directement causés par l'incendie à l'exploitation agricole, a mené en 1996 ses opération d'expertise au contradictoire de la commune, qui n'a pas alors émis de dires pendant la procédure ; que, si cet expert judiciaire s'est fondé, à plusieurs reprises, dans son rapport du 14 juin 1996 sur celui de M.E..., ingénieur agronome, expert près de la cour d'appel de Bastia, établi le 20 décembre 1989 à la demande de M.I..., qui voulait un constat rapide sur place des dégâts de la propriété pour préserver ses droits, la commune de Sari Solenzara ne saurait soutenir que A...conclusions de l'expert judiciaire ont été faites uniquement à partir des pièces produites par l'exploitant et des observations non contradictoires de cet expert privé, dès lors que l'expert judiciaire, qui a mené son expertise 7 ans après A...faits, a, pour chaque poste de préjudice, comparé, conforté, ou critiqué A...dires de l'expert privé, datés de 1989, avec ses propres constatations sur le terrain ; qu'il a d'ailleurs minoré de moitié la perte de production agricole de l'exploitation par rapport aux estimations de l'expert privé ; que par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que le rapport de cet expert devrait être écarté ;
S'agissant de l'évaluation du préjudice :
22. Considérant que la SCP Solenzara exploitait 20 ha de clémentiniers plantés en 1971 et 1975 et 10 ha d'oliviers plantés en 1972 ; que la ferme a été abandonnée par ses exploitants après l'incendie en 1989 ;
23. Considérant que l'expert judiciaire a fixé la perte de récoltes de clémentines, en maturation sur A...arbres à la date de l'incendie, à 324 000 francs, en se fondant sur l'attestation du 21 janvier 1996 de la coopérative agricole des agrumiculteurs indépendants du centre de la Corse, relative à l'apport de fruits en tonnes par la société Solenzara à la coopérative pendant A...3 années d'exploitation avant l'incendie en 1986, 1987 et 1988, à partir des attestations du 14 mars 1996 de pépiniéristes relatives au nombre de clémentiniers vendus par ces derniers aux exploitants ; que ces attestations, précises, circonstanciées et cohérentes avec A...estimations de l'expert, sont suffisantes pour établir le nombre d'arbres et, par suite, la perte de récoltes, alors même qu'elles ne sont pas accompagnées de factures, qui auraient été datées de 1971 et 1975 ; que la perte de récoltes d'olives a été fixée par l'expert à 181 000 francs en se fondant, sur la base de 410 oliviers, sur une hypothèse de rendement non contestée en huile de 15 %, rendement moyen, sur une période de 7 années, par arbre pour la variété des olives Piccholine ; que, ni la note de la direction départementale de l'agriculture de Corse du sud, établie à la demande de la commune le 4 décembre 1998, sans procédure contradictoire, relative aux pertes d'exploitation de la propriété, ni le constat d'huissier du 27 août 2010 établi à la demande de la commune ne sont de nature à contredire A...dires de l'expert ; que, par suite, il y a lieu d'allouer, pour ce poste de préjudice, la somme de 505 000 francs ;
24. Considérant que l'expert a chiffré A...pertes d'équipement et de structures de l'exploitation, composés d'une clôture de 3 000 m autour de la ferme, d'arbres brise-vent plantés le long de cette clôture, d'une station de pompage de l'eau de la rivière la Solenzara, nécessaire en l'absence de toute autre possibilité d'arrosage sur la propriété, pour arroser A...arbres plantés sur un plateau situé plus haut que la rivière, le matériel nécessaire à l'exploitation, notamment un groupe électrogène, une remorque, une calibreuse, en appliquant un coefficient de vétusté de 30 % à 50 %, à la somme de 445 780 francs ; que la remise en état du bâtiment d'exploitation (portes, fenêtres, toit détruits par l'incendie) est estimée à la somme de 31 140 F ; que la commune ne peut utilement soutenir que le bail emphytéotique passé entre A...propriétaires et la société Solenzara prévoyait que toutes A...constructions, A...plantations, le matériel agricole nécessaires à l'exploitation devaient être assurés, alors que la police d'assurance ne concernerait qu'un bâtiment et une station de pompage, dès lors que ces stipulations contractuelles n'imposent des obligations qu'entre le bailleur et son emphytéote ; que, si la commune soutient aussi que A...exploitants ont déjà été indemnisés par leur compagnie d'assurance pour ces chefs de préjudice, il résulte de l'instruction que le dossier de la compagnie d'assurance relative au montant de l'indemnisation des indivisairesI..., datant de 1989, n'est plus archivé ; qu'en réponse à une mesure d'instruction de la cour, A...exploitants, qui n'ont jamais modifié leurs déclarations sur la nature et le montant de la réparation qui leur a été allouée par leur assureur, confirment qu'ils ont perçu 24 000 francs de ce dernier en dédommagement de la pompe d'arrosage uniquement ; que, par suite, ce chef de préjudice doit être évalué à la somme de 452 920 francs ;
25. Considérant que la perte des arbres eux-mêmes, mandariniers et oliviers, dont il ressort des pièces du dossier qu'ils n'étaient pas assurés contre l'incendie à la date du sinistre, est évaluée à la somme non contestée de 2 380 000 francs ;
26. Considérant que A...intimés ne sont pas fondés à demander que l'indemnité allouée tienne compte du taux d'inflation depuis 1989, date de l'estimation de leurs biens par l'expert, dès lors que A...effets du temps sont corrigés par A...intérêts moratoires et leur capitalisation qu'ils ont demandés ;
27. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Sari Solenzara doit être condamnée à verser la somme totale de 508 868,05 euros (3.337.920 F), soit la somme de 169 622,68 euros à M. J...A...combes, la même somme à M. C...I...et la même somme à Mme veuve F...I... ;
Sur A...intérêts et leur capitalisation :
28. Considérant que chacune des sommes de 169 622,68 euros portera intérêt à compter du 27 avril 2009, date de réception par la commune de la demande préalable des consortsI... ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à la capitalisation des intérêts à compter du 27 avril 2010 ;
Sur A...frais d'expertise :
29. Considérant qu'il y a lieu de mettre la charge définitive des frais de l'expertise ordonnée par A...premiers juges, taxés à la somme de 1.769,04 euros (soit 11.604,13 F), à la commune de Sari Solenzara ;
Sur A...conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
30. Considérant que A...dispositions de cet article font obstacle à ce que A...co- indivisaires, qui ne sont pas la partie perdante au litige, soient condamnés à verser quelque somme que ce soit à la commune au titre des frais exposés par elle et non compris dans A...dépens ; qu'il y a lieu, dans A...circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Sari Solenzara le versement aux co indivisaires d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de cet article ;
DECIDE :
Article 1 : Il n'y a pas lieu de statuer sur A...conclusions de la requête de la commune de Sari Solenzara enregistrée sous le n° 12MA00997.
Article 2 : Le jugement du 26 novembre 2010 du tribunal administratif de Bastia est annulé.
Article 3 : La commune de Sari Solenzara versera la somme de 169 622,68 (cent soixante neuf mille six cent vingt deux euros et soixante huit centimes) à M. J...I..., la somme de 169 622,68 (cent soixante neuf mille six cent vingt deux euros et soixante huit centimes) euros à M. C...I...et la somme de 169 622,68 (cent soixante neuf mille six cent vingt deux euros et soixante huit centimes) euros à Mme veuve F...I... . Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2009. A...intérêts échus seront capitalisés au 27 avril 2010 pour produire eux-mêmes des intérêts.
Article 4 : A...frais d'expertise d'un montant de 1 769,04 (mille sept cent soixante neuf euros et quatre centimes) euros sont mis à la charge définitive de la commune de Sari Solenzara.
Article 5 : La commune de Sari Solenzara versera la somme de 1 000 (mille) euros à M. J...I..., la somme de 1 000 (mille) euros à M. C...I...et la somme de 1 000 (mille) euros à Mme veuve F...I...au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus de la demande des consorts I...et A...conclusions de la commune de Sari Solenzara sont rejetés.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Sari Solenzara, à M. J...I..., à M. C...I...et à Mme F...I....
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N° 11MA00395-12MA009972