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25/02/2013 | FRANCE | N°11MA00103

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 25 février 2013, 11MA00103


Vu la requête, enregistrée le 14 janvier 2011, présentée pour M. D... E..., demeurant..., par Me B... ; M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 0900558 du 21 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia, après avoir, par son article 1er, mis à la charge de l'office national des accidents médicaux des affections iatrogenes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme de 2 000 euros, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête tendant à la condamnation de l'établissement français du sang (EFS) à lui verser une somme de 1

8 000 euros en réparation du préjudice résultant de sa contamination ...

Vu la requête, enregistrée le 14 janvier 2011, présentée pour M. D... E..., demeurant..., par Me B... ; M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 0900558 du 21 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia, après avoir, par son article 1er, mis à la charge de l'office national des accidents médicaux des affections iatrogenes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme de 2 000 euros, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête tendant à la condamnation de l'établissement français du sang (EFS) à lui verser une somme de 18 000 euros en réparation du préjudice résultant de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;

2°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 18 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de sa contamination ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les premiers juges ont fait une évaluation insuffisante de son préjudice, dès lors qu'il est astreint à un suivi médical rigoureux et à une stricte hygiène de vie ;

- que la menace d'une évolution future de la maladie est à l'origine pour lui d'une souffrance morale, qui a nécessité un suivi psychiatrique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 20 mars 2012, présenté pour l'EFS, par MeF..., qui demande à la Cour de juger que l'ONIAM est substitué à l'EFS dans la présente instance, de rejeter les demandes indemnitaires éventuellement dirigées contre l'EFS et de condamner la partie succombante aux entiers dépens ;

Il soutient que :

- il ne peut être mis hors de cause, lui seul pouvant être déclaré responsable, l'ONIAM lui étant substitué uniquement en ce qui concerne le paiement de l'indemnité au profit de la victime ;

- seul l'ONIAM doit répondre des conséquences dommageables résultant de la contamination, l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 étant entré en vigueur ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2012, présenté pour l'ONIAM par Me de la Grange, qui conclut à l'annulation du jugement en ce qu'il a indemnisé les troubles dans les conditions d'existence de M.E... ;

Il soutient que :

- l'appelant présente une hépatite C bénigne et peu évolutive et ne justifie aucun traitement depuis 1999 ;

- en l'absence de caractère évolutif de la maladie les premiers juges ne pouvaient reconnaître l'existence de troubles dans les conditions d'existence et pouvaient seulement réparer les souffrances endurées, qui ne sauraient être évaluées au delà de 1 000 euros ;

- M. E...bénéficie d'une simple surveillance biologique ;

- il ne présente pas les conditions nécessaires à son indemnisation au titre d'un préjudice spécifique de contamination, les troubles psychologiques décrits se révélant dénués de tout lien avec la pathologie hépatique ;

- M. E...pourra revenir devant le juge en cas d'aggravation ultérieure de son état de santé ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 4 avril 2011, admettant M. E... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;

Vu l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 ;

Vu les décrets n° 2010-251 et n° 2010-252 du 11 mars 2010 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2013 :

- le rapport de MmeG..., rapporteure,

- les conclusions de MmeA..., rapporteure publique,

- et les observations de Me C...du cabinet F...et associés pour l'EFS ;

1. Considérant que M. E...relève appel du jugement du 21 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia n'a que partiellement fait droit à ses conclusions tendant à la réparation des préjudices nés de sa contamination par le virus de l'hépatite C ; que, par la voie de l'appel incident, l'ONIAM relève pour sa part appel du même jugement en tant qu'il l'a condamné à réparer au bénéfice de M. E...des troubles dans les conditions d'existence ;

2. Considérant que l'ONIAM ne conteste pas le principe de la responsabilité ; qu'il résulte d'ailleurs de l'instruction que M.E..., né le 23 mai 1971, a, en raison d'une hémophilie congénitale, présenté durant sa vie de multiples épisodes hémorragiques ayant nécessité l'administration de nombreux produits sanguins ; que l'innocuité des produits qui lui ont été administrés n'a pu être démontrée ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que la probabilité d'une origine transfusionnelle soit manifestement moins élevée que celle d'une origine étrangère aux transfusions ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que M. E..., âgé de 41 ans est porteur du virus de l'hépatite C mais qu'il n'a subi aucune incapacité temporaire de travail en relation avec sa contamination, n'a fait l'objet d'aucun soin à raison de sa positivité à ce virus et ne souffre d'aucune incapacité permanente partielle ; qu'en revanche, il éprouve légitimement des craintes relatives à une évolution défavorable de son état de santé ; que sa contamination entraîne des souffrances physiques, évaluées par l'expert à 0,5 sur une échelle allant jusqu'à 7, ainsi que des troubles dans les conditions d'existence induits par la découverte, en 1999, à l'âge de 28 ans, de sa contamination par le virus de l'hépatite C et par le suivi médical périodique auquel il est astreint de ce fait ; qu'il sera fait une juste appréciation de ses préjudices en portant la somme de 2 000 euros que le tribunal administratif lui a allouée à ces titres à la somme de 5 000 euros ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a limité à 2 000 euros la réparation de ses préjudices ; que l'ONIAM n'est, pour sa part, pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a réparé les troubles dans les conditions d'existence résultant de sa contamination ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant, d'une part, que M.E..., pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. E...n'a pas demandé la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à la condamnation de l'ONIAM sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme mise à la charge de l'ONIAM par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 21 octobre 2010 est portée à 5 000 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 21 octobre 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. E...et les conclusions de l'ONIAM sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Corse, à l'ONIAM et à l'EFS.

Délibéré après l'audience du 4 février 2013, où siégeaient :

- M. Duchon-Doris, président de chambre,

- MmeG..., première conseillère,

- M. Roux, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 25 février 2013

La rapporteure,

A. G...Le président,

J.-C. DUCHON-DORISLa greffière,

D. GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 11MA00103


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA00103
Date de la décision : 25/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : ANDRAC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-02-25;11ma00103 ?
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