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17/12/2012 | FRANCE | N°10MA00734

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 17 décembre 2012, 10MA00734


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2010, présentée pour Mme Fatima B épouse C ..., par la SCP Dessalces-Ruffel ;

Mme B épouse C demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904918 du 22 janvier 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de carte de résident et de l'arrêté du 16 octobre 2009 par lequel ledit préfet a refusé de lui délivrer une carte de résident et l'a obligée à quitter le territoire frança

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2°) d'annuler lesdites décisions préfectorales ;

3°) d'enjoindre au préfet de ...

Vu la requête, enregistrée le 22 février 2010, présentée pour Mme Fatima B épouse C ..., par la SCP Dessalces-Ruffel ;

Mme B épouse C demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904918 du 22 janvier 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de carte de résident et de l'arrêté du 16 octobre 2009 par lequel ledit préfet a refusé de lui délivrer une carte de résident et l'a obligée à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler lesdites décisions préfectorales ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, à titre principal, de lui délivrer une carte de résident et, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de deux mois ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2012,

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure,

1. Considérant que Mme B épouse C, de nationalité marocaine, relève appel du jugement n° 0904918 du 22 janvier 2010 du tribunal administratif de Montpellier rejetant ses conclusions tendant à l'annulation, d'une part, de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de carte de résident et, d'autre part, de l'arrêté du 16 octobre 2009 par lequel ledit préfet a refusé de lui délivrer une carte de résident et l'a obligée à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin de non lieu à statuer présentées par le préfet de l'Hérault :

2. Considérant que le préfet de l'Hérault fait valoir, dans ses observations devant la cour, que suite au réexamen de la situation de Mme B épouse C, il a été décidé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " conjoint de français " valable du 28 juillet 2010 au 27 juillet 2011 et, qu'ainsi, la requête de l'intéressée est devenue sans objet ;

3. Considérant que la copie d'écran versée au dossier par le préfet, communiquée à Mme B épouse C et non contestée par cette dernière, permet d'établir la délivrance d'une carte de séjour temporaire d'un an valable du 28 juillet 2010 au 27 juillet 2011 et non d'une carte de résident de dix ans dont l'obtention avait été sollicitée par l'intéressée ; que, dès lors, cette décision prise postérieurement à l'enregistrement de la présente requête a seulement eu pour effet d'abroger l'arrêté du 16 octobre 2009 du préfet de l'Hérault en tant qu'il porte obligation à l'intéressée de quitter le territoire français ; que, par suite, la requête de Mme B épouse C, en tant qu'elle est dirigée contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, est devenue sans objet ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions relatives à cette seule décision ;

Sur les conclusions de Mme B épouse C dirigées contre la décision implicite de rejet d'une demande de carte de résident :

4. Considérant que Mme B épouse C persiste à soutenir en appel que le préfet de l'Hérault a rejeté implicitement sa demande de carte de résident déposée avant l'expiration, le 17 février 2008, de son titre de séjour en qualité de " conjoint de français " alors qu'à cette date, la communauté de vie entre elle et son époux n'avait pas cessé ;

5. Considérant que l'appelante n'établit pas avoir saisi le préfet avant la date du 17 février 2008 d'une demande de délivrance d'une carte de résident sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se bornant à produire le récépissé de sa demande de délivrance de son premier titre de séjour du 19 janvier 2005 ainsi que les deux récépissés de sa demande de renouvellement de son titre de séjour respectivement datés du 20 avril 2009 et du 15 juin 2009 ni, par suite, l'existence d'une décision implicite de rejet de cette demande ; que, dans ces conditions, ainsi que l'a jugé le tribunal, les conclusions de la requête susvisée tendant à l'annulation de cette prétendue décision implicite doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de Mme B épouse C dirigées contre la décision du 16 octobre 2009 en tant qu'elle porte refus de titre de séjour :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident peut être accordée : (...) 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française, qu'il ait été transcrit préalablement que les registres de l'état civil français (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B épouse C, entrée régulièrement en France le 21 avril 2003, a épousé un ressortissant français le 23 décembre 2004 et a obtenu, en qualité de conjointe de français, un titre de séjour temporaire renouvelé plusieurs fois jusqu'au 16 février 2009 ; que l'intéressée a présenté le 18 décembre 2008 une demande de carte de résident en qualité de conjoint de français ; que, pour refuser la délivrance de ce titre de dix ans, le préfet de l'Hérault s'est fondé sur la circonstance que la communauté de vie entre les époux avait cessé au vu des conclusions d'enquêtes menées par les services de police les 25 avril 2008 et 4 juin 2009 ; que Mme B épouse C soutient toutefois qu'aucun élément concret ne permet de contester l'existence d'une communauté de vie avec son époux depuis la date de son mariage ; qu'elle verse, à l'appui de ses allégations, des documents récents établissant la vie commune de son couple ;

8. Considérant, d'une part, que la légalité d'une décision administrative s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment des procès-verbaux des 25 avril 2008 et 4 juin 2009 dressés par le service de sécurité de proximité de la direction départementale de la sécurité publique de l'Hérault relevant de la direction générale de la police nationale, qu'à la date du refus contesté, Mme B épouse C ne remplissait pas la condition de la communauté de vie exigée pour prétendre à l'octroi d'une carte de résident en qualité de conjointe de français ; qu'en outre, les attestations produites par la requérante rédigées par des proches au cours du mois de novembre 2011, soit postérieurement à la date de la décision attaquée, ne sauraient remettre en cause les deux rapports de police établis après visites domiciliaires, enquêtes de voisinage et audition du couple ; que, par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Montpellier sans commettre d'erreur d'appréciation, la décision du 16 octobre 2009 refusant à Mme B épouse C la délivrance d'une carte de résident de dix ans ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 applicable du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B épouse C est entrée en France le 21 avril 2003 à l'âge de 33 ans ; que si elle est mariée à un ressortissant français depuis le 23 décembre 2004, ainsi qu'il a été dit précédemment, elle ne réside pas avec son époux ; qu'il est constant qu'elle n'a pas de charge de famille ; qu'elle n'établit pas ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle admet, dans ses écritures d'appel, être retournée depuis son arrivée en France à deux reprises ; que, dans ces circonstances, et alors même que Mme B épouse C travaille depuis son arrivée en France, paie ses impôts, bénéficie d'une couverture sociale, est titulaire d'un permis de conduire et d'un contrat de travail à durée indéterminée et fait partie de l'association caravane du monde, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, l'arrêté contesté ne saurait être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi que l'ont estimé les premiers juges, Mme B épouse C n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L 313-11 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 de ce même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans " ; qu'il résulte de ces dispositions que, sauf dans le cas prévu par les dispositions de l'article L. 313-14 précité, le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 ou L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B épouse C n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de l'Hérault n'était pas tenu, en application des dispositions précitées des articles L. 312-1 et 2, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

14. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de Mme B épouse C tendant à ce que la cour enjoigne sous astreinte au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de résident ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour, ne peuvent qu'être rejetées ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B épouse C n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat ; que la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens ; que, par suite, les conclusions présentées par Mme B épouse C sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme B épouse C relatives à l'arrêté du 16 octobre 2009 du préfet de l'Hérault en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B épouse C est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fatima B épouse C et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 10MA00734

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA00734
Date de la décision : 17/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SCP DESSALCES et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-12-17;10ma00734 ?
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