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26/10/2012 | FRANCE | N°10MA00410

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2012, 10MA00410


Vu la requête, enregistrée le 1er février 2010, présentée pour la SARL FRAMO, dont le siège est au Ville Active Avenue Jean Prouvé à Nîmes (30000), par la SCP d'avocats Pellegrin - Soulier ;

La société FRAMO demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0801438 du 1er décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été a

ssujettie au titre des années 2003 à 2006 ainsi que des pénalités dont ils ont été assor...

Vu la requête, enregistrée le 1er février 2010, présentée pour la SARL FRAMO, dont le siège est au Ville Active Avenue Jean Prouvé à Nîmes (30000), par la SCP d'avocats Pellegrin - Soulier ;

La société FRAMO demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0801438 du 1er décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 2003 à 2006 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2) de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2012:

- le rapport de M. Haïli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Pellegrin, avocat de la SARL FRAMO ;

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL FRAMO, qui exploite un restaurant sous l'enseigne " Chez Œufs ", qui a porté sur la période allant du 1er janvier 2003 au 30 juin 2006 en matière de taxe sur la valeur ajoutée et sur les exercices clos les 31 décembre 2003, 2004 et 2005 en matière d'impôt sur les sociétés, l'administration a procédé, en l'absence de comptabilité régulière et probante, à la reconstitution du chiffre d'affaires et à des rehaussements en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés pour les années 2003 à 2005 par notification d'une proposition de rectification en date du 7 décembre 2006 ; que la société requérante interjette régulièrement appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de décharge des impositions litigieuses ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le débat oral et contradictoire :

2. Considérant que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, à la demande expresse de son dirigeant, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, il appartient au contribuable, qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la demande de la gérante de la SARL FRAMO, les opérations de contrôle se sont déroulées au cabinet comptable de la société ; qu'alors qu'une visite des locaux d'exploitation a eu lieu le 5 septembre 2006 ainsi que trois entretiens avec la gérante et l'expert comptable les 5 septembre, 6 octobre et 27 novembre 2006, la société requérante n'établit pas que la vérificatrice se serait refusée à tout dialogue avec son gérant, et n'aurait pas pris en compte les conditions d'exploitation réelles de l'entreprise ; qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe du défaut de débat oral et contradictoire pendant la vérification de sa comptabilité ;

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre, dans sa rédaction applicable : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la société requérante critique l'absence de référence à la méthode de reconstitution des recettes à partir des achats de nappes dans la proposition de rectification, en alléguant que les premiers juges auraient validé la méthode fondée sur les serviettes en papier au motif que celle-ci est corroborée par la méthode des nappes, cette proposition comporte le détail de la méthode utilisée par la vérificatrice pour reconstituer les recettes de la société ; que la société ne saurait utilement reprocher à l'administration la référence incidente, dans la réponse du service aux observations du contribuable en date du 15 février 2007, à l'étude des achats de nappes réalisés par la société requérante, alors que l'administration pouvait s'en tenir à une seule méthode de reconstitution et que le caractère suffisant de la motivation d'une proposition de rectification s'apprécie indépendamment de la pertinence de ses motifs ; que la société a ainsi été mise à même de formuler ses observations sur les rectifications proposées en litige et d'en contester la validité, notamment en ce qui concerne la méthode de reconstitution ; que dès lors, la proposition de rectification du 7 décembre 2006 est suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne la régularité de l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 60-3 du livre des procédures fiscales : " L'avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts " ;

7. Considérant que la motivation insuffisante de l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas, en tout état de cause, le caractère d'une erreur entachant la régularité de la procédure d'imposition ; que, par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant ;

Sur le bien fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

8. Considérant que pour écarter la comptabilité de la société, l'administration a relevé que tous les doubles des commandes des clients de la SARL FRAMO n'avaient pas été produits, que les tickets Z présentés ne comportaient pas systématiquement le détail des ventes réalisées et que certaines recettes et charges avaient été dissimulées ; que les irrégularités et anomalies ainsi constatées suffisent à ce que la comptabilité puisse être regardée comme non probante sur l'ensemble de la période vérifiée ;

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

9. Considérant que les impositions litigieuses ayant été mises en recouvrement conformément à l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires réunie le 28 juin 2007, et la comptabilité comportant de graves irrégularités de la société appelante ayant été, comme il a été dit ci-dessus, à bon droit écartée par le service, il revient à celle-ci, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'établir le caractère exagéré des impositions mises à sa charge ;

10. Considérant que le contribuable auquel incombe la charge de la preuve et qui ne peut établir le montant exact de son bénéfice en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante peut, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie en vue de démontrer que cette méthode aboutit à une exagération des bases d'imposition, soit encore, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge de l'impôt une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition de façon précise et fiable ;

11. Considérant que, pour reconstituer les recettes " restaurant " de la société requérante pour les exercices 2003 à 2005, l'administration a retenu la méthode de valorisation du prix moyen d'un couvert servi, consistant à déterminer le nombre de couverts servis à partir des achats de serviettes en papier ; que les achats constatés ont été diminués de 30 % pour tenir compte des pertes et détériorations, des serviettes fournies avec les ventes à emporter et des serviettes utilisées pour le service de certains desserts tels que les glaces ; que ce taux a été porté à 33, 5 % à la suite de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires pour tenir compte des éléments présentés par le contribuable sur le pourcentage de pertes et de détérioration des serviettes ; que l'administration a opéré sur le nombre des achats ainsi calculé une déduction pour prélèvements du personnel lors des repas pris sur le lieu de travail ; que cette méthode a permis à l'administration de connaître pour chaque service le nombre de couverts servis ; que ce nombre ramené au chiffre d'affaires déclaré a permis de déterminer le prix moyen du couvert qui tenait compte des promotions réalisées ainsi que des remises de fidélité ; que du prix moyen par service le vérificateur a obtenu un prix moyen par couvert à l'année qui tient compte des spécificités des services du midi et du soir, des promotions et des remises de fidélité ; que le chiffre d'affaires reconstitué a été obtenu en multipliant le nombre de serviettes retenues par le prix moyen par couvert déterminé à 14 euros en 2003 et à 15 euros en 2004 et 2005 ;

12. Considérant, en premier lieu, que, pour critiquer la méthode de reconstitution, la société requérante se prévaut du caractère radicalement vicié dans son principe de la méthode de reconstitution d'un établissement de restauration rapide en fonction du nombre de clients évalué à partir de celui des serviettes en papier achetées ; que toutefois, la SARL FRAMO ne démontre pas que son établissement fonctionne en restauration rapide avec mise à disposition des serviettes en papier en libre service, alors que l'administration expose que ses tables sont dressées avec une serviette par place, même si certaines serviettes sont accessibles en libre service ; que l'étude des achats de nappes n'a été utilisée par le service, qui n'y était pas tenu, que pour confirmer les résultats obtenus par la " méthode des serviettes en papier " ; que si la société se prévaut d'une autre méthode de reconstitution, à partir de l'étude de la consommation des pains réalisée le 20 juin 2008 par un expert-comptable sur les années 2004 et 2005, concluant à l'absence de cohérence du nombre de repas déterminé par l'administration fiscale avec les achats de pain, l'administration soutient, sans être sérieusement contredite que cette méthode qui ne se fonde pas sur le nombre de repas finalement retenu à la suite de l'avis de la commission départementale, ne prend pas en compte les produits ne nécessitant pas ou peu de pains et aboutit au final, sur la base des achats de pains et l'évaluation de la consommation donnée par la société requérante, à un chiffre d'affaire largement inférieur au chiffre d'affaires déclaré ; qu'ainsi la méthode alternative proposée par la requérante ne permet pas de déterminer le chiffre d'affaires de la période en litige avec une meilleure approximation que celle de l'administration ; que par suite, la SARL FRAMO n'établit pas que la méthode suivie par l'administration fiscale, même si elle comporte une part d'approximation, soit radicalement viciée dans son principe et excessivement sommaire ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante qui se limite à reprendre devant la Cour le moyen tiré de ce que le nombre de serviettes utilisées pour le dessert a été sous-évalué et que le taux de pertes et de détérioration aurait dû être fixé à 40, 79 % pour 2003, 43, 67 % pour 2004 et 46,16 % pour 2005, ne discute pas sérieusement l'argument de l'administration selon lequel la reconstitution du chiffre d'affaires, en retenant les consommations de serviettes utilisées pour le service des desserts fixées par la société et en appliquant les taux de pertes revendiqués, conduirait à des recettes très inférieures à celles portées en comptabilité et déclarées par la société elle-même pour la détermination de ses résultats ;

14. Considérant enfin que si la société appelante soutient, comme devant les premiers juges, que le prix moyen du repas pondéré par le service ne tient pas compte des promotions proposées par l'établissement, l'administration indique, sans être contredite, que le prix moyen par couvert a été déterminé à partir des bons de commande présentés et des recettes nettes réalisées et qu'il tient nécessairement compte de la politique de prix " cassés " appliquée par la société ;

15. Considérant qu'il suit de là que la société requérante, qui ne démontre pas que la méthode de reconstitution présenterait un caractère excessivement sommaire, n'apporte pas davantage, faute de proposer une autre méthode susceptible d'aboutir à une meilleure reconstitution, la preuve que l'évaluation de ses recettes faite par le service serait exagérée ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL FRAMO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande à fin de décharge ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE FRAMO est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE FRAMO et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal sud-est.

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N° 10MA00410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA00410
Date de la décision : 26/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS PELLEGRIN - SOULIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-10-26;10ma00410 ?
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