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15/10/2012 | FRANCE | N°08MA04054

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 15 octobre 2012, 08MA04054


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 3 septembre 2008, sous le n° 08MA04054, présentée pour la société Quillery Méditerranée, représentée par son ayant droit la société Eiffage construction Provence et pour la société Eiffage construction Provence, représentée par son représentant légal en exercice et dont le siège est 8-14 allée Cervantès Parc du Roy d'Espagne BP 75 à Marseille Cedex 9 (13273), par Me Engelhard, avocat ;

Les sociétés demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0408399 en date du

26 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irreceva...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 3 septembre 2008, sous le n° 08MA04054, présentée pour la société Quillery Méditerranée, représentée par son ayant droit la société Eiffage construction Provence et pour la société Eiffage construction Provence, représentée par son représentant légal en exercice et dont le siège est 8-14 allée Cervantès Parc du Roy d'Espagne BP 75 à Marseille Cedex 9 (13273), par Me Engelhard, avocat ;

Les sociétés demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0408399 en date du 26 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irrecevables la requête de la société Quillery Méditerranée et les conclusions de la société Eiffage construction Provence qui tendaient à la condamnation de la société Marseille aménagement à leur verser la somme de 268 877,01 euros assortie des intérêts moratoires, au titre de travaux supplémentaires et modificatifs réalisés dans le cadre de l'opération du grand parc urbain du Prado ;

2°) de condamner la société Marseille aménagement ou, le cas échéant, la ville de Marseille à verser à la société Quillery Méditerranée la somme de 249 560,61 euros TTC, assortie des intérêts moratoires à compter du 9 mars 2002 et de la capitalisation desdits intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la société Marseille aménagement au paiement de cette même somme au bénéfice de la société Eiffage construction Provence, assortie des intérêts moratoires à compter du 9 mars 2002 et de la capitalisation desdits intérêts ;

4°) de condamner la société Marseille aménagement ou, le cas échéant, la ville de Marseille au paiement des frais d'expertise ainsi qu'au versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2012 :

- le rapport de Mme Felmy, conseiller,

- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public,

- et les observations de Me Engelhard représentant la société Eiffage construction Provence, de Me Tixier représentant la société Marseille aménagement, de Me Revest représentant la ville de Marseille et de Me Perrimond représentant la société Omnium général d'ingénierie ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré reçue le 25 septembre 2012, présentée pour la société Eiffage construction Provence ;

1. Considérant que par une convention de mandat en date du 15 mars 1999, la communauté de communes Marseille Provence Métropole, à laquelle s'est substituée la Ville de Marseille en 2001, a confié à la société Marseille aménagement, société d'économie mixte locale, la maîtrise d'ouvrage déléguée pour la réalisation du " Parc du 26ème centenaire " sur l'emplacement de l'ancienne gare du Prado ; que le marché de maîtrise d'oeuvre a été attribué à un groupement constitué du cabinet Huet, mandataire du groupement, et de la société Omnium général d'ingénierie par un marché en date du 17 février 1999 ; que la société Quillery Méditerranée a été attributaire du lot n° 5 " bâtiments " selon un acte d'engagement en date du 17 mai 2000 pour un montant global et forfaitaire de 9 791 013,51 francs TTC ; que les travaux ont fait l'objet d'une réception avec réserves le 18 juin 2001, la réception définitive étant prononcée le 21 juin 2002 ; que la société titulaire du marché a adressé le 21 janvier 2002 le projet de décompte définitif au maître d'oeuvre d'un montant de 11 004 633,51 francs HT, comprenant le marché initial pour 8 118 585 francs HT, l'avenant n°1 pour 786 638,98 francs HT, des travaux supplémentaires non régularisés pour 105 942,50 francs HT, une réclamation pour des travaux supplémentaires pour 1 698 527,13 francs HT et la révision de prix pour 294 939,90 francs HT ; que la personne responsable du marché lui a notifié le 18 novembre 2002 son décompte général ramené à 9 113 026,98 francs HT en retenant uniquement le marché initial, l'avenant et la révision des prix ; que la société Quillery Méditerranée lui a retourné le 9 décembre 2002 le décompte signé avec réserves et accompagné d'un mémoire de réclamation ; que, par requête enregistrée le 25 novembre 2004, la société Quillery Méditerranée a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le maître d'ouvrage à lui payer les sommes de 19 316,39 euros TTC et 249 560,62 euros au titre des travaux supplémentaires et modificatifs qu'elle estime avoir réalisés en exécution du marché litigieux et qui lui restent dus ; que dans le cadre de cette instance, la société Eiffage construction Provence a présenté des conclusions le 14 février 2008 ; que la société Eiffage construction Provence, en son nom ainsi que pour le compte de la société Quillery Méditerranée, interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a déclaré irrecevable la requête de la société Quillery Méditerranée ainsi que, par voie de conséquence, l'intervention de la société Eiffage construction Provence, venant aux droits de la précédente, destinée à poursuivre, pour son propre compte, l'instance engagée à l'encontre de la société Marseille aménagement ;

Sur la recevabilité de la demande de la société Quillery Méditerranée :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 1844-5 du code civil dans sa rédaction applicable à la date de la dissolution de la société Quillery Méditerranée : " En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties si la société en offre et si elles sont jugées suffisantes. La transmission du patrimoine n'est réalisée et il n'y a disparition de la personne morale qu'à l'issue du délai d'opposition ou, le cas échéant, lorsque l'opposition a été rejetée en première instance ou que le remboursement des créances a été effectué ou les garanties constituées. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la personnalité morale d'une société s'éteint du seul fait de sa dissolution, sans liquidation, à l'expiration du délai de trente jours ouvert à compter de la publication, au registre du commerce des sociétés, de ladite dissolution ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une décision en date du 2 janvier 2004, M. Jean-Jacques Lefebvre, directeur général de la société Eiffage construction Provence, constatant que ladite société était devenue l'associé unique de la société Quillery Méditerranée, a, en application de l'article 1844-5 du code civil, décidé de procéder à la dissolution de cette dernière et à la transmission, sans liquidation, du patrimoine de la société dissoute ; que ladite décision a pris effet à l'expiration du délai de contestation de trente jours ouvert à compter du 30 juin 2004, date de la publication au registre du commerce de la dissolution de la société Quillery Méditerranée ; qu'il s'ensuit que la personnalité morale de la société Quillery Méditerranée ayant disparu le 30 juillet 2004, cette société n'avait pas la capacité pour déposer une requête le 25 novembre 2004 devant le tribunal administratif de Marseille ; qu'en outre, la dissolution ayant entraîné de plein droit et sans liquidation la transmission universelle à la société Eiffage construction Provence du patrimoine de la société Quillery Méditerranée, cette dernière ne peut utilement se prévaloir de ce que la collectivité maître d'ouvrage n'aurait pas été informée de la transmission de patrimoine entre les deux sociétés ni de ce qu'elle aurait, entre temps, et alors qu'elle n'avait plus d'existence juridique, conclu un protocole transactionnel, pour soutenir qu'elle était encore dotée de sa personnalité morale, postérieurement à sa dissolution, et donc recevable à saisir le juge d'un litige relatif au règlement dudit marché ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Quillery Méditerranée n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande comme irrecevable ;

Sur la recevabilité de la demande de la société Eiffage construction Provence :

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 1844-5 du code civil qu'à l'issue du délai d'opposition à la décision de dissolution d'une société dont les parts ont été réunies entre les mains d'un unique associé, ce dernier recueille dans son patrimoine l'ensemble des créances et des dettes de la société en raison de la transmission universelle du patrimoine social entraînée par cette dissolution et qu'il se substitue à la société vis-à-vis des tiers pour l'exercice des droits et l'exécution des obligations correspondant aux créances et aux dettes ainsi transmises ;

6. Considérant que la société Eiffage construction Provence, venant aux droits de la société Quillery Méditerranée a présenté en première instance, le 14 février 2008, un mémoire par lequel elle a conclu à ce que la société Marseille aménagement et, subsidiairement, la Ville de Marseille, soient condamnées à lui verser la somme initialement demandée par la société Quillery Méditerranée ; qu'ainsi qu'il a été dit, la société Eiffage construction Provence, à laquelle le patrimoine de la société Quillery Méditerranée et par conséquent, les droits et obligations découlant de l'exécution du marché en litige, ont été intégralement transmis le 30 juillet 2004, avait qualité pour agir dans le présent litige relatif au règlement de ce marché dès lors que, ainsi qu'il a été précisé plus haut, le patrimoine de la société Quillery Méditerranée lui avait été transmis de plein droit ; qu'il y a par suite lieu d'annuler le jugement entrepris et d'évoquer l'affaire dans cette mesure ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux, dont l'applicabilité au marché litigieux n'est pas contestée par la société Eiffage construction Provence : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de trente jours, si le marché a un délai d'exécution inférieur ou égal à six mois. Il est de quarante cinq jours dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois (...) Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés dans un mémoire en réclamation (...) ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le décompte général du marché litigieux a été notifié par la société Marseille aménagement, maître d'ouvrage délégué, à la société Quillery Méditerranée, devenue depuis lors société Eiffage construction Provence, qui en a accusé réception au plus tard le 9 décembre 2002 ; que si ladite société a transmis, le 9 décembre 2002, à la société Marseille aménagement, maître d'ouvrage délégué, ledit décompte général assorti de réserves et d'un mémoire en réclamation, elle n'apporte au dossier aucun élément de nature à contredire l'affirmation des défenderesses selon lesquelles elle n'aurait pas adressé, dans le délai de quarante-cinq jours qui lui était imparti pour ce faire et qui expirait le 23 janvier 2003, ce décompte et, en particulier le mémoire en réclamation au maître d'oeuvre ainsi que lui en faisaient obligation les stipulations de l'article 13-44 précité ; qu'ainsi, la société requérante, qui, en ne respectant pas la procédure visée ci-dessus, doit être regardée comme ayant implicitement accepté ce décompte général, ne pouvait plus le contester devant le juge du contrat ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres fins de non recevoir opposées en défense ni sur l'acquisition de la prescription quadriennale, que la demande de la société Eiffage construction Provence doit être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Marseille aménagement et de la ville de Marseille, qui ne sont pas les parties perdantes à la présente instance, la somme que demandent les requérantes au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des défenderesses et de la société Omnium général d'ingénierie, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 26 juin 2008 est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevable la demande de la société Eiffage construction Provence.

Article 2 : La demande présentée par la société Eiffage construction Provence devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Quillery Méditerranée représentée par son ayant droit la société Eiffage construction Provence et de la société Eiffage construction Provence est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la ville de Marseille, de la société Marseille aménagement et de la société Omnium général d'ingénierie présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eiffage construction Provence, à la société Marseille aménagement, à la société Huet, à la société Omnium général d'ingénierie, à la ville de Marseille, à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole et au ministre de l'intérieur.

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N° 08MA04054


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA04054
Date de la décision : 15/10/2012
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés.

Procédure - Introduction de l'instance - Capacité.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : ENGELHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-10-15;08ma04054 ?
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