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04/10/2012 | FRANCE | N°10MA01550

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2012, 10MA01550


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°10MA01550, présentée pour la MAAF ASSURANCES, dont le siège est Chaban de Chauray à Niort (79081), M. Denis A, demeurant ..., Mme Elisabeth A épouse , demeurant ..., M. Jean-Marie A, demeurant ... et M. Robert A demeurant ..., par Me Bensa, avocat ; la MAAF ASSURANCES et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0706568 du 19 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de MAAF ASSURANCES et Mme Simone C tendant à la c

ondamnation de la commune de Saint-Cyr sur Mer à leur verser la so...

Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°10MA01550, présentée pour la MAAF ASSURANCES, dont le siège est Chaban de Chauray à Niort (79081), M. Denis A, demeurant ..., Mme Elisabeth A épouse , demeurant ..., M. Jean-Marie A, demeurant ... et M. Robert A demeurant ..., par Me Bensa, avocat ; la MAAF ASSURANCES et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0706568 du 19 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de MAAF ASSURANCES et Mme Simone C tendant à la condamnation de la commune de Saint-Cyr sur Mer à leur verser la somme de 71 582,60 euros, qui avait été versée à Mme D en réparation de son préjudice corporel, la somme de 1 000 euros versée à Mme D au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la somme de 80 292,49 euros versée à la CMR de Provence, organisme de sécurité sociale de Mme D en remboursement de ses débours, la somme de 500 euros versée à la CMR de Provence au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la somme de 712,71 euros versée à la CMR de Provence au titre des dépens, la somme de 960 euros versée à la CMR de Provence au titre de l'indemnité forfaitaire sur le fondement de l'article L.376-1 du code de sécurité sociale, sommes qu'elles ont été solidairement condamnées à payer par jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 3 avril 2007 devenu définitif, à la suite de l'accident dont a été victime Mme D le 8 mai 2001 sur la plage du Liouquet à Saint-Cyr sur Mer, ces sommes portant intérêt au taux légal à compter de la demande préalable en date du 6 septembre 2007, les intérêts sur ces sommes produisant eux-mêmes intérêts après introduction du recours contentieux le 11 décembre 2007 et à chaque date anniversaire, et à chacune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la commune de Saint-Cyr à verser les sommes sus-invoquées de 71 582,60 euros, 1 000 euros, 80 292,49 euros, 500 euros, 712,71 euros et 960 euros à la MAAF ASSURANCES ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Cyr une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative à verser à la MAAF ASSURANCES ;

4°) de statuer sur l'appel en garantie diligenté par la commune de Saint-Cyr à l'encontre de l'Etat ;

.................................................................................................

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des assurances ;

Vu la code civil ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2012 :

- le rapport de M. Pocheron, président assesseur,

- et les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;

Considérant que le 8 mai 2001, Mme D était grièvement blessée, alors qu'elle se trouvait sur la plage du Liouquet à Saint-Cyr sur Mer (Var), suite à l'éboulement d'une partie de la falaise située en contrebas de la propriété de Mme C ; que Mme D a assigné les époux C et leur assureur, la MAAF ASSURANCES, ainsi que " Swisslife assurances ", assureur de la commune, devant le tribunal de grande instance de Marseille pour qu'ils soient déclarés responsables de l'accident et réparent son préjudice ; que, par ordonnance du 19 septembre 2006, le juge de la mise en l'état a déclaré irrecevable l'action intentée à l'encontre de l'assureur de la commune ; que, par jugement du 3 avril 2007, devenu définitif, le tribunal de grande instance de Marseille a déclaré Mme C responsable du dommage et l'a condamnée in solidum avec son assureur la MAAF ASSURANCES à verser les sommes de 71 582,60 euros en réparation du préjudice corporel et 1 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à Mme D, et les sommes de 80 292,49 euros en remboursement des débours et 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à la caisse de sécurité sociale de la victime, ainsi qu'au paiement des dépens ; que, par courrier du 6 septembre 2007, Mme C a demandé à la commune de Saint-Cyr sur Mer le remboursement des quatre sommes sus évoquées, la responsabilité de la commune étant selon elle engagée pour faute commise dans l'exercice des pouvoirs de police du maire en application des dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales ; que, cette correspondance étant restée sans réponse, Mme C et la MAAF ASSURANCES ont saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à la condamnation de la commune à leur verser les quatre sommes en cause ainsi que les dépens pour un montant de 712,71 euros, ainsi qu'une somme de 960 euros d'indemnité forfaitaire qui aurait été versée à la caisse de sécurité sociale de Mme D au titre de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2007 et capitalisation de ces intérêts à compter du 11 décembre 2007 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; que l'assureur et les héritiers de Mme C relèvent appel du jugement en date du 19 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de leur mère décédée et de la MAAF ASSURANCES au motif que les intéressées, qui ne démontraient pas avoir versé à Mme D les sommes dont elles demandaient le remboursement, n'établissaient pas la réalité du préjudice allégué ;

Considérant que lorsque l'auteur d'un dommage, condamné, comme en l'espèce, par le juge judiciaire à indemniser la victime, saisit la juridiction administrative d'un recours en vue de faire supporter la charge de la réparation par la collectivité publique co-auteur de ce dommage, sa demande, quel que soit le fondement de sa responsabilité retenu par le juge judiciaire, n'a pas le caractère d'une action récursoire par laquelle il ferait valoir ses droits propres à l'encontre de cette collectivité, mais d'une action subrogatoire fondée sur les droits de la victime à l'égard de ladite collectivité ; qu'ainsi subrogé, s'il peut utilement se prévaloir des fautes que la collectivité publique aurait commises à son encontre ou à l'égard de la victime et qui ont concouru à la réalisation du dommage, il ne saurait avoir plus de droits que cette dernière et peut donc se voir opposer l'ensemble des moyens de défense qui auraient pu l'être à la victime ; qu'en outre, eu égard à l'objet d'une telle action, qui vise à assurer la répartition de la charge de la réparation du dommage entre ses co-auteurs, sa propre faute lui est également opposable ; que, dans le cas de l'espèce, la MAAF ASSURANCES est, en outre, elle-même subrogée dans les droits de son assurée Mme C du fait de l'article L.121-12 du code des assurances ; que la circonstance que cette dernière et son assureur ont été condamnés par le juge judiciaire à indemniser Mme D sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 du code civil est dés lors sans incidence sur leur droit à venir rechercher la responsabilité de la commune de Saint-Cyr sur Mer en tant que co-auteur du dommage devant le juge administratif ;

Sur la réalité du préjudice allégué :

Considérant qu'il appartient d'une part aux héritiers de Mme C, et, d'autre part à la MAAF ASSURANCES, de justifier par tout moyen du versement allégué des sommes sus évoquées à Mme D et à sa caisse de sécurité sociale ; que, par la production pour la première fois en appel de trois correspondances en date des 15, 21 et 22 mai 2007 échangées entre l'avocat de la MAAF ASSURANCES et les avocats de Mme D et de sa caisse de sécurité sociale, qui, à supposer même qu'elles aient été couvertes par le secret professionnel, ont été régulièrement communiquées à la cour par les avocats eux-mêmes, il est établi qu'ont été réglées par la MAAF ASSURANCES, à la victime et à sa caisse, les seules sommes respectives de 71 582,60 euros, 1 000 euros, 80 292,49 euros et 500 euros ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a estimé que la réalité du préjudice tiré du versement de ces sommes par la MAAF ASSURANCES n'était pas démontrée ; qu'en revanche, la réalité du préjudice allégué par les héritiers de Mme C, d'une part, et par leur assureur la MAAF ASSURANCES en tant qu'il porte sur le remboursement des sommes de 712,71 et 960 euros, d'autre part, n'est pas établie ;

Considérant qu'il appartient ainsi à la cour administrative d'appel de Marseille, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande présentée par la MAAF ASSURANCES devant le tribunal administratif de Toulon en tant qu'elle tend à la condamnation de, la commune de Saint-Cyr sur Mer à lui verser les sommes de 71 582,60 euros, 1 000 euros, 80 292,49 euros et 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2007, et capitalisation de ces intérêts à compter du 11 décembre 2007 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur la prescription quadriennale :

Considérant que le maire ou l'adjoint qu'il délègue à cet effet a seul qualité pour opposer la prescription quadriennale au nom de la commune ; que la prescription invoquée par la commune de Saint-Cyr sur Mer devant le tribunal administratif de Toulon dans un mémoire en défense qui ne porte que la signature de son avocat n'a ainsi pas été régulièrement opposée ; qu'au surplus, pour l'application des règles de prescription issues de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968, la créance de l'assureur de l'auteur d'un dommage ayant indemnisé la victime d'un accident à la suite d'une décision de la juridiction judiciaire se rattache à l'exercice au cours duquel est intervenue la décision judiciaire qui a fixé le montant de la réparation et rendu ainsi la créance liquide et exigible, que, dans le cas de l'espèce, le jugement du tribunal de grande instance de Toulon étant intervenu le 3 avril 2007, le délai de prescription n'était pas acquis le 10 septembre 2007, date à laquelle la commune de Saint-Cyr sur Mer a de manière certaine reçu notification de la réclamation préalable de Mme C et de la MAAF ASSURANCES ;

Sur la responsabilité de la commune de Saint-Cyr sur Mer :

Considérant qu'aux termes de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : ... 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables ... les accidents ...et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure ... " ; qu'en vertu de ces dispositions, il incombe aux maires des communes maritimes de prendre les mesures appropriées afin d'informer les baigneurs et promeneurs des dangers du littoral excédant ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accident s'est produit en un lieu où l'accès à la plage est interdit en vertu d'un arrêté municipal du 7 août 1995 ; que, toutefois, il ressort du procès-verbal de police rédigé suite audit accident et d'un constat d'huissier établi le 11 mai 2001 que, le jour de cet accident, seul un panneau, de surcroît en mauvais état, placé sur une barrière dirigée vers la corniche de la plage, informait les usagers éventuels de celle-ci que l'accès en était interdit en raison d'un danger d'éboulement ; que, de surcroît, il ressort des déclarations de la victime, Mme D, à la police, qu'à la date de l'accident, l'office du tourisme de la commune diffusait au public un dépliant assurant la publicité, entre autres, de la plage du Liouquet, sans préciser aucunement que celle-ci était interdite d'accès ; qu'eu égard à l'insuffisance de la signalisation de l'interdiction d'accès à ladite plage, et à l'information contradictoire donnée à ce sujet par un document municipal distribué au public, la commune, en n'ayant pas respecté les obligations qui pèsent sur elle au regard des exigences sus rappelées de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la MAAF ASSURANCES ; que, cependant, Mme D, qui réside à Marseille, non loin des lieux de l'accident, a commis une imprudence en se rendant à la plage du Liouquet alors qu'un panneau, certes vétuste, situé sur un accès piétonnier, en interdisait l'accès en raison des risques d'éboulement ; qu'en outre, M. et Mme E, alors propriétaires de la falaise dont ils avaient la garde, ainsi qu'il résulte du jugement en date du 3 avril 2007 du tribunal de grande instance de Marseille devenu définitif, ont également une part de responsabilité dans la survenue du dommage ; qu'il sera ainsi fait une juste appréciation de la part de responsabilité de la commune de Saint-Cyr sur Mer en exonérant celle-ci des deux tiers des conséquences dommageables de l'accident litigieux ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article 2212-3 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale des communes riveraines de la mer s'exerce sur le rivage de la mer jusqu'à la limite des eaux. " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées avec les dispositions précitées de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales que la commune a seule la charge, sur ses plages, du respect de la sécurité publique ; que si le maire de Saint-Cyr sur Mer a alerté le préfet du Var du danger représenté par la falaise située au-dessus de la plage du Liouquet, et, n'arrivant pas à faire respecter l'interdiction d'accès aux lieux, a demandé à cet effet le concours de l'Etat, son courrier, daté du 14 mai 2001, est postérieur à l'accident dont a été victime Mme D ; que, par suite, en l'absence de responsabilité de l'Etat à l'égard de la MAAF ASSURANCES, les conclusions de la commune appelant l'Etat en garantie des sommes qu'elle sera condamnée à verser à la requérante doivent être rejetées ;

Sur le préjudice :

Considérant que, compte tenu du partage de responsabilité retenu en l'espèce entre la commune de Saint-Cyr sur Mer, la victime Mme D et les propriétaires de la falaise M. et Mme E, il y a lieu de condamner la commune à verser à la MAAF ASSURANCES la somme de 51 125 euros ; que la MAAF ASSURANCES a droit aux intérêts au taux légal afférents à cette somme à compter du 10 septembre 2007, date à laquelle il résulte de l'accusé de réception de sa réclamation préalable que la commune en a reçu de manière certaine notification ; que la MAAF ASSURANCES a demandé la capitalisation des intérêts par mémoire du 13 mars 2009 ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dés lors de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Saint-Cyr sur Mer le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la MAAF ASSURANCES et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La commune de Saint-Cyr sur Mer est condamnée à verser à la MAAF ASSURANCES la somme de 51 125 (cinquante et un mille cent vingt-cinq) euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2007. Les intérêts échus à la date du 13 mars 2009 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 19 mars 2010 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : La commune de Saint-Cyr sur Mer versera à la MAAF ASSURANCES une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de la MAAF ASSURANCES ET AUTRES est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Saint-Cyr tendant à ce qu'elle soit garantie par l'Etat des sommes qu'elle est condamnée à verser par le présent arrêt à la MAAF ASSURANCES sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la MAAF ASSURANCES, à M. Denis A, à Mme Elisabeth A, à M. Jean-Marie A, à M. Robert A et à la commune de Saint-Cyr sur Mer.

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N° 10MA01550 2

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