La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/09/2012 | FRANCE | N°10MA02532

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 21 septembre 2012, 10MA02532


Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2010, présentée pour M. Adel A, ... par Me Bourchet ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000752 du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2010 du préfet de Vaucluse qui lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté préfectoral du 15 février 2010 ;

3°) d'enjoindre le préfet de Vauc

luse de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard...

Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2010, présentée pour M. Adel A, ... par Me Bourchet ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000752 du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2010 du préfet de Vaucluse qui lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté préfectoral du 15 février 2010 ;

3°) d'enjoindre le préfet de Vaucluse de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et à défaut, d'enjoindre le préfet de Vaucluse dans les mêmes conditions de réexaminer sa situation et de lui délivrer pendant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat en contrepartie de la renonciation de celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

............................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

............................................................................................................

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 6 septembre 2010, admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance, du 13 avril 2012, fixant la clôture de l'instruction au 11 mai 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2012 :

- le rapport de M. Lemaitre, président-assesseur ;

Considérant que M. Adel A, de nationalité algérienne, né en 1975, est entré en France en 2001 sous couvert d'un visa touristique ; qu'il a sollicité l'asile territorial, qui lui a été refusé par une décision du 31 décembre 2002 du ministre de l'intérieur ; que M. A s'est vu opposer un refus de titre de séjour le 2 avril 2003 ; qu'il a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière en 2004 puis a été incarcéré le 19 septembre 2004, après une condamnation à six mois d'emprisonnement et trois ans d'interdiction du territoire français, dont il a été relevé par jugement du 10 septembre 2007 ; que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement en France après sa libération ; qu'il s'est marié le 15 avril 2006 avec une ressortissante algérienne, bénéficiaire d'un certificat de résidence valide un an à compter du 5 janvier 2010, portant la mention " commerçant ", avec laquelle il a eu deux enfants nés le 29 mai 2006 et 28 juillet 2007 ; que par un courrier du 25 janvier 2008, son épouse a présenté une demande de regroupement familial sur place au profit de M. A, qui a été rejetée le 10 juin 2008 en raison de la présence du requérant sur le territoire français ; que M. A a présenté le 15 décembre 2008 une demande de régularisation de sa situation au titre du droit au respect de la vie privée et familiale sur le fondement du 5° de l'article 6 des stipulations de l'accord franco-algérien ; que par l'arrêté attaqué du 15 février 2010, le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination ; que M. A relève appel du jugement du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant, en ce qui concerne la légalité externe de cette décision, que si M. A invoque l'incompétence du signataire de la décision préfectorale litigieuse, ce moyen doit être rejeté par adoption des motifs des premiers juges ;

Considérant, en ce qui concerne la légalité interne de cette décision, en premier lieu, que pour contester la mention portée dans la décision attaquée, selon laquelle il s'est délibérément maintenu sur le territoire français au-delà de la durée du visa qui lui avait été délivré, M. A fait valoir qu'il a entrepris diverses démarches pour tenter de régulariser sa situation à la suite de son entrée en France le 18 mai 2001 et que la décision attaquée serait entachée d'une erreur de fait au motif qu'elle n'en fait pas état ; que toutefois, toutes ces démarches ayant échoué, le constat du maintien irrégulier de l'intéressé sur le territoire français après l'expiration de la durée de validité de son visa n'est entaché d'aucune erreur de fait ; que par suite, ce moyen doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles stipule que " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

Considérant que si M. A soutient qu'il est fondé à demander la délivrance d'un titre de séjour en application de l'article 6, 5° de l'accord franco-algérien, en sa qualité de conjoint d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an, le requérant entre toutefois, en application de l'article 4 du même accord, dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial et qui sont expressément exclues du champ d'application des stipulations de l'article 6, 5° ; que pour ce motif, M. A ne saurait revendiquer un titre de séjour sur ce fondement ;

Considérant que M. A est entré en France le 18 mai 2001, sous couvert d'un visa touristique de trente jours, et s'y est maintenu à l'expiration de la durée de validité de ce visa ; qu'à la suite du rejet d'une demande d'asile, un refus de séjour assorti d'une invitation à quitter le territoire lui a été notifié le 7 avril 2003 ; qu'il s'est fait interpeller le 26 mars 2004 alors qu'il tentait d'ouvrir un compte dans un bureau de poste en Avignon muni d'un faux titre de séjour ; qu'incarcéré le 19 septembre 2004, il a été condamné à 6 mois d'emprisonnement et une interdiction du territoire français de 3 ans pour séjour irrégulier, dégradation grave d'un bien d'autrui en réunion, transport d'arme de catégorie 6 et prise de nom d'un tiers ; que libéré le 22 janvier 2005, l'intéressé était placé en rétention administrative, mesure à laquelle le juge de la liberté et de la détention mettait fin le 23 janvier 2005, après lui avoir rappelé son obligation de quitter le territoire français ; qu'en méconnaissance de l'interdiction du territoire dont il faisait l'objet et dont il a été relevé le 10 septembre 2007, M. A s'est maintenu sur le territoire français et s'est marié le 15 avril 2006 à Marseille, avec une ressortissante algérienne née le 15 mai 1976, qui est entrée en France le 23 octobre 2002 et qui, à la date de l'arrêté attaqué, y séjournait régulièrement sous couvert d'un certificat de résidence valide un an à compter du 5 janvier 2010 ; que le requérant a reconnu le 26 mars 2004 s'être maintenu en France à l'aide d'un faux titre de séjour acheté un an plus tôt ; que deux enfants sont nés respectivement en mai 2006 et juillet 2007 ; que seul l'aîné, âgé de moins de quatre ans à la date de la décision attaquée, était alors scolarisé en école maternelle ; que la situation familiale dont se prévaut le requérant trouve de fait son origine dans la violation de l'interdiction du territoire que l'intéressé a délibérément perpétrée ; que la durée d'application de cette mesure ne peut être prise en compte pour apprécier l'ancienneté et la continuité du séjour en France de l'intéressé avant que celui-ci n'ait été relevé de cette peine le 10 septembre 2007 ; qu'âgé de 34 ans à la date de l'arrêté attaqué, M. A ne démontre pas l'existence de liens anciens et continus avec son père qui est installé en France depuis 1964, en dernier lieu sous couvert d'une carte de résident valide dix ans à compter du 27 juillet 2009, et dont il a été séparé pendant de nombreuses années ; que la régularité du séjour de son père et la nationalité française de l'un de ses frères ne lui confèrent pas un droit au séjour alors d'ailleurs que sa mère et quatre des cinq membres de sa fratrie vivent en Algérie ; que rien ne fait obstacle à ce que la vie familiale du couple et de leurs deux jeunes enfant se poursuive en Algérie ; qu'eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour de l'intéressé qui révèlent un défaut d'intégration dans la société française, la décision de refus de séjour attaquée n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise ; qu'elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de Vaucluse ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

Considérant, en troisième lieu, que la légalité s'appréciant à la date de l'arrêté attaqué, M. A ne peut utilement se prévaloir d'une promesse d'embauche qui, datée du 10 mars 2010, est postérieure à la décision qu'il conteste ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que si le requérant soutient que ces stipulations ont été en l'espèce méconnues, dès lors que le refus de séjour a nécessairement de graves répercussions sur la situation des deux jeunes enfants du couple, la seule circonstance qu'un refus de titre de séjour ou une mesure d'éloignement prise à l'encontre d'un des parents, puisse de fait, affecter la situation d'un enfant, ne saurait avoir pour conséquence qu'elle doive être regardée comme portant atteinte à l'intérêt supérieur de cet enfant au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que si les enfants de M. A sont nés en France et que l'aîné y est scolarisé en école maternelle, ce constat ne suffit pas à établir que l'intérêt supérieur des enfants n'aurait pas été pris en compte dans l'arrêté préfectoral attaqué ; que par suite le requérant, qui se borne à verser aux débats cinq attestations d'amis et d'une tante toutes datées de début mars 2010, et qui sont ainsi postérieures à l'arrêté attaqué, selon lesquelles il garde les enfants pendant que son épouse, qui est commerçante ambulante, exerce son activité professionnelle, ne peut soutenir que les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ont été méconnues ;

Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré de ce que le préfet de Vaucluse aurait méconnu l'étendue de son pouvoir de régularisation en s'estimant lié par les stipulations de l'article 6, 5° de l'accord franco-marocain en l'absence d'examen particulier de la demande de M. A, doit être écarté au regard des pièces du dossier ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, Mme Pinault, en charge d'assurer l'intérim du préfet de Vaucluse à la date de la décision attaquée, avait compétence pour signer celle-ci ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux relatifs au refus de séjour, le préfet de Vaucluse a pu, sans méconnaître les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant, faire obligation à M. A de quitter le territoire français ;

Considérant, en troisième lieu, que les conclusions en annulation dirigées contre la décision portant refus de séjour ayant été rejetées, le requérant ne saurait utilement se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision pour soutenir que celle portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A, n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu de faire application des dispositions des articles L. 911-1 ou L. 911-2, et L. 911-3 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées à cette fin par le requérant doivent donc être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à l'avocat de M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au préfet de Vaucluse.

''

''

''

''

2

N°10MA02532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02532
Date de la décision : 21/09/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Dominique LEMAITRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : BOURCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-09-21;10ma02532 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award