La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/09/2012 | FRANCE | N°10MA02464

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 21 septembre 2012, 10MA02464


Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2010, présentée pour M. Mahmoud A, domicilié ..., par Me Pieratti ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000401 du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mars 2010 du préfet de la Haute-Corse qui a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté préfectoral du 2 mars 2010 ;

3°) d'enjoindre le

préfet de la Haute-Corse de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours suiv...

Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2010, présentée pour M. Mahmoud A, domicilié ..., par Me Pieratti ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000401 du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mars 2010 du préfet de la Haute-Corse qui a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté préfectoral du 2 mars 2010 ;

3°) d'enjoindre le préfet de la Haute-Corse de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

......................................................................................................

Vu l'ordonnance, du 13 avril 2012, fixant la clôture de l'instruction au 11 mai 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2012 :

- le rapport de M. Lemaitre, président-assesseur ;

Considérant que M. Mahmoud A, de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mars 2010 par lequel le préfet de la Haute-Corse a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence présentée sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Considérant en premier lieu, qu'après avoir rappelé que M. A a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, l'arrêté préfectoral attaqué résume l'avis rendu le 19 janvier 2010 par le médecin inspecteur de la santé publique avant d'énoncer que le refus de délivrance du titre demandé ne méconnaît pas ces stipulations ; qu'il examine également la demande du requérant au regard des stipulations des articles 6, 1° et 6, 5° du même accord en prenant en compte la situation personnelle et familiale de M. A et constate enfin que ce dernier n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour prévu notamment par l'accord franco-algérien ; que ces éléments circonstanciés, sur lesquels se fonde l'arrêté préfectoral litigieux, témoignent que, contrairement à ce que soutient le requérant, sa demande a fait l'objet d'un examen particulier de la part du préfet de la Haute-Corse ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificats de résidence présentées par les ressortissants algériens sur le fondement de ces stipulations : " le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades : " Le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; / - et la durée du traitement. / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin inspecteur de la santé publique a indiqué, dans son avis du 19 janvier 2010, que si l'état de santé de M. A nécessitait une prise en charge médicale, son défaut ne devrait toutefois pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le requérant ne produit, ni même n'invoque, aucun élément qui serait de nature à contredire ce constat et verse aux débats des ordonnances médicales récentes, qui ne portent que sur des soins courants ; que s'il soutient que son état de santé précaire nécessite une prise en charge par l'intermédiaire d'une couverture sociale dont il ne bénéficierait pas dans son pays d'origine, la pathologie dont il souffrirait n'est même pas identifiée et cette allégation d'ordre général n'est assortie d'aucun élément établissant l'inadéquation de ses ressources au regard du coût en Algérie des soins, dont la nature n'est pas davantage précisée ; que par suite, M. A ne démontre pas qu'il serait dans l'incapacité d'accéder aux soins que requiert son état de santé dans son pays d'origine ; que, dès lors, le préfet de la Haute-Corse a pu légalement refuser à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des stipulations de l'article 6, 7° de l'accord franco-algérien ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5°) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; "

Considérant que M. A fait valoir que le jugement attaqué énonce à tort qu'il ne justifie ni de sa date d'entrée sur le territoire français, ni d'une présence sur le territoire français depuis au moins dix ans ; que le passeport dont il produit la copie fait mention d'un nombre élevé d'allers-retours que l'intéressé a effectués au début des années 1990, notamment en 1992 qui serait celle de son entrée en France ; qu'il ne ressort pas des cachets difficilement lisibles qui y sont apposés que le requérant soit resté en France au terme de son dernier voyage en 1992 ; qu'en tout état de cause, les pièces versées au débat par l'intéressé pour démontrer l'ancienneté de sa présence en France, comme l'ouverture d'un livret A le 7 septembre, le contrat de location signé le 16 septembre et l'attestation de couverture complémentaire CMU, ne concernent que des années récentes, particulièrement l'année 2009 ; qu'à l'exception d'une facture ponctuelle du 23 janvier 2002 et d'attestations rétroactives et insuffisamment probantes de deux commerçants du village de Vescovato selon lesquelles le requérant est leur client depuis plusieurs années, les autres pièces sont constituées d'ordonnances médicales éparses et peu circonstanciées, et souvent à portée rétroactive qui au surplus, ne revêtent pas un caractère suffisamment probant dès lors que les médecins ne sont pas tenus de s'assurer de l'identité réelle du patient ; que M. A qui prétend sans en justifier, avoir séjourné près de dix-huit années en France, n'a d'ailleurs pas engagé pendant cette période de démarches pour la régularisation de sa situation, à l'exception de sa précédente demande de titre de séjour déposée le 8 juin 2009 dont le dossier a été saisi sur commission rogatoire dans le cadre d'une procédure ouverte pour obtention et fourniture frauduleuses de documents administratifs ; qu'il ne démontre pas l'existence d'une présence depuis plusieurs années en France à la date de la décision attaquée ; qu'il ne saurait dès lors soutenir que le jugement qu'il conteste serait entaché d'erreur de fait ;

Considérant, par ailleurs, que M. A qui est né en 1958, n'établit pas le caractère erroné, ni même ne conteste les mentions de la décision attaquée selon lesquelles il est marié et sans famille en France, alors que son épouse et ses sept enfants résident en Algérie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué du préfet de la Haute-Corse portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, le préfet de la Haute-Corse n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements inhumains ou dégradants contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. A peut bénéficier d'un traitement et de soins appropriés à ses pathologies dans son pays d'origine ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision fixant, notamment, son pays d'origine comme pays de renvoi, l'exposerait à des traitements inhumains ou dégradants et qu'elle aurait, ainsi, méconnu les droits qu'il tient de ces stipulations ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. Mahmoud A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mahmoud A et préfet de la Haute-Corse.

''

''

''

''

2

N°10MA02464


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02464
Date de la décision : 21/09/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Dominique LEMAITRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : PIERATTI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-09-21;10ma02464 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award