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16/07/2012 | FRANCE | N°11MA01883

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 16 juillet 2012, 11MA01883


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2011 au greffe de la Cour administrative

d'appel de Marseille, sous le n° 11MA01883, présentée pour M. Nejib A, demeurant ..., par Me Touhlali ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101297 du 12 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 8 février 2011 rejetant sa demande d'admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) d'annule

r ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches du Rhône de lui délivrer un titr...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2011 au greffe de la Cour administrative

d'appel de Marseille, sous le n° 11MA01883, présentée pour M. Nejib A, demeurant ..., par Me Touhlali ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101297 du 12 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 8 février 2011 rejetant sa demande d'admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans le mois suivant la notification de l'arrêt, et, passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au bénéfice de son avocat ;

.........................................................................................................

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2012 :

- le rapport de Mme Felmy, conseiller,

- et les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité tunisienne, relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 février 2011 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français à destination de la Tunisie ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que si le requérant soutient que le jugement est entaché d'une omission à statuer car il ne vise pas la directive 2008/115/CE, il ressort des pièces du dossier de première instance qu'aucun moyen tiré de la méconnaissance de cette directive n'était invoqué ; que, par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes des dispositions applicables de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ;

Considérant que, contrairement à ce qu'il soutient, M. A ne justifie pas être entré en France en janvier 2003 et s'y être maintenu depuis de manière habituelle ; que les pièces qu'il produit, notamment le passeport délivré le 1er juin 2008 par le consulat général de Tunisie à Marseille et les documents médicaux datés de 2008 démontrent au mieux sa présence depuis cette année sur le territoire français à la date de la décision litigieuse ; que si M. A produit des attestations afin de prouver sa résidence habituelle depuis 2003, ces pièces, qui ne font d'ailleurs pas état d'une présence continue en France depuis cette année-là, ne suffisent pas à elles seules à prouver, ainsi qu'il le soutient, qu'il n'a plus quitté la France depuis cette date ; qu'il n'a au demeurant sollicité la délivrance d'un premier titre de séjour que le 7 avril 2009 ; qu'âgé de 24 ans à la date de la décision litigieuse, célibataire et sans enfant, il conserve des attaches familiales en Tunisie où vivent notamment son frère et sa soeur aînés nés en 1980 et 1983 ; qu'alors même que ses parents résident en France et ont obtenu en 2007 et 2011 la nationalité française, l'arrêté attaqué n'a pas, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, notamment du caractère récent de son séjour en France tel qu'il ressort des pièces du dossier, et nonobstant la promesse d'embauche produite, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a donc pas méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 du Parlement européen et du Conseil susvisée : " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement (...) indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles. / Les informations relatives aux motifs de fait peuvent être limitées lorsque le droit national permet de restreindre le droit à l'information, en particulier pour sauvegarder la sécurité nationale, la défense et la sécurité publique, ou à des fins de prévention et de détection des infractions pénales et d'enquêtes et de poursuites en la matière (...) " qu'aux termes de l'article 7 de cette directive, relatif au départ volontaire : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. (...) / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " I. L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. / (...) / L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / (...) / - refusent une autorisation (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 511-1 précitées, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'article 37 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 étaient, en tant qu'elles prévoyaient que l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation, incompatibles avec les objectifs de l'article 12 précité de la directive du 16 décembre 2008, dont le délai de transposition expirait le 24 décembre 2010 ; que, par suite, il y a lieu d'en écarter l'application ; que, toutefois, trouvent, dès lors, à s'appliquer les dispositions précitées des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, qui imposent la motivation des décisions refusant la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, ou retirant un tel titre, mais également de celles faisant obligation de quitter le territoire français, lesquelles constituent des mesures de police ; que les dispositions de la loi du 11 juillet 1979, en ce qu'elles s'appliquent à une telle obligation, sont propres à assurer la transposition du 1° de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008, et ne sont pas incompatibles avec les objectifs de cet article ; que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que, dès lors que, comme en l'espèce, ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de cette obligation n'implique pas de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, dispositions légales au regard desquelles doit être apprécié le caractère suffisant ou non de cette motivation ;

Considérant, d'autre part, que, contrairement à ce que soutient M. A, aucune disposition de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 n'impose à l'autorité administrative de motiver spécifiquement le délai de départ volontaire imparti à l'étranger lorsque la durée de ce délai est comprise, comme en l'espèce, entre les limites de sept et trente jours fixées au 1° de cet article ; que les dispositions du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile laissent, de façon générale, un délai d'un mois pour le départ volontaire de l'étranger qui fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'un tel délai d'un mois est égal ou supérieur à la durée de trente jours prévue par l'article 7 de la directive à titre de limite supérieure du délai devant être laissé pour un départ volontaire ; que, par suite, alors même que ni les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni celles de l'article 7 de la directive ne font obstacle à ce que le délai de départ volontaire soit prolongé, le cas échéant, d'une durée appropriée pour les étrangers dont la situation particulière le nécessiterait, l'autorité administrative, lorsqu'elle accorde ce délai d'un mois, n'est pas tenue de motiver sa décision sur ce point si l'étranger, comme en l'espèce, n'a présenté aucune demande en ce sens ; qu'il ne résulte pas de la lecture de l'arrêté en litige que le préfet des Bouches-du-Rhône se serait estimé à tort en situation de compétence liée au regard du délai de départ de volontaire d'un mois déterminé par le 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans examiner la situation particulière de l'intéressé ;

Considérant, en dernier lieu, que compte tenu de ce qui précède, le préfet n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision portant obligation de quitter le territoire d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Nejib A et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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N° 11MA01883


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01883
Date de la décision : 16/07/2012
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : TOUHLALI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-07-16;11ma01883 ?
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