Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2009, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 09MA00879, présentée par le PREFET DES ALPES-MARITIMES ;
Le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0802499 du 16 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté son déféré tendant à l'annulation, d'une part, de la délibération en date du 28 février 2008 par laquelle le conseil de la communauté d'agglomération Nice-Côte-d'Azur a décidé par voie de protocole transactionnel la résiliation du marché CMO1 passé avec les sociétés Eiffage TP, Eiffage construction Côte d'Azur, Spie fondations et Eiffage travaux publics Méditerranée, d'arrêter le montant des sommes dues au titre des travaux effectués par le groupement pour la réalisation du centre de maintenance et dépendances ainsi que du parc relais de Nice Nord à la somme globale de 82 806 658,14 euros HT, soit 99 036 763,14 euros TTC, de régler le solde après déduction des sommes déjà versées, à hauteur de la somme de 11 372 730,03 euros HT soit 13 601 785,12 euros TTC et d'autoriser la signature du protocole en cause et, d'autre part, du protocole transactionnel afférent signé le 28 février 2008 ;
Vu le jugement et les actes attaqués ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2012 :
- le rapport de Mme Lopa Dufrénot, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public,
- et les observations de Me Guénaire, avocat, représentant la CUNCA et de Me Quinton, avocat, représentant les sociétés Eiffage TP, Eiffage construction Côte d'Azur, Spie fondations et Eiffage travaux publics Méditerranée ;
Considérant qu'en exécution d'une délibération du conseil de la communauté d'agglomération Nice Côte-d'Azur (CANCA) du 28 février 2008, la communauté d'agglomération, d'une part et les sociétés Eiffage TP, Eiffage construction Côte d'Azur, Spie fondations et Eiffage travaux publics Méditerranée, d'autre part sont convenues d'un protocole transactionnel signé le même jour ; que par le jugement attaqué du 16 janvier 2009, le tribunal administratif de Nice a rejeté le déféré du PREFET DES ALPES-MARITIMES tendant à l'annulation de la délibération précitée du 28 février 2008 et de la transaction du même jour ;
Considérant que selon l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ; qu'en vertu de l'article 2052 de ce code, un tel contrat de transaction a entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ; qu'il est exécutoire de plein droit, sans qu'y fassent obstacle, notamment, les règles de la comptabilité publique ;
Sur le principe de la transaction :
Considérant, en premier lieu, que dans le cadre de l'opération de la première ligne du tramway de Nice, la communauté d'agglomération de Nice Côte d'Azur, désormais communauté urbaine de Nice Côte d'Azur, a confié aux entreprises Eiffage construction Côte d'Azur, Spie fondations, Appia Alpes-Maritimes aux droits de laquelle vient la société Eiffage travaux publics Méditerranée et Eiffage TP formant un groupement solidaire dont le mandataire était la société Eiffage TP, la réalisation de la construction du complexe " Espace Comte de Falicon " comprenant le centre de maintenance et d'exploitation du tramway de Nice, un parc auto relais et les aménagements associés, les aménagements spécifiques de la station terminus, le viaduc d'accès au centre de maintenance et différents ouvrages de consolidation et de soutènement, en vertu d'un marché signé le 11 août 2004, complété par un avenant n° 1, pour un montant de 62 555 318 euros HT, soit 74 816 160,33 euros TTC ; que, alors qu'étaient annexées au marché en cause, des études géotechniques réalisées en 2001 et 2003, lors de la conception du projet, les entreprises intéressées du groupement titulaire du marché ont, de leur propre initiative, procédé à des sondages du sol ; que ces sondages ont révélé des changements dans les hypothèses hydrogéologiques, des niveaux d'eaux souterraines différents de ceux relevés lors des études de conception ainsi que la présence de marnes gonflantes et d'un paléo-thalweg ; qu'en exécution de divers ordres de service, les entreprises ont effectué des travaux supplémentaires relatifs à la modification des parois de soutènement périphériques du centre de maintenance, à de nouvelles études, à la transformation des fondations et de la structure du plancher bas du centre et à des réseaux VRD sous ce plancher ; qu'en outre, le maître d'ouvrage a commandé la réalisation de nouvelles prestations en vue de l'installation d'un dispositif complémentaire de détection incendie et d'extinction automatique à la demande du service départemental d'incendie et de secours et des modifications liées à l'aménagement des divers locaux du centre de maintenance ; qu'il résulte de l'instruction qu'une proposition d'avenant ayant recueilli l'avis favorable de la commission d'appel d'offres en 2005 n'a pas été acceptée par les entreprises ; qu'en outre, par jugement du 2 février 2007, dont avait interjeté appel la communauté urbaine de Nice Côte d'Azur, le Tribunal administratif de Nice a annulé la décision de la commission d'appel d'offres attribuant le marché au groupement d'entreprises ; que, alors que la masse initiale des travaux prévue au marché était atteinte, la communauté a, le 14 mai 2007, décidé de poursuivre l'exécution du marché ; qu'à la suite d'observations émises par le PREFET DES ALPES-MARITIMES, la nouvelle décision de poursuivre au-delà de la masse initiale des travaux prévue, du 29 octobre 2007 a fait l'objet d'un retrait le 21 janvier 2008 ; qu'au surplus, le receveur municipal de Nice a rejeté, le 11 décembre 2007, les mandats de payer pour défaut de pièces justificatives ; que la nouvelle proposition d'avenant a donné lieu à un avis défavorable de la commission d'appel d'offres le 15 janvier 2008 ; qu'enfin, les entreprises ont présenté, le 15 février 2008, un projet de décompte final pour un montant de 93 376 063,95 euros HT comprenant outre le paiement de travaux supplémentaires, une réclamation au titre du surcoût supporté en raison de l'allongement des délais d'exécution et du nouveau programme d'exécution ; que les parties ne contestent pas le motif du jugement attaqué tiré de ce que les difficultés d'exécution rencontrées par les entreprises titulaires du marché, à l'origine de la réalisation de travaux supplémentaires ne constituant pas des sujétions imprévues au sens des dispositions de l'article 19 du code des marchés publics applicables au marché en cause, les parties contractantes ne pouvaient signer d'avenant qui, compte tenu du montant des travaux, aurait bouleversé l'économie dudit marché ; que les parties ont entendu mettre fin aux incertitudes sur la régularité du marché du fait notamment de l'annulation de la décision d'attribution au groupement du marché et prévenir tout éventuel contentieux lié tant au paiement de travaux supplémentaires dont la majorité ont donné lieu à commandes du maître d'oeuvre et notification de nouveaux prix qu'à la réparation du préjudice que les entreprises estiment avoir subi ; qu'ainsi, la communauté d'agglomération, d'une part et les sociétés Eiffage TP, Eiffage construction Côte d'Azur, Spie fondations et Eiffage travaux publics Méditerranée d'autre part ont conclu un protocole en vue notamment, de résilier le marché, d'arrêter le décompte général et définitif des travaux et prestations réalisés à la somme globale de 82 806 658,14 euros HT, soit 99 036 763,14 euros TTC, toutes sources de préjudice confondues y compris les frais financiers, de constater l'engagement pour les entreprises à lever certaines réserves à la réception intervenue le 22 novembre 2007, de verser à celles-ci la somme de 13 601 785 euros TTC au titre des prestations et travaux exécutés par les entreprises cocontractantes et les sous-traitants et de renoncer à porter toute réclamation, instance ou action, née ou à naître, à raison de l'ensemble des relations contractuelles ; que, dès lors, alors même qu'un différend n'était pas encore né entre les parties à la date de la délibération contestée et de la transaction, la CANCA et les entreprises concernées ont pu légalement avoir recours à la transaction prévue par les dispositions de l'article 2044 du code civil ;
Considérant, en second lieu, que, comme il a été dit, les règles de comptabilité publique, et notamment celles relatives à la réquisition des comptables ne font pas obstacle au recours à la transaction pour mettre fin à une contestation née ou prévenir une contestation à naître ; qu'il en est de même des principes de liberté d'accès à la commande publique et de transparence des procédures ; que, par suite, le PREFET DES ALPES-MARITIMES ne saurait soutenir que la délibération du 28 février 2008 et la transaction en cause portent atteinte à ces règles et principes, ni davantage que l'accord transactionnel constitue un avenant de régularisation prohibé par le code des marchés publics ;
Sur la validité de la transaction :
Considérant, en premier lieu, qu'ont été annexés au protocole la " décomposition du montant des travaux et prestations réalisées " et le " détail des sommes déjà versées et restant à verser " ; que l'exigence d'un dossier financier ou d'une étude d'expertise, laquelle est recommandée par la circulaire ministérielle du 6 février 1995 relative au développement du recours à la transaction pour régler amiablement les conflits, ne constitue pas une condition de validité de la transaction ; que leur absence n'est pas de nature à entacher la délibération d'illégalité et la transaction d'irrégularité ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les parties ont évalué, d'une part, à la somme de 12 225 595,07 euros HT le montant des prestations et travaux supplémentaires dont la plus grande partie a été réalisée en exécution d'ordres de service du maître d'oeuvre, versés aux débats et d'autre part, à celle de 2 727 565,54 euros HT, l'indemnité destinée à réparer le préjudice résultant de l'allongement du délai d'exécution du marché ; que, d'une part, alors même que les difficultés d'exécution à l'origine de la commande de travaux supplémentaires ont été révélées par la réalisation de sondages à l'initiative des entreprises titulaires du marché, il ne résulte pas de l'instruction que la somme retenue aurait été déterminée sur une base étrangère au montant des dépenses utiles à la CANCA ; que, d'autre part, alors que les entreprises réclamaient le paiement d'une somme de 30 820 745 euros HT au titre des prestations et travaux supplémentaires effectués et de la réparation du préjudice qu'elles estimaient avoir subi du fait de l'allongement du chantier, la CANCA s'est engagée à verser une indemnité arrêtée à la somme de 14 953 160, 61 euros HT, inférieure à celle à laquelle elle aurait pu être éventuellement condamnée, à ces deux titres, en contrepartie de la renonciation par les entreprises à toute réclamation ou action fondée sur l'exécution du marché en cause ; que, dans ces conditions et eu égard, en outre, à l'avantage retiré découlant de la résolution plus rapide d'un éventuel litige, les concessions réciproques des parties ne sont pas manifestement disproportionnées ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit n'exige que l'accord transactionnel conclu et revêtu de l'autorité de la chose jugée en dernier ressort, soit soumis préalablement à l'homologation du juge ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES ALPES-MARITIMES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté son déféré ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme 1 500 euros demandée par la communauté urbaine de Nice Côte d'Azur et celle de 1 500 euros aux sociétés Eiffage construction Côte d'azur, Eiffage TP, Spie fondations et Eiffage travaux publics Méditerranée ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du PREFET DES ALPES-MARITIMES est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la communauté urbaine de Nice Côte d'Azur et celle de 1 500 euros aux sociétés Eiffage construction Côte d'azur, Eiffage TP, Spie fondations et Eiffage travaux publics Méditerranée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté urbaine de Nice Côte d'Azur, à la société Eiffage construction Côte d'Azur, à la société Eiffage TP, Eiffage travaux publics Méditerranée, à la société Spie fondations et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au PREFET DES ALPES-MARITIMES.
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N° 09MA00879
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