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09/07/2012 | FRANCE | N°11MA01983

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 juillet 2012, 11MA01983


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 11MA01983, présentée pour M. Abdesselam A, demeurant chez ..., par Me Moulinas ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1006590 du 21 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 30 août 2010 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au pr

fet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 11MA01983, présentée pour M. Abdesselam A, demeurant chez ..., par Me Moulinas ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1006590 du 21 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 30 août 2010 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention n° 2 de l'Organisation internationale du travail assurant aux chômeurs involontaires des indemnités ou des allocations ;

Vu la convention n° 44 de l'Organisation internationale du travail assurant aux chômeurs involontaires des indemnités ou des allocations ;

Vu la convention n° 97 sur les travailleurs migrants de l'Organisation internationale du travail ratifiée par la France le 29 mars 1954 ;

Vu la directive 2000/43/CE du conseil de l'Union européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique ;

Vu la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2012 le rapport de Mme Felmy, conseiller ;

Considérant que M. A, de nationalité marocaine, interjette appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision d'irrecevabilité de sa demande de titre de séjour devant s'analyser en refus de délivrance d'une carte de séjour prise par le Préfet des Bouches-du-Rhône à son encontre le 30 août 2010 sur le fondement de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur le fondement de l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort de la lecture du jugement attaqué que les premiers juges ont procédé à une analyse de la situation de M. A au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'un défaut de motivation ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention "salarié", une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an ; (...) 4° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail saisonnier entrant dans les prévisions du 3° de l'article L. 122-1-1 du code du travail et qui s'engage à maintenir sa résidence habituelle hors de France. (...) Elle porte la mention "travailleur saisonnier" " ; qu'aux termes de l'article R. 341-1 du code du travail dans sa version alors en vigueur : " Tout étranger, pour exercer à temps plein ou à temps partiel une activité professionnelle salariée, doit être titulaire d'une autorisation de travail en cours de validité. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 341-2 du même code : " Sous réserve des dispositions des articles R. 341-7 et R. 341-7-2, l'autorisation de travail est constituée par la mention "salarié" apposée sur la carte de séjour temporaire ou par la carte de résident en cours de validité. " ; qu'aux termes de l'article R. 341-7-2 du code du travail, dans sa version issue

du décret 84-169 du 8 mars 1984 et expressément abrogée par le décret n° 2007-801 du

11 mai 2007 : " Le contrat d'introduction de travailleur saisonnier visé par les services du ministre chargé du travail donne à son titulaire le droit d'exercer l'activité professionnelle salariée qui y est portée pendant sa durée de validité chez l'employeur qui a signé ce contrat. La durée totale du ou des contrats saisonniers dont peut bénéficier un travailleur étranger ne peut excéder six mois sur douze mois consécutifs. Un même employeur ne peut être autorisé à recourir à un ou des contrats de main-d'oeuvre saisonnière visés à l'article 1er pour une période supérieure à six mois sur douze mois consécutifs. Le décompte est effectué pour chaque établissement d'une même entreprise. A titre exceptionnel, l'employeur peut être autorisé à conclure des contrats saisonniers d'une durée maximum totale de huit mois sur douze mois consécutifs sous la double condition que ces contrats concernent des activités de production agricole déterminées, pour lesquelles cette mesure répond à des exigences spécifiques et que l'employeur intéressé apporte la preuve qu'il ne peut faire face à ce besoin par le recrutement de main-d'oeuvre déjà présente sur le territoire national. " ; qu'il résulte des dispositions en vigueur depuis le 26 juillet 2006, et notamment de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version issue de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et de l'article R. 5221-23 du code du travail, que la durée pendant laquelle un étranger peut occuper un ou plusieurs emplois saisonniers ne peut excéder six mois par an ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été bénéficiaire de contrats de travailleur saisonnier tous les ans entre 2002 et 2009 sur une exploitation agricole située sur la commune de Châteaurenard chaque année dans le cadre des dispositions applicables du code du travail et notamment de ses articles L.122-1 et R.341-7-2, et que ces contrats ont fait l'objet à six reprises de prolongation au-delà d'une durée de six mois, et notamment en 2007, soit après l'abrogation de dispositions réglementaires permettant de le faire ; que, toutefois, eu égard en particulier au nombre d'années pendant lesquelles M. A est venu travailler en France, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne pouvait se prévaloir ni de motifs exceptionnels ni de considérations humanitaires pour être admis au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, que comme il a été dit précédemment, M. A a été bénéficiaire de contrats de travailleur saisonnier ; qu'il est retourné au Maroc à l'issue de chacun de ses contrats ; qu'il n'a jamais été titulaire d'une carte de séjour portant la mention " salarié " et, au demeurant, n'en a jamais sollicité la délivrance ; qu'il n'appartient pas à l'administration de requalifier des contrats de travailleurs saisonniers en contrats de travail à durée indéterminée ; que par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur dans la qualification juridique des faits, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 relatif à l'exercice d'une activité professionnelle salariée en France pour une durée d'un an minimum et n'a pas davantage commis de détournement de pouvoir, nonobstant la circonstance que les contrats de travail de M. A auraient excédé la durée légale ;

Considérant, en troisième lieu, que comme il vient d'être dit M. A n'a jamais été titulaire d'une carte de séjour portant la mention " salarié " ; que par suite, il ne saurait invoquer une rupture de l'égalité de traitement du fait d'une discrimination entre travailleurs étrangers placés dans la même situation et une violation des engagements internationaux ratifiés par la France sur les travailleurs migrants, dès lors qu'en se bornant à refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui ne justifiait pas des conditions requises pour son obtention, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a méconnu ni la directive européenne 2000/43/CE du 29 juin 2000 et la loi n° 2000-1486 du 30 décembre 2004 votée pour sa transcription en droit interne, ni la convention n° 2 de l'Organisation internationale du travail sur le chômage du 28 novembre 1919 et la convention n° 44 de cette même organisation du 23 juin 1934 ratifiée par la France le 21 février 1949, ni celle n° 97 sur les travailleurs migrants de l'Organisation internationale du travail ratifiée par la France le 29 mars 1954, ni les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d' une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que si M. A fait valoir, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'il a travaillé sur le territoire français depuis 2002 comme ouvrier sous couvert de contrats d'introduction de travailleur saisonnier conclus dans le cadre des dispositions applicables du code du travail et notamment de ses articles L. 122-1 et R. 341-7-2, ses contrats ayant été illégalement prolongés au-delà de la durée de six mois et que sont présents en France des membres de sa fratrie, il ne conteste pas avoir rejoint à l'issue de chacun de ses contrats son pays d'origine où résident notamment son épouse et ses enfants ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situerait en France ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, pour les mêmes motifs que ceux sus-indiqués, que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Abdesselam A et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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N° 11MA01983


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01983
Date de la décision : 09/07/2012
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : MOULINAS LE GO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-07-09;11ma01983 ?
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