Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2008, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA02215, présentée pour les sociétés BEC FRERES, société anonyme, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est 1111, avenue Justin Bec à Saint-Georges d'Orques (34680), EUROVIA MEDITERRANEE, société en nom collectif, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est 140 rue Georges Claude à Aix-en-Provence, venant aux droits des sociétés Routière du Midi et Cochery Bourdin Chaussé et EUROVIA BETON, société en nom collectif, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est 14 juillet, ZI de la Gaudrée à Dourdan (91412), venant aux droits de la société TSS, par la SELARL Ringle Roy et associés, avocat ;
Les sociétés BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0401413 en date du 26 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser les sommes de 784 603,12 euros au titre du règlement du marché 97 013 E du 5 mai 1997 relatif à la mise à deux fois trois voies de l'autoroute A51 entre Septèmes et les Chabauds, 104 947,18 euros au titre des retards de paiement des situations acquittées, arrêtés au 30 septembre 2001 et 22 081,69 euros au titre des frais qu'elles ont dû engager pour la réalisation de l'expertise judiciaire, assorties des intérêts calculés au taux légal à compter du 22 mars 1999 ainsi que leur capitalisation et à mettre à la charge de l'Etat une somme de 22 867,35 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser les sommes de 784 603,12 euros au titre du règlement du solde du marché, 104 947,18 euros au titre des retards de paiement des situations arrêtées au 30 septembre 2001 et 22 081,69 au titre des frais d'expertise, assorties des intérêts outre la capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 22 867,35 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.........................................................................................................
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2012 :
- le rapport de Mme Lopa Dufrénot, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public ;
- les observations de Me Ringle, représentant les SOCIETES BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON ;
Considérant que, par marché signé le 5 mai 1997 et notifié le 23 mai 1997, l'Etat a confié l'exécution de la mise à deux fois trois voies de l'autoroute A 51 entre l'échangeur de Septèmes et l'échangeur des Chabauds à un groupement conjoint d'entreprises, composé des SOCIETES BEC FRERES, Cochery Bourdin Chaussé, Routière du Midi et Travaux signalisation et sécurité BTP (TSS), la SOCIETE BEC FRERES étant désignée comme mandataire ; que la direction départementale de l'équipement des Bouches-du-Rhône a assuré la maîtrise d'oeuvre ; que le marché était décomposé en trois lots, le lot n° 1 'signalisation' attribué à la société TSS, le lot n° 2 'terrassement -assainissement - murs de soutènement' à la SOCIETE BEC FRERES et le lot n° 3 'chaussées' au groupement solidaire formé de la société Cochery Bourdin Chaussé et la société Routière du Midi ; que la SOCIETE EUROVIA vient aux droits des sociétés Routière du Midi et Cochery Bourdin Chaussé ; que la SOCIETE EUROVIA BETON intervient aux droits de la société TSS ; que, par le jugement attaqué en date du 26 février 2008, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser les sommes de 784 603,12 euros au titre du règlement du marché précité relatif à la mise à deux fois trois voies de l'autoroute A51 entre Septèmes et les Chabauds, de 104 947,18 euros au titre des retards de paiement des situations arrêtés au 30 septembre 2001, assorties des intérêts calculés au taux légal à compter du 22 mars 1999 ainsi que leur capitalisation et celle 22 081,69 euros au titre des frais d'expertise ;
Sur la procédure de règlement de différend :
Considérant, d'une part, qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par le décret du 21 janvier 1976 : "L'entrepreneur doit, dans un délai de 45 jours compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. / Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché" ; qu'il en résulte que l'entrepreneur dispose d'un délai fixé selon le cas à 30 ou 45 jours à compter de la notification du décompte général par le maître de l'ouvrage pour faire valoir, dans un mémoire en réclamation, ses éventuelles réserves, le règlement du différend intervenant alors selon les modalités précisées à l'article 50 ; que l'article 50, auquel il est ainsi renvoyé, stipule que : " 50-22 - Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de
l'ouvrage. 50-23 - La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage (...) " ; qu'aux termes de l'article 50-32 dudit cahier : " Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. Toutefois, le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement amiable dans les conditions du 4 du présent article (...) " ; qu'il résulte des stipulations de l'article 13-44 et de l'article 50-22 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, qu'il appartient à l'entrepreneur qui a contesté le décompte général dans le délai de trente ou de quarante-cinq jours prévu à l'article 13-44 à compter de la notification qui lui en a été faite et qui n'accepte pas la décision qui a été prise sur sa réclamation par le maître de l'ouvrage dans le délai de trois mois prévu à l'article 50-31 ou le refus implicite né du silence gardé par le maître de l'ouvrage au terme de ce délai, de saisir du litige le tribunal administratif compétent dans le délai de six mois prévu à l'article 50-32 à partir de la notification de cette décision " ;
Considérant, d'autre part, que les intérêts moratoires dont les stipulations de
l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales précité permettent la discussion même après la signature du décompte général sont exclusivement ceux qui courent le cas échéant sur le solde résultant de ce décompte ; qu'eu égard au caractère définitif du décompte accepté, ces stipulations ne sauraient, en revanche, concerner les intérêts moratoires afférents à des acomptes inclus dans le décompte général ;
Considérant que par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que la demande présentée par les entreprises requérantes au greffe du Tribunal le 24 février 2004 était tardive au motif qu'à la suite du rejet, le 30 octobre 2000, par le maître d'ouvrage de leurs réclamations présentées par mémoire adressé le 22 mars 1999, le silence gardé par la SOCIETE BEC FRERES, mandataire du groupement d'entreprises, durant plus de six mois avait conféré un caractère définitif au décompte général du marché transmis le 8 février 1999 ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la transmission par le mandataire du groupement d'entreprises, le 16 novembre 1998, du projet de décompte final, la direction départementale de l'équipement des Bouches-du-Rhône lui a notifié le 8 février 1999 un projet de décompte général ; que la SOCIETE BEC FRERES en sa qualité de mandataire, a transmis, le 22 mars 1999, à la direction départementale de l'équipement, un mémoire de réclamation ; que cette direction départementale lui a notifié, par ordre de service du
21 mai 1999, la position du maître d'ouvrage acceptant de prendre en compte quelques points de la réclamation, tout en lui faisant part de son souhait que " l'expertise porte sur les points de divergence abordés " dans le mémoire de réclamation ; que les parties ne contestent pas que cette correspondance n'a pas constitué le rejet des réclamations des entreprises, au sens des stipulations de l'article 5.32 du cahier des clauses administratives générales ; qu'au cours des opérations qu'il a menées, l'expert désigné par ordonnance du président du Tribunal administratif de Marseille du 12 avril 1999, a vu sa mission étendue à l'examen des chefs de réclamation du groupement d'entreprises, objet du mémoire de réclamation ; que le rapport d'expertise a été déposé au greffe du Tribunal les 19 mai 1999 et 14 juin 2000 ; qu'au vu de ces conclusions, le conseil du groupement d'entreprises a adressé, le 4 août 2000, à la direction départementale de l'équipement des Bouches-du-Rhône, une proposition de négociation ; que
le directeur de cette direction a, par courrier du 30 octobre 2000, présenté une
contre-proposition invitant le conseil à recueillir l'accord éventuel des entreprises concernées en vue d'un règlement définitif ; que, à supposer même que le maître d'ouvrage ait entendu rejeter la réclamation des entreprises, cette correspondance adressée directement à leur conseil, ne répond pas aux exigences posées par les stipulations des articles 50.23 et 50.32 du cahier précité ; qu'à la suite de l'avis du comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges en matière de marchés publics de Marseille, émis le 8 juillet 2003, la direction départementale de l'équipement a notifié, par ordre de service du 1er septembre 2003, au mandataire, la position du maître d'ouvrage rejetant partiellement les réclamations des entreprises ; que, dans ces conditions, le délai de six mois avant l'expiration duquel il appartenait aux entreprises de saisir le Tribunal a couru à compter de cette dernière décision ; qu'en revanche, faute pour l'entrepreneur d'avoir, en application des stipulations de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales précitées, en renvoyant le décompte général au maître d'oeuvre, fait connaître ses réclamations au titre des intérêts moratoires sur les acomptes honorés avec retard, ni davantage avant l'expiration du délai des 45 jours de la réception du décompte général, ce décompte est devenu définitif au regard de ce chef de réclamation et ne peut donc pas, sur ce point, être contesté, devant le juge du contrat ; que, par suite, la demande des entreprises requérantes, enregistrée le 24 février 2004, au greffe du Tribunal administratif de Marseille, était recevable sauf en ce qui concerne les intérêts moratoires sur acomptes ;
Sur les réclamations relatives aux " occultation/désocculation des panneaux d'information " et à la signalisation des accès se rattachant à la phase 3 :
Considérant que l'Etat reconnaît la créance des entreprises, pour chacun de ces deux postes, à hauteur de la somme de 41 674,20 F HT soit 6 353,19 euros HT et celle de 13 980 F HT, soit 2 131,24 euros HT ;
Sur la réclamation relative à l'écart de quantités :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les métrés successifs produits par l'entreprise mandataire, adressés tardivement au maître d'oeuvre ainsi que les bilans modifiés font état de quantités différentes ; que les sociétés requérantes ne sont pas en mesure de justifier de la réalité des quantités consommées, lesquelles sont contestées ; que, par suite, il y a lieu de rejeter ce chef de réclamation ;
Sur la réclamation relative aux GBA (glissières béton armé) dans la zone des caniveaux à fente (satujo) :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le marché rémunère les prestations au mètre linéaire de glissières béton armé selon le prix n° 108 ; que le maître d'oeuvre a notifié un nouveau prix n° 126 afin de prendre en considération la moins-value correspondant à 4 250 ml de caniveaux à fente en pied de glissières béton armé au motif que dès lors que le caniveau empiétait sur la semelle de la glissière, la quantité de béton mis en oeuvre pour la réalisation de la semelle était nécessairement réduite ; que, toutefois, d'une part, il n'est pas contesté que les entreprises ont pratiqué, lors de l'établissement du marché, une péréquation sur le prix n° 108 correspondant au prix moyen des glissières béton armé à réaliser dans les zones en cause ; que, d'autre part, l'Etat ne peut utilement faire valoir que les entreprises qui réclament par ailleurs une indemnité au titre du facteur de complexité découlant de l'adaptation des glissières béton armé en présence du mur 1, ne pourraient y prétendre cumulativement ; que, dans ces conditions, il sera fait droit à la demande d'un montant de 94 902,50 F HT, soit 14 467,79 euros HT ;
Sur la réclamation relative aux matériaux d'apport :
Considérant que la SOCIETE BEC FRERES réclame la somme de 278 012 F correspondant au montant de la réfaction à laquelle a procédé le maître d'oeuvre sur la quantité de déblais de redents métrés ; que si l'Etat fait valoir que 4 835 m3 de déblais pour la création des redents dans talus ont été réutilisés à l'occasion d'autres travaux sur le chantier, il n'apporte aucun élément de nature à justifier ses allégations ; que, par suite, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 278 012,50 F HT, soit 42 382,73 euros HT ;
Sur la réclamation relative au réseau d'appel d'urgence :
Considérant qu'en vertu du l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières applicables au marché, ses stipulations sont prioritaires sur le bordereau des prix ; que selon l'article III-6-3 du cahier des clauses techniques particulières précité, les fourreaux seront réalisés en tube PVC haute densité ; qu'ainsi, alors même que le maître d'oeuvre à la suite d'une erreur a notifié de nouveaux prix prévoyant la fourniture et la pose d'une artère de télétransmission composée de fourreaux en TPC, les entrepreneurs ont néanmoins mis en place l'ouvrage en PVC, conformément aux stipulations contractuelles ; que les sociétés requérantes ne sauraient utilement se prévaloir du bordereau des prix prévoyant des fourreaux en TPC et réclamer paiement de la pose et fourniture de l'artère de télétransmission composé de fourreaux en PVC alors qu'une telle prestation était prévue au marché ; que par suite, ce chef de réclamation doit être rejeté ;
Sur la réclamation relative au déplacement de barrières de la phase 1 :
Considérant que les sociétés requérantes réclament à ce titre le paiement d'une part du coût du déplacement de barrières provisoires pour permettre des engravures et d'autre part de celui du déplacement des barrières provisoires pour permettre l'exécution du joint longitudinal d'enrobés à 10 cm des barrières ; qu'il résulte de l'instruction que, alors que le marché imposait en phase 1 que le tranchage de la chaussée s'opère à 1,65 m de l'axe du terre plein central, l'entreprise concernée a réalisé ce tranchage à 1,95 m ; qu'à la suite de la détérioration du bord du tranchage de la chaussée, lors des opérations de déblaiement, elle a proposé de réaliser une engravure et la reprise des joints de chaussée ; que l'Etat a accepté la prise en charge de l'engravure et des joints ;
Considérant que, d'une part, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que l'expert a estimé que ces travaux résultaient exclusivement du choix d'organisation du chantier imputable aux entrepreneurs et n'étaient pas nécessaires ; que les entreprises n'apportent pas d'élément de nature à infirmer les conclusions de l'expert et, par suite, ne sauraient réclamer paiement du coût du déplacement des barrières provisoires pour permettre les engravures en cause ; que, d'autre part, en revanche, il résulte de l'instruction, notamment des conclusions de l'expert, éclairées par l'avis de deux sapiteurs que le déplacement des barrières était nécessaire pour le compactage des joints de chaussée, évaluant le coût de cette prestation à la somme de 511 140 F HT ; que, dans ces conditions, l'Etat doit être condamné à payer la somme de 511 140 F HT, soit 77 922,79 euros HT ;
Sur la réclamation relative à l'adaptation technique des dispositifs de protection des glissières :
Considérant que les sociétés requérantes réclament le coût supplémentaire résultant de l'adaptation des glissières en béton armé aux contraintes particulières au droit du mur 1 et correspondant à un facteur de complexité ; que, toutefois, tant la présence du mur et les incidences techniques en découlant que les caractéristiques des glissières devant éventuellement être adaptées figuraient au marché ; que, dans ces conditions, il ne peut être fait droit à cette réclamation ;
Sur la réclamation relative aux caniveaux du terre plein central afférents à la phase 3 :
Considérant, d'une part, qu'il résulte du bordereau de prix unitaire applicable au marché en cause que le prix n° 319 rémunère l'exécution des " caniveaux à fente (de jour) " et comprend " l'exécution des fouilles nécessaires à la réalisation de l'ouvrage (tranchage de la chaussée) .... " ; que, par suite, les entreprises requérantes ne sauraient sérieusement prétendre que le tranchage de la fouille, réalisé pour les caniveaux de la phase 3 aurait dû être rémunéré sur la base du sous détail de prix n° 369 au motif que le prix n° 319 applicable (en travaux de jour) n'intègrait pas le coût du tranchage ;
Considérant, d'autre part, que les entreprises ont procédé au remplissage en béton B 20 des fouilles des caniveaux à fente ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert que le remblaiement des caniveaux à fente côté grilles béton armé, avec du béton n'était pas nécessaire, le remblaiement en grave et le compactage étant réalisables ; que, dès lors, les entreprises requérantes ne peuvent prétendre au paiement de la somme de 46 588 F HT au titre de cette prestation ; qu'en revanche, l'expert a estimé que le remplissage des fouilles des caniveaux, du côté des voies de circulation, en grave et son compactage ainsi que le mise en oeuvre des couches de chaussée pour reconstitution et leur compactage, prévus au marché n'étaient pas réalisables et qu'ainsi, le remplissage en béton nécessaire devait être rémunéré selon le prix n° 305 correspondant au béton B 20 ; que si l'Etat fait valoir toutefois que le remblaiement de fouilles par des matériaux graveleux avec reconstitution des couches des chaussées était réalisable au vu des notes techniques du SETRA, il ne fournit pas d'élément pour infirmer les conclusions de l'expert sur ce point ; que, par suite, il y a lieu de faire droit à la demande et de condamner l'Etat à verser aux sociétés requérantes la somme de 144 556,66 F HT, soit 22 037,52 euros HT ;
Sur la réclamation relative aux déplacements de barrière de la phase 3 :
Considérant que les sociétés requérantes réclament paiement du coût du déplacement de barrières réalisées au cours de la phase 3 pour 50 400 ml supplémentaires ; qu'il résulte de l'instruction que dès lors que les entreprises n'étaient pas en mesure de respecter le planning de la phase 3 et, en conséquence, le délai d'exécution contractuel de cette phase, la SOCIETE BEC FRERES, mandataire, a proposé le 19 décembre 1997 une solution technique permettant de réduire le délai de réalisation de la phase 3 sur laquelle se sont greffés en outre des travaux afférents à la phase 2, non terminés ; que, malgré plusieurs relances de la maîtrise d'oeuvre, la société mandataire n'a transmis le détail de son projet portant sur les deux phases, puis les bilans des travaux de la phase 2 et le bilan prévisionnel de la phase 3 qu'en mars 1998 ; que le 8 avril 1998, le maître d'oeuvre a accepté les propositions financières en ce qui concerne la phase 3 pour 37 347 ml et en ce qui concerne la phase 2 reportée sur la précédente, pour 28 053 ml ; qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'état navette mensuel des prestations arrêtées au 30 avril 1998, du bilan prévisionnel du 23 juin 1998 et du décompte de travaux arrêté à fin juin 1998, lesquelles émanent de l'entreprise mandataire elle-même qu'à cette dernière date, les prestations portaient sur le déplacement de barrières, estimé par celle-ci à 63 435 ml dont pour la phase 3, un volume de 35 400 ml ; que si les sociétés requérantes réclament paiement du coût du déplacement de barrières pour 50 400 ml supplémentaires, elles ne fournissent pas d'éléments précis de nature à remettre en cause leurs propres estimations arrêtées au cours de l'exécution des travaux ; que dans ces conditions, elles ne sont pas fondées à réclamer le coût des déplacements supplémentaires de barrières au cours de la phase en cause ;
Sur la réclamation relative aux moyens supplémentaires liés à la réduction du délai de la phase 3 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la nouvelle proposition technique et financière élaborée par les entreprises requérantes, dès décembre 1997 de réaliser la phase 3 et terminer les prestations de la phase 2, non achevées, au cours de la phase 3, a été acceptée par la maîtrise d'oeuvre ; que ces modifications apportées au marché, sur leur seule initiative, ont nécessairement pris en compte le coût de la mise en place de moyens d'encadrement pour assurer la sécurité ainsi que celui des moyens de production pour la réalisation de travaux de béton extrudé ; que, par suite, alors même que le maître d'oeuvre n'a pas infligé de pénalités de retard, les entreprises requérantes ne sauraient réclamer une indemnité au titre de moyens supplémentaires qu'elle auraient mis en oeuvre dans le cadre de la réduction du délai d'exécution de la phase 3 ; que, par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à ce chef de réclamation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les sociétés BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et de faire droit à aux demandes des sociétés requérantes à hauteur de la somme de 1 084 265,86 F HT, soit 165 295,26 euros HT au titre du solde du marché ;
Sur les intérêts moratoires et leur capitalisation :
Considérant qu'aux termes de l'article 178 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " I. L'administration contractante est tenue de procéder au mandatement des acomptes et du solde dans un délai qui ne peut dépasser trente-cinq jours ; (...) Le délai de mandatement est précisé dans le marché (...). / II. Le défaut de mandatement dans le délai prévu au I ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire et du sous-traitant, des intérêts moratoires, à partir du jour suivant l'expiration dudit délai jusqu'au quinzième jour inclus suivant la date du mandatement du principal. " ; qu'ainsi, le défaut de mandatement du solde d'un marché dans les délais qu'il prévoit fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du
sous-traitant, des intérêts moratoires ; que l'article 3.3.6 du cahier de clauses administratives particulières stipule que les délais des mandatements du solde étant fixés respectivement à 35 jours ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le décompte général a été notifié au groupement d'entreprises par ordre de service du 8 février 1999 ; qu'ainsi, le groupement a droit aux intérêts moratoires sur la somme de 1 084 265,86 F HT, soit 165 295,26 euros HT, augmentée de la TVA, à compter du 22 mars 1999 ; que les entreprises requérantes ont
demandé la capitalisation des intérêts pour la première fois dans leur demande enregistrée le 24 février 2004 ; qu'à cette date était due plus d'une année d'intérêts ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais de l'expertise taxés et liquidés par ordonnance du président du Tribunal administratif de Marseille à la somme totale de 110 145,36 francs, soit 16 791,55 euros doivent être mis à la charge de l'Etat ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article susvisé, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par les SOCIETES BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 26 février 2008 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser aux sociétés BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON la somme de 165 295,26 euros, augmentée de la TVA. Cette somme est assortie des intérêts moratoires à compter du 22 mars 1999 et de leur capitalisation à compter du 24 février 2004 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 3 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme totale de 16 791,55 euros sont mis à la charge de l'Etat.
Article 4 : L'Etat versera aux sociétés BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié aux SOCIETES BEC FRERES, EUROVIA MEDITERRANEE et EUROVIA BETON et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
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