La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2012 | FRANCE | N°10MA01846

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 03 juillet 2012, 10MA01846


Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2010 sur télécopie confirmée le 17 mai 2010, présentée par Me Laëtitia Pommarat, avocat, pour M. Hubert A, élisant domicile ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902197 rendu le 11 mars 2010 par le tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision datée du

3 juillet 2009 par laquelle du jury académique a refusé son admission à l'examen de qualification professionnelle nécessaire à sa titularisation en tant que professeur certifié ;

2°) d'annuler lad

ite décision ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Montpellier de le réintégrer pour ...

Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2010 sur télécopie confirmée le 17 mai 2010, présentée par Me Laëtitia Pommarat, avocat, pour M. Hubert A, élisant domicile ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902197 rendu le 11 mars 2010 par le tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision datée du

3 juillet 2009 par laquelle du jury académique a refusé son admission à l'examen de qualification professionnelle nécessaire à sa titularisation en tant que professeur certifié ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Montpellier de le réintégrer pour qu'il effectue une nouvelle année de stage à compter de la prochaine année scolaire ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

Vu le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés ;

Vu l'arrêté du 19 décembre 2006 MENS0603181A portant cahier des charges de la formation des maîtres en institut universitaire de formation des maîtres et son annexe ;

Vu l'arrêté du 22 août 2005 MENP0501709A relatif aux conditions d'accomplissement du stage et de la formation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation ;

Vu l'arrêté du 22 août 2005 MENP0501711A relatif à l'examen de qualification professionnelle organisé en vue de l'admission au certificat d'aptitude au professorat du second degré (CAPES) ou au certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement technique (CAPET) ou au certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement physique et sportif (CAPEPS) ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2012 :

- le rapport de Mme Busidan, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public,

- et les observations de M. A ;

Considérant que M. A, qui avait enseigné en qualité de contractuel durant quatre années à compter de septembre 2002, a réussi le concours interne d'accès au corps des professeurs certifiés de sa discipline, les arts plastiques, en tant que major avec une note de 18 sur 20 à l'épreuve professionnelle ; qu'en vertu des dispositions de l'article 24 du décret du 4 juillet 1972, son expérience professionnelle antérieure au concours, dont plusieurs pièces versées au dossier montrent qu'elle avait donné entière satisfaction à l'administration, notamment le rapport d'une inspection effectuée le 30 janvier 2003, dans laquelle l'inspecteur relevait qu'en très peu de temps l'intéressé avait saisi l'essentiel de sa mission éducative et affirmait n'avoir aucun doute sur la possession par l'intéressé des qualités requises pour exercer le métier d'enseignant, a conduit M. A à accomplir une première année de stage en situation dans un collège de Marsillargues durant l'année scolaire 2007-2008, pendant laquelle un différend important s'est élevé entre le principal et l'intéressé au sujet d'une heure supplémentaire hebdomadaire qu'on lui demandait d'effectuer sans rémunération ; qu'admis à accomplir une seconde année de stage durant l'année scolaire 2008-2009, cette fois au sein d'un collège à Bouillargues, il a été définitivement ajourné par une délibération du jury académique du 3 juillet 2009 à l'issue de l'examen de qualification professionnelle au professorat de l'enseignement du second degré, et licencié, par un arrêté du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche notifié à l'intéressé en décembre 2009 ; que M. A interjette appel du jugement rendu le 11 mars 2010 par le tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du jury académique de Montpellier du 3 juillet 2009 refusant son admission à l'examen de qualification professionnelle en vue de l'admission au certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré ;

Sur le bien-fondé du jugement et les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article 6 du décret du 4 juillet 1972 susvisé, relatif au statut particulier des professeurs certifiés : " Le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré est délivré aux candidats qui, ayant subi avec succès les épreuves d'un concours externe ou d'un concours interne ou d'un troisième concours, ont accompli un stage d'une durée d'une année sanctionné par un examen de qualification professionnelle " ; qu'aux termes de l'article 24 du même décret, dans sa rédaction alors applicable : " Les candidats reçus aux concours prévus aux articles 6 et 11 ci-dessus (...) accomplissent en qualité de professeur stagiaire le stage mentionné aux articles 6 et 11 ci-dessus.

Au cours de l'année de stage, les professeurs stagiaires reçoivent une formation professionnelle initiale dans les instituts universitaires de formation des maîtres et sont soumis aux épreuves de l'examen de qualification professionnelle prévu aux articles 6 et 11, dont les modalités sont fixées par arrêté du ministre chargé de l'éducation. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 applicable de l'arrêté MENP0501711A susvisé du 22 août 2005 relatif à l'examen de qualification professionnelle : " Le jury académique se prononce après avoir pris connaissance des éléments du dossier de compétences du professeur stagiaire prévus aux articles 3 et 5-I de l'arrêté du 22 août 2005 susvisé (...) " ; que le paragraphe I de l'article 5 de l'arrêté MENP0501709A susvisé du 22 août 2005 relatif aux conditions d'accomplissement du stage prévoit que : " En vue de la validation du stage accompli en situation par ... les professeurs certifiés stagiaires, ... mentionnés à l'article 4 ci-dessus, il est constitué pour chaque stagiaire un dossier de compétences comportant : 1° L'avis de l'autorité responsable de la formation spécifique prévue à l'article 4 ci-dessus rendant compte de la maîtrise des compétences attendues à la fin de l'année de stage ; la compétence " maîtriser les techniques de l'information et de la communication " est attestée par l'obtention du certificat informatique et internet de niveau 2 " enseignant. Les rapports de visite du tuteur pédagogique du stagiaire sont joints au dossier ; 2° L'avis du chef de l'établissement au sein duquel s'est déroulé le stage en situation sur la manière de servir du stagiaire ; 3° L'avis d'un membre d'un des corps d'inspection. L'avis prévu au 3° peut résulter d'une inspection. Pour les stagiaires qui effectuent une seconde année de stage, l'avis prévu au 3° résulte obligatoirement d'une inspection. (...) " ;

Considérant, en premier lieu, que l'avis favorable de l'autorité responsable de formation, prévu au 1° des dispositions précitées de l'arrêté du 22 août 2009, a été émis le

4 juin 2009 par le directeur de l'institut universitaire de formation des maîtres, au vu notamment du rapport final rendu le 30 avril 2009 par Mme E, tutrice de M. A durant cette année de stage, et de la fiche synthèse de la formation disciplinaire, signée le 14 mai 2009 par Mme D, formatrice responsable disciplinaire académique, documents qui figuraient nécessairement, en vertu des dispositions précitées, au dossier de compétences au vu duquel le jury a pris la délibération en litige ; que la tutrice détaille favorablement ses appréciations sur les dix compétences professionnelles nécessaires à tout enseignant, énumérées par l'annexe à l'arrêté ministériel susvisé du 19 décembre 2006 relatif au cahier des charges de la formation des maîtres en institut universitaire de formation des maîtres ; qu'elle indique notamment que M. A présente un " niveau de culture générale et savoirs spécifiques aux Arts plastiques très satisfaisant ", fournit un " travail de réflexion et de préparation des cours sérieux et étoffé ", fait montre d'une " grande qualité d'écoute et relation avec les élèves et les parents ", " connaît et utilise les différentes formes d'évaluations (sommative, formative et auto-évaluation) " ; qu'elle conclut que " M. A a effectué un travail de qualité durant cette année de stage en situation. Il a su être attentif aux conseils et a effectué un énorme travail de recherche et de préparation de ses cours. Impliqué dans son travail et attentif à faire progresser ses élèves, il s'est investi dans de nombreux projets au sein de l'établissement. " ; que la formatrice disciplinaire académique, pour sa part, évalue en " Très bien " neuf des dix compétences professionnelles sus évoquées, la dixième étant évaluée " Bien " et conclut par une appréciation générale indiquant que M. A " questionne son enseignement et la discipline toujours dans le bon sens et avec de l'énergie " et coche " oui " en réponse à la question pré-imprimée " d'après ce que vous avez pu observer, les compétences vous semblent-elles atteintes à un niveau suffisant pour permettre l'entrée dans le métier ' " ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'avis en date du 22 mai 2009, émis conformément au 2° des dispositions précitées de l'arrêté du 22 août 2009 par le principal du collège de Bouillargues, indique : " M. C s'est bien adapté à son nouvel environnement professionnel, le collège de Bouillargues. Il a travaillé tout au long de cette année scolaire en étroite concertation avec sa tutrice et s'est associé à diverses réalisations. Par ailleurs, il n'a connu aucun problème de gestion de classe. L'année s'est donc déroulée de façon satisfaisante. " ; que si cette autorité termine cette appréciation en regrettant que M. A ait " certaines difficultés à se situer dans un système hiérarchique et à en assimiler les codes ", son observation fait seulement référence à l'oubli par l'intéressé de la mention " sous couvert de M. le principal " devant figurer sur un courrier qu'il adressait à l'inspecteur général des arts plastiques mais qu'il avait cependant déposé au secrétariat dudit principal ; que, par ailleurs, ce même principal évaluait " très bien " les trois critères mentionnés sur la fiche de notation administrative établie le 20 janvier 2009 sur l'intéressé, et relatifs à sa ponctualité/assiduité, son activité/efficacité et son autorité/rayonnement et proposait une augmentation de sa note d'un demi-point ; que l'avis du principal du collège était donc favorable, contrairement à ce qu'a indiqué le recteur dans un courrier adressé au requérant le 19 mai 2009 ;

Considérant, en troisième lieu, que conformément au 3° des dispositions précitées de l'arrêté du 22 août 2009, l'avis émis par le membre des corps d'inspection l'a été à la suite d'une inspection effectuée le 26 mars 2009 par M. B, inspecteur général de l'éducation nationale en arts plastiques ; que le rapport effectué à la suite de cette inspection conclut que M. A " n'a pas atteint le niveau requis pour être titularisé " ; que l'observation majeure fondant cette appréciation précitée, tient au constat fait, ce jour-là, par ledit inspecteur d'un " écart considérable entre les intentions annoncées, travaillées en amont par M. A avec l'aide de sa conseillère pédagogique, puis la réalité de sa mise en oeuvre au cours de la séance observée " ;

Considérant que M. B a refusé à la tutrice de M. A l'autorisation d'assister à la visite d'inspection en classe, autorisation dont l'administration ne conteste pas qu'elle est habituellement donnée aux tuteurs dans ces occasions, et a également refusé qu'elle assiste à l'entretien entre ledit inspecteur général et le stagiaire après le cours donné ; que si, par conséquent, le rapport de l'inspecteur général constitue le seul témoignage direct versé au dossier sur le cours donné ce 26 mars 2009 par M. A, il ressort cependant de plusieurs autres pièces produites, notamment d'attestations émises par la formatrice responsable disciplinaire académique et datées du 27 juillet 2009, du 9 novembre 2010 et du 28 mars 2011 et par la tutrice le 8 novembre 2010, attestations qui donnent des indications concordantes sur le contenu et la présentation aux élèves des documents préparés par M. A pour cette inspection, que ce rapport contient plusieurs approximations, inexactitudes ou oublis de nature à jeter un doute sur sa fiabilité ; que ce doute est accru par la circonstance, avérée par certains documents au dossier, et au demeurant non contestée par l'administration, selon laquelle M. A n'a pu obtenir communication de ce rapport que peu avant la réunion du jury, et après plusieurs courriers adressés à l'administration par lui-même et l'intermédiaire de syndicats et après une manifestation de soutien de ses collègues et de parents d'élèves relatée dans la presse ;

Considérant que, dans ces conditions, le jury académique, dont la présidente a rédigé un rapport daté du 29 juillet 2009 motivant la délibération en litige, ne pouvait, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, accorder une part primordiale au rapport d'inspection élaboré par un de ses membres pour refuser d'admettre M. A à l'examen de qualification professionnelle à l'issue de sa deuxième année de stage ; que, par conséquent, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autre moyens de la requête, M. A est fondé, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du jury académique de Montpellier du 3 juillet 2009, d'autre part, à obtenir l'annulation de cette délibération ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que si le présent arrêt, qui annule pour erreur manifeste d'appréciation la délibération portant appréciation par le jury académique de la manière de servir de M. A à l'issue de sa seconde année de stage, implique de réintégrer l'intéressé dans ses fonctions à la date à laquelle il a été irrégulièrement licencié pour procéder à sa titularisation en l'absence de toute circonstance invoquée par le ministre qui y aurait fait obstacle, il n'implique pas, en revanche, que la réintégration soit ordonnée pour que M. A effectue une troisième année de stage ; que, par suite, les conclusions présentées par M. A, tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de le réintégrer pour effectuer une troisième année de stage, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État le versement à M. A de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui, et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902197 rendu le 11 mars 2010 par le tribunal administratif de Nîmes et la délibération en date du 3 juillet 2009 par laquelle le jury académique de Montpellier a refusé à M. A son admission à l'examen de qualification professionnelle en vue de l'admission au certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré sont annulés.

Article 2 : L'État (ministère de l'éducation nationale) versera à M. A la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hubert A et au ministre de l'éducation nationale.

Copie en sera adressée pour information au recteur de l'académie de Montpellier.

''

''

''

''

N° 10MA018463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA01846
Date de la décision : 03/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - motifs - Erreur manifeste - Existence.

Fonctionnaires et agents publics - Entrée en service - Stage - Fin de stage.


Composition du Tribunal
Président : M. REINHORN
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: Mme VINCENT-DOMINGUEZ
Avocat(s) : POMMARAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-07-03;10ma01846 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award