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04/06/2012 | FRANCE | N°10MA03989

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 04 juin 2012, 10MA03989


Vu I°) sous le n° 10MA03989, la requête enregistrée le 2 novembre 2010, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. Haro , demeurant au ..., par Me Poitout, avocat ;

M. Haro demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003610 du 14 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2009 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destin

ation, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer ...

Vu I°) sous le n° 10MA03989, la requête enregistrée le 2 novembre 2010, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. Haro , demeurant au ..., par Me Poitout, avocat ;

M. Haro demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003610 du 14 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2009 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, durant l'instruction, dans un délai de quinze jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, dans un délai de quinze jour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour et subsidiairement, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, durant l'instruction ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.............

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 13 décembre 2010, admettant Mme au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me Poitout comme avocat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mai 2012 le rapport de Mme Lopa Dufrénot, premier conseiller ;

Considérant que par arrêtés distincts du 23 novembre 2009, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté les demandes d'admission au séjour présentées par M. Haro et Mme Mirsada , son épouse, tous deux ressortissants monténégrins, et assorti ces décisions d'une obligation de quitter le territoire français à destination de leur pays d'origine ; que M. et Mme interjettent appel des jugements du 14 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes n° 1003989 présentée pour M. et n° 1003990 présentée pour Mme présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la légalité externe :

Considérant, en premier lieu qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté du préfet des Bouches du Rhône en date du 8 juin 2009, régulièrement publié, " délégation permanente de signature est donnée à M. David Lambert, chef du bureau des mesures administratives, du contentieux et des examens spécifiques pour signer ", notamment, " tout document relatif à la procédure de délivrance de titre de séjour " ; qu'il en résulte que celui-ci disposait d'une délégation lui permettant de signer les décisions contestées ;

Considérant, en second lieu, qu'il convient, par adoption des motifs retenus par les premiers juges et non utilement critiqués en appel, d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation des décisions en cause ;

Sur la légalité interne :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les requérants sont entrés en France le 28 janvier 2008, soit moins de deux avant les décisions attaquées, aux âges respectifs de trente-six et vingt-neuf ans ; qu'eu égard aux conditions de leur séjour, alors même que les parents de M. et Mme sont décédés, la circonstance que leurs enfants nés en 1998, 2000, 2002, 2004 et 2007 au Monténégro, sont pour les aînés scolarisés en CM1, CE 1, CP et grande section de maternelle en France, n'est pas suffisante pour caractériser l'atteinte disproportionnée au droit des requérants à mener une vie privée et familiale, ni l'erreur manifeste d'appréciation sur leur situation personnelle que le préfet aurait commise en prenant les décisions attaquées ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que les époux soutiennent que leurs enfants scolarisés en France depuis deux ans, ayant noué ainsi d'importantes attaches et fixé leurs repères personnels et éducatifs à des âges cruciaux de leur développement devraient supporter de graves répercussions en cas de retour au Monténégro ; que les décisions litigieuses n'ont toutefois pas pour effet de séparer ces enfants de leurs parents ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que leur vie familiale ainsi que la scolarité des enfants ne pourraient pas se dérouler dans leur pays d'origine ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que comme il a été dit précédemment à l'appui des conclusions tendant à l'annulation des décisions de refus de titre de séjour, le moyen tiré de l'atteinte portée au droit au respect de la vie privée et familiale ne peut qu'être rejeté ; que, les décisions obligeant M. et Mme à quitter le territoire français ne portent pas non plus une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard de leurs motifs et ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur les décisions fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (... ) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; que ce dernier article stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger a l'obligation de s'assurer au vu du dossier dont elle dispose et sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements visés à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est en droit de prendre en considération à cet effet les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile ayant statué sur la demande d'asile du requérant, sans pour autant être liée par ces éléments ; que, toutefois, il résulte des dispositions sus rappelées que ces autorités procèdent désormais à l'examen des risques de torture ou de soumission à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants encourus par le demandeur d'asile au sens de l'article 3 précité ;

Considérant que par décision du 22 octobre 2009, la Cour nationale du droit d'asile a estimé que ni les pièces du dossier parmi lesquels figuraient un permis de conduire international comportant de nombreuses fautes et des " attestations de compatriotes résidant en France, rédigées en termes convenus ", ni les allégations des requérants ne permettaient de tenir pour établis les faits allégués, notamment leur nationalité et pour fondées les craintes énoncées ; qu'outre le récit des circonstances les ayant conduits à fuir leur pays d'origine, dans le cadre de leur recours dirigé contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 février 2009 et deux attestations d'anciens voisins résidant à Podgorica, désormais en France, certifiant la difficulté de la situation des intéressés et les agissements de la mafia dans leur pays d'origine, écartées par la Cour nationale du droit d'asile, les requérants produisent, en appel, une pétition d'habitants de la commune de Miramas exposant les discriminations mettant en danger leur vie et la précarité de leurs conditions de vie ; que, toutefois, ce document rédigé en termes imprécis et vagues, n'est pas de nature à établir la réalité des risques personnels auxquels seraient exposés M. et Mme en cas de retour dans leur pays d'origine ; que, par suite, les décisions fixant le pays à destination duquel ils seront éloignés n'ont pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Haro , à Mme Mirsada et au ministre de l'intérieur.

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N°s 10MA03989 et 10MA03990


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA03989
Date de la décision : 04/06/2012
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : POITOUT ; POITOUT ; POITOUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-06-04;10ma03989 ?
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