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29/05/2012 | FRANCE | N°10MA01435

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 29 mai 2012, 10MA01435


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 12 avril 2010, sous le n° 10MA01435, présentée pour M. Pascal A, demeurant ..., par Me Maria, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902353 du 4 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 20 avril 2009 par laquelle le maire de la commune d'Antibes a refusé d'autoriser le transfert à son bénéfice de la licence de taxi n° 35 dont est titulaire M. B et, d'autr

e part, à la condamnation de la commune d'Antibes à lui verser une indemnité...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 12 avril 2010, sous le n° 10MA01435, présentée pour M. Pascal A, demeurant ..., par Me Maria, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902353 du 4 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 20 avril 2009 par laquelle le maire de la commune d'Antibes a refusé d'autoriser le transfert à son bénéfice de la licence de taxi n° 35 dont est titulaire M. B et, d'autre part, à la condamnation de la commune d'Antibes à lui verser une indemnité de 28 000 euros en réparation du préjudice financier, arrêté en juin 2009, qu'il a subi en continuant de verser les mensualités de la licence de taxi depuis le mois de novembre 2008 et à lui rembourser mensuellement le coût de la location de la licence jusqu'à ce que le maire lui donne l'autorisation de cession, soit une somme mensuelle de 3 476, 58 euros à compter du 1er juillet 2009 ;

2°) d'enjoindre au maire de la commune d'Antibes de prendre une nouvelle décision concernant le transfert de ladite licence et de lui donner son accord, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte dont le montant devra être déterminé par la Cour ;

3°) de condamner la commune d'Antibes à lui verser une indemnité de 48 719,30 euros en réparation du préjudice financier, arrêté en décembre 2009, qu'il a subi en continuant de verser les mensualités de la licence de taxi depuis le mois de novembre 2008 ;

4°) de condamner la commune d'Antibes à lui verser une indemnité de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'il a subi au titre d'une perte de chance d'acquérir la licence de taxi n° 35, outre une indemnité de 3 000 euros au titre de son préjudice moral ;

5°) de mettre à la charge de la commune d'Antibes une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi ;

Vu le décret n° 95-935 du 17 août 1995 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 avril 2012 :

- le rapport de Mme Buccafurri, président assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- les observations de Me Wedrychowsky pour M. A ;

Considérant que M. A, qui exerçait la profession d'exploitant de taxi depuis le 22 décembre 1998 et exploitait, depuis le 1er janvier 2006, en qualité de locataire, une " licence de taxi ", à savoir l'autorisation de stationnement, n° 35, dont M. B était titulaire, a conclu, le 28 décembre 2005, avec ce dernier un compromis de cession de la " licence " en cause ; que M. A, qui s'est rendu coupable, le 1er avril 2007, d'une agression sexuelle sur une personne âgée, a été condamné à une peine de trois ans d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans, par un jugement du tribunal correctionnel de Grasse du 25 mai 2007, condamnations qui ont été réduites à 30 mois d'emprisonnement avec sursis et deux ans de mise à l'épreuve, assorties d'obligations de soins médicaux, par un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 25 juin 2008 ; que M. A a sollicité du maire de la commune d'Antibes l'autorisation d'acquérir la " licence de taxi " n° 35, par trois demandes successives des 9 juin, 22 novembre et 3 décembre 2008, lesquelles ont fait l'objet de réponses d'attente de la part du maire ; que M. A a à nouveau sollicité, le 12 février 2009, du maire de la commune cette même autorisation et, par une décision du 20 avril 2009, le maire de la commune d'Antibes a " confirmé son opposition à la cession de la licence de M. B à M. A " ; que M. A relève appel du jugement n° 0902353 du 4 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision précitée en date du 20 avril 2009 et, d'autre part, à la condamnation de la commune d'Antibes à lui verser une indemnité de 28 000 euros en réparation du préjudice financier, arrêté en juin 2009, qu'il a subi en continuant de verser les mensualités de la " licence de taxi " depuis le mois de novembre 2008 et à lui rembourser mensuellement le coût de la location de la " licence " jusqu'à ce que le maire lui donne l'autorisation de cession, soit une somme mensuelle de 3 476,58 euros à compter du 1er juillet 2009 ; que, dans le dernier état de ses écritures, M. A a déclaré renoncer à ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées en appel ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune d'Antibes à la requête d'appel et à la demande de première instance ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 20 avril 2009 :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant que M. A n'est pas recevable à invoquer, pour la première fois en appel, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée, qui procède d'une cause juridique distincte des seuls moyens de légalité interne invoqués devant le tribunal administratif ; que, par suite, ce moyen est irrecevable et doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi : " Le titulaire d'une autorisation de stationnement a la faculté de présenter à titre onéreux un successeur à l'autorité administrative qui a délivré celle-ci. / Cette faculté est subordonnée à l'exploitation effective et continue pendant une durée de cinq ans de l'autorisation de stationnement à compter de la date de délivrance de celle-ci. Toutefois, cette durée est de quinze ans dans les cas suivants : / - pour les titulaires d'autorisations nouvelles délivrées postérieurement à la date de publication de la présente loi ; / - pour les titulaires d'autorisations délivrées antérieurement à la date de publication de la présente loi et qui, en vertu des textes antérieurs, ne disposaient pas de la faculté de présenter à titre onéreux un successeur. / Dans ces deux derniers cas, une fois la première mutation intervenue, par usage de la faculté ainsi prévue sous condition d'exploitation de quinze ans de l'autorisation de stationnement, la faculté de présenter à titre onéreux un successeur est constituée dans les conditions de droit commun, après une exploitation effective et continue de cinq ans. " ; qu'aux termes de l'article 7 de la même loi : " Les dispositions de la présente loi ne font pas obstacle à l'exercice par les autorités administratives compétentes des pouvoirs qu'elles détiennent, dans l'intérêt de la sécurité et de la commodité de la circulation sur les voies publiques, en matière d'autorisation de stationnement. " ; qu'aux termes de l'article 6 du décret n° 95-935 du 17 août 1995 pris pour l'application de ladite loi : " Nul ne peut exercer la profession de conducteur de taxi lorsqu'il a fait l'objet d'une condamnation définitive mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire pour l'un des délits définis aux articles L. 1er, L. 2, L. 4, L. 9, L. 12 ou L. 19 du code de la route ou d'une condamnation à une peine d'au moins six mois fermes d'emprisonnement pour vol, escroquerie, abus de confiance, outrage public à la pudeur, infraction à la législation en matière de stupéfiants ou pour atteinte volontaire à l'intégrité de la personne. " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (....) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il est constant que, pour refuser à M. A le transfert à son bénéfice de l'autorisation de stationnement dont M. B était titulaire, le maire de la commune d'Antibes s'est fondé, en droit, sur les pouvoirs de police détenus par le maire en vertu des dispositions précitées de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales et, en fait, sur la condamnation pénale dont avait fait l'objet M. A ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 20 janvier 1995 susvisée que la condition minimum de durée d'exploitation d'une autorisation de stationnement qu'elles fixent ne concerne que le titulaire de cette autorisation de stationnement qui souhaite céder cette dernière à un successeur, et non pas ce dernier, et que les dispositions de l'article 6 du décret du 17 août 1995 ne fixent une condition d'honorabilité que pour les personnes souhaitant exercer la profession de conducteur de taxi et non pas celles exerçant la profession d'exploitant de taxi ; que la décision contestée n'est fondée ni sur la circonstance que M. B ne justifierait pas de la durée d'exploitation minimum exigée par l'article 3 de la loi du 29 janvier 1995 ni sur les conditions d'exercice par M. A de son activité de conducteur de taxi, notamment la condition d'honorabilité ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qui aurait été commise par le maire d'Antibes dans l'application des dispositions des articles 3 de la loi du 20 janvier 1995 et 6 du décret du 17 août 1995 est inopérant et ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant, en second lieu, que la décision en litige, qui n'a pas pour objet de sanctionner une violation des règles applicables à la profession en cause mais, fondée sur les incertitudes quant au comportement personnel de M. A eu égard à la condamnation pénale dont il a fait l'objet, a pour but de préserver l'ordre public et revêt le caractère d'une mesure de police ; qu'une telle mesure ne peut légalement intervenir que pour autant qu'elle soit strictement nécessaire et ne porte pas aux droits de l'intéressé une atteinte disproportionnée par rapport au but poursuivi et aux motifs qui la justifient ;

Considérant, d'une part, que, compte tenu de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de M. A qui, alors même qu'elle a été réduite par l'arrêt précité de la cour d'Appel d'Aix-en-Provence, était définitive, et eu égard à la nature des faits établis et constants sur lesquels elle reposait, la décision contestée est légalement justifiée par la nécessité de la préservation de l'ordre public ; que, par ailleurs, la décision en litige, ayant pour objet et pour effet de refuser la cession d'une autorisation de stationnement et non de refuser une autorisation d'exercice de l'activité de conducteur de taxi, cette mesure n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la liberté de travail de M. A alors qu'au demeurant cette activité est une activité réglementée ; que, pour les mêmes motifs, cette mesure n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie ;

Considérant, d'autre part, que la circonstance que la commission communale des taxis ait émis un avis favorable au transfert au bénéfice de M. A de l'autorisation de stationnement dont était titulaire M. B et que le préfet n'ait pas marqué d'opposition à ce transfert n'était pas de nature à faire obstacle à l'exercice par le maire de son pouvoir de police municipale ; qu'en exerçant cette compétence, le maire de la commune n'a pas outrepassé ses pouvoirs ;

Considérant, enfin, que si le refus en litige n'a pas pour conséquence de priver M. A de la possibilité d'exercer l'activité de conducteur de taxi, le maire de la commune d'Antibes, en décidant de s'opposer au transfert de l'autorisation de stationnement en cause, et alors qu'il est constant que M. A remplissait les autres conditions fixées par la loi du 20 janvier 1995 et son décret d'application, a pris une mesure de police adaptée à l'objectif de préservation de l'ordre public recherché ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 4 février 2010, le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision précitée du 20 avril 2009 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, la décision contestée du 20 avril 2009 n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, les conclusions indemnitaires présentées par M. A, fondées sur l'illégalité fautive de ladite décision, ne peuvent qu'être rejetées ; que, par suite, M. C n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a également rejeté lesdites conclusions ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que, par un mémoire, enregistré au greffe de la cour le 19 mai 2011, M. A a déclaré renoncé aux conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées dans sa requête ; que ce désistement étant pur et simple, rien ne s'oppose à ce qu'il lui soit donné acte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Antibes une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A une somme au titre des frais exposés par la commune d'Antibes et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. A dans sa requête.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune d'Antibes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pascal A et à la commune d'Antibes.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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N° 10MA01435 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA01435
Date de la décision : 29/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Taxis - Pouvoirs des maires.

Police administrative - Police générale.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET MARIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-05-29;10ma01435 ?
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