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16/05/2012 | FRANCE | N°10MA01300

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 16 mai 2012, 10MA01300


Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2010, présentée pour M. A, élisant domicile B, par la SCP Schreiber-Fabbian-Volpato, avocats ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707934, 0800009 du 5 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté son recours tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 novembre 2007 de ladite commune lui opposant un refus de permis de construire une bergerie sur un terrain sis au lieudit Serre-Gros à Champcella ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre à titre principal à la co

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Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2010, présentée pour M. A, élisant domicile B, par la SCP Schreiber-Fabbian-Volpato, avocats ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707934, 0800009 du 5 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté son recours tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 novembre 2007 de ladite commune lui opposant un refus de permis de construire une bergerie sur un terrain sis au lieudit Serre-Gros à Champcella ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre à titre principal à la commune de Champcella de lui délivrer un permis de construire le bâtiment d'élevage d'ovins projeté dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

4°) d'enjoindre à titre subsidiaire à la commune de Champcella de procéder à un nouvel examen de sa demande de permis de construire dans le délai règlementaire d'instruction à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Champcella la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 avril 2012 :

- le rapport de Mme Paix, rapporteur ;

- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;

- les observations de Me Clément substituant la SCP Schreiber-Fabbian-Volpato pour

M. A ;

- et de Me Rouanet pour la commune de Champcella ;

Considérant que par arrêté du 30 novembre 2007, le maire de Champcella a, d'une part, retiré un précédent refus de permis de construire opposé à M. A, le 23 octobre 2007, et d'autre part, refusé à celui-ci le permis de construire qu'il sollicitait pour une bergerie sur le territoire de la commune de Champcella ; que M. A interjette appel du jugement du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté la demande d'annulation du refus opposé le 30 novembre 2007 et décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande d'annulation dirigée contre le refus opposé le 23 octobre 2007 ; que M. A, qui demande l'annulation du jugement dans sa totalité, doit être regardé comme demandant l'annulation à la fois du non lieu à statuer prononcé par le premier juge sur l'arrêté du 23 octobre 2007, et du rejet opposé à sa demande en tant qu'elle concerne le refus du 30 novembre 2007 ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'à la date à laquelle le tribunal administratif de Marseille a statué, le retrait de permis de construire du 23 octobre 2007 n'était pas définitif ; que dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa légalité ; que par suite le jugement est dans cette mesure irrégulier ; qu'il y a lieu d'évoquer partiellement et de statuer sur les conclusions de la requête de M. A devant le tribunal administratif de Marseille et sur les conclusions de la commune de Champcella devant la cour en tant qu'elles sont dirigées contre cet arrêté ;

Sur la légalité du refus de permis de construire du 23 octobre 2007 :

Considérant que la commune de Champcella s'est fondée sur l'article L 421-5 du code de l'urbanisme qui n'était plus applicable à la date de l'arrêté attaqué ; que toutefois, elle doit être regardée comme ayant entendu invoquer les dispositions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme qui se sont substituées aux précédentes en les reprenant en substance ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation " ;

Considérant que pour refuser le permis de construire sollicité par M. A, la commune de Champcella s'est fondée sur les circonstances que " le demandeur déclare raccorder le bâtiment d'élevage envisagé au réseau d'eau potable alors que le terrain d'implantation n'est pas desservi par ce réseau ( réseau situé à environ 400 m) et que la commune n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de sa demande, M. A avait posé une conduite desservant le terrain d'assiette de la bergerie dont il envisageait la réalisation ; que cette conduite pouvait être retirée par un simple raccordement au réseau public existant ; que par suite la commune de Champcella ne pouvait se fonder l'impossibilité de desserte en eau potable du projet pour refuser le permis sollicité ; qu'il en résulte que M. A est fondé à soutenir que cet arrêté est illégal et à en demander l'annulation ;

Considérant toutefois que la commune de Champcella indique qu'elle aurait pris la même décision si elle s'était fondée sur les dispositions de l'article NC1 du plan d'occupation des sols de la commune;

Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant qu'aux termes de l'article NC 1 § 3 du plan d'occupation des sols de la commune de Champcella : " les constructions nécessaires et directement liées à l'exploitation des richesses naturelles et notamment les habitations qui y sont liées doivent être situées à proximité du siège d'exploitation sauf justification fonctionnelle " ; que la commune produit un constat d'huissier du 13 mai 2008 mentionnant que le siége de l'exploitation sis au Clos des Rousses et le projet situé à Serre-Gros sont distants de 1850 mètres ;

Considérant que la commune produit un constat d'huissier du 13 mai 2008 mentionnant que le siège de l'exploitation sis au Clos des Rousses et le projet situé au lieu dit Serre-Gros sont distants de 1 850 m ; qu'elle en tire la conséquence que l'éloignement de la bergerie envisagée du siège de l'exploitation méconnaît l'article NC 1 § 3 du règlement du POS ; que toutefois M.A qui exploite de nombreuses parcelles sur le territoire de la commune, envisage de fixer le siège de son exploitation dans sa bergerie au lieu-dit Serre-Gros ; que cette intention est attestée par sa déclaration d'exploitation à la DDASS ; que rien n'interdit une telle implantation alors même qu'il réside à près de 2 km, chez ses parents au lieu dit Clos des Rousses ; que par suite la construction projetée se confondant avec le siège de l'exploitation, la commune ne peut pas soutenir que les dispositions de l'article NC 1 § 3 du règlement du POS de la commune auraient été méconnues ; que dès lors la demande de substitution de motif fondée sur cette méconnaissance ne peut être accueillie ;

Sur la légalité du refus de permis de construire du 30 novembre 2007 :

Considérant que l'arrêté du 30 novembre 2007 est motivé par la circonstance que " l'extension du réseau sur une longueur de 400 mètres a été réalisée par une personne autre qu'une collectivité publique ou un concessionnaire de service public " et " que de ce fait la commune de Champcella n'a pas eu l'occasion de se prononcer préalablement ni sur l'exécution des travaux ni sur la capacité du réseau public d'adduction d'eau potable communal à supporter cette extension " ; qu'à cet égard, aucune disposition du code de l'urbanisme n'interdit à un pétitionnaire de relier une construction à un réseau public existant par une conduite privée ; qu'en tout état de cause une telle motivation ne peut venir au soutien de l'application des dispositions de l'article L.111-4 relatives à l'impossibilité de procéder à l'extension des réseaux ; que par ailleurs, par cette simple déclaration de principe, le maire de la commune ne démontre pas que le raccordement serait impossible, pour des raisons techniques, quand bien même le diamètre de la conduite installée par M.A serait différent de celui d'autres branchements privés ; qu'il en résulte que celui-ci est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L.111-4 ;

Considérant que la substitution de motif précédemment analysée ne saurait davantage, et pour les mêmes motifs être accueillie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 23 novembre et du 30 novembre 2007 :

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

Considérant que M. A demande à la cour d'enjoindre au maire de la commune de Champcella de lui délivrer le permis de construire sollicité, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de cet arrêt ; que l'annulation prononcée n'implique pas nécessairement la délivrance d'une autorisation ; qu'il en résulte que ses conclusions doivent être rejetées ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ; que l'annulation par le présent arrêt du refus du permis de construire demandé par M. A implique nécessairement que le maire de la commune de Champcella procède à une nouvelle instruction de sa demande déposée le 31 juillet 2007 et prenne une nouvelle décision ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au maire de se prononcer sur la demande de M. A dans un délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte sollicitée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l 'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la commune de Champcella au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Champcella la somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par M. A ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille et les arrêtés en date des 23 octobre et 30 novembre 2007 du maire de la commune de Champcella sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Champcella de se prononcer à nouveau, dans un délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt, sur la demande de permis de construire de M. A ;

Article 3 : La commune de Champcella versera la somme de 1 500 euros à M. A au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et à la commune de Champcella.

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N° 10MA013002

FS


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA01300
Date de la décision : 16/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. LAMBERT
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS SCHREIBER - FABBIAN - VOLPATO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-05-16;10ma01300 ?
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