Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 30 décembre 2010, sous le n° 10MA04723, présentée pour la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SILVESTRE, dont le siège social est sis 68 bis avenue du Port BP 75 à Port Saint Louis Du Rhone (13512), par Me Mosconi, avocat ;
La SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SILVESTRE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0802773 du 2 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 11 février 2008 par laquelle l'inspectrice du travail de la 8ème section des Bouches-du-Rhône a refusé de lui accorder l'autorisation de licencier Mme Aicha A, salariée protégée ;
2°) d'annuler cette décision du 11 février 2008 et d'autoriser le licenciement de Mme Aicha A ;
2°) de condamner tout succombant à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2012 :
- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
- les observations de Me Chauvin, pour la SARL NOUVELLES AMBULANCES SILVESTRE ;
Considérant que, par lettre du 11 janvier 2008, la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE a sollicité, auprès de l'inspection du travail, l'autorisation de licencier pour faute Mme A, conductrice ambulancière et déléguée du personnel ; que par une décision en date du 11 février 2008, l'inspectrice du travail de la 8ème section des Bouches-du-Rhône a refusé d'autoriser ce licenciement, décision confirmée sur recours hiérarchique par le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité par une décision en date du 13 août 2008 ; que la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE a demandé l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail en date du 11 février 2008 ; que la société fait appel du jugement susvisé du Tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande, qui a rejeté son recours contre ladite décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
Considérant, en premier lieu, que s'agissant des faits survenus le 1er octobre 2007, Mme A a reconnu n'avoir pas répondu aux appels téléphoniques de son employeur au motif qu'elle avait placé son téléphone dans son sac lui-même déposé dans le coffre du véhicule ; que cette négligence, en l'absence de faits antérieurs similaires, n'est pas constitutive d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement ; qu'en revanche, les insultes proférées le même jour par Mme A à l'encontre du gérant de la société doivent être regardées comme établies par l'attestation rédigée par un autre salarié de l'entreprise ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il existait au sein de l'entreprise un contexte social très tendu tenant notamment à la tenue d'élections des délégués du personnel dans l'entreprise malgré plusieurs demandes de Mme A et de son syndicat et l'intervention de l'inspection du travail et en raison de l'absence de tenues de réunions des délégués du personnel pendant plusieurs mois sans que la société ne puisse utilement prétendre qu'elle en aurait été empêchée en raison de difficultés liées à la reprise de l'entreprise ; que, dans ces conditions, les propos tenus par l'intéressée ne peuvent être regardés, à eux seuls, comme constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de Mme A ; qu'enfin, et ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, la réalité des coups portés lors de l'altercation entre Mme A et le gérant ne peut être regardée comme établie par les pièces du dossier et notamment eu égard aux versions contradictoires données par les témoins de la scène ;
Considérant, en deuxième lieu, que s'agissant des faits survenus le 10 octobre 2007, si Mme A a reconnu avoir informé une cliente d'un mouvement de grève et de l'absence de transport ce jour là alors que l'employeur soutient qu'il était néanmoins en mesure d'assurer le transport de cette cliente, il ne justifie pas que Mme A aurait également donné les coordonnées d'un concurrent à cette même cliente en se bornant à produire l'attestation rédigée par un salarié de l'entreprise relatant des faits que lui auraient exposés la cliente concernée ; que la faute ainsi commise par la salariée n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement ;
Considérant, en troisième lieu, que s'agissant des faits reprochés le 12 octobre 2007, Mme A ne peut être regardée comme ayant commis une faute en ayant, à la demande d'un client, contacté un médecin de sa propre initiative, sans en référer préalablement à son employeur, pour demander si le rendez-vous était maintenu nonobstant le retard pris ;
Considérant, enfin, que si la société requérante reproche à Mme A d'avoir pris, le 22 octobre 2007, un véhicule à la place d'un autre, cette erreur, reconnue par l'intéressée, ne peut révéler l'intention de la salariée de s'affranchir des directives données par l'employeur dès lors que les clés des véhicules, identiques, avaient été interverties ;
Considérant que les fautes imputables à la salariée, mêmes prises dans leur ensemble, ne peuvent pas être regardées comme d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; que, par suite, c'est à bon droit que l'inspectrice du travail a refusé d'accorder à la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE l'autorisation de licencier Mme A ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A ou de l'Etat, qui ne sont pas dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er: La requête de la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE est condamnée à verser une somme de 1 500 euros à Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE NOUVELLES AMBULANCES SYLVESTRE, à Mme Aïcha A et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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N° 10MA04723 2
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