Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2008, présentée pour Mme Tatiana A, demeurant ... et M. Sergiy B, demeurant ..., par Me Roussarie ;
Mme A et M. B demandent à la Cour :
1°) d'annuler l'article 3 du jugement n° 0506590 en date du 7 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice, après avoir, par les articles 1er et 2 du même jugement, prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles le foyer fiscal qu'ils formaient a été assujetti au titre de l'année 2002, a rejeté le surplus de leur demande en décharge de ces impositions, de celles auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2001 et des intérêts de retard qui ont assorti ces impositions ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention conclue entre la France et Chypre le 18 décembre 1981 en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et d'impôt sur la fortune ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2012,
- le rapport de M. Bédier, président assesseur ;
- les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;
- et les observations de Me Roussarie, pour Mme A et M. B ;
Considérant que Mme A et M. B demandent à la Cour d'annuler l'article 3 du jugement en date du 7 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice, après avoir, par les articles 1er et 2 du même jugement, prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles le foyer fiscal qu'ils formaient a été assujetti au titre de l'année 2002, a rejeté le surplus de leur demande en décharge de ces impositions, de celles auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2001 et des intérêts de retard correspondants ;
Considérant que Mme A et M. B, qui ont fait l'objet d'un examen contradictoire d'ensemble de leur situation fiscale personnelle, contestent le principe de leur imposition conjointe, leur domiciliation fiscale en France ainsi que la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur le principe de l'imposition en France des revenus perçus par Mme A et M. B :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus " ; et qu'aux termes du 1 de l'article 4 B du même code : " Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques " ; que pour l'application des dispositions du a. du 1 de l'article 4 B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en fonction des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A et M. B ont acquis à Nice en 1999 deux appartements de cinq et trois pièces au même étage d'une résidence, que ces appartements enregistraient des consommations régulières et importantes d'électricité et de téléphone, que Mme A et M. B avaient également souscrit deux abonnements auprès d'opérateurs de téléphonie mobile et un abonnement auprès d'un fournisseur d'accès à Internet, que le certificat d'immatriculation dans les Alpes-Maritimes de leur véhicule automobile mentionnait l'adresse de Nice ; qu'en outre, Mme A et M. B détenaient plusieurs comptes bancaires ouverts dans les Alpes-Maritimes mentionnant leur adresse à Nice, comptes qui enregistraient des opérations très régulièrement ; que, si les requérants soutiennent que ces éléments matériels attestent de la présence en France de la seule Mme A et qu'ils ne permettraient pas en revanche d'en déduire la présence en France de M. B, ils ne produisent toutefois pas, compte tenu des indices nombreux et concordants réunis par l'administration, de documents de nature à permettre de retenir que M. B n'aurait pas eu comme son épouse son foyer à Nice ; que ne saurait faire échec à cette constatation le fait que M. B se déplaçait à Chypre, où il disposait d'un logement, pour raisons professionnelles ; que, d'ailleurs, il résulte de l'instruction et notamment d'attestations de remboursements de frais médicaux adressées personnellement à M. B que celui-ci bénéficiait régulièrement de soins en France au cours de l'année 2002 ; que, dans ces conditions, Mme A et M. B doivent être regardés comme ayant eu en France en 2001 et 2002 leur foyer au sens de l'article 4 B du code général des impôts ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 18 décembre 1981 entre la France et Chypre : " Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'un Etat " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus de sources situées dans cet Etat ou pour la fortune qui y est située. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident des deux Etats, sa situation est réglée de la manière suivante : a. Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent : si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; b. Si l'Etat où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat où elle séjourne de façon habituelle ; c. Si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux Etats ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat dont elle possède la nationalité ; d. Si cette personne possède la nationalité des deux Etats ou si elle ne possède la nationalité d'aucun d'eux, les autorités compétentes des Etats tranchent la question d'un commun accord (...) " ;
Considérant qu'au regard de ces stipulations, il ne résulte pas de l'instruction que M. B serait, en vertu de la législation chypriote, assujetti à l'impôt dans l'Etat de Chypre à raison de l'ensemble de ses revenus ; que les documents rédigés en langue anglaise qu'il produit ne permettent pas de retenir un tel assujettissement ; que le document traduit qui est produit pour la première fois en appel et qui atteste d'un assujettissement à Chypre à l'impôt sur le revenu " dans le monde entier " concerne la seule année 2007, qui est étrangère au présent litige ; qu'en toute hypothèse, et comme il a été dit, Mme A et M. B disposaient en France d'un foyer d'habitation permanent alors que la disposition à Chypre d'un tel foyer par M. B ne résulte pas de l'instruction ; que les stipulations de l'article 4 de la convention conclue le 18 décembre 1981 entre la France et Chypre ne font donc pas obstacle à l'imposition en France des revenus perçus par Mme A et M. B ;
Considérant, en troisième lieu, que la domiciliation fiscale ainsi retenue est conforme à la doctrine administrative, exprimée par les documentations administratives de base référencées 5 B-1121 à jour au 1er septembre 1999, 7-B à jour au 1er septembre 1999 et 5 B-7123 et par la réponse ministérielle faite à M. de Villiers, député, publiée au Journal Officiel de l'Assemblée Nationale du 21 septembre 1998, selon lesquelles il convient d'apprécier séparément la domiciliation fiscale de chacun des époux ; que les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que l'administration aurait méconnu les termes de ces doctrines ;
Sur l'imposition conjointe des époux :
Considérant qu'aux termes du 4. de l'article 6 du code général des impôts : " Les époux font l'objet d'impositions distinctes : a. Lorsqu'ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit ; b. Lorsque étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées ; c. Lorsqu'en cas d'abandon du domicile conjugal par l'un ou l'autre des époux, chacun dispose de revenus distincts " ;
Considérant qu'il n'est pas allégué qu'au cours des années en litige, Mme A et M. B se seraient trouvés dans une des trois situations visées au a. du 4 de l'article 6 du code général des impôts ; que la circonstance que M. B a effectué des déplacements à Chypre en 2001 et en 2002 ne faisait pas obstacle à l'établissement d'une imposition unique au nom du foyer fiscal ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à ce qui précède, le moyen tiré de ce que la procédure aurait dû être suivie à l'égard des requérants par le centre des impôts des non- résidents ne peut qu'être écarté ; qu'il en va de même du moyen par lequel les requérants soutiennent qu'une demande de justifications n'est régulièrement adressée à un contribuable non-résident qu'à la condition que l'administration démontre avoir réuni, au préalable, des indices lui permettant de penser que l'intéressé peut avoir des revenus de source française plus importants que ceux qui ont fait l'objet de sa déclaration ; que la procédure de taxation d'office suivie par l'administration est donc régulière ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment des mentions, non contestées, de la proposition de rectification datée du 6 août 2004, que le vérificateur a rencontré le conseil des contribuables le 3 octobre 2003 et le 8 juillet 2004 ; qu'il n'apparaît pas qu'en ces occasions le vérificateur se serait refusé à un échange contradictoire avec son interlocuteur ; que, par suite, le moyen des requérants selon lequel ils auraient été privés de tout débat oral et contradictoire doit être écarté, le caractère oral d'un tel débat n'étant en toute hypothèse pas exigé au cours des opérations d'examen contradictoire d'ensemble de situation fiscale personnelle ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A et M. B ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus de leur demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A et de M. B est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Tatiana A, à M. Sergiy B et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
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N° 08MA05111 2
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