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07/02/2012 | FRANCE | N°09MA01576

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 07 février 2012, 09MA01576


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 mai 2009, sous le n° 09MA01576, présentée pour l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, dont le siège est Impasse du Séminaire à Alet-les-Bains (11580), et pour M. Gilbert et Mme Andrée demeurant ..., par la SCP d'avocats Darribere ;

L'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, M. Gilbert et Mme Andrée demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604199 du 27 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18

mai 2006 par lequel le préfet de l'Aude a abrogé l'arrêté du 3 décembre 2003 m...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 mai 2009, sous le n° 09MA01576, présentée pour l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, dont le siège est Impasse du Séminaire à Alet-les-Bains (11580), et pour M. Gilbert et Mme Andrée demeurant ..., par la SCP d'avocats Darribere ;

L'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, M. Gilbert et Mme Andrée demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604199 du 27 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 mai 2006 par lequel le préfet de l'Aude a abrogé l'arrêté du 3 décembre 2003 mettant en demeure la Société des eaux d'Alet de régulariser la situation administrative de son installation de conditionnement d'eaux minérales située sur le territoire de la commune d'Alet-les-Bains ;

2°) d'annuler cet arrêté du 18 mai 2006 et d'imposer toutes mesures susceptibles de faire cesser les nuisances et risques industriels engendrés par ces installations ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2011-725 du 17 mai 2011 ;

Vu le décret n° 76-1323 du 29 décembre 1976 ;

Vu le décret n° 2005-989 du 10 août 2005 ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2011 :

- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de M. , président de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par arrêté en date du 3 décembre 2003, le préfet de l'Aude a mis en demeure la Société des eaux d'Alet, exploitante d'une usine d'embouteillage d'eau minérale sur le territoire de la commune d'Alet-les-Bains, de régulariser la situation administrative de son installation en déposant auprès des services préfectoraux, dans un délai de trois mois à compter de la notification de cet arrêté, une demande d'autorisation d'exploitation établie dans les formes définies aux articles 2 et 3 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ; que cette décision était motivée par le fait que l'installation considérée avait une capacité de 261 000 litres par jour et que, en application du décret susvisé en date du 21 septembre 1977, toute installation de conditionnement d'eaux minérales dont la capacité de production est supérieure à 100 000 litres par jour est soumise à autorisation préfectorale en application de l'article L. 512-1 du code de l'environnement et de la rubrique n° 2254-1 de la nomenclature des installations classées ; que, par arrêté en date du 18 mai 2006, le préfet de l'Aude a abrogé son arrêté en date du 3 décembre 2003 au motif que le décret susvisé en date du 10 août 2005 avait modifié la nomenclature des installations classées, en supprimant notamment la nomenclature 2254, de sorte que l'installation exploitée par la Société des eaux d'Alet n'était plus, à ce titre, soumise à autorisation ; que l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET et autres font appel du jugement en date du 27 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête dirigée contre cet arrêté du 18 mai 2006 ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que l'article 70 de la loi du 17 mai 2011 dispose que : " Lorsque l'autorité administrative, avant de prendre une décision, procède à la consultation d'un organisme, seules les irrégularités susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de l'avis rendu peuvent, le cas échéant, être invoquées à l'encontre de la décision " ;

Considérant que ces dispositions énoncent, s'agissant des irrégularités commises lors de la consultation d'un organisme, une règle qui s'inspire du principe selon lequel, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte ;

Considérant que les appelants font valoir que l'arrêté en litige du 18 mai 2006 est illégal dès lors qu'il a été pris sur le fondement du décret du 10 août 2005 portant modification de la nomenclature des installations classées, dont ils soutiennent qu'il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Considérant que le 1° de l'article 2 du décret 76-1323 du 29 décembre 1976, dans sa rédaction applicable à l'espèce, comprend la liste des six membres de droit du conseil supérieur des installations classées ; que le 2° du même article, relatif aux membres nommés, énonce : " Membres nommés pour une durée de trois ans par arrêté du ministre de la qualité de la vie : Sept personnalités choisies en raison de leur compétence en matière de nuisances ou d'hygiène publique ; Sept représentants des intérêts des exploitants des installations classées, dont notamment deux proposés par le conseil national du patronat français, deux par l'assemblée permanente des chambres de commerce et d'industrie, un par l'assemblée permanente des chambres d'agriculture et un par la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles ; Sept inspecteurs (ou anciens inspecteurs) des installations classées ; Deux membres du conseil supérieur d'hygiène publique de France proposés par le ministre de la santé ; Deux membres d'associations ayant pour objet la défense de l'environnement " ;

Considérant que les membres du conseil supérieur des installations classées, autres que les membres de droit, ont été désignés, conformément aux dispositions précitées, par le ministre par arrêté du 4 septembre 2001 pour une durée de trois ans ; que ces nominations, qui ont pris effet dès la date de signature de l'arrêté, sont ainsi venues à expiration le 3 septembre 2004 ; que la nouvelle nomination des membres désignés du conseil supérieur des installations classées n'est intervenu que par arrêté en date du 4 octobre 2004 ; qu'ainsi, à la date du 10 septembre 2004 à laquelle a été émis l'avis du conseil supérieur des installations classées au vu duquel a été pris le décret du 10 août 2005 modifiant la nomenclature des installations classées, les vingt-cinq membres nommés de ce conseil n'avaient plus qualité pour y siéger ; que, dès lors, cet organisme était irrégulièrement composé ; que cette irrégularité, compte tenu du nombre des personnes concernées et de leur qualification pour émettre en connaissance de cause un avis technique sur la proposition de suppression de la rubrique n° 2254, a été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à exercer une influence tant sur le sens de l'avis du conseil supérieur des installations classées que sur celui du décret du 10 août 2005, lequel est par suite entaché d'illégalité ; que, par suite, l'arrêté en litige du 18 mai 2006, pris sur le fondement de ce décret illégal, est dépourvu de base légale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association appelante et M. et Mme sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en litige du 18 août 2006 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision qui annule le retrait de l'arrêté du 3 décembre 2003, par lequel le préfet de l'Aude a mis en demeure la Société des eaux d'Alet de déposer un dossier de demande d'autorisation au titre de la législation des installations classées dans un délai de trois mois, a pour effet de remettre en vigueur ledit arrêté ; que la présente décision n'implique pas d'autres mesures d'exécution ; que les conclusions des appelants tendant à ce que la Cour impose toutes mesures susceptibles de faire cesser les nuisances et risques engendrés par l'installation ne peuvent être que rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à l'ASSOCIATION AVENIR d'ALET, à M. et à Mme une somme de 500 euros chacun au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er: Le jugement susvisé du 27 février 2009 du Tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du 18 mai 2006 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, à M. et à Mme une somme de 500 euros (cinq cents euros) chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION AVENIR d'ALET, à M. et Mme , à la Société des eaux d'Alet et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

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N° 09MA01576 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA01576
Date de la décision : 07/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-03-02-06 ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS. VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE. PROCÉDURE CONSULTATIVE. COMPOSITION DE L'ORGANISME CONSULTÉ. - CONSULTATION DU CONSEIL SUPÉRIEUR DES INSTALLATIONS CLASSÉES. PERSONNES, AUTRES QUE LES MEMBRES DE DROIT, Y SIÉGEANT ALORS QUE LEUR MANDAT AVAIT EXPIRÉ. COMPOSITION IRRÉGULIÈRE DE NATURE À AVOIR EXERCÉ UNE INFLUENCE SUR LE SENS DE LA DÉCISION PRISE SUR CET AVIS.

01-03-02-06 L'article 2-2° du décret 76-1323 du 29 décembre 1976, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que le conseil supérieur des installations classées est notamment composé, outre de six membres de droit, de vingt-cinq membres nommés pour une durée de trois ans par arrêté ministériel. Le mandat des membres nommés par arrêté ministériel du 4 septembre 2001, qui avait commencé dès la signature de cet arrêté, était expiré à la date du le 10 septembre 2004 à laquelle ils ont participé à la séance au cours de laquelle le conseil supérieur des installations classées a émis un avis au vu duquel a été pris le décret n° 2005-989 du 10 août 2005 modifiant la nomenclature des installations classées. Compte tenu du nombre de personnes concernées, cette irrégularité est susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de l'avis du conseil supérieur des installations classées et, par suite, sur celui du décret du 10 août 2005, lequel est ainsi entaché d'illégalité.[RJ1][RJ2].


Références :

[RJ1]

Cf. CE 23 décembre 2011, M. Claude Danthony et autres, n° 335033.,,

[RJ2]

Cf. CE 24 février 1986, Epoux Robert, n° 38493.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Melle Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET DARRIBERE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-02-07;09ma01576 ?
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