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20/12/2011 | FRANCE | N°09MA00361

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2011, 09MA00361


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 28 janvier 2009, sous le n° 09MA00361, présentée pour l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, dont le siège est Impasse du Séminaire à Alet-les-Bains (11580), M. Amor A demeurant ..., M. Jean-Louis B, demeurant ..., M. Christophe C demeurant ..., par la SCP d'avocats Darribere ;

L'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, M. A, M. B, M. C demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700020-0700733 du 21 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête tendant

l'annulation de l'arrêté en date du 1er décembre 2006 par lequel le pré...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 28 janvier 2009, sous le n° 09MA00361, présentée pour l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, dont le siège est Impasse du Séminaire à Alet-les-Bains (11580), M. Amor A demeurant ..., M. Jean-Louis B, demeurant ..., M. Christophe C demeurant ..., par la SCP d'avocats Darribere ;

L'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, M. A, M. B, M. C demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700020-0700733 du 21 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 1er décembre 2006 par lequel le préfet de l'Aude a créé une zone de développement de l'éolien, sur le territoire des communes de Roquetaillade et de Conilhac-de-la-Montagne ;

2°) d'annuler cet arrêté du 1er décembre 2006 ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2011 :

- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- les observations de M. Dargegen, président de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, de Me Cassin pour la Compagnie du Vent et de Me Chanville, substituant Me Légier, pour la commune de Roquetaillade ;

Considérant que l'ASSOCAITION AVENIR d'ALET, MM A, B et C font appel du jugement en date du 21 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur recours contre l'arrêté du 1er décembre 2006 du préfet de l'Aude relatif à la création d'une zone de développement de l'éolien sur les communes de Roquetaillade et de Conilhac-de-la-Montagne ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

Considérant que le président de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET a été autorisé à interjeter appel par délibération du 3 janvier 2009 du conseil d'administration de l'association, compétent à cet effet en vertu de l'article des statuts ; que, par suite, le président de cette association a qualité pour agir au nom de cette association ; qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement de première instance a été notifié notamment à l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET le 28 novembre 2008 ; que la requête d'appel émanant en particulier de cette association a été enregistrée le 28 janvier 2009, soit dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement attaqué ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête d'appel en tant qu'elle émane des autres appelants, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête d'appel ne peut être accueillie ;

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité : Sous réserve de la nécessité de préserver le bon fonctionnement des réseaux, Electricité de France et, dans le cadre de leur objet légal et dès lors que les installations de production sont raccordées aux réseaux publics de distribution qu'ils exploitent, les distributeurs non nationalisés mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée sont tenus de conclure, si les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l'achat de l'électricité produite sur le territoire national par : (...) 3° Les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent qui sont implantées dans le périmètre d'une zone de développement de l'éolien, définie selon les modalités fixées à l'article 10-1 ; (...) ; qu'aux termes de l'article 10-1 de la même loi : Les zones de développement de l'éolien sont définies par le préfet du département en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. Elles sont proposées par la ou les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé ou par un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, sous réserve de l'accord de la ou des communes membres dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé. / La proposition de zones de développement de l'éolien en précise le périmètre et définit la puissance installée minimale et maximale des installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent pouvant bénéficier, dans ce périmètre, des dispositions de l'article 10. Elle est accompagnée d'éléments facilitant l'appréciation de l'intérêt du projet au regard du potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. / La décision du préfet du département intervient sur la base de la proposition dans un délai maximal de six mois à compter de la réception de celle-ci, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites (...) Le préfet veille à la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien et au regroupement des installations afin de protéger les paysages. ;

Considérant qu'il ressort de ces dispositions qu'un arrêté portant création d'une zone de développement de l'éolien a pour objet la définition d'un périmètre privilégié par les autorités publiques pour l'implantation des éoliennes ; qu'il repose sur une appréciation comparative et globale, à l'échelle d'un vaste territoire, des regroupements qu'il convient de favoriser dans le but notamment de respecter les paysages et les sites remarquables et protégés ; qu'au regard de cet objet, l'ASSOCIATION AVENIR d'ALET, dont les statuts lui donnent pour mission la sauvegarde du patrimoine architectural, la défense de l'environnement et du cadre de vie de la commune d'Alet-les-Bains située dans les alentours de la zone concernée, ainsi que MM. A, B et C, propriétaires de domaines situés dans et le long de la zone, justifient d'un intérêt suffisant pour agir contre l'arrêté en litige du 1er décembre 2006 ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la Compagnie du vent doit être écartée ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable au litige : I. - Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l'air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation. /II. - Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : (...) /4° Le principe de participation, selon lequel chacun a accès aux informations relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses, et le public est associé au processus d'élaboration des projets ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire. ;

Considérant que l'arrêté attaqué autorise la création d'une zone de développement de l'éolien situé sur les communes de Roquetaillade et de Conilhac-de-la-Montagne afin d'y implanter des installations produisant de l'électricité ayant des puissances minimale et maximale de, respectivement, 5 mégawatts et 36 mégawatts ; que le projet contesté, par sa nature, son objet et son importance, comporte une incidence importante sur l'environnement et l'aménagement du secteur territorial concerné ; qu'il entre, dès lors, dans le champ d'application du 4° desdites dispositions, lesquelles imposent l'association du public à son élaboration ;

Considérant qu'il est soutenu que le dossier a été mis à la disposition du public en mairies de Conilhac et de Roquetaillade depuis le 10 février 2006 jusqu'à la date de l'arrêté en litige et qu'une réunion d'information a été organisée le 23 février 2006 à Roquetaillade pour les maires des communes voisines à laquelle le public pouvait participer ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que ces mise à disposition et information étaient essentiellement destinées aux conseillers municipaux, dès lors que la possibilité de consulter le dossier en mairie et de participer à une réunion publique n'a fait l'objet d'aucune mesure de publicité, invitant le public à consulter le dossier et à participer à cette unique réunion ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué que la mise à disposition du public aurait été conçue de manière à permettre au public de faire valoir ses observations et propositions ; que la circonstance que la délivrance des permis de construire de vingt éoliennes a été précédée d'une enquête publique qui s'est déroulée du 5 avril au 6 mai 2005 est sans influence sur le présent litige, dès lors que cette enquête n'était pas relative au projet de création de zone de développement de l'éolien en cause, laquelle est susceptible en outre d'accueillir un nombre supérieur d'éoliennes ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Aude ne justifie pas d'une association effective du public à l'élaboration du projet contesté ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance du principe de participation du public prévu par les dispositions précitées de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ;

Considérant, au surplus, qu'il ressort du dossier de demande, et notamment de l'étude paysagère annexée audit dossier, que si l'examen des effets du projet de création de la zone de développement de l'éolien projetée sur la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés a pris en compte le patrimoine historique, en particulier celui d'Alet-les-Bains et de Rennes-le-Château, il est constant que l'étude paysagère n'a pas examiné cette incidence sur les sites classés, qui n'y sont pas mentionnés et qui correspondent à ces deux communes, distantes respectivement de 4 kms et 10 kms de la zone en cause ; que cette omission, alors que le dossier de proposition a pour objet de permettre d'apprécier l'atteinte portée notamment aux sites remarquables et protégés a été de nature à fausser l'appréciation que le préfet a portée sur la proposition de création de la zone de développement de l'éolien, alors qu'il n'est pas contesté que ces sites seront visibles et co-visibles de ladite zone ; que, contrairement à ce que soutient la société la Compagnie du vent, le plan de gestion des paysages audois, sur lequel figuraient notamment les sites inscrits en cause, ne faisait pas partie du dossier de demande de création de la zone en cause ; que, dans ces conditions, l'autorité administrative ne peut être regardée comme ayant été mise à même d'apprécier l'incidence du projet au regard de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 110-1 précité du code de l'environnement ; qu'ainsi, les insuffisances qui affectent la composition du dossier sont constitutives d'un vice de procédure substantiel ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande à fin d'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2006 ;

Sur les conclusions de la commune tendant à la limitation dans le temps des effets de l'annulation :

Considérant que l'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu ; que, toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation ; qu'il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieur à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine ;

Considérant que la Compagnie du Vent demande que soient limités dans le temps les effets de l'annulation prononcée par le présent arrêt, aux motifs que, selon elle, l'annulation aura des conséquences considérables pour l'intérêt public de la promotion des énergies renouvelables et que la rentabilité de l'exploitation du parc d'éoliennes repose sur l'obligation d'achat à laquelle est soumise Electricité de France ; que, toutefois, il n'apparaît pas, alors que les permis de construire des éoliennes ont été délivrés près d'un an avant l'arrêté en litige que, dans les circonstances de l'espèce, les effets du présent arrêt entraîneraient des conséquences manifestement excessives justifiant qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses ; que par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la Compagnie du Vent ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, à MM. A, B et C une somme 400 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant, en revanche, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des appelants, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la société la Compagnie du Vent demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er: Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Montpellier du 21 novembre 2008 et l'arrêté du 1er décembre 2006 du préfet de l'Aude sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, à MM. A, B et C une somme 400 euros (quatre cents euros) chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la Compagnie du Vent sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, à MM. Amor A, Jean-Louis B et Christophe C, à la Compagnie du Vent, à la commune de Roquetaillade, à la commune de Conilhac-de-la-Montagne, au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N° 09MA00361 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA00361
Date de la décision : 20/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

29 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Melle Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET DARRIBERE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-12-20;09ma00361 ?
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