Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mars 2009, présentée pour Mme Michèle A, demeurant ..., par Me Berlanger, avocat ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0501102 du 15 janvier 2009, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2004 de la commune de Briançon, rejetant sa demande indemnitaire ;
2°) d'annuler la décision du 22 décembre 2004 et de condamner la commune de Briançon à lui verser la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu'elle a subis au cours de sa carrière au sein de la fonction publique de cette commune ;
3°) de condamner la commune de Briançon à lui verser une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code du travail, notamment son ancien article L. 145-2 ;
Vu le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 1617-5 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret 95-25 du 10 janvier 1995 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux ;
Vu le décret n° 95-33 du 10 janvier 1995 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux de conservation du patrimoine et des bibliothèques ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2011 :
- le rapport de Mme Hogedez, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public,
- et les observations de Me Lesbros, du cabinet d'avocats Courtier, pour la commune de Briançon ;
Considérant que Mme A, entrée en qualité de commis au sein de la commune de Briançon en 1972, a accédé au grade de rédacteur principal puis a été reclassée en 1995 en qualité de rédacteur territorial ; qu'elle a, en cette qualité, été affectée à la bibliothèque municipale à compter de novembre 1996 ; que placée en congé de maladie au début de
l'année 1997, elle a sollicité du maire de Briançon qu'il reconsidère son affectation, qu'elle ne jugeait pas conforme à son grade ; que par lettre du 12 mars 1997, le maire a justifié les différentes décisions d'affectation dont elle avait fait l'objet et indiqué que dès sa reprise de fonctions, elle serait affectée au centre culturel pour occuper le poste de responsable de cette structure ; qu'à l'issue de son congé de longue maladie en février 2000, la requérante s'est trouvée de nouveau affectée à la bibliothèque ; que de nouveau en congé de maladie à compter de l'année 2002, elle a été mise à la retraite pour invalidité en 2004 ; qu'en août 2004, elle a présenté auprès de la commune une demande indemnitaire, sollicitant 300 000 euros en réparation des préjudices professionnels ou de carrière qu'elle estime avoir subis ; qu'elle demande l'annulation du jugement n° 0501102 du 15 janvier 2009 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du
22 décembre 2004 de la commune de Briançon, rejetant sa demande indemnitaire et à la condamnation de la commune à lui verser l'indemnisation demandée ; qu'elle sera, en l'espèce, regardée comme ayant donné à l'ensemble de ses prétentions le caractère d'une demande de plein contentieux ;
Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ; que contrairement à ce que soutient la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse, la requête introductive d'appel de Mme A ne constitue pas la seule reproduction littérale de son mémoire de première instance mais énonce à nouveau, de manière précise, les critiques adressées à la décision dont elle avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'écarter la fin de
non- recevoir opposée en défense ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Sur les illégalités fautives reprochées à la commune de Briançon :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 95-25 susvisé du 10 janvier 1995, portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux : Les rédacteurs sont chargés de l'instruction des affaires qui leur sont confiées et de la préparation des décisions. Ils exercent leurs fonctions dans l'une des spécialités suivantes : 1° Administration générale : dans cette spécialité, ils assurent en particulier des tâches de gestion administrative et financière, de suivi de la comptabilité et participent à la rédaction des actes juridiques. Ils contribuent à l'élaboration et à la réalisation des actions de communication, d'animation et de développement économique, social, culturel et sportif de la collectivité (...) Les rédacteurs territoriaux peuvent, dans certains cas, assurer des fonctions d'encadrement des agents d'exécution et la direction d'un bureau et remplir les fonctions de principal adjoint d'un fonctionnaire de catégorie A. Ils peuvent être chargés des fonctions de secrétaire de mairie d'une commune de moins de 2 000 habitants. ; qu'il résulte de l'instruction que Mme A a été affectée à la bibliothèque municipale pour assumer les fonctions d'adjoint du fonctionnaire de catégorie A responsable de ce service ; que cette affectation est en cohérence avec les missions confiées aux rédacteurs territoriaux en vertu des dispositions précitées ; que les fonctions d'encadrement n'y sont, pour les rédacteurs territoriaux, envisagées que de façon subsidiaire ; que Mme A ne saurait donc soutenir qu'étant privée de telles fonctions, son affectation en bibliothèque n'aurait pas été conforme à son grade ; que par ailleurs, la circonstance que les fonctions qu'elle devait assurer en bibliothèque auraient pu être également confiées à des assistants territoriaux de conservation du patrimoine et des bibliothèques, ainsi qu'il résulte du décret n° 95-33 susvisé du 10 janvier 1995, ne saurait à elle seule démontrer que la commune de Briançon aurait entendu lui confier de simples tâches d'exécution, ni la faire dépendre à l'avenir de la seule filière culturelle ;
Considérant que Mme A ne peut utilement se prévaloir de la lettre précitée du maire de Briançon en date du 12 mars 1997 pour soutenir qu'elle avait un droit acquis à être nommée en qualité de responsable du centre culturel et que son affectation en bibliothèque à l'issue de son congé de longue durée aurait été contraire aux mentions portées dans cette lettre ; qu'il résulte de l'instruction que la commune de Briançon ne pouvait laisser vacant le poste envisagé pendant les trois années qu'a duré le congé de longue durée de Mme A ; que la reprise de ses fonctions à mi-temps thérapeutique se serait en tout état de cause avérée incompatible avec les fonctions inhérentes à la direction du centre culturel ; qu'en toutes hypothèses, la commune n'avait plus la possibilité, en février 2000, d'affecter un de ses agents au sein du service public de programmation et de diffusion culturelles, l'ayant confié à une association à compter de 1999 ; qu'eu égard à l'ensemble de ces circonstances, la commune de Briançon n'a pas commis de faute en affectant de nouveau Mme A à la bibliothèque municipale ;
Considérant qu'aux termes de l'article 52 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 : L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires. Dans le cas où il s'agit de remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service et à laquelle il n'est pas possible de pourvoir par un autre moyen, même provisoirement, la mutation peut être prononcée sous réserve d'examen ultérieur par la commission compétente ; que Mme A ne pouvant tirer aucun droit de la lettre du 12 mars 1997, sa situation lors de sa reprise de fonctions demeurait inchangée par rapport à sa précédente affectation ; qu'il n'y avait donc pas lieu de saisir la commission administrative paritaire préalablement à son affectation en février 2000 ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la carrière de Mme A aurait été ralentie ou que la commune lui aurait, en vingt huit années de carrière, refusé les avancements auxquels elle pouvait prétendre ; que le reclassement dont elle a été l'objet en 1995 ne constitue pas une rétrogradation ; que son avancement a été régulier ; qu'elle ne démontre pas que ses qualités professionnelles auraient justifié qu'elle soit proposée au grade de rédacteur principal en lieu et place d'autres collègues ; que la circonstance qu'elle remplissait les conditions statutaires ouvrant droit à l'avancement ne lui garantissait pas un droit à une nomination au grade supérieur ; qu'elle n'est ainsi pas fondée à soutenir que la commune de Briançon aurait bloqué sa carrière ;
Considérant, concernant les modalités de versement de son traitement entre octobre 2002 et janvier 2003, que la commune de Briançon n'a pu s'organiser en temps utile pour tirer les conséquences de son droit à demi-traitement à compter d'octobre 2002, n'ayant été avisée de l'avis du comité médical départemental que le 16 novembre 2002 ; qu'elle a, en revanche, et ainsi que l'a caractérisé le tribunal, commis une faute, en ne lui laissant pas la disposition d'une somme au moins équivalente au revenu minimum d'insertion, en compensant le trop-perçu au titre des mois d'octobre et de novembre 2002, par la suppression totale de son traitement en décembre 2002 et janvier 2003 ; que cependant, dès lors qu'aucun texte n'interdit les retenues sur salaire par compensation entre le traitement dû au titre d'un mois et la dette de l'agent, la commune pouvait se borner à prendre une mesure purement comptable qui n'est soumise à aucune procédure particulière, sans être tenue de respecter les formes et procédures du titre exécutoire, dans les conditions de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; qu'enfin, et contrairement à ce qu'elle soutient, Mme A a été informée par la commune, par lettre du 3 novembre 2002, des incidences financières à venir sur ses traitements de décembre 2002 et janvier 2003 ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les allergies dont a souffert Mme A à compter de l'année 2002 auraient eu pour cause directe et exclusive son affectation à la bibliothèque ; qu'il n'est pas démontré, et qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction, que Mme A aurait été cantonnée à des tâches subalternes et dévalorisantes, qu'elle aurait fait l'objet de sanctions déguisées et de harcèlement de la part de son employeur, ni, en conséquence, que ses conditions de travail seraient à l'origine directe et exclusive du syndrome dépressif dont elle a également souffert ;
Considérant, enfin, que si Mme A soutient que la commune de Briançon aurait commis une faute en ne l'informant pas de la conclusion d'un contrat collectif en 1998 avec une mutuelle complémentaire pour la couverture du risque maladie, l'affiliation à un organisme d'assurance afin de bénéficier d'une protection complémentaire en matière d'assurance santé ne revêt toutefois aucun caractère obligatoire, ni pour l'employé, ni pour son employeur ; que Mme A ne précise, ni les conditions dans lesquelles cette protection aurait été mise en place par la commune de Briançon, ni les modalités de paiement des primes d'assurance, ni les catégories de personnels bénéficiaires de la protection ; que, par suite, elle n'est pas fondé à soutenir que la commune de Briançon aurait commis une faute à son égard ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence dont a pu légitimement souffrir Mme A compte tenu de la suppression totale de son traitement aux mois de décembre 2002 et janvier 2003, en lui allouant une somme de 500 euros ; qu'il y a lieu, en conséquence, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il lui a refusé toute indemnisation pour ce chef de préjudice ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions tant par la commune de Briançon que par Mme A ;
D E C I D E :
Article 1er : La commune de Briançon versera à Mme A la somme de 500 euros
(cinq cents euros) en réparation des conséquences dommageables résultant de la suppression totale de la rémunération de cette dernière aux mois de décembre 2002 et janvier 2003.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Briançon sur le fondement de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Michèle A, à la commune de Briançon et au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
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N° 09MA00919 2